Voir la source de Approximation diophantienne

{{Ébauche|mathématiques}}
[[Fichier:Diophantine approximation graph.svg|vignette|Meilleurs approximations rationnelles pour les nombres irrationnels Π (vert), e (bleu), ϕ (rose), √3/2 (gris), 1/√2 (rouge) et 1/√3 (orange) tracées sous forme de pentes y/x avec des erreurs par rapport à leurs vraies valeurs (noirs) par CMG Lee.]]
En [[théorie des nombres]], l''''approximation diophantienne''', qui porte le nom de [[Diophante d'Alexandrie]], traite de l'approximation des [[nombre réel|nombres réels]] par des [[nombre rationnel|nombres rationnels]].

Il est possible d'approcher tout nombre réel par un rationnel avec une [[Précision arithmétique|précision]] arbitrairement grande (cette propriété s'appelle la [[Partie dense|densité]] de l'ensemble des rationnels dans l'[[Construction des nombres réels|ensemble des réels]], muni de la [[Distance (mathématiques)|distance]] usuelle). La [[valeur absolue]] de la différence entre le nombre réel à approcher et le nombre rationnel qui l'approche fournit une mesure brute de la précision de l'approximation.

Une mesure plus subtile tient compte de la taille du [[dénominateur]].

== Illustration ==
{| class="wikitable"
|+
!Nombre réel
!Fraction de nombres rationnels
|-
|'''[[Pi|π]]'''
|<math>\pi\cong\frac{22}{7}\cong3.1426...</math>
|-
|'''[[E (nombre)|e]]'''
|<math>e\cong\frac{19}{7}\cong2.714...</math>
|-
|[[Nombre d'or|φ]]
|<math>\varphi\cong\frac{34}{21}\cong1.6190...</math>
|}

== Position du problème sur la droite réelle ==
''(Approximation rationnelle d''''un''' seul réel)''

Du fait de la densité de <math>\mathbb{Q}</math> (ensemble des rationnels) dans <math>\mathbb{R}</math> (ensemble des réels), tout réel peut être approché par des rationnels aussi près qu'on le souhaite au sens où :

<center><math>\forall \ \alpha \in \mathbb{R} \quad \forall \varepsilon > 0 \quad \exist \ (p,q) \in \mathbb{Z} \times \mathbb{N}^*, \ \left\vert \alpha - \frac{p}{q} \right\vert \leq \varepsilon</math></center>

Toute la subtilité de la démarche réside alors dans l'idée qu’il ne s’agit pas seulement d’effleurer au plus près la valeur d’un réel donné {{mvar|α}} par une fraction {{sfrac|''p''|''q''}} sans aucune autre considération, mais bien d'obtenir un compromis, le meilleur qui soit, entre :
* la « qualité », ou précision de l'approximation, dont <math>\left\vert \alpha - \frac{p}{q} \right\vert</math> fournit une mesure brute,
* et son coût, ou « prix », c'est-à-dire la taille du dénominateur du rationnel en question.
Afin de conserver un certain contrôle sur l’approximation, il semble en effet naturel d’affirmer qu’un réel est bien approché par la fraction {{sfrac|''p''|''q''}}, si l’écart entre ce réel et {{math|''p''/''q''}} est petit sans que {{mvar|q}} ne soit trop grand : ce qui revient à chercher, en usant des termes précédemment employés, le meilleur « rapport qualité / prix » possible. Il paraît alors raisonnable d'essayer de majorer la distance de {{math|''p''/''q''}} à {{mvar|α}} par une fraction dont le dénominateur est une puissance de {{mvar|q}}, c'est-à-dire de la forme : {{math|''C''/''q{{exp|s}}''}}. On voit ici apparaître deux paramètres : une constante {{mvar|C}}, dite constante d'approximation, et une puissance {{mvar|s}}, appelée ordre d'approximation, que la [[théorie de l'approximation]] diophantienne a cherché à optimiser au cours des siècles.

== Ordre d'approximation ==
On dit qu'un réel {{mvar|α}} est rationnellement approchable à l''''ordre''' {{math|''s'' > 0}} s'il existe {{math|''K'' > 0}} tel que l'inéquation : <math>\left\vert \alpha - \frac{p}{q} \right\vert < \frac{K}{q^s}</math> ait une infinité de solutions.

On définit alors la [[mesure d'irrationalité]] {{math|''μ''(''α'')}} d'un irrationnel {{mvar|α}} comme la valeur optimale de l'ordre d'approximation de {{mvar|α}} :
:<math>\mu(\alpha) = \sup{\left\{\mu \in \mathbb{R^*}\left|\text{ il existe une infinité de couples }(p,q)\in\Z\times\N^*\text{ tels que }\left\vert \alpha - \frac{p}{q} \right\vert < \frac{1}{q^\mu}\right.\right\}}</math>.

Pour un irrationnel arbitraire {{mvar|α}}, [[Théorème d'approximation de Dirichlet|un théorème de Dirichlet]] fournit un ordre d'approximation minimal {{math|''s'' {{=}} 2}}. Autrement dit, il affirme que la mesure d'irrationalité d'un irrationnel quelconque est supérieure ou égale à 2.

En divisant les irrationnels en plusieurs catégories, il est possible d'affiner grandement ce résultat. On peut par exemple distinguer les nombres bien approchés, appelés [[Nombre transcendant|nombres transcendants]], dont les [[Nombre de Liouville|nombres de Liouville]], des nombres mal approchés, ou nombres diophantiens, comprenant les [[Nombre algébrique|nombres algébriques]]. Cette distinction est rendue pertinente par le [[Théorème de Liouville (approximation diophantienne)|théorème de Liouville]] (1844) qui affirme qu'un nombre algébrique de degré {{mvar|d}} n'est approchable qu'à un ordre inférieur ou égal à {{mvar|d}}, limitant ainsi la précision des approximations rationnelles ({{math|''μ''(''α'') ≤ ''d''}}).

Celui-ci reçut au cours des décennies qui suivirent plusieurs améliorations successives sous forme de diminution de l’exposant {{mvar|s}}, {{c.-à-d.}} des améliorations qui conduisirent à un encadrement toujours plus fin de la mesure d'irrationalité des nombres algébriques. [[Axel Thue]] (1909) ({{math|''μ''(''α'') ≤ 1 + {{sfrac|''d''|2}}}}), [[Carl Ludwig Siegel]] (1921) ({{math|''μ''(''α'') ≤ 2{{racine|''d''}}}}), [[Freeman Dyson]] (1947) ({{math|''μ''(''α'') ≤ {{racine|2''d''}}}}) apportèrent ainsi chacun leur pierre à l'édifice, jusqu'au résultat final qui valut à [[Klaus Roth]] la médaille Fields en 1958, et qui fournit d'ailleurs un bon critère de transcendance : tout irrationnel algébrique {{mvar|α}} n'est approchable qu'à l'ordre 2 ({{math|''μ''(''α'') {{=}} 2}}). (Voir « [[Théorème de Roth]] ».)

== Constante d'approximation ==
Pour tout irrationnel {{mvar|α}}, on appelle '''constante d'approximation''' de {{mvar|α}} l'élément {{math|''γ''(''α'')}} positif de <math>\mathbb{R} \cup {\{+\infty\}}</math> défini par :

:<math>\gamma(\alpha) = \lim\limits_{q \rightarrow + \infty } q\left\vert q\alpha - p \right\vert  \quad (p,q) \in \mathbb{Z} \times \mathbb{N^*}</math>.

Un premier résultat valable pour des irrationnels {{mvar|x}} et {{mvar|y}} quelconques, assure l'égalité des constantes d'approximation lorsque {{mvar|x}} et {{mvar|y}} sont [[Fraction continue et approximation diophantienne#Nombres équivalents|équivalents]] au sens de la [[relation d'équivalence]] suivante :

:<math>\exists (a,b,c,d) \in \Z^4\ \text{tel que} \   y = \frac{ax+b}{cx+d} \ \text{et} \ \left\vert ad-bc \right\vert = 1</math>.

On a également [[Théorème de Hurwitz (approximation diophantienne)|le théorème suivant]], que l'on doit à [[Adolf Hurwitz]] :

Pour tout irrationnel {{mvar|α}} l'inégalité : <math>\left\vert \alpha - \frac{p}{q} \right\vert < \frac{1}{\sqrt{5} \ q^2}</math> admet une infinité de solutions, et le nombre {{racine|5}} est optimal, au sens où le théorème n'est plus vrai si n'importe quel nombre strictement plus grand lui est substitué.

Cependant, [[Andreï Markov (mathématicien)|Andreï Markov]] a démontré que ce résultat pouvait être amélioré. En effet, la théorie classique permet de calculer à l'aide de l'[[Nombre de Markov|équation diophantienne de Markov]]
:<math>x^2 + y^2 + z^2 = 3xyz</math> (1)
et de la relation d'équivalence définie précédemment, une majoration optimale de la valeur {{math|''γ''(''α'')}} selon l'irrationnel {{mvar|α}} — voire une égalité dans certains cas — sous la forme : <math>\sqrt{9 - \frac{4}{m^2}}</math> où {{mvar|m}} est solution de (1). Ces constantes sont appelées [[Spectre de Lagrange|nombres de Lagrange]].

== Fraction continue et approximation diophantienne ==
{{Voir|Fraction continue et approximation diophantienne}}
Les [[Fraction continue|fractions continues]] sont reconnues comme étant les [[Fraction continue et approximation diophantienne#Théorème de meilleure approximation rationnelle|meilleures approximations rationnelles]] de réels, au sens suivant :

une fraction {{math|''p''/''q''}} est dite de « meilleure approximation » du réel {{mvar|α}} si <math>\forall (p', q') \in \mathbb{Z} \times \mathbb{N^*}\quad\left(q'<q \Rightarrow \left\vert q'\alpha - p' \right\vert > \left\vert q\alpha - p \right\vert\right)</math>.

L'[[Arbre de Stern-Brocot|algorithme de Stern-Brocot]], qui s'appuie sur un calcul successif des [[Suite de Farey|médiantes de Farey]], est cependant plus intéressant en termes de commodité calculatoire. On retrouve par ailleurs les réduites du développement en fraction continue d'un réel dans l'arbre de Stern-Brocot qui lui est associé.

== Voir aussi ==
=== Articles connexes ===
{{Colonnes|nombre=2|
;Méthodes
* [[Fraction continue]]
* [[Fraction continue généralisée]]
* [[Suite de Sylvester]]
* [[Série entière]]
* [[Développement en série de Engel]]
* [[Développement en série de Pierce]]
* [[Développement en cotangente continue de Lehmer]]
;Majoration
* [[Conjecture de Duffin-Schaeffer]] (résolue en 2019)
* [[Conjecture de Littlewood]]
* [[Conjecture d'Oppenheim]]
* [[Conjecture du coureur solitaire]]
* [[Lemme de Siegel]]
* {{Lien|langue=en|trad=Davenport–Schmidt theorem|fr=Théorème de Davenport-Schmidt}}
* [[Théorème de Meyer]]
* [[Théorème du sous-espace]] de [[Wolfgang M. Schmidt|Schmidt]]
}}

=== Bibliographie ===
* {{Ouvrage|langue=en|auteur1=Yann Bugeaud|titre=Approximation by Algebraic Numbers|éditeur=[[Cambridge University Press|CUP]]|année=2004|isbn=|lire en ligne={{Google Livres|iAg8FL5jKSgC}}}}
* {{Ouvrage|langue=en|auteur=[[Andrej Dujella]]|titre=Number Theory|éditeur={{Lien|Školska knjiga}}|année=2020}}
* {{Ouvrage|auteur1=Daniel Duverney|titre=Théorie des nombres|éditeur=[[Dunod]]|année=2007}}
* {{Ouvrage|langue=en|auteur1=Steven R. Finch|titre=Mathematical Constants|éditeur=[[Cambridge University Press]]|année=2003|isbn=|numéro chapitre=II}}
* {{HardyWrightFr}}, chap. XI

=== Liens externes ===
* {{Lien web|langue=fr|auteur=Benoît Mselati|titre=Approximation diophantienne et réseaux|url=http://culturemath.ens.fr/maths/pdf/nombres/reseaux.pdf|site=|date=|consulté le=17/03/2018}}
* {{Lien web|lang=en|url=http://www.math.jussieu.fr/~miw/articles/pdf/IntroductionDiophantineMethods.pdf|titre=Introduction to Diophantine methods irrationality and trancendence|auteur=Cours de [[Michel Waldschmidt]]}}

{{Portail|théorie des nombres}}

[[Catégorie:Approximation diophantienne| ]]