Voir la source de Exergie

{{Voir homonyme|mef=[[Anergie]], phénomène physiologique immunitaire}}

En [[thermodynamique]], l’'''exergie''' est une [[grandeur physique]] permettant de mesurer la qualité d'une [[énergie]]. C'est la partie utilisable d'un [[joule]]. Le [[Travail d'une force|travail]] maximal récupérable est ainsi égal à l’opposé de la variation d’exergie au cours de la transformation. L'exergie mécanique (ou électrique) présente un ratio exergétique nécessairement égal à 1<ref>{{Lien web |titre=Exergy Analysis of the Supply of Energy and Material Resources in the Swedish Society |url=https://www.researchgate.net/figure/The-exergy-factor-of-some-common-energy-forms_tbl1_307615827 |site=researchgate.net }}.</ref> avec cette définition. Un système à l'équilibre thermomécanique ou chimique n'a plus aucune valeur. Plus un système est loin de l'équilibre ambiant, plus il est apte à opérer un changement, aptitude sur laquelle repose l'utilité d'une énergie.

Si selon le [[premier principe de la thermodynamique]] la quantité d'énergie se conserve, la qualité de cette énergie, l’exergie, ne peut en revanche que diminuer lors d'une transformation. L’exergie détruite au cours d’une réaction est appelée [[Anergie (thermodynamique)|anergie]].

Ce phénomène est lié à l’[[Entropie (thermodynamique)|entropie]] du système et de son environnement, qui selon le [[deuxième principe de la thermodynamique]] ne peut qu’augmenter au cours d’une transformation réelle, non réversible, alors que l'exergie diminue au cours d’une telle transformation.

== Définition générale ==

Par définition, l’exergie d’un système est égale à zéro lorsqu’il est à l’[[équilibre thermodynamique]] avec son environnement.

Cet équilibre comprend :
* l’[[équilibre mécanique]] avec les [[forces intérieures et forces extérieures|forces extérieures]], notamment celles de [[pression]] ;
* l’[[équilibre thermique]] avec la [[température]] extérieure ;
* l’[[équilibre chimique]] entre les [[Potentiel chimique|potentiels chimiques]] des espèces présentes dans le système et dans l’environnement.

Si l’on considère que le milieu extérieur est invariant (notamment sa température <math>T_{ext}</math>), il devient possible de considérer que l’exergie est une [[fonction d’état]] : sa valeur, le [[Travail d'une force|travail]] maximal que peut fournir le système à l’extérieur, ne dépend en effet que de l’état d’équilibre dans lequel se trouve le système et de la constante <math>T_{ext}</math><ref>{{Ouvrage |auteur1=André Lallemand |titre=Thermodynamique appliquée - Bilans entropiques et exergétiques |éditeur=[[Éditions techniques de l'ingénieur]], Référence BE8008 |passage=3 |date=10 avril 2005}}.</ref>.

Pour d’autres auteurs, l’exergie n’est pas une fonction d’état du système car {{Précision nécessaire|elle est définie par : 
: <math>F_0 = U - U_0 + p_0 (V - V_0) - T_0 (S - S_0) - \sum_i \mu_{i,o} N_i</math>.|date=29 octobre 2023}}

L'exergie est formée :
* de paramètres relatifs au système :
** <math>U</math>, l’[[énergie interne]], en joules,
** <math>S</math>, l’[[Entropie (thermodynamique)|entropie]], en joules par kelvin,
** <math>V</math>, le [[volume]], en mètres cubes,
** <math>N_i</math>, la [[composition chimique]] du système, en moles ;
* de paramètres relatifs à l’environnement :
** <math>T_0</math>, la [[température]] environnante, en kelvins,
** <math>p_0</math>, la [[pression]] environnante, en pascals,
** <math>\mu_{i,0}</math>, les potentiels chimiques des composants, en joules par mole.

Elle est notée <math>F_0</math> pour signifier qu’elle dépend à la fois du système et de son environnement.
Le choix de la lettre ''F'' est dû à sa similitude avec l’[[énergie libre]].

Cette fonction a été très étudiée après [[Pierre Duhem]] (1861-1916) par [[Louis Georges Gouy]] (1854-1926), mais le terme « exergie » n'a été introduit qu'en 1956 par Zoran Rant.
Un peu tombée en désuétude, malgré son utilisation par [[Albert Einstein]], elle revient par le biais ingénieur des réflexions sur le [[gaspillage d'énergie]]s lors des années 1970, à la suite du [[premier choc pétrolier]].

== Définitions dans des cas particuliers ==

Pour un système de composition chimique donnée, à [[pression]] et [[Entropie (thermodynamique)|entropie]] données, on peut utiliser l'[[enthalpie]] ''H'' pour exprimer l’exergie :
: <math>F_0 = H - T_0 S</math>.

Pour un système de composition chimique donnée, à [[température]] et [[volume]] donnés, on peut utiliser l'[[énergie libre]] ''F'' :
: <math>F_0 = F = U - T S</math>.

Pour un système de composition chimique donnée, à température et pression données, on peut utiliser l'[[enthalpie libre]] ''G'' :
: <math>F_0 = G = U + p V - T S</math>.

== Considérations de coût énergétique ==

L’analyse d’un système par l’exergie permet de mesurer le degré d’[[irréversibilité]] d’une transformation dans un environnement de température <math>T_0</math>.
Cette fonction est aussi appelée « énergie disponible » ou « disponibilité énergétique » (en anglais : {{lang|en|availability}}), car on démontre que sa chute entre un état A et un état B est le travail maximal récupérable : 
: <math>W \le \Delta F_0</math>.

Comme cela est peu intuitif, il est utile de détailler les 4 cas possibles :
# si l’on chute énergétiquement d’un état désordonné vers un état ordonné, on ne peut pas récupérer la totalité de <math>- \Delta U</math>, il faut payer le prix de l’information gagnée (<math>- T_0 \Delta S</math>, positif) : on ne peut récupérer en tout que <math>- \Delta U + T_0 \Delta S</math> ;
# si au contraire on chute énergétiquement d’un état ordonné vers un état désordonné, ce serait du gaspillage que de ne récolter que <math>- \Delta U</math>, on peut récolter en plus <math>T_0 \Delta S</math> (bonus positif à ne pas manquer) : on peut récupérer en tout <math>- \Delta U + T_0 \Delta S</math> ;
# si l’on monte énergétiquement d’un état désordonné vers un état ordonné, il va falloir payer le prix fort, c’est-à-dire non seulement <math>\Delta U</math> mais aussi le prix de l’information à payer (<math>- T_0 \Delta S</math>, positif) : on doit payer en tout <math>\Delta U - T_0 \Delta S</math> ;
# si au contraire on monte énergétiquement d’un état ordonné vers un état désordonné, on aura à payer moins que <math>\Delta U</math> d’une quantité <math>T_0 \Delta S</math> (positive) : on ne doit payer en tout que <math>\Delta U - T_0 \Delta S</math>.

Il se pourrait même que l’on récupère du travail dans l’opération si l’état final est très désordonné (ce qui n’est pas, ''a priori'', intuitif) : certaines piles au mercure et calomel réalisent cet apparent prodige.

Dès que l’on a pris conscience que récupérer de l’information chaude coûte cher, tout devient assez raisonnable : prendre l’exemple de la [[Second principe de la thermodynamique#La boîte de Maxwell|boîte de Maxwell]] ; on conçoit bien que séparer les billes blanches et noires dans chaque compartiment est d’autant plus difficile que les bords de la boîte sont vibrants à une haute température <math>T_0</math>.
C’est même très exactement ce prix que l’on doit payer pour séparer de l’[[hexafluorure d'uranium|hexafluorure d'uranium 235]] de son [[isotope|isotope 238]] : faire fonctionner « un [[démon de Maxwell]] » coûte d’autant plus que les particules vont vite.

== Notion de potentiel F{{Ind|0}} ==

Bien sûr, si <math>W = 0</math>, le système ne peut évoluer que vers l’état où <math>F_0</math> sera minimal, et il y restera : ce n’est pas l’état d’énergie <math>U</math> minimale qui est l’équilibre.
Ce n’est pas non plus <math>S</math> maximal, car le système peut rétrocéder de l’énergie au thermostat.

En définitive, l’équilibre est le minimum conjoint <math>U - T_0 S</math>, soit <math>F_0(T,V)</math>.

À volume constant, cela donne <math>\left( \frac{\partial U}{\partial S} \right)_V = T_0</math>, c’est-à-dire le résultat intuitif suivant : <math>T = T_0</math>.

Donc, à l’équilibre monotherme isochore, <math>F_0(T, V) = F(T_0,V)</math> ; cela justifie qu’en chimie, on utilise pratiquement toujours l’[[énergie libre]] <math>F</math> et non pas l’exergie <math>F_0</math>.

== Exergie monobare ==

Tout se généralise dans le cas d’un [[pressostat]] de pression <math>p_0</math>, lors d’une transformation monotherme.
Ce qui interviendra est <math>G_0(T,P) = U + p_0 V - T_0 S</math>, et tous les raisonnements tiennent à condition de parler du travail <math>W^*</math>, autre que celui des forces de pression (égal à <math>- p_0 \Delta V</math>).

== Stabilité de l’équilibre ==

La considération de la différence seconde qui doit être positive donne des inégalités intéressantes, dites [[inégalités de Le Châtelier]] (ou inégalités de [[Henry Le Chatelier|Le Châtelier]]-[[Ferdinand Braun|Braun]]).

== Remarque ==

Bien qu’issu de la thermodynamique, le concept d’exergie est aussi fortement lié à la théorie de l’information.
En conséquence, il est parfois appliqué en dehors du champ de la thermodynamique ''stricto sensu'', par exemple, à l’analyse de coûts économiques, de la biodiversité, de la disponibilité des ressources minérales.
On parle alors d’exergo-économie, de exergo-écologie, d’éco-exergie, etc.

== Notes et références ==

{{Références}}

== Voir aussi ==

=== Articles connexes ===
* [[Anergie (thermodynamique)|Anergie]]
* [[Néguentropie]]
* [[Entropie (thermodynamique)|Entropie]]
* [[Énergie]]
* [[Émergie]]
* [[Méthode Carnot]]

=== Bibliographie ===
* [http://www.ppur.org/produit/332/9782880745455/Thermodynamique%20et%20energetique%20%28Volume%201%29 Thermodynamique et énergétique (Volume 1) "De l’énergie à l’exergie", de Lucien Borel et Daniel Favrat]
* [http://exergy.se Travaux de Göran Wall] (en anglais)
* [http://www.exergoecology.com/Members/aliciavd/PhD_Alicia_Valero.pdf Alicia Valero Delgado, "Exergy Evolution of the mineral capital on Earth", Thèse de doctorat, Université de Saragosse, 2008] (en anglais)
* Van Wylen : Thermodynamique
* Kubo : Thermodynamics
* Callen : Thermodynamics
* Bruhat : Thermodynamique

{{Portail|Physique|énergie}}

[[Catégorie:Grandeur thermodynamique]]