Voir la source de Groupe alterné

{{Voir homonymes|Alterné}}

En [[mathématiques]], et plus précisément en [[théorie des groupes]], le '''groupe alterné''' de degré ''n'', souvent noté ''A<sub>n</sub>'', est un [[sous-groupe]] [[Sous-groupe normal|distingué]] du [[groupe symétrique]] des [[permutation]]s d'un ensemble fini à ''n'' éléments. Ce sous-groupe est constitué des permutations [[Signature d'une permutation|produits d'un nombre pair de transpositions]]. Une [[Permutation#Permutations particulières|transposition]] est une permutation qui échange deux éléments et fixe tous les autres.

Il existe un groupe alterné pour chaque entier ''n'' supérieur ou égal à 2 ; il se note habituellement ''A<sub>n</sub>'' (ou parfois <math>\mathfrak A_n</math> en écriture [[Fraktur]]) et possède [[Factorielle|''n''!]]/2 éléments. Le plus petit groupe alterné, ''A''<sub>2</sub>, est [[groupe trivial|trivial]] ; ''A''<sub>3</sub> est [[groupe cyclique|cyclique]] d'[[Ordre (théorie des groupes)|ordre]] 3 ; le suivant, ''A''<sub>4</sub>, est [[groupe résoluble|résoluble]] et, plus précisément, est [[produit semi-direct]] d'un [[groupe de Klein]] par le groupe cyclique d'ordre 3. À partir du groupe ''A''<sub>5</sub>, les groupes alternés sont [[groupe simple|simples]] et non [[groupe abélien|abéliens]], donc non résolubles. Cette non-résolubilité à partir de ''n'' = 5 a pour conséquence le [[Théorème d'Abel (algèbre)|théorème d'Abel]], stipulant qu'il ne peut exister d'expression générique par radicaux des solutions d'une [[équation algébrique]] de degré supérieur ou égal à 5.

Le groupe alterné est la structure source de certains casse-têtes mathématiques comme le [[jeu de taquin]] ou le [[Rubik's Cube]]. Les mouvements possibles dans les deux jeux cités sont des éléments d'un groupe alterné. Cette propriété permet de montrer qu'il n'est pas possible de permuter deux cases du taquin sans modifier le reste du jeu.

Les groupes alternés de degré 4 et 5 se [[représentations d'un groupe fini|représentent]] comme le [[groupe de symétrie|groupe des rotations]] laissant invariant un [[polyèdre régulier]], le [[tétraèdre]] pour ''A''<sub>4</sub> et le [[dodécaèdre régulier]] ou encore l'[[icosaèdre]] pour ''A''<sub>5</sub>.

== Construction du groupe ==
=== Définition ===
Un résultat, à la base de la définition de la [[Signature d'une permutation|signature]], stipule que le nombre de transpositions nécessaires pour décomposer une permutation donnée est toujours de même parité. Ainsi, le [[Permutation circulaire|cycle]] ('''abc'''), qui transforme '''a''' en '''b''', '''b''' en '''c''' et '''c''' en '''a''' peut se décomposer en deux transpositions ('''bc'''), puis ('''ab''') ou encore en ('''ac''') puis ('''bc''') mais jamais en un produit d'un nombre impair de transpositions.

{{Théorème|Définition|
Une permutation est dite '''paire''' lorsqu'elle se décompose en un [[nombre pair]] de transpositions. Dans le cas inverse, la permutation est dite '''impaire'''.}}

Cette définition est à l'origine de celle d'un groupe alterné.

{{Théorème|Définition|
Le '''groupe alterné de degré''' ''n'', noté ''A<sub>n</sub>'',  est le [[sous-groupe]] des permutations paires de degré ''n''<ref>C'est par exemple la définition donnée dans ''[http://www.bibmath.net/dico/index.php3?action=affiche&quoi=./a/alterne.html Groupe alterné]'' sur bibmath.net.</ref>.}}

Remarque : On trouve aussi l'expression groupe alterné '''d'indice''' ''n'', à la place de groupe alterné de degré ''n''<ref>C'est par exemple le choix de : N. Lanchier, ''[http://www.univ-rouen.fr/LMRS/Persopage/Lanchier/files/lec106.pdf Groupe des permutations d’un ensemble fini. Applications.]'', [[Université de Rouen]].</ref>. Ce choix est un peu ambigu, l'[[Indice d'un sous-groupe|indice]] de ''A<sub>n</sub>'' dans ''S<sub>n</sub>'' désigne, pour d'autres auteurs, le [[cardinal d'un ensemble fini|cardinal]] du [[groupe quotient]] ''S<sub>n</sub>''/''A<sub>n</sub>''<ref>C'est le choix par exemple de M. Hindry, ''[http://people.math.jussieu.fr/~hindry/Simple.pdf Liste des groupes simples finis]'', [[Université Paris 7]].</ref>. On trouve encore le terme d''''ordre''' pour décrire le degré<ref>Y. Ladegaillerie, « [https://books.google.fr/books?hl=fr&id=luFUAAAAYAAJ&pg=PA137&sig=ACfU3U11Suxi4iVyrNAd5bsi7gvPi7tzOQ&q=relations+d%27ordre+particuli%C3%A8res+li%C3%A9es+au+groupe+sym%C3%A9trique+d%27ordre+n#search_anchor Ordres liés au groupe symétrique] », dans ''[[CRAS]]'', sér. A, t. 271, 1970, {{p.|137-140}}, parle en introduction du {{citation|groupe symétrique d'ordre ''n''}}.</ref>. Cette convention est plus rarement utilisée, car le terme d'[[Ordre (théorie des groupes)|ordre]] étant employé en théorie des groupes pour décrire le cardinal d'un groupe, ce choix introduit une confusion parfois regrettable.

=== Propriétés élémentaires ===
{{Article détaillé|groupe symétrique}}
Dans toute la suite de l'article, ''n'' désigne un entier supérieur ou égal à 2. La définition précédente repose sur une propriété fondamentale partagée par toutes les permutations :
{{Théorème|Propriété 1|
La parité du nombre de transpositions nécessaires pour décomposer une permutation donnée est indépendante de la décomposition choisie.}}

Cette propriété se démontre à l'aide du concept de signature d'une permutation, traitée dans le paragraphe suivant. Une fois établie, une deuxième propriété se démontre simplement :

{{Théorème|Propriété 2|
L'ensemble ''A{{ind|n}}'' des permutations paires de ''S{{ind|n}}'' forme un [[sous-groupe distingué]].}}
En effet, ''A{{ind|n}}'' est non vide car il contient l'[[application identité]], qui se décompose en zéro transposition, ou encore en deux fois la même transposition. Si φ<sub>1</sub> et φ<sub>2</sub> sont deux permutations paires, respectivement [[Composition de fonctions|produits]] de 2''p'' et 2''q'' transpositions, alors leur produit est aussi une permutation paire (comme produit de 2(''p + q'') transpositions). Enfin, l'[[Bijection réciproque|inverse]] d'une permutation σ est de même parité que σ (donc est paire si σ l'est), car si σ est un produit τ<sub>1</sub>…τ<sub>''r''</sub> de ''r'' transpositions, son inverse est égal à τ<sub>''r''</sub>…τ<sub>1</sub>, le produit des mêmes transpositions prises dans l'ordre inverse.

Dire que ''A<sub>n</sub>'' est distingué revient à dire que si φ est élément du sous-groupe et si σ est une permutation quelconque de ''S<sub>n</sub>'', alors la permutation σφσ{{-1}} est paire. En effet, φ est le produit d'un nombre pair de transpositions, et le paragraphe précédent montre que σ{{-1}} se décompose en autant de transpositions que σ. Le nombre de toutes ces transpositions est donc pair car de la forme ''r'' + 2''p'' + ''r''.

{{Théorème|Propriété 3|
L'ordre de ''A{{ind|n}}'' est la moitié de celui de ''S{{ind|n}}'', c'est-à-dire ''n''!/ 2.}}

En effet, fixons dans ''S{{ind|n}}'' une transposition σ et considérons l'application ''f'' de ''S{{ind|n}}'' dans ''S{{ind|n}}'' qui, à une permutation φ, associe φσ. Une telle application est, dans un groupe, appelée translation à droite. La fonction ''f'', comme toute translation, est une bijection. De plus, φ est paire si et seulement si φσ est impaire, donc ''f'' se restreint en une bijection de ''A{{ind|n}}'' dans l'ensemble des permutations impaires, c'est-à-dire ''S{{ind|n}}''\''A{{ind|n}}''. Ces deux ensembles ont par conséquent même cardinal. Or ils forment une [[Partition d'un ensemble|partition]] de ''S{{ind|n}}'', puisqu'ils sont disjoints et que leur réunion vaut ''S{{ind|n}}'', ce qui [[Lemme des bergers|termine la démonstration]].

{{Théorème|Propriété 4|
Soit ''m'', un entier inférieur ou égal à ''n''. Un cycle de ''S{{ind|n}}'' et de longueur ''m'' est élément du groupe alterné si, et seulement si, ''m'' est impair.}}
Une [[démonstration par récurrence]] en est donnée dans l'article « [[Permutation circulaire]] ».

=== Signature ===
{{Article détaillé|Signature d'une permutation}}
La signature d'une permutation est la parité du nombre d'inversions contenues dans une permutation. On démontre que cette application est un [[morphisme de groupes]] de ''S{{ind|n}}'' dans {-1, 1} et que la signature d'une transposition est toujours égale à -1. On en déduit que le nombre de transpositions nécessaires pour décomposer une permutation ne peut être tantôt pair et tantôt impair. En effet, si φ est une permutation qui se décompose en ''p'' ou bien ''q'' transpositions, la signature de φ, d'après la propriété de morphisme, est à la fois égale à (-1)<sup>p</sup> et (-1)<sup>q</sup>, ce qui montre que ''p'' et ''q'' sont de même parité. On en déduit une nouvelle définition du groupe alterné, équivalente à la précédente :

{{Théorème|Définition alternative|
Le groupe alterné ''A<sub>n</sub>'' est le [[Noyau (algèbre)#Noyau d'un morphisme de groupes|noyau du morphisme]] signature du groupe symétrique ''S{{ind|n}}''<ref>Cette définition est utilisée dans {{Ouvrage|prénom1=Adrien|nom1=Douady|lien auteur1=Adrien Douady|prénom2=Régine|nom2=Douady|titre=Algèbre et théories galoisiennes|année=2005|passage=318|id=A. et R. Douady 2005|référence simplifiée=Référence:Théories galoisiennes (Douady)}}</ref>.}}
Cette approche offre des démonstrations alternatives aux propositions du paragraphe précédent numérotées de 2 et 3. Le noyau d'un morphisme est toujours un sous-groupe distingué, ce qui montre que ''A<sub>n</sub>'' est un sous-groupe distingué. L'ordre du noyau que multiplie l'ordre de l'image d'un morphisme de groupes est égal à l'ordre du groupe de départ, ce qui permet de déterminer l'ordre du groupe alterné.

=== Exemples ===
Le groupe alterné de degré 2 ne contient que l'élément neutre.

Le groupe symétrique de degré 3 est d'ordre 6 et contient : l'identité, trois transpositions et deux cycles d'ordre 3. Le groupe alterné de degré 3 ne comporte que l'identité et les cycles d'ordre 3 :
<center><math>\mathfrak A_3 = \{\text{I},\,(123),\,(132)\}</math></center>
Comme tout groupe contenant 3 éléments, il est [[groupe cyclique|cyclique]].

Le groupe symétrique de degré 4 est d'ordre 24, le groupe alterné associé est d'ordre 12. Il contient les cycles d'ordre 3 et les produits de deux cycles d'ordre 2 de supports disjoints :
<center><math>\mathfrak A_4 = \{\text{I},\,(234),\,(243),\,(134),\,(143),\,(124),\,(142),\,(123),\,(132),\,(12)(34),\,(13)(42),\,(14)(23)\}</math></center>
Le groupe alterné de degré 4 n'est pas [[groupe abélien|abélien]]. En effet, les cycles ('''1 2 3''') et ('''2 3 4''') ne commutent pas. Aucun groupe alterné de degré supérieur ou égal à 4 n'est abélien, pour la même raison. Le groupe alterné de degré 4 est néanmoins [[groupe résoluble|résoluble]], il contient un sous-groupe distingué abélien ''K'', composé des produits de deux transpositions à support disjoints et de l'élément neutre. Ce sous-groupe ''K'' est abélien car [[Isomorphisme de groupes|isomorphe]] au [[groupe de Klein]] et le [[Groupe quotient|quotient]] ''A''<sub>4</sub>/''K'' est aussi abélien, et même cyclique, car d'ordre 3.

Le groupe alterné de degré 5 est d'ordre 60. Il est étudié plus avant à la suite de cet article.

=== Jeu de taquin ===
{{Article détaillé|Taquin}}
[[Image:15-puzzle.svg|thumb|left|Jeu de taquin résolu]]
[[Image:15-puzzle-loyd.svg|thumb|right|Jeu de taquin non résoluble]]
Le jeu de taquin, est un jeu solitaire qui se présente sous la forme d'un damier composé de 15 cases et d'une {{16e}} manquante. Sa théorisation mathématique date de [[1879 en science|1879]] et se fonde sur les propriétés du groupe alterné<ref>Cité par [[Édouard Lucas]], dans ''Récréations mathématiques'', 1891, rééd. Blanchard, 1992 {{ISBN|2853671232}}, {{p.|190}}</ref>. Une des questions posée par [[Sam Loyd]] est celle de la résolution du jeu de taquin illustré à droite. Elle correspond à la résolution d'un état du jeu où toutes les cases sont à la bonne position exceptées celles numérotées 14 et 15, qui sont interverties. Elle est impossible si l'on impose à la case vide d'être en bas à droite. Elle l'est si on admet que la case vide soit en haut à gauche et que la première ligne ne contienne que les cases '''1''', '''2''' et '''3'''.

Si l'on considère un ''mouvement'' comme une permutation des cases numérotées de '''1''' à '''15''', alors le groupe des permutations de degré 15 [[action de groupe (mathématiques)|opère]] sur le jeu de taquin. Pour être plus précis, le groupe qui opère est un sous-groupe [[Partie génératrice d'un groupe|engendré]] par les différentes permutations ''possibles''. Il est relativement simple de vérifier que les permutations engendrant le sous-groupe sont toutes des cycles d'ordre 3 ou 5<ref>La démonstration proposée ici provient de M. Coste ''[http://agreg-maths.univ-rennes1.fr/documentation/docs/taquin.pdf Jeu de taquin et générateurs du groupe alterné]'' Université de Rennes 1 (2008)</ref>. Ces permutations sont toutes dans le groupe alterné ''A''<sub>15</sub>. Le groupe qui opère sur le jeu de taquin est un sous-groupe du groupe alterné ''A''<sub>15</sub>, qui ne contient aucune transposition. C'est une manière simple de démontrer que la configuration de droite n'est pas résoluble.

D'autres solitaires, comme [[l'Âne rouge]] ou le [[Rubik's Cube]] utilisent de manière analogue le groupe alterné.
{{boîte déroulante début|align=left|titre=Détail de la démonstration}}
[[Image:15-puzzle-loyd-ter.svg|thumb|right|numérotation d'une permutation]]
On numérote une position de la manière indiquée par la figure de droite. Le ''trou'' n'est pas compté. Ainsi, la position initiale représentée sur la figure est ('''123456789…'''). Le mouvement correspondant à la flèche bleue donne la position ('''134562789…'''), elle correspond à la permutation ('''23456'''), un cycle d'ordre 5 et donc une permutation paire. Celle correspondant à la flèche rouge donne ('''123456978…'''), elle correspond à la permutation ('''798''') un cycle d'ordre 3, et donc encore une permutation paire. Si la case vide est sur un bord, on obtient soit la permutation constante soit un cycle d'ordre 7, donc toujours une permutation paire. Ainsi toutes les permutations générant le sous-groupe opérant sur le jeu de taquin sont paires et appartiennent donc au groupe alterné.

La permutation nécessaire à la résolution du cas de figure intitulée ''Jeu de taquin non résoluble'' est une transposition, de signature impaire, elle n'est donc pas réalisable car le groupe alterné ne contient aucune transposition.

Avec les notations utilisées, le cas de figure intitulée ''Jeu de taquin non résoluble'' correspond à la position 1,2,3,4,8,7,6,5,9,10,11,12,14,15,13. Celle correspondant au taquin reconstitué dans l'ordre avec la case vide en première position à 1,2,3,7,6,5,4,8,9,10,11,15,14,13,12. Passer de l'une à l'autre des positions impose la permutation ('''47586''')('''12 15 13'''), produit de deux permutations de signature paire, donc paire. Il est ainsi possible de résoudre la question posée par Sam Loyd si l'on permet à la case vide de se trouver en haut à gauche.

La référence sur le taquin montre que le groupe alterné ''A''<sub>15</sub> est bien celui qui opère sur le jeu.
{{Boîte déroulante fin}}

== Générateurs et relations ==
{{Voir|Présentation d'un groupe}}
{{énoncé|Les 3-cycles [[Partie génératrice d'un groupe|engendrent]] le groupe alterné.}}
En effet, tout produit de deux transpositions est un produit de 3-cycles, puisque pour ''a'', ''b'', ''c'', ''d'' distincts, (''ab'')(''ab'') = id, (''ab'')(''bc'') = (''abc'') et (''ab'')(''cd'') = (''abc'')(''bcd'').

Il suffit en fait des 3-cycles (''i'', ''n'' – 1, ''n'') pour 1 ≤ ''i'' ≤ ''n'' – 2 — ou bien (1, ''i'' + 1, ''n''). On obtient ainsi une [[Présentation d'un groupe|présentation]] du groupe ''A{{ind|n}}'' à ''n'' – 2 générateurs ''V{{ind|i}}'' et (''n'' – 1)(''n'' – 2)/2 relations : ''V{{ind|i}}''{{3}} = 1 et, pour ''i'' < ''j'', (''V{{ind|i}}V{{ind|j}}''){{2}} = 1<ref name=CM>{{Ouvrage|langue=en|auteur1=[[H. S. M. Coxeter]]|auteur2={{Lien|lang=de|William Oscar Jules Moser|texte=W. O. J. Moser}}|titre=Generators and Relations for Discrete Groups|éditeur=[[Springer Verlag|Springer]]|année=1972|numéro d'édition=3|année première édition=1957|réimpression=2013|pages totales=164|passage=66-67|isbn=978-3-662-21946-1|lire en ligne={{Google Livres|ZIjnCAAAQBAJ|page=66}}|id=Coxeter et Moser 1972}}.</ref>.

Si ''n'' > 3, on peut aussi prendre comme générateurs ''t'' = (1, 2, 3) et ''s'' égal soit à (3, 4, … , ''n'') si ''n'' est impair, soit à (1, 2)(3, 4, … , ''n'') si ''n'' est pair. On obtient encore une présentation, à seulement 2 générateurs et [[Partie entière|E(n/2)]] + 2 relations<ref name=CM/> :
:si ''n'' est impair : ''s''{{exp|''n''–2}} = ''t''{{3}} = (''st''){{exp|''n''}} = 1 et, pour 1 ≤ ''k'' ≤ (''n'' – 3)/2, (''ts{{exp|–k}}ts{{exp|k}}''){{2}} = 1 ;
:si ''n'' est pair : ''s''{{exp|''n''–2}} = ''t''{{3}} = (''st''){{exp|''n''–1}} = 1 et, pour 1 ≤ ''k'' ≤ (''n'' – 2)/2, (''t''{{exp|(–1){{exp|''k''}}}}''s{{exp|–k}}ts{{exp|k}}''){{2}} = 1.

== Classes de conjugaison ==
{{Article détaillé|Classe de conjugaison}}

=== Structure ===
La structure des classes de conjugaison est l'un des premiers éléments à étudier dans le cadre d'une analyse d'un groupe non abélien. Elles sont utilisées dans la suite de l'article pour établir que si ''n'' est strictement supérieur à 4, le groupe est simple, ou encore que tout groupe simple d'ordre 60 est isomorphe à ''A''<sub>5</sub>.

[[Groupe symétrique#Classes de conjugaison|Dans un groupe symétrique, les classes de conjugaison]] sont composées de produits de cycles à supports disjoints de même structure, c'est-à-dire de même nombre et de mêmes longueurs. En conséquence, les classes de conjugaison du groupe alterné sont aussi composées de produits de cycles à supports disjoints de même structure ; plus précisément :

{{énoncé|Une classe de conjugaison dans ''A<sub>n</sub>'' est constituée d'éléments ayant la même structure. Les permutations ayant cette structure constituent :
*une classe si la structure comporte un cycle de longueur paire ou deux cycles de même longueur (éventuellement égale à 1) ;
*deux classes sinon<ref>{{Ouvrage|lang=en|auteur=W. R. Scott|titre=Group Theory|éditeur=[[Dover Publications|Dover]]|date=1987|url={{Google Livres|fAPLAgAAQBAJ|page=299}}|page=299}}, l'énonce différemment : la classe de conjugaison dans ''S{{ind|n}}'' d'une permutation ''f'' est aussi sa classe de conjugaison dans ''A{{ind|n}}'' si ''f'' est paire et ''f''(2''i'') > 0 ou ''f''(2''i'' + 1) > 1 pour un certain ''i'' ; sinon, elle est la réunion de deux classes de conjugaison dans ''A{{ind|n}}'' de même taille.</ref>.}}

{{Démonstration|contenu=
* '''Une classe de conjugaison dans ''A<sub>n</sub>'' est constituée d'éléments ayant la même structure. Les permutations ayant cette structure constituent une classe si la structure comporte un cycle de longueur paire ou deux cycles de même longueur (éventuellement égale à 1), deux classes sinon :'''<br />Établir la nature des classes de conjugaison de <math>A_n</math> est simplifié par le travail équivalent pour le groupe symétrique : on sait déjà que deux permutations sont conjuguées par un élément de <math>S_n</math> si et seulement si elles ont même structure.<br />Soit <math>\sigma=c_1</math>…<math>c_m</math> une permutation paire décomposée en produit de cycles disjoints. D'après la [[Action par conjugaison#Propriétés|formule des classes]], le nombre de ses conjugués (pairs aussi) dans <math>S_n</math> est égal à l'[[Indice d'un sous-groupe|indice]], dans <math>S_n</math>, de son [[centralisateur]] <math>S_\sigma</math> dans ce groupe, et le nombre de ses conjugués dans <math>A_n</math> est égal à l'indice, dans <math>A_n</math>, de son centralisateur <math>A_\sigma=S_\sigma\cap A_n</math> dans ce groupe.
**Commençons par établir le cas où la classe de conjugaison de <math>\sigma</math> dans <math>A_n</math> est la même que dans <math>S_n</math> :
***Si l'un des <math>c_i</math> est d'ordre pair, alors <math>S_\sigma</math> contient une permutation impaire (ce cycle), si bien que <math>A_\sigma</math> est d'indice 2 dans <math>S_\sigma</math>, de même que <math>A_n</math> est d'indice 2 dans <math>S_n</math>. On en déduit que <math>[A_n:A_\sigma]=[S_n:S_\sigma]</math>, c'est-à-dire que <math>\sigma</math> n'a pas plus de conjugués dans <math>S_n</math> que dans <math>A_n</math>.
***Si deux des <math>c_i</math> sont de même ordre <math>k</math> impair, soient ('''a<sub>1</sub>a<sub>2</sub>…a<sub>k</sub>''') et ('''b<sub>1</sub>b<sub>2</sub>…b<sub>k</sub>''') ces deux cycles, alors le produit des ''k'' transpositions ('''a<sub>1</sub>b<sub>1</sub>''')('''a<sub>2</sub>b<sub>2</sub>''')…('''a<sub>k</sub>b<sub>k</sub>''') est une permutation impaire qui appartient à <math>S_\sigma</math>, et on conclut comme précédemment. 
**Établissons le cas où la classe de conjugaison de <math>\sigma</math> dans <math>S_n</math> est divisée en deux :<br />Si les longueurs des <math>c_i</math> (de somme <math>n</math>) sont distinctes, alors (d'après l'étude des classes de conjugaison dans <math>S_n</math>) <math>S_\sigma</math> est simplement le sous-groupe engendré par <math>c_1,</math>…<math>,c_m</math>. Si de plus toutes ces longueurs sont impaires, alors les <math>c_i</math> appartiennent à <math>A_n</math>. Ainsi, <math>S_\sigma</math> est inclus dans <math>A_n</math> donc <math>A_\sigma=S_\sigma</math>, si bien que <math>[S_n:S_\sigma]=[S_n:A_\sigma]=[S_n:A_n][A_n:A_\sigma]=2[A_n:A_\sigma]</math>, c'est-à-dire que le nombre de conjugués de <math>\sigma</math> dans <math>S_n</math> est le double de celui de ses conjugués dans <math>A_n</math>.
}}

=== Exemples ===
La seule classe de conjugaison de ''S''<sub>4</sub> qui se trouve ''divisée'' en deux dans ''A''<sub>4</sub> est celle des cycles d'ordre 3. Un tel élément est en effet composé de deux cycles de longueurs impaires et différentes : 1 et 3. Les cycles d'ordre 1 sont en effet comptés. La classe de l'élément neutre ne contient qu'un élément et n'est jamais divisée. Celle des permutations composées de deux transpositions à supports disjoints n'est pas divisée en deux, car une telle permutation contient des cycles de longueurs paires ou encore car elle contient deux cycles de même longueur. On obtient 4 classes de conjugaison : l'identité, les produits de deux cycles disjoints d'ordre 2 et deux classes de cycles d'ordre 3 :
<center><math>C_I=\{I\},\quad C_{2,2}=\{(12)(34),~(13)(24),~(14)(23)\},</math></center>
<center><math>C_{3a}=\{(123),~(142),~(134),~(243)\}\quad\text{et}\quad C_{3b}=\{(132),~(124),~(143),~(234)\}.</math></center>
Dans le cas de ''A''<sub>5</sub>, il est plus long d'écrire toutes les classes en extension, on trouve en effet 60 éléments. Il existe 5 classes de conjugaison. Une contient l'identité, une autre 15 permutations formées de deux transpositions à supports disjoints. Cette classe n'est pas divisée car elle contient un cycle de longueur paire. Les 20 cycles d'ordre 3 ne forment plus qu'une classe de conjugaison car chacun est maintenant complété par deux cycles de même longueur (d'ordre 1). Enfin, les cycles d'ordre 5 sont divisés en 2 classes de conjugaisons contenant 12 permutations chacune<ref>{{Lien web|prénom1=R.|nom1=Bédard|titre=Représentation des groupes|site=UQAM|année=2008|passage=76|lire en ligne=https://docplayer.fr/166310915-Mat-7400-representation-des-groupes-robert-bedard-uqam.html}}.</ref>.

== Groupe simple ==
{{Article détaillé|Groupe simple}}

=== Simplicité et groupe alterné ===
Une propriété éventuelle et importante d'un groupe est d'être simple, ce qui signifie qu'il ne contient pas de [[sous-groupe normal]] [[Sous-groupe#Sous-groupe propre|propre]].

* ''Si n est un entier supérieur ou égal à'' 5, ''le groupe alterné de degré n est simple.''
Les groupes alternés forment une deuxième série infinie de groupes simples, après ceux, [[groupe abélien|abéliens]] et d'ordre un nombre premier. Cette série contient le plus petit groupe simple non commutatif :
* ''Le groupe alterné de degré'' 5 ''est le plus petit groupe simple non abélien et tout groupe simple d'ordre'' 60 ''est isomorphe à A''<sub>5</sub><ref name=Hindry>M. Hindry, ''[http://people.math.jussieu.fr/~hindry/Cours-alg.pdf Cours d'algèbre au magistère de Cachan]'', Université Paris 7, {{p.|22}}.</ref>{{,}}<ref>{{en}} J. S. Rose, ''A Course on Group Theory'', Cambridge 1978, réimpr. Dover, 1994, théor. 5.30, {{p.|106}}. Soit G un groupe simple d'ordre 60. L'essentiel de la démonstration consiste à montrer, en considérant l'opération de G sur ses 2-sous-groupes de Sylow, que G est isomorphe à un sous-groupe de ''S''{{sub|5}}.</ref>.

Si ''n'' ≥ 5, le groupe ''A{{ind|n}}'' est simple et non abélien, donc non [[Groupe trivial|trivial]] et [[Groupe parfait|parfait]] (c'est-à-dire égal à son sous-[[groupe dérivé]]), donc non [[Groupe résoluble|résoluble]]. Puisqu'il est égal au sous-groupe dérivé du groupe ''S{{ind|n}}'', ce dernier n'est pas résoluble non plus. Cette propriété intervient par exemple dans la [[théorème d'Abel (algèbre)|résolution d'une équation algébrique par radicaux]]. On peut la préciser ainsi :

* ''Si n est un entier supérieur ou égal à'' 5, ''le seul sous-groupe normal propre de S<sub>n</sub> est A<sub>n</sub>, donc S<sub>n</sub> n'est pas résoluble.''

{{Démonstration|titre=Démonstrations|contenu=
*'''Si n est un entier supérieur ou égal à 5, le groupe alterné de degré n est simple :'''
La méthode proposée ici est peu technique. Il en existe d'autres<ref name=Hindry/>.

Soient ''H'' un sous-groupe normal du groupe alterné ''A<sub>n</sub>'', et contenant un élément {{math|''σ''}} distinct du neutre. Il existe donc {{math|''a''}} tel que <math>b:=\sigma(a)\ne a</math>. Soient ensuite <math>c\notin\{a,b,\sigma(b),\sigma^{-1}(a)\}</math> et <math>\tau=(abc)</math>. Alors la composée <math>\tau(\sigma(c)\sigma(b)b)=\tau(\sigma(c)\sigma(b)\sigma(a))=\tau(\sigma\tau^{-1}\sigma^{-1})=(\tau\sigma\tau^{-1})\sigma^{-1}</math> appartient à ''H'' et est de l'une des formes suivantes (avec {{math|''a'', ''b'', …}} distincts) :
#<math>(abc)(cab)=(acb)</math> ;
#<math>(abc)(cdb)=(ab)(cd)</math>, auquel cas ''H'' contient aussi (par [[#Structure|conjugaison dans ''A<sub>n</sub>'' pour ''n'' ≥ 5]]) une permutation de la forme {{math|(''cd'')(''be'')}} et donc également la composée {{math|1=(''ab'')(''cd'')(''cd'')(''be'') = (''ab'')(''be'') = (''abe'')}} ;
#<math>(abc)(dab)=(ac)(bd)</math>, cas analogue au précédent ;
#<math>(abc)(deb)=(abdec)</math>, auquel cas ''H'' contient aussi la conjuguée {{math|1=(''eba'')(''abdec'')(''abe'') = (''adbce'')}} donc également la composée {{math|1=(''abdec'')(''adbce'') = (''eba'')}}.
En conclusion : dans tous les cas, ''H'' contient un 3-cycle, donc (par conjugaison dans ''A<sub>n</sub>'' pour ''n'' ≥ 5) il les contient tous, si bien que ''H = A<sub>n</sub>''.

(Remarque : même si ''n'' n'est pas supposé au moins égal à 5, il est encore vrai que le seul sous-groupe distingué de ''A<sub>n</sub>'' qui comprenne un cycle d'ordre 3 est ''A<sub>n</sub>'' lui-même. En effet, on prouve facilement que si γ<sub>1</sub> et γ<sub>2</sub> sont des cycles d'ordre 3 dans ''A<sub>n</sub>'', un au moins des deux cycles γ<sub>2</sub> et γ<sub>2</sub>{{-1}} est conjugué de γ<sub>1</sub> dans ''A<sub>n</sub>'' et non seulement dans ''S<sub>n</sub>''.)

* '''Le groupe alterné de degré 5 est le plus petit groupe simple non abélien :'''
Dans un premier temps, utilisons [[Théorème de Burnside (groupe résoluble)|un théorème de Burnside]] stipulant qu'un groupe simple non abélien possède un ordre dont la décomposition en facteurs premiers contient au minimum 3 nombres premiers. Les seuls entiers inférieurs à 60  vérifiant cette propriété sont 30 et 42.

Un groupe de 30 éléments n'est jamais simple ; les [[théorèmes de Sylow]] permettent de le démontrer. Ils assurent en effet que le nombre de sous-groupes d'ordre 5 d'un tel groupe est un diviseur de 6 et est congru à 1 modulo 5 (donc est égal à 1 ou 6) et que le nombre de sous-groupe d'ordre 3 est un diviseur de 10 et est congru à 1 modulo 3 (donc est égal à 1 ou 10). S'il y a 6 sous-groupes d'ordre 5 alors, comme ces sous-groupes ont pour intersection deux à deux l'élément neutre (car tout élément non neutre d'un groupe d'ordre premier engendre l'intégralité du groupe), le groupe entier contient 24 éléments d'ordre 5. De même, s'il existe 10 sous-groupes d'ordre 3 alors le groupe contient 20 éléments d'ordre 3. Mais ces deux éventualités ne peuvent être simultanées (24 + 20 > 30). Il existe donc un unique sous-groupe d'ordre 5 ou un unique sous-groupe d'ordre 3. L'unicité assure qu'un tel sous-groupe est normal.

* '''Si ''n'' est un entier supérieur ou égal à 5, le seul sous-groupe normal propre de ''S<sub>n</sub>'' est ''A<sub>n</sub>'' donc ''S<sub>n</sub>'' n'est pas résoluble :'''
Soit ''H'' un sous-groupe normal de ''S<sub>n</sub>''. L'intersection de ''H'' et du groupe alterné ''A<sub>n</sub>'' est un sous-groupe normal du groupe simple ''A<sub>n</sub>'' ; c'est donc soit le groupe alterné, soit le groupe trivial.

Si ''H'' contient le groupe alterné, alors son [[Indice d'un sous-groupe|indice]] dans ''S<sub>n</sub>'' est un diviseur de 2 (l'indice du groupe alterné). ''H'' est donc soit le groupe alterné, soit le groupe symétrique.

Si ''H'' ne contient pas le groupe alterné alors il est réduit au neutre. En effet, pour tout élément {{math|''σ''}} de ''H'' et toute permutation {{math|''τ''}}, la permutation {{math|(''τστ''{{-1}})''σ''{{-1}}}} est un élément pair de ''H'' donc est égale au neutre, autrement dit : tout élément {{math|''σ''}} de ''H'' est [[Centre d'un groupe|central]] dans ''S<sub>n</sub>'', donc neutre.

Le seul sous-groupe normal propre de ''S<sub>n</sub>'' est donc ''A<sub>n</sub>''. Ce sous-groupe est simple et non abélien ; en conséquence, ''S<sub>n</sub>'' n'est pas résoluble.
}}

=== Conséquence ===
{{Article détaillé|Théorème d'Abel (algèbre)|Groupe de Galois}}
Si le [[groupe de Galois]] d'un [[polynôme irréductible]] sur un [[corps parfait]] comme ℚ, celui des nombres rationnels, n'est pas [[groupe résoluble|résoluble]], alors 
les racines du polynômes ne s'expriment pas à l'aide de radicaux. Tel est le contenu de la version formulée par [[Évariste Galois]] et en langage moderne, du théorème d'Abel. Les exemples les plus simples ({{cf.}} articles détaillés) s'obtiennent à l'aide d'une équation de degré ''n'' ≥ 5 dont le groupe de Galois est le groupe symétrique ''S{{ind|n}}'', qui n'est pas résoluble d'après les résultats précédents. Le théorème d'Abel montre que l'équation ''P''(X) = 0 n'est alors pas résoluble par radicaux dans ℚ.

''Remarque.'' Les groupes simples non abéliens qui interviennent dans les groupes de Galois ne sont pas nécessairement des groupes alternés. En revanche, si un polynôme de degré 5 n'est pas résoluble, cela signifie nécessairement que le groupe de Galois contient comme sous-groupe distingué le groupe alterné de degré 5.

== Représentation ==

=== Caractère ===
{{Article détaillé|Caractère d'une représentation d'un groupe fini|Fonction centrale sur un groupe fini#Fonctions centrales et caractères{{!}}Fonctions centrales et caractères}}
Une manière d'étudier un groupe fini ''G'' est de le représenter à l'aide d'un sous-groupe d'un [[Groupe général linéaire|groupe linéaire]].

Soit ρ une [[représentations d'un groupe fini|représentation de ''G'']], sur un [[espace vectoriel]] [[Nombre complexe|complexe]] ''V'' dont la [[Dimension d'un espace vectoriel|dimension]] — appelée le degré de ρ — est finie. Le caractère de ρ est l'application χ qui à un élément ''s'' du groupe associe la [[trace (algèbre)|trace]] de l'[[Isomorphisme d'espaces vectoriels|automorphisme]] ρ(''s'') de ''V''. La valeur de χ(''s'') ne dépend pas du choix de ''s'' dans sa classe de conjugaison. Le caractère est dit irréductible si la représentation est [[Représentation irréductible|irréductible]], c'est-à-dire si ''V'' est non [[Espace nul|nul]] et ne possède pas d'autre [[sous-espace stable]] par tous les ρ(''s'') que l'espace entier et l'espace nul.

*Le nombre des caractères irréductibles χ{{ind|''i''}} de ''G'' est égal au nombre ''h'' de classes de conjugaison.
*Soient {{math|{{!}}''G''{{!}}}} l'ordre du groupe, {{math|''s''}} et {{math|''t''}} deux éléments de {{math|''G''}} non conjugués, et {{math|''n''(''s'')}} le nombre de conjugués de {{math|''s''}}. Alors (« relations d'orthogonalité sur les colonnes » de la [[table des caractères]]) :<center><math>\sum_{i=1}^h\chi_i(s)\overline{\chi_i(t)}=0\quad{\rm et}\quad\sum_{i=1}^h|\chi_i(s)|^2=\frac{|G|}{n(s)}~;</math></center>
*en particulier (pour {{math|''s''}} égal au [[élément neutre|neutre]]) les degrés ''d{{ind|i}}'' des représentations associées aux χ{{ind|''i''}} vérifient :<center><math>\sum_{i=1}^hd_i^2=|G|.</math></center>
*Un caractère χ est irréductible si et seulement s'il est « de norme 1 », ce qui se traduit par :
<center><math>\sum_{g\in G}|\chi(g)|^2=|G|.</math></center>

=== Groupe alterné de degré 4 ===
Il y a [[#Classes de conjugaison|4 classes de conjugaison]] (12 = 1 + 3 + 4 + 4) donc 4 caractères irréductibles.

Le premier est donné par la représentation triviale, de degré 1, qui à chaque élément de ''A''<sub>4</sub> associe l'automorphisme identité. Son caractère ''t'' associe 1 à chaque élément du groupe ''A''<sub>4</sub>.

Il existe deux autres représentations de degré 1 du [[#Exemples|groupe quotient ''A''<sub>4</sub>/''K'']] : elles associent à un générateur (d'ordre 3) de ce groupe, respectivement, les [[Racine de l'unité#Exemples|racines cubiques de l'unité]] {{math|j}} et {{math|j}}{{2}}.

On obtient une quatrième représentation par restriction à ''A''{{ind|4}} de la [[Représentations du groupe symétrique#La représentation standard φ1|représentation standard φ{{ind|1}}]] (de degré 3) de ''S''{{ind|4}}. [[Représentations du groupe symétrique#Calcul de la table|Son caractère φ]] est défini par φ(1) = 3, φ(''ab'')(''cd'') = –1 et φ(''abc'') = φ(''acb'') = 0. Ce caractère est de norme 1 donc irréductible.

On en déduit la table des caractères<ref>{{harvsp|Bédard|2008|p=29}}.</ref> :

{|class="wikitable centre" style="text-align: center;"
|-
!scope="row"|Car. irr.||1||(ab)(cd)||(abc)||(acb)
|-
!scope="row"|t
|1||1||1||1
|-
!scope="row"|σ{{ind|1}}
|1||1||{{math|j}}||{{math|j}}{{2}}
|-
!scope="row"|σ{{ind|2}}
|1||1||{{math|j}}{{2}}||{{math|j}}
|-
!scope="row"|φ
|3||–1||0||0
|}

La représentation de degré 3 est utilisée dans le paragraphe « [[#Groupe des rotations du tétraèdre|Groupe des rotations du tétraèdre]] ».

=== Groupe alterné de degré 5 ===
On peut déterminer les caractères de ''A''{{ind|5}} par une approche générique assez lourde<ref name="Bédard p. 78">{{harvsp|Bédard|2008|p=78}}.</ref>, ou par les calculs élémentaires suivants. Il y a [[#Classes de conjugaison|5 classes de conjugaison]] (60 = 1 + 15 + 20 + 12 + 12) donc 5 caractères irréductibles, tous réels<ref>Un groupe est dit [[Groupe ambivalent|ambivalent]] lorsque tous ses caractères complexes sont réels, ce qui équivaut à : tout élément est conjugué de son symétrique. Les seuls entiers ''n'' ≥ 2 pour lesquels ''A{{ind|n}}'' est ambivalent sont 2, 5, 6, 10 et 14 : {{Lien web|lang=en|url=http://groupprops.subwiki.org/wiki/Ambivalent_group|titre=Ambivalent group|site=groupprops.subwiki.org}}.</ref>. Leur table est :
{|class="wikitable centre" style="text-align: center;"
|-
!scope="row"|Car. irr.||1||(ab)(cd)||(abc)||(abcde)||(acebd)
|-
!scope="row"|t
|1||1||1||1||1
|-
!scope="row"|σ{{ind|1}}
|3||–1||0||(1 + {{sqrt|5}})/2||(1 – {{sqrt|5}})/2
|-
!scope="row"|σ{{ind|2}}
|3||–1||0||(1 – {{sqrt|5}})/2||(1 + {{sqrt|5}})/2
|-
!scope="row"|φ
|4||0||1||–1||–1
|-
!scope="row"|ψ
|5||1||–1||0||0
|}

{{Démonstration/début|titre=Démonstration<ref>Résumée comme un exercice élémentaire en introduction de {{Chapitre|lang=en|auteur=[[Robert Arnott Wilson|Robert A. Wilson]]|titre=Construction of finite matrix groups|auteurs ouvrage=P. Dräxler, C. M. Ringel et G. O. Michler|titre ouvrage=Computational Methods for Representations of Groups and Algebras|éditeur=[[Birkhäuser]]|année=1999|page=61-83|url={{Google Livres|aOAFCAAAQBAJ|page=61}}|doi=10.1007/978-3-0348-8716-8_3}}, et détaillée dans {{Lien web|lang=en|auteur=Maria Wesslén|url=http://www.math.toronto.edu/murnaghan/courses/mat445/mwesslen.pdf|titre=The Irreducible Representations of ''A''{{ind|5}}|sous-titre=Assignment for MAT1196 Representation Theory Submitted to Fiona Murnaghan|année=2005|site=[[Université de Toronto]]|page=18-19}} et {{Ouvrage|langue=en|auteur1=Steven H. Weintraub|titre=Representation Theory of Finite Groups|sous-titre=Algebra and Arithmetic|éditeur=[[American Mathematical Society|AMS]]|année=2003|passage=76-79|lire en ligne={{Google Livres|cx4PCgAAQBAJ|page=76}}}}.</ref>}}
Outre la représentation triviale ''t'', on dispose, par restriction de la représentation standard φ{{ind|1}} (de degré 4) de ''S''{{ind|5}}, d'un [[Représentations du groupe symétrique#Les sept caractères irréductibles de S5|caractère φ = (4, 0, 1, –1, –1)]], de norme 1 donc irréductible. De même, par restriction de la [[Représentations du groupe symétrique#Les sept caractères irréductibles de S5|représentation ψ{{ind|1}} de ''S''{{ind|5}}]] (de degré 5), on trouve le caractère irréductible ψ = (5, 1, –1, 0, 0).

Les degrés des deux représentations manquantes sont 3 et 3, car 3{{2}} + 3{{2}} est la seule décomposition de 60 – 1{{2}} – 4{{2}} – 5{{2}} = 18 en somme de deux carrés.

On complète facilement la table grâce aux [[#Caractère|relations d'orthogonalité sur les colonnes]].
{{Démonstration/fin}}

De plus, leur {{Lien|trad=Frobenius–Schur indicator|indicateur de Frobenius-Schur}} est égal à 1 donc ils proviennent de {{Lien|trad=Real representation|Représentation réelle|texte=représentations réelles}}. Cette remarque s'applique en particulier aux représentations de degré 3. Le paragraphe « [[#Groupe des rotations du dodécaèdre|Groupe des rotations du dodécaèdre]] » montre qu'une telle représentation correspond au [[groupe de symétrie|groupe des rotations]] d'un [[solide de Platon]].

== Groupe des rotations d'un polyèdre régulier ==
=== Représentation et géométrie ===
Les groupes ''A''{{ind|4}} et ''A''{{ind|5}} admettent des représentations réelles irréductibles de degré 3. Chacune est même, pour [[Théorie des représentations d'un groupe fini#Produit hermitien|un produit scalaire ''adhoc'']] sur ℝ{{3}}, une représentation par [[Automorphisme orthogonal|isométries]]. 

Ces isométries sont toutes des [[Rotation vectorielle|rotations]] car leur [[Déterminant (mathématiques)#Déterminant d'un endomorphisme|déterminant]] est égal à 1 : pour ''n'' égal à 4, on le constate sur la description explicite ci-dessous ; pour ''n'' égal à 5, cela résulte du fait que ''A''{{ind|5}} est un groupe simple non abélien.

Les représentations de degré 3, pour ''n'' égal à 4 ou 5, sont fidèles, c'est-à-dire [[Morphisme de groupes#Noyau et image|injectives]] : à nouveau, on le déduit pour ''n'' = 4 de la description explicite et pour ''n'' = 5, du fait que ''A''{{ind|5}} est simple.

Pour ''n'' égal à 4 ou 5, le groupe ''A{{ind|n}}'' est donc isomorphe à un sous-groupe ''G'' du [[SO(3)|groupe des rotations de ℝ{{3}}]]. On identifiera chaque [[application linéaire]] à l'[[application affine]] associée qui [[Point fixe|fixe]] un point origine ''O''. Montrons que ''G'' est le groupe des rotations d'un [[polyèdre]] [[polyèdre régulier|régulier]].

=== Groupe des rotations du tétraèdre ===
[[File:A 4 TetraederDrehgruppe.PNG|thumb|Le tétraèdre régulier a deux rotations d'ordre 3 par sommet ''i'' (d{{ind|''i''}} et d{{ind|''i''}}{{-1}}) et un demi-tour (c) par [[paire]] d'arêtes opposées.]]

La représentation de degré 3 de ''A''{{ind|4}} a été obtenue par restriction de la [[Représentations du groupe symétrique#Représentation φ1|représentation standard de ''S''{{ind|4}}]].

Le groupe ''G'', constitué de 12 rotations, est engendré par deux d'entre elles, ''r''{{ind|1}} et ''r''{{ind|2}}, tiers de tour ayant les matrices suivantes dans une [[base orthonormale]] :

<center><math>R_1= \begin{pmatrix} 0 & 0 & -1 \\ 1  & 0 & 0 \\ 0 & -1 & 0 \end{pmatrix} \quad\text{et}\quad
              R_2= \begin{pmatrix} 0 & 1 & 0  \\ 0  & 0 & 1 \\ 1 &  0 & 0 \end{pmatrix}</math></center>

Soient ''s'' un point de l'axe de ''r''{{ind|2}}, distinct de ''O'', et ''S'' son [[Action de groupe (mathématiques)|orbite]], c'est-à-dire l'ensemble des points ''g''(''s'') quand ''g'' parcourt le groupe ''G''. Par construction, cette orbite ''S'' est (globalement) stable par l'action de ''G''. Elle forme les sommets d'un polyèdre (son [[enveloppe convexe]]), qui est par conséquent, lui aussi, stable par ''G''.

{{énoncé|Ce polyèdre est un [[tétraèdre]] régulier et son groupe des rotations est ''G''.}}

{{Démonstration/début}}
* '''Ce polyèdre a 4 sommets :''' choisissons par exemple ''s'' = (–1, –1, –1) et notons ''t'' = (1, –1, 1), ''u'' = (–1, 1, 1) et ''v'' = (1, 1, –1). Alors, ''r''{{ind|1}} fixe ''v'' et permute circulairement (''s'', ''t'', ''u''), tandis que ''r''{{ind|2}} fixe ''s'' et permute circulairement {{nobr|(''t'', ''u'', ''v'').}}
* '''Ce tétraèdre est régulier :''' d'après ce qui précède, les deux faces (''stu'') et (''tuv'') sont des [[triangle équilatéral|triangles équilatéraux]], [[Triangles isométriques|isométriques]] car de côté commun (''tu''). L'arête restante (''vs'') est l'image de (''vu'') par ''r''{{ind|1}}, donc a même longueur.
* '''Son groupe des rotations est ''G'' :''' il contient ''G'' ; montrons qu'il lui est égal, c'est-à-dire que le tétraèdre n'a que 12 rotations. Une rotation du tétraèdre est entièrement déterminée par l'image (''ab'') de l'arête (''st''). Il y a 4 choix possibles pour ''a'' (parmi les 4 sommets), puis 3 pour ''b'' (parmi les 3 sommets différents de ''a'').
{{Démonstration/fin}}

=== Groupe des rotations du dodécaèdre ===
[[File:Dualicosaedre.png|thumb|left|Le dual de l'[[icosaèdre]] (rouge) est le dodécaèdre (bleu).]]
[[File:Cube in dodecahedron.png|thumb|L'un des {{Lien|trad=Compound of five cubes|Composé de cinq cubes|texte=cinq cubes}} dont les sommets sont parmi ceux du [[dodécaèdre régulier]].]]

Le groupe ''A''{{ind|5}} est aussi isomorphe à un groupe ''G'' de rotations de ℝ{{3}}.

Dans la boîte déroulante ci-dessous, on montre — par un raisonnement analogue à celui du paragraphe précédent — que ''G'' est égal au groupe des rotations d'un [[icosaèdre]] régulier ''I'', ou, ce qui est équivalent, au groupe des rotations de son [[polyèdre dual]] (le polyèdre dont les sommets sont les centres des faces de ''I'', cf. figure de gauche), qui est un [[dodécaèdre régulier]] ''D''. Il existe ainsi deux polyèdres réguliers ayant un groupe de rotations isomorphe à ''A''{{ind|5}} (ce phénomène n'apparaissait pas pour ''A''{{Ind|4}}, parce que le tétraèdre est son propre dual).

Pour démontrer que ''A''{{ind|5}} est isomorphe au groupe ''H'' des rotations du dodécaèdre ''D'', une méthode plus directe — sans passer par ''G'', mais en supposant connue la géométrie de ''D'' — est de remarquer qu'il existe 5 cubes dont les sommets sont parmi ceux de ''D'' (cf. figure de droite). Le groupe ''H'' [[Action de groupe (mathématiques)#Action fidèle|opère fidèlement]] sur l'ensemble de ces 5 cubes. Il est donc isomorphe à un sous-groupe de ''S''{{ind|5}}. On sait par ailleurs que ''H'' est d'ordre 60 (cf. « [[Icosaèdre#Symétrie|Groupe de rotations de l'icosaèdre]] »). Dans ''S''{{ind|5}}, le seul sous-groupe à 60 éléments ([[Sous-groupe normal#Exemples|donc normal]]) est ''A''{{ind|5}}, ce qui montre l'isomorphisme recherché<ref name="Bédard p. 78"/>.

{{Démonstration/début|titre=Construction de l'icosaèdre et du dodécaèdre}}
Pour l'icosaèdre, on commence comme [[#Groupe des rotations du tétraèdre|pour le tétraèdre]] : soient φ une rotation de ''G'' d'ordre 5, ''s'' un point de son axe, distinct de ''O'', ''S'' l'orbite de ''s'' sous l'action de ''G'', et ''I'' l'enveloppe convexe de ''S'' (stable par ''G''). Le stabilisateur de ''s'' est réduit aux 5 puissances de φ — car la représentation est fidèle or dans ''A''{{ind|5}}, le [[centralisateur]] d'un élément d'ordre 5 est le [[sous-groupe engendré]] par cet élément — donc ''S'' contient 12 points.

Ces 12 sommets de ''I'', situés sur la sphère de centre ''O'' et passant par ''s'', sont permutés par φ, donc se répartissent en : le point ''s'', le point diamétralement opposé, et (les sommets de) deux [[Pentagone régulier convexe|pentagones réguliers]], dans deux plans [[perpendiculaire]]s à l'axe de φ. Puisque ''I'' possède des rotations d'ordre 3, ces deux plans sont distincts, donc les faces contenant ''s'' sont 5 [[Triangle isocèle|triangles isocèles]] (reliant ''s'' à celui des deux pentagones qui est le plus proche).

Puisque l'action de ''G'' sur ''S'' est [[Action transitive|transitive]], le [[Action de groupe (mathématiques)#Stabilisateur d'un élément|stabilisateur de n'importe quel sommet]] ''t'' est, comme celui de ''s'', engendré par une rotation d'ordre 5, donc la répartition des 12 sommets par rapport à ''t'' est analogue. On en déduit, de proche en proche, que toutes les arêtes ont même longueur (donc les faces sont en fait équilatérales).

Le polyèdre ''I'' est donc un icosaèdre régulier. Puisque [[Icosaèdre#Symétrie|son groupe des rotations]] est d'ordre 60 et contient ''G'', il est égal à ''G''.

Son [[polyèdre dual]] ''D'' est régulier et a même groupe de rotations. Puisque ''I'' a 12 sommets, 30 arêtes et 20 faces, ''D'' a 20 sommets, 30 arêtes et 12 faces : c'est un dodécaèdre.
{{Démonstration/fin}}

== Notes et références ==
{{références|colonnes=2}}

== Voir aussi ==
{{Autres projets|v=Théorie des groupes/Groupes alternés}}
=== Bibliographie ===
* {{Perrin1}}
* {{Serre2}}
* {{en}} {{Lien|Magnus Wenninger|texte=M. J. Wenninger}}, ''Dual Models'', [[Cambridge University Press|CUP]], 2003 ({{1e}} éd. 1983) {{ISBN|978-0-521-54325-5}}
=== Articles connexes ===
*[[Groupe simple d'ordre 360]]
*[[Groupe presque simple]]

{{Portail|algèbre}}

[[Catégorie:Groupe fini|Alterne]]
[[Catégorie:Permutation]]