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En [[géométrie riemannienne]], la '''courbure scalaire''' (ou '''scalaire de Ricci''') est un des outils de mesure de la [[courbure]] d'une [[variété riemannienne]]. Cet [[invariant]] riemannien est une fonction qui affecte à chaque point ''m'' de la variété un simple [[nombre réel]] noté {{mvar|R(m)}} ou {{mvar|s(m)}}, portant une information sur la courbure intrinsèque de la variété en ce point. Ainsi, on peut décrire le comportement infinitésimal des boules et des sphères centrées en ''m'' à l'aide de la courbure scalaire. 

Dans un espace à deux dimensions, la courbure scalaire caractérise complètement la courbure de la variété. En dimension supérieure à 3, cependant, elle n'y suffit pas et d'autres invariants sont nécessaires. La courbure scalaire est définie comme la [[trace (algèbre)|trace]] du [[tenseur de Ricci]] relativement à la [[métrique (mathématiques)|métrique]] (le point d'application ''m'' est souvent omis)
:<math>R = \mbox{tr}_g(\mathrm{Ric})</math>

On peut aussi écrire en [[coordonnées locales]] et avec les [[Convention de sommation d'Einstein|conventions d'Einstein]],
:<math>R  = g^{ij}R_{ij}</math>,

avec 
:<math>\mathrm{Ric} = R_{ij}\,dx^i\otimes dx^j</math>

== Calculs de courbure scalaire ==
===En dimension 2 et en coordonnées de Riemann===
Le scalaire de Ricci {{mvar|R}} ou Ric s'obtient à partir du [[tenseur de Ricci]] par la relation générale, appliquée à une surface<ref>En toute rigueur, on devrait utiliser ici ''u'' et ''v'' au lieu d'''x'' et ''y'', car il s'agit de coordonnées de Gauss (voir [[tenseur de Riemann]]).</ref> :

:<math>R = g^{mm} R_{mm} =  g^{xx} R_{xx} +g^{yy} R_{yy}</math>

En utilisant les relations entre composantes directes et inverses de la métrique ainsi que les relations entre les tenseurs de Riemann {{mvar|R{{ind|xyxy}}}} et de Ricci de composantes {{mvar|R{{ind|xx}}}} et {{mvar|R{{ind|yy}}}} qui s'écrit alors, en deux dimensions<ref name="lire1">Bernard Schaeffer, ''Relativités et quanta clarifiés'', Publibook, 2007</ref> :

:<math>R_{xx} = g^{yy}R_{xyxy} = \frac{1}{g_{yy}}R_{xyxy}</math>

:<math>R_{yy} = g^{xx}R_{xyxy} = \frac{1}{g_{xx}}R_{xyxy}</math>

on obtient la relation entre le scalaire de Ricci et la courbure de Gauss :

:<math>R = g^{xx}\frac{1}{g_{yy}}R_{xyxy}+g^{yy}\frac{1}{g_{xx}}R_{xyxy}=\frac{2}{g_{xx}g_{yy}}R_{xyxy}=2K</math>

En deux dimensions, c’est-à-dire pour une surface, le scalaire de Ricci est le double de la [[courbure de Gauss]] {{mvar|K}} (au signe près selon la convention utilisée).

===Espaces et opérations classiques===
Pour une variété de dimension {{math|n}} à courbure constante (c'est-à-dire [[courbure sectionnelle]] constante) {{math|K}}, la courbure scalaire est constante également, de valeur <math>n(n-1)K</math>. Ainsi l'espace euclidien a une courbure scalaire nulle, une sphère de rayon {{math|r}} munie de sa structure canonique admet une courbure constante positive <math>n(n-1)\frac1{r^2}</math><ref name="GHL107">{{GallotHulinLafontaine}}, exemples 3.20 p. 107</ref>.

Le tenseur de courbure d'un produit de variétés riemanniennes est la somme des tenseurs de courbure, donc la courbure scalaire est également la somme des courbures scalaires.

Lorsqu'on passe d'une métrique {{math|g}} à une métrique [[transformation conforme|conforme]], de la forme <math>g'=e^{2f} g</math> pour une certaine fonction {{math|f}}, la nouvelle courbure scalaire est donnée par <ref>[[Arthur Besse]], ''Einstein Manifolds'', coll. « Ergebnisse der Mathematik und ihrer Grenzgebiete » (3), vol. 10, Springer-Verlag, Berlin, 1987, théorème 1.159 p. 58-59</ref>
:<math>s'=e^{-2f}\Bigl(s-2(n-1)\Delta f-(n-2)(n-1)|{\mathrm d}f|^2\Bigr)</math>
expression qui se réduit dans le cas d'un simple facteur multiplicatif <math>g'=\lambda g</math> à la relation <math>s'=\frac1{\lambda } s</math><ref name="GHL107"/>.

== Interprétation locale : volume des boules ==
Soit ''M'' une variété riemannienne de dimension ''n''. La courbure scalaire en un point ''m'' donne une estimation asymptotique du volume de la boule centrée en ''m'' et de rayon ''r'', en la comparant au volume ''V'' de la [[Boule (topologie)|boule unité]] de l'espace euclidien de même dimension : lorsque ''r'' tend vers 0,
:<math>\mathrm{Vol}(B_m(r))=V.r^n.\left(1-\frac{R(m)}{6(n+2)}r^2+o(r^2)\right)</math>

Ainsi, pour des boules suffisamment petites, une courbure scalaire strictement positive caractérise une tendance à obtenir des boules de volume plus petit que dans le cas euclidien, et une courbure scalaire négative montre l'inverse<ref>{{GallotHulinLafontaine}}, théorème 3.98 p. 139</ref>. L'{{Lien|langue=en|trad=Bishop–Gromov inequality|fr=inégalité de Bishop-Gromov}} fournit un théorème de comparaison valable pour des boules de toutes tailles mais ce résultat ne fait pas intervenir seulement la courbure scalaire, il demande de contrôler l'ensemble de la courbure de Ricci.

== Courbure scalaire totale ==

Sur une variété riemannienne compacte {{math|M}}, on appelle courbure scalaire totale {{math|S}} l'intégrale de la courbure scalaire sur la variété <math>S_g=\int_M s_g\mu_g</math> où <math>\mu_g</math> désigne la [[forme volume|mesure riemannienne]] issue de la métrique
{{math|g}}. 

Pour les variétés compactes de dimension 2, la [[formule de Gauss-Bonnet]] montre que la topologie est totalement déterminée par la  quantité {{math|S}}. En sens inverse, la [[caractéristique d'Euler-Poincaré]] détermine en partie la courbure scalaire : il est impossible d'avoir une courbure scalaire de signe constamment opposé. 

En dimension strictement plus grande on s'intéresse également à la courbure scalaire totale, mais la situation est moins contrainte. Plus précisément, il est pertinent de tenir compte de la notion de changement d'échelle, soit en se restreignant aux métriques de [[Forme volume|volume]] total 1, soit en renormalisant {{math|S}}
:<math>Y_g=\frac{S_g}{{\mathrm Vol}_g(M)^{\frac{n-2}2}}</math>
Quand on considère l'ensemble des métriques riemanniennes dont la variété peut être munie, {{math|Y}} et {{math|S}} (restreinte aux métriques de volume 1) deviennent des fonctions dont on peut étudier les [[point critique|points critiques]] : on établit que ce sont les [[variété d'Einstein|variétés d'Einstein]] qui réalisent ces points critiques<ref>Besse, théorème 4.21 p. 120</ref>.
Dans le cadre des [[Variété lorentzienne|variétés lorentziennes]] employées notamment en relativité générale, la courbure scalaire totale correspond d'ailleurs à un facteur près à l'[[action d'Einstein-Hilbert]].

On peut également s'intéresser aux mêmes fonctions {{math|Y}} ou {{math|S}} (restreinte aux métriques de volume 1)  en se limitant à l'ensemble des métriques [[Transformation conforme|conforme]]s à une métrique {{math|g}} donnée. Cette fois, les points critiques correspondent aux métriques conformes à {{math|g}} et ayant une courbure scalaire constante
<ref>Besse, proposition 4.25 p. 121</ref>. Ces considérations sont à l'origine de la notion d'[[invariant de Yamabe]] et de la position du [[problème de Yamabe]] : existe-t-il, sur une variété compacte, une métrique conforme à {{math|g}} et de courbure scalaire constante ? La réponse, positive, a été apportée en 1984.

== Existence de métriques à courbure scalaire prescrite ==

Une [[variété différentielle]] compacte étant donnée, on peut caractériser toutes les fonctions "courbure scalaire" obtenues pour toutes les métriques riemanniennes possibles. Dans le cas de la dimension 2, on a vu que la courbure scalaire est équivalente à la [[courbure de Gauss]] et est reliée à la topologie de la variété. En dimension supérieure à 3, il existe trois types de situation

- les variétés pour lesquelles il existe une métrique {{math|g}}<sub>0</sub> de courbure scalaire {{math|s}}<sub>0</sub> strictement positive ; dans ce cas, toute fonction <math>C^\infty</math> peut être réalisée comme la courbure scalaire d'une certaine métrique {{math|g}} ;

- les variétés pour lesquelles la courbure scalaire ne peut pas être positive en tout point ; dans ce cas, les fonctions courbure scalaire possibles sont toutes les fonctions <math>C^\infty</math> prenant au moins une valeur strictement négative ;

- les autres variétés admettent pour fonctions courbure scalaire possibles la [[fonction nulle]] et toutes les fonctions <math>C^\infty</math> prenant au moins une valeur strictement négative<ref>[[Thierry Aubin]], (1998), « Some nonlinear problems in Riemannian geometry », Springer Monographs in Mathematics, Springer-Verlag, Berlin, {{ISBN|3-540-60752-8}}, {{pp.|195-196}}</ref>.

== Unicité ==
En {{date|1917|en science}}, le mathématicien allemand [[Hermann Vermeil]] ({{date-|1889}}-{{date-|1959}}) publie un [[théorème]] d'[[Unicité (mathématiques)|unicité]]{{sfn|Rowe|2018|loc={{IVe|partie}} (« Mathematics and the relativity revolution »), {{chap.|17}} (« Introduction to {{nobr|part {{IV}}}} »)|p=210, {{col.|2}}}} {{incise|[[Éponymie|dit]] théorème de Vermeil{{sfn|Lamine|2023|loc={{sec.|1.2}} (« Analyse tensorielle et courbure d'espace-temps »), sous-{{sec.|1.2.3}} (« Courbure »), {{§|1.2.3.5}} (« Propriétés du tenseur de Riemann »), {{numéro|1.2.3.5.1}} (« Tenseur et sclaire de Ricci »)|p=63}}}} en vertu duquel le courbure de Ricci est unique [[champ scalaire]] qui soit [[Linéarité|linéaire]] dans les [[Dérivée seconde|dérivées secondes]] du [[tenseur métrique]], pour des variétés de toutes [[Variété (géométrie)#La dimension et la topologie|dimensions]]{{sfn| Ramond|2023|loc=appendix A (« Lorentzian geometry »), A.1 (« Unicity of the field equations »)|p=309}}.

== Dimension ==
Il est usuel de considérer {{incise|par convention}} la courbure de Ricci comme une [[Grandeur physique|grandeur]] [[Analyse dimensionnelle|homogène à]] l'[[inverse]] du [[Carré (algèbre)|carré]] d'une [[longueur]]{{sfn|Jeanperrin|2019|loc={{chap.|{{III}}}} (« Les géométries riemanniennes »), {{sec.|{{II}}}} (« Essai de développement d'un espace de Riemann sur un espace pseudo-euclidien ; notion de courbure »), sous-{{sec.|F}} (« Formes contractées du tenseur de courbure »), {{§|a}} (« Contraction complète du tenseur de courbure »)|p=106}}.

== Notes et références==

{{Références}}

== Bibliographie ==
* Hakim, R, Gravitation relativiste, [[EDP Sciences]], 2001

== Voir aussi ==

=== Bibliographie ===
* {{Ouvrage | langue=fr | prénom=Claude | nom=Jeanperrin | titre=Utilisation du calcul tensoriel dans les géométries riemanniennes | sous-titre=cours et exercices corrigés | lieu=Paris | éditeur=[[Éditions Ellipses|Ellipses]] | collection=Références sciences | date=10/2019 | numéro d'édition=2 | année première édition={{date-|6/2019}} | pages totales=370 | format livre={{dunité|19|24|cm}} | isbn10=2-340-03305-5 | isbn=978-2-340-03305-4 | ean=9782340033054 | oclc=1127389641 | bnf=45789930m | sudoc=240449975 | présentation en ligne=https://www.editions-ellipses.fr/accueil/65-utilisation-du-calcul-tensoriel-dans-les-geometries-riemanniennes-cours-et-exercices-corriges-nouvelle-edition-augmentee-9782340033054.html | lire en ligne={{Google Livres|id=4WDvEAAAQBAJ}} | consulté le=21/8/2024 | libellé=Jeanperrin 2019}}.
* {{Chapitre | langue=fr | prénom=Brahim | nom=Lamine | titre=Relativité générale | auteur ouvrage=Natalie Webb (dir.) | titre ouvrage=Gravitation | lieu=Londres | éditeur=ISTE | collection=Encyclopédie / sciences | série=Univers / cosmologie et relativité générale | date=3/2023 | numéro d'édition=1 | pages totales={{VIII}}-352 | format livre={{dunité|16|23,4|cm}} | isbn10=1-78948-120-1 | isbn=978-1-78948-120-4 | ean=9781789481204 | oclc=1377288035 | bnf=47234398r | sudoc=269367470 | présentation en ligne=https://www.istegroup.com/fr/produit/gravitation/ | lire en ligne={{Google Livres|id=TUq1EAAAQBAJ}} | consulté le=21/8/2024 | partie={{chap.|{{1er}}}} | passage=1-107 | libellé=Lamine 2023}}.
* {{Ouvrage | langue=en | prénom=Paul | nom=Ramond | titre=The first law of mechanics in general relativity & isochrone orbits in Newtonian gravity | lieu=Cham | éditeur=[[Springer Science+Business Media|Springer]] | collection=Springer theses : recognizing outstanding {{nobr|Ph. D.}} research | date=5/2023 | réimpression={{date-|5/2024}} | numéro d'édition=1 | pages totales={{XXVI}}-393 | format livre={{dunité|15,88|23,5|cm}} | isbn10=3-031-17963-3 | isbn1=978-3-031-17963-1 | isbn2=978-3-031-17966-2 | ean=9783031179631 | doi=10.1007/978-3-031-17964-8 | hal=tel-03409635 | s2cid=258419462 | sudoc=27297532X | présentation en ligne=https://link.springer.com/book/10.1007/978-3-031-17964-8 | lire en ligne={{Google Livres|id=aIy8EAAAQBAJ}} | consulté le=21/8/2024 | libellé=Ramond 2023}}.
* {{Ouvrage | langue=en | prénom=David E. | nom=Rowe | lien auteur=David E. Rowe | titre=A richer picture of mathematics | sous-titre=the Göttingen tradition and beyond | lieu=Cham | éditeur=[[Springer Science+Business Media|Springer]], hors {{coll.}} | date=3/2018 | réimpression={{date-|12/2018}} | numéro d'édition=1 | pages totales={{XIX}}-461 | format livre={{dunité|20,96|27,94|cm}} | isbn10=3-319-67818-3 | isbn1=978-3-319-67818-4 | isbn2=978-3-030-09812-4 | ean=9783319678184 | oclc=1041429843 | bnf=45492572f | doi=10.1007/978-3-319-67819-1 | s2cid=187266702 | sudoc=228487749 | présentation en ligne=https://link.springer.com/book/10.1007/978-3-319-67819-1 | lire en ligne={{Google Livres|id=ZRBMDwAAQBAJ}} | consulté le=21/8/2024 | libellé=Rowe 2018}}.
* {{Article | langue=de | prénom=Hermann | nom=Vermeil | lien auteur=Hermann Vermeil | titre=Notiz über das mittlere Krümmungsmaß einer {{italique|n}}-fach ausgedehnten Riemann'schen Mannigfaltigkeit | périodique=Nachrichten von der Gesellschaft der Wissenschaften zu Göttingen, Mathematisch-Physikalische Klasse | date=1917 | pages=334-344 | oclc=946375662 | zbl=46.1130.01 | lire en ligne=http://gdz.sub.uni-goettingen.de/dms/resolveppn/?PPN=GDZPPN002504820 | accès url=libre | format=pdf | libellé=Vermeil 1917}}.

=== Articles connexes ===
{{Autres projets|wikiversity=Relativité générale|wikiversity titre=Relativité générale}}
* [[Courbure]]
* [[Tenseur de Ricci]]
* [[Relativité générale]]
* [[Problème de Yamabe]]

=== Liens externes === 
* [http://www.mathpages.com/rr/s5-07/5-07.htm Riemannian geometry] sur ''mathpages''
* {{YouTube|id=xzVk56EKBUI|chaine=Institut des Hautes Études Scientifiques (IHÉS)|titre=Cédric Villani - 1/7 La théorie synthétique de la courbure de Ricci}}

{{Palette|Courbure en géométrie différentielle}}
{{Portail|physique|Géométrie}}

[[Catégorie:Relativité générale]]
[[Catégorie:Tenseur de courbure|Scalaire]]

[[de:Riemannscher Krümmungstensor#Krümmungsskalar]]