Voir la source de Escargot de Pythagore

[[File:Spiral of Theodorus.svg|thumb|upright=2|La spirale de Théodore construite jusqu'au triangle d'[[hypoténuse]] {{sqrt|17}}.]]
L{{'}}'''escargot de Pythagore''', ou '''spirale de Théodore''' est une figure qui permet de construire géométriquement les [[Racine_carrée|racines carrées]] des entiers consécutifs<ref name="stoll-99">{{Lien web |langue=fr |format=pdf |auteur=André Stoll |titre=Les spirales ({{1re}} partie) |url=https://numerisation.univ-irem.fr/ST/IST99071/IST99071.pdf |site=univ-irem.fr |date=1 juillet 1999 |consulté le=29 août 2021}}</ref>.

== Construction ==
La spirale de Théodore est une [[spirale]] discrète construite par une suite de [[triangle rectangle|triangles rectangles]], autour d'un point O pris pour centre de la spirale.
* Le premier triangle rectangle est [[triangle isocèle rectangle|isocèle]], tel que l'une des extrémité de l'hypoténuse soit le point O ; la longueur des côtés de l'angle droit est prise comme unité ;
* le second a pour côtés de l'angle droit l'[[hypoténuse]] du premier et un segment de longueur unité, construit sur l'extrémité de l'hypoténuse qui n'est pas O, pour qu'il ne se superpose pas au premier ;
* le troisième est construit de la même façon sur le second et ainsi de suite ;
* plus rigoureusement, la construction procède par [[définition par récurrence|récurrence]] : supposons construit le ''n''-ième triangle rectangle, son hypoténuse  alors le (''n''+1)-ième a pour côtés de l'angle droit l'[[hypoténuse]] du ''n''-ième et un segment de longueur unité, construit pour qu'il ne se superpose pas au ''n''-ième<ref>Définition adaptée de {{harvsp|Stoll|1999|p=3}}, qui peut s'appuyer sur un schéma où les points de la spirale sont nommés.</ref>.
D'après le [[théorème de Pythagore]] la longueur de l'hypoténuse du premier triangle rectangle, de côtés de l'angle droit égale à 1, est {{racine|2}}, celle du second, de côtés de l'angle droit égales à {{racine|2}} et 1, est {{racine|3}}, et ainsi de suite. Par [[démonstration par récurrence|récurrence]], le ''n''-ième triangle a des côtés de l'angle droit de longueurs {{sqrt|''n''}} et 1 et une hypoténuse de longueur {{sqrt|''n'' + 1}}{{sfn| Stoll|1999|p=3}}.

[[Fichier:Spiral of Theodorus triangle.svg|vignette|alt=triangle rectangle dont l'hypoténuse mesure racine carrée de n+1, et les côtés adjacents à l'angle droit racine carrée de n et 1|Le ''n''-ième triangle de la construction de la spirale de Pythagore.]]

== Histoire ==
Historiquement, la première mention explicite de l'[[Commensurabilité (mathématiques)|incommensurabilité]] apparait dans un dialogue de [[Platon]], le ''[[Théétète (Platon)|Théétète]]''<ref>{{Ouvrage|langue=en|auteur1=[[David Fowler]]|titre=The Mathematics of Plato’s Academy|sous-titre=A New Reconstruction|lieu=Oxford|éditeur=Clarendon Press (Oxford Science Publications)|année=1999|numéro d'édition=2|pages totales=441|isbn=0-19-850258-3}}, {{p.|290}}.</ref>, où le mathématicien [[Théodore de Cyrène]] expose des cas particuliers de « lignes irrationnelles »<ref>{{Ouvrage|auteur=[[Maurice Caveing]]|titre=La constitution du type mathématique de l'idéalité dans la pensée grecque|volume=3|titre volume=L’irrationalité dans les Mathématiques grecques jusqu’à Euclide|éditeur=[[Presses universitaires du Septentrion]]|année=1998|pages totales=343|isbn=2-85939-539-3|bnf=36971590m|présentation en ligne={{Google Livres|ZycSoMNgL2YC}}}}, {{p.|164}}.</ref>, celles correspondant, en termes modernes, aux [[racine carrée d'un entier naturel|racines carrées]] des nombres [[entier naturel|entier]] qui ne sont pas des [[carré parfait|carrés parfaits]] de 3 jusqu'à 17{{sfn|Stoll|1999|p=2}}.

Le passage du texte de Platon pose des problèmes de traduction et d'interprétation, en particulier de certains termes mathématiques et il n'y a pas unanimité à ce sujet chez les historiens{{sfn|Caveing|1998|p=164-176}}. Selon Platon, Théodore utilise des figures ; une des questions, auxquelles les historiens des Mathématiques de l'Antiquité ont apporté des réponses très diverses{{sfn|Caveing|1998|p=177-184}}, est : Théodore a-t-il vraiment exposé des démonstrations d'irrationalité, et alors quelles étaient-elles{{sfn|Caveing|1998|p=164}}, ou bien a-t-il simplement montré, mis en évidence, certains faits{{sfn|Caveing|1998|p=172}} ? Une autre est pourquoi Théodore s'est-il arrêté à 17{{sfn|Stoll|1999|p=2}} ?

Une réponse à cette dernière question est donnée dans une publication de 1941 par un certain Jakob Heinrich Anderhub, introduit ce qu'il appelle « {{langue|de|Die Quadratwurzelschnecke}} », « l'escargot de la racine carré », et que nous appelons « spirale de Théodore » : Théodore aurait construit en spirale les triangles rectangles jusqu'à atteindre {{sqrt|17}}, et se serait arrêté là, car le suivant, d'hypoténuse {{sqrt|18}}, se superpose au premier{{sfn|Stoll|1999|p=2-3}}{{,}}<ref>{{ouvrage|lang=en|auteur=[[Wilbur Knorr]]|titre=The Evolution of the Euclidean Elements |sous-titre=A Study of the Theory of Incommensurable Magnitudes and Its Significance for Early Greek Geometry |lieu=Dordrecht |éditeur=D. Reidel Publishing Co. |année=1975 |isbn=90 27705097}}, {{p.|69}} et note 28 {{p.|100}}.</ref>.

la spirale de Théodore avait déjà été décrite en 1877, jusqu'à {{sqrt|9}}, par Hermann Schmidt dans un commentaire du [[Théétète (Platon)|Théétète]]<ref>{{harvsp|Knorr|1975|p=69,100}}, la publication de H. Schmidt est [https://books.google.fr/books?id=y_oZAQAAIAAJ&pg=PA441 accessible ici].</ref>. 

Schmidt et Anderhub sont dans la tradition de ceux qui estiment que Théodore n'a que montré certains faits : Théodore n'aurait proposé qu'un simple exercice de construction géométrique [[construction à la  règle et au compas|à la règle et au compas]]{{sfn|Caveing|1998|p=177}}{{,}}{{sfn|Knorr|1975|p=69}}. Pour [[Maurice Caveing]] c'est exclu car à l'époque où est censé se tenir le dialogue, vers −400{{sfn|Caveing|1998|p=164}}, de telles constructions de lignes irrationnelles sont connues depuis au moins {{nobr|50 ans}}, et Platon n'aurait pas mentionné de telles leçons{{sfn|Caveing|1998|p=177}}. II juge que {{citation|le seul intérêt de la construction d'Anderlub est anecdotique : c'est le hasard heureux d'un arrêt à 17 qu'on donne comme explication d'un fait incompris}}{{sfn|Caveing|1998|p=178}}. [[Wilbur Knorr]] souligne qu'aucune construction récursive telle que celle de Schmidt et d'Anderhub n'apparait dans les sources grecques anciennes, et ne voit pas comment elle pourrait être attribuée à Théodore{{sfn|Knorr|1975|p=69}}. [[David Fowler]], dans une section consacrée à la leçon de géométrie du Théétète{{sfn|Fowler|1999|p=378-381}},  estime d'emblée, comme Caveing et Knorr — il reprend la traduction de ce dernier —, que Platon a bien parlé de démonstrations à propos de Théodore{{sfn|Fowler|1999|p=378}}, et ne cite pas Schmidt ou Anderhub.

Cependant l'helleniste Holger Thesleff tient quant à lui pour une interprétation et une traduction du texte où Théodore ne démontre pas mais montre<ref>{{article|lang=en |auteur=Holger Thesleff |titre=Theaitetos and Theodoros |date=1990 |journal=Arctos, Acta Philologica Fennica |volume=XXXIV |passage=147-160|url=https://journal.fi/arctos/article/download/86902/45737}}, {{p.|151}}.</ref>, reprend l'hypothèse d'Anderhub et se dit certain qu'il a raison{{sfn|Thesleff|1990|p=153}}.

== Extension ==
[[File:Spiral of Theodorus extended.svg|thumb|Escargot de Théodore colorié avec 110 triangles]]
Théodore a arrêté la construction de la spirale à l'hypoténuse de longueur <math>\sqrt{17}</math>, mais en continuant l'escargot à l'infini, d'autres propriétés émergent.

=== Non-superposition ===
En 1958, Kaleb Williams prouve qu'aucune paire d'hypoténuses ne coïncident, jusqu'à l'infini. De plus, si les côtés unitaires sont étendus en des droites, aucune ne passe par un des sommets de la figure complète<ref name=LONG/>{{,}}<ref name=teuffel/>.

=== Angle total ===
[[File:Spiral of Theodorus triangle.svg|thumb|Un triangle ou section de l'escargot]]
En notant <math>\varphi_n</math> l'angle du ''n''{{exp|e}} triangle, alors :
<math display=block>\tan\left(\varphi_n\right)=\frac{1}{\sqrt{n}}.</math>
Ainsi à chaque étape est ajouté un angle de{{sfn|Hahn|Schoenberger|2007|p=5}} :
<math display=block>\varphi_n=\arctan\left(\frac{1}{\sqrt{n}}\right).</math>

La somme des angles des ''k'' premiers triangles est appelé angle total <math>\varphi(k)</math> pour le ''k''{{exp|e}} triangle. Elle croit proportionnellement avec la racine carrée de {{mvar|k}}, avec un terme correctif borné {{mvar|c<sub>2</sub>}}{{sfn|Hahn|Schoenberger|2007|p=5}}:
<math display=block>\varphi(k)=\sum_{n=1}^k\varphi_n = 2\sqrt{k}+c_2(k)</math>
où
<math display=block>\lim_{k \to \infty} c_2(k)= - 2,157782996659\ldots</math>
({{OEIS2C|A105459}}).

=== Spirale d'Archimède ===
L'escargot de Pythagore [[Approximation|approche]] la [[spirale d'Archimède]]<ref name=KAHN2/>. De même que la distance entre deux arcs de la spirale d'Archimède est égale à {{mathPi}}, quand le nombre de tours de l'escargot de Pythagore augmente infiniment, la distance entre deux arcs consécutifs approche rapidement de {{mathPi}}<ref name=hahn/>.

La table suivante montre l'évolution de cette suite de distances :

{| class="wikitable"
!Tour No.:
!width=200px|Distance moyenne
!width=200px|Écart moyen avec {{mathPi}}
|-
|2
|3,1592037
|99,44255%
|-
|3
|3,1443455
|99,91245%
|-
|4
|3,14428
|99,91453%
|-
|5
|3,142395
|99,97447%
|-
|<math>\to\infty</math>
|<math>\to\pi</math>
|<math>\to 100\%</math>
|}

Ainsi, en cinq tours, on a déjà une bonne approximation de {{mathPi}}<ref name=KAHN2/>.

== Courbe régulière interpolante ==

[[File:Theodorus Wiki.svg|thumb|right|400px|Prolongement analytique de l'escargot de Pythagore par Philip J. Davis, incluant le prolongement dans la direction opposée (pour les entiers négatifs).]]

La question de l'existence d'une courbe régulière interpolant les sommets de l'escargot a été proposée et résolue par [[Philip J. Davis]] en 2001, par analogie avec la formule d'Euler pour la [[fonction Gamma]] comme interpolante de la fonction [[factorielle]]. Davis propose{{sfnp|Davis|2001|pp=37–38}}
<math display=block>T(x) = \prod_{k=1}^\infty \frac{1 + \mathrm{i}/\sqrt{k}}{1 + \mathrm{i}/\sqrt{x+k}} \qquad ( -1 < x < \infty )</math>
qui a plus longuement été étudiée par son élève [[Jeffery J. Leader|Leader]]<ref name=leader/> et [[Arieh Iserles|Iserles]]<ref>Dans un appendice de {{Harv|Davis|2001}}</ref>. Cette fonctions est caractérisée comme l'unique solution de l'[[équation fonctionnelle]]
<math display=block>f(x+1) = \left( 1 + \frac{\mathrm{i}}{\sqrt{x+1} }\right) \cdot f(x),</math>
avec pour condition initiale <math>f(0) = 1,</math> et [[Fonction monotone|monotone]] en [[Argument d'un nombre complexe|argument]] et [[Valeur absolue|module]]<ref>{{Harvsp|Gronau|2004}}, une alternative est donnée dans {{Harvsp|Heuvers|Moak|Boursaw|2000}}.</ref>.

Un [[prolongement analytique]] de la forme continue de Davis de l'escargot de Pythagore s'étend dans la direction opposée depuis l'origine{{sfnp|Waldvogel|2009}}.

== Voir aussi ==
* [[Spirale de Fermat]]
* [[Spirale]]

== Références ==
{{Traduction/Référence|en|Spiral of Theodorus|1229369423}}
{{reflist|refs=
<ref name=hahn>
{{lien arXiv |lang=en
 |last=Hahn |first=Harry K.
 |year=2008
 |title=The distribution of natural numbers divisible by 2, 3, 5, 7, 11, 13, and 17 on the square root spiral
 |eprint=0801.4422}}</ref>

<ref name=KAHN2>{{lien web |lang=en
 |nom1=Hahn
 |prénom1=Harry K.
 |nom2=Schoenberger
 |prénom2=Kay
 |titre=The ordered distribution of natural numbers on the square root spiral
 |url=https://arxiv.org/pdf/0712.2184
 |année=2007
 }}</ref>

<ref name=leader>{{ouvrage |lang=en
 | nom = Leader | prénom = Jeffery James | lien auteur = Jeffery J. Leader
 | lire en ligne=https://www.proquest.com/docview/303808219
 | mr = 2685516
 | page = 173
 | éditeur = Brown University
 | titre = The generalized Theodorus iteration
 | nature ouvrage = Thèse de PhD 
 | année = 1990}}</ref>

<ref name=LONG>
{{lien web |lang=en
 |nom=Long
 |prénom=Kate
 |titre=A Lesson on The Root Spiral
 |url=http://courses.wcupa.edu/jkerriga/Lessons/A%20Lesson%20on%20Spirals.html
 |consulté le=30 April 2008
|archive-url=https://web.archive.org/web/20130411230043/http://courses.wcupa.edu/jkerriga/Lessons/A%20Lesson%20on%20Spirals.html
 |archive-date=11 April 2013}}</ref>

<ref name=teuffel>{{article |lang=de
 | nom = Teuffel | prénom = Erich
 | journal = Mathematisch-Physikalische Semesterberichte zur Pflege des Zusammenhangs von Schule und Universität
 | mr = 96160
 | pages = 148–152
 | titre = Eine Eigenschaft der Quadratwurzelschnecke
 | volume = 6
 | année = 1958}}</ref>

}}

== Bibliographie ==
* {{ouvrage |lang=en| titre = Spirals from Theodorus to Chaos | prénom = P. J. | nom = Davis | éditeur = A K Peters/CRC Press | lien auteur = Philip J. Davis |année = 2001 }}
* {{article |lang=en| doi = 10.2307/4145130 | titre = The Spiral of Theodorus | prénom = Detlef| nom = Gronau | journal = [[The American Mathematical Monthly]] | volume = 111 |date=March 2004 | pages = 230–237 | numéro = 3 | jstor = 4145130 }}
* {{ouvrage |lang=en| prénom1 = J. | nom1 = Heuvers | prénom2 = D. S. | nom2 = Moak | prénom3 = B | nom3 = Boursaw | chapter = The functional equation of the square root spiral | titre = Functional Equations and Inequalities | éditeur = T. M. Rassias | année = 2000 | pages = 111–117 }}
* {{lien web |lang=en | titre = Analytic Continuation of the Theodorus Spiral | prénom = Jörg | nom = Waldvogel | année = 2009 | url = http://www.math.ethz.ch/~waldvoge/Papers/theopaper.pdf }}

{{Portail|mathématiques|géométrie}}

[[Catégorie:Spirale]]
[[Catégorie:Pi]]