Voir la source de Logique paracohérente

En [[logique mathématique]], une '''logique paracohérente''' (aussi appelé '''logique paraconsistante''') est un [[système logique]] qui tolère les [[contradiction]]s, contrairement au système de la [[logique classique]]. Les logiques tolérantes aux incohérences sont étudiées depuis au moins [[1910]], avec des esquisses remontant sans doute au temps d'[[Aristote]]<ref>[[Aristote]], Métaphysique Γ, 4.</ref>. Le terme ''paracohérent'' - (''[[Racine grecque#P|à côté]] du cohérent'', {{Langue|en|paraconsistent}} en anglais) - n'a été employé qu'après [[1976]] par le [[philosophe]] [[Pérou|péruvien]] {{Lien|langue=en|fr=Francisco Miró Quesada Cantuarias}}<ref>{{harvsp|Priest|2002|p=288, §3.3.}}</ref>.

== Définition ==
{{article connexe|Principe d'explosion}}
Les logiques paracohérentes se distinguent des logiques classiques par leur approche de la propriété de [[cohérence (logique)|cohérence logique]]. En [[logique classique]] (mais aussi en [[logique intuitionniste]] et dans la plupart des autres logiques), la [[contradiction]] permet de [[déduction logique|déduire]] n'importe quelle autre formule de la logique. C'est le [[principe d'explosion]] ou {{Latin|ex contradictione sequitur quodlibet}} ([[Latin]], « d'une contradiction se déduit n'importe quoi »)<ref>{{lien conférence |langue=en|auteur1=W. Carnielli |auteur2=J. Marcos |date=juillet 2000  |citeseerx=10.1.1.107.70 |titre=Ex contradictione non sequitur quodlibet |titre livre= Proceedings of the II Annual Conference on Reasoning and Logic, held in Bucharest, RO, July 2000 |année édition=2001}}</ref>.
Brièvement, le principe d'explosion est un schéma de raisonnement qui montre qu'en partant d'une contradiction logique, c'est-à-dire d'une formule de la forme ''P et non P'', par exemple « tous les chats sont gris et tous les chats ne sont pas gris », en appliquant les [[règle d'inférence|règles d'inférences]] classiques on peut déduire n'importe quelle formule de la logique, par exemple « je suis une pomme ».

Quelle que soit la proposition ''A'', et si la proposition ''P'' et sa négation ¬''P'' sont supposées vraies toutes les deux, alors la proposition ''P ou A'' est vraie (d'après la définition de la [[disjonction logique|disjonction]]), or sachant que ''P'' n'est pas vraie, il est nécessaire que ''A'' soit vraie (en utilisant l'argument du [[syllogisme disjonctif]]).

Ainsi, par le principe d'explosion, dès qu'une [[théorie]] comporte une [[cohérence (logique)|incohérence]], toute formule de cette théorie en logique classique est [[logique triviale|trivialement]] un [[théorème]]. La propriété caractéristique d'une logique paracohérente est de ne pas permettre ce type de raisonnement. Les logiques paracohérentes peuvent donc permettre de travailler avec des théories incohérentes mais non triviales.

== Approche formelle ==
{{...}}

== Comparaison à la logique classique ==
Les logiques paracohérentes sont, du point de vue du [[calcul des propositions]] ''plus faibles'' que la [[logique classique]] ; il existe donc moins d'inférences et donc ''moins de théorèmes''. On le démontre en considérant qu'aucune extension de la logique classique (c'est-à-dire une logique qui démontre tous les théorèmes que la logique classique peut démontrer) n'est paracohérente. En ce sens, les logiques paracohérentes sont plus prudentes dans leurs inférences. En contrepartie les langages, au sens de [[Alfred Tarski]]<ref name="metalanguages">{{SEP|tarski-truth|Hodges, Wilfrid, Tarski's Truth Definitions}}</ref>, paracohérents peuvent être ''plus expressifs'', notamment en prenant en compte leur analogue classique dans la hiérarchie des [[métalangage]]s créée par [[Alfred Tarski]] et al. D'après [[Solomon Feferman]] [1984] : {{Citation étrangère|langue=en|…natural language abounds with directly or indirectly self-referential yet apparently harmless expressions—all of which are excluded from the Tarskian framework.}} ({{citation|les expressions directement ou indirectement auto-référentielles et apparemment inoffensives abondent dans le langage naturel — elles sont toutes exclues du cadre théorique de Tarski}}). Des limitations relatives à l'[[autoréférence]], notion importante en histoire des sciences car donnant naissance à de nombreux paradoxes, peuvent être contournées dans ce type de logique.

== Motivation ==
La motivation principale au développement et à l'étude des logiques paracohérentes est la conviction qu'il est possible de raisonner en présence d'information contradictoires de manière contrôlée et discriminatoire. Le principe d'explosion l'empêche, et doit donc dans cette optique être abandonné. Dans une logique paraconsistante, il n'y a qu'une seule théorie incohérente : la théorie triviale dans laquelle toutes les formules sont des théorèmes. Les logiques paracohérentes permettent de discriminer les théories comportant des contradictions et de raisonner avec elles.

Le développement des logiques paraconsistantes a été à l'origine de l'école philosophique du [[dialethéisme]] (dont l'avocat le plus fervent est [[Graham Priest]]), qui suppose que de vraies contradictions existent réellement, par exemple des groupes de personnes tenant des points de vue différents sur des questions morales<ref name="Fisher2007">{{Ouvrage|auteur1=Jennifer Fisher|titre=On the Philosophy of Logic|éditeur=Cengage Learning|année=2007|pages totales=240|passage=132–134|isbn=978-0-495-00888-0|lire en ligne=https://books.google.com/books?id=k8L_YW-lEEQC&pg=PT142}}</ref>. Un dialéthéiste rationnel implique l'acceptation d'une forme de logique paracohérente, sous peine de tomber dans le [[trivialisme]], c'est-à-dire d'accepter que toutes les contradictions, ou toutes les propositions sont vraies<ref name="GabbayWoods2007">{{Chapitre|auteurs ouvrage=Dov M. Gabbay et John Woods|titre ouvrage=The Many Valued and Nonmonotonic Turn in Logic|url=https://books.google.com/books?id=3TNj1ZkP3qEC&pg=PA131|année=2007|éditeur=Elsevier|isbn=978-0-444-51623-7|passage=131|auteur=Graham Priest|titre chapitre=Paraconsistency and Dialetheism}}</ref>. L'inverse n'est cependant pas forcément vrai, et il n'est pas nécessaire de s'engager soit pour l'existence de théories vraies ou de vraies contradictions pour accepter que l'étude des logiques paracohérentes n'implique pas l'acceptation du dialéthéisme. Par exemple avec une vision [[empirisme|empirique]] qui se bornerait à constater qu'empiriquement les logiques paracohérentes modélisent de manière adéquate certaines formes de raisonnement humain. C'est le cas de la notion d'[[adéquation empirique]] de [[Bas van Fraassen]]<ref name="Allhoff2010">{{Ouvrage|auteur1=Otávio Bueno|titre=Philosophies of the Sciences|sous-titre=A Guide|éditeur=Fritz Allhoff / John Wiley & Sons|année=2010|passage=55|isbn=978-1-4051-9995-7|lire en ligne=https://books.google.com/books?id=Vu6cVCLvPt0C&pg=PA55|titre chapitre=Philosophy of Logic}}</ref>. Par exemple leur capacité à accepter des phrases paradoxales des langues naturelles comme « je mens », le [[paradoxe du menteur]], sans problème peut être mise en parallèle avec la capacité à raisonner en langage naturel sans souci malgré la possibilité de ce type de paradoxe.

== Philosophie ==
En logique classique, la loi du tiers exclu, la loi de non contradiction et les trois lois d'Aristote ([[principe du tiers exclu|tiers exclu]] <math>(p \lor \lnot p)</math>, non contradiction <math>\lnot (p \land \lnot p)</math> et identité <math>(p \Leftrightarrow p)</math>) ne peuvent être dissociées, à cause de l'interdépendance des définitions des connecteurs. De plus, traditionnellement la présence de contradiction (dans la théorie ou dans la base de connaissance) et la [[logique triviale|trivialité]] (le fait que n'importe quelle formule soit une conséquence de la théorie) sont supposées inséparables, à partir du moment ou la négation est définie. Ces principes peuvent être philosophiquement remis en cause, précisément parce que la contradiction et d'autres formes éventuelles d'incohérences ne peuvent être différenciées.

De l'autre côté, il est possible de retrouver la trivialité en discriminant la cohérences et les contradictions si on définit ces notions de manière appropriées. Les notions elles-mêmes peuvent être reléguées dans le langage défini par la logique.

== Compromis ==
{{article connexe|principe d'explosion}}
La paracohérence implique un compromis sur possibilité d'inférences. En particulier, interdire le principe d'explosion nécessite d'abandonner au moins l'une des pourtant très naturelles lois :
{| class="wikitable" style="margin: auto;"
![[introduction de la disjonction]]
|<math>A \vdash A \lor B</math>
|-
![[syllogisme disjonctif]]
|<math>A \lor B, \neg A \vdash B</math>
|-
![[relation transitive|Transitivité]] de la [[déduction logique|déduction]] <br> ou « [[Règle de coupure]] »
|<math> \Gamma \vdash A; A \vdash B \Rightarrow \Gamma \vdash B</math>
|}

Bien que la remise en cause de chacun de ces principes ait été envisagée, la principale approche des paralogiciens est de rejeter le principe de syllogisme disjonctif. Pour un dialethéiste, il est parfaitement sensé que cette règle puisse faillir : l'idée qu'énonce cette règle est que si ''¬ A'' est vrai, alors ''A'' ne peut l'être. Donc ''A ∨ B'' ne peut être vrai que si ''B'' l'est également. Cependant s'il est possible qu'''A'' et ''¬ A'' soient vrais en même temps, ce raisonnement ne fonctionne pas.

Une autre approche est de ne pas inclure l'introduction de la disjonction, et de garder le syllogisme disjonctif et la transitivité. La disjonction <math>A \lor B</math> est définie comme <math>\lnot (\lnot A \land \lnot B)</math>. Toutes les règles de la déduction naturelle sont alors valides, sauf la preuve par l'absurde et l'introduction de la disjonction. De plus <math>A \vdash B</math> ne signifie pas forcément <math>\vdash A \Rightarrow B</math>, une autre différence avec la déduction naturelle<ref name="Hewitt 2008b">Hewitt (2008b)</ref>. La loi du tiers exclu est également conservée, ainsi que l'associativité, la commutativité, la distributivité, les [[lois de De Morgan]], et l'idempotence de la conjonction et la disjonction dans les expressions booléennes. En définissant l'implication <math>A \rightarrow B</math> comme <math> \lnot (A \land \lnot B)</math>, il y a un théorème de déduction, le {{Lien|langue=en|trad=deduction theorem#Paraconsistent deduction theorem|fr=théorème de la déduction paracohérent}}. {{Lien|langue=en|fr=Carl Hewitt}} est en faveur de cette approche, parce qu'avoir les propriétés booléennes usuelle, la déduction naturelle et le théorème de la déduction est très important dans des domaines d'application comme le [[génie logiciel]]<ref name="Hewitt 2008b"/>{{,}}<ref name="Hewitt 2008a">Hewitt (2008a)</ref>.

Une approche encore différente est de réunir les deux précédentes. Dans beaucoup de systèmes de [[logique pertinente]], de même qu'en [[logique linéaire]], il existe deux connecteurs différents pour la disjonction. L'un permet l'introduction de la disjonction, et l'autre le syllogisme disjonctif. Évidemment cette approche a des désavantages, comme la confusion entre les deux opérateurs et la complexité induite par le fait qu'on les relie l'un à l'autre.

Les trois principes ci-dessous, pris ensemble, ont pour conséquence le principe d'explosion, donc au moins l'un d'eux doit être abandonné :

{| class="wikitable" style="margin: auto;"
![[raisonnement par l'absurde|Reductio ad absurdum]]
|<math>A \to (B \wedge \neg B) \vdash \neg A</math>
|-
!{{Lien|langue=en|trad=Rule of weakening|fr=Règle d'affaiblissement}}
|<math>A \vdash B \to A</math>
|-
!{{Lien|langue=en|trad=Double negative elimination|fr=élimination de la double négation}}
|<math>\neg \neg A \vdash A</math>
|}

Les deux premières ont été envisagées, sans grand succès. La double négation est contestée, mais pour d'autres raisons. En l'enlevant et en conservant les deux autres, il reste parfois possible de démontrer toutes les propositions négatives à partir d'une contradiction.

== Exemple d'une logique paracohérente : la logique du paradoxe ==

Un des systèmes logiques paracohérent le plus connus est celui connu sous le signe LP (« Logique du Paradoxe » ; en anglais «{{langue|en|Logic of paradox}}»), proposée initialement par le logicien argentin {{Lien|langue=en|fr=F. G. Asenjo}} en 1966 et popularisé par Priest et al<ref>{{harvsp|Priest|2002|p=306}}.</ref>. LP n'est qu'une seule des nombreuses logiques paracohérentes proposées<ref>Une revue des approches possibles peut être lue dans {{harvsp|Bremer|2005}} et dans {{Harvsp|Priest|2002}}, une large famille de ces logiques est développé dans Carnielli, Congilio et Marcos (2007).</ref>. Elle est présentée ici à titre d'exemple et d'illustration sur le fonctionnement des logiques paracohérentes.

=== Valuation relationnelle ===
Une manière de présenter la sémantique de LP est de remplacer la valuation fonctionnelle de la logique classique par une valuation relationnelle<ref>On peut aussi représenter LP comme une logique trivaluée (''vrai'', ''faux'', et ''les deux'').</ref>. La relation binaire <math>V\,</math> fait correspondre une formule à une valeur de vérité : <math>V(A,1)\,</math> signifie que <math>A\,</math> est vraie, et <math>V(A,0)\,</math> signifie que <math>A\,</math> est fausse. Une formule doit être associée à ''au moins'' à une valeur de vérité (mais peut-être les deux valeurs 0 ou 1). Les clauses sémantiques de la négation et la disjonction sont alors définie comme :
* <math>V(\neg A,1)</math> si et seulement si <math>V(A,0)\,</math>
* <math>V(\neg A,0)</math> si seulement si <math>V(A,1)\,</math>
* <math>V(A \lor B,1)</math> si seulement si <math>V(A,1)\,</math> ou <math>V(B,1)\,</math>
* <math>V(A \lor B,0)</math> si seulement si <math>V(A,0)\,</math> et <math>V(B,0)\,</math>
* <math>V(A \land B,1)</math> si seulement si <math>V(A,1)\,</math> et <math>V(B,1)\,</math>
* <math>V(A \land B,0)</math> si seulement si <math>V(A,0)\,</math> ou <math>V(B,0)\,</math>

=== Sémantique ===
La relation de [[déduction logique|conséquence logique]] est alors définie comme préservation de la vérité :
: <math>\Gamma\vDash A</math> si et seulement si <math>A\,</math> est vraie quand chaque membre de <math>\Gamma\,</math> est vrai.

Regardons maintenant l'affectation <math>V\,</math> telle que <math>V(A,1)\,</math> et <math>V(A,0)\,</math> mais sans <math>V(B,1)\,</math>. Il est aisé de vérifier que cette affectation est un contre exemple à la fois de l'explosion et du syllogisme disjonctif. Cependant c'est aussi un contre-exemple du modus ponens pour l'[[implication (logique)|implication logique]] de LP. Pour cette raison, les partisans de LP considèrent qu'il vaut mieux étendre le système pour y inclure un connecteur d'implication plus fort qui n'est pas définissable en utilisant juste la négation et la disjonction<ref>{{harvsp|Priest|2002|loc=§5}}.</ref> contrairement à l'implication classique.

On peut vérifier que LP préserve la plupart des autres schémas d'inférences valides qu'on pourrait souhaiter, comme les lois de De Morgan et les règles de la [[déduction naturelle]] pour l'introduction et l'élimination de la négation, la conjonction et la disjonction. De manière surprenante, les vérités (les [[Tautologie (logique)|tautologie]]s) de LP sont exactement celles de la logique classique<ref>{{harvsp|Priest|2002|p=310}}.</ref>. LP et la logique classique diffèrent seulement dans le choix des ''inférences'' qu'elles considèrent valides). En relâchant le prérequis que chaque formule soit vraie, soit fausse, donne la logique para-cohérente connue sous le nom de FDE ({{Langue|en|"First-Degree Entailment"}} (déduction de premier degré)). Contrairement à LP, FDE ne contient pas de tautologie.

== Relations avec d'autres logiques ==

L'un des types importants de logique paracohérente est celui des [[logique pertinente|logiques pertinentes]]. Une logique est dite ''pertinente'' si elle satisfait la propriété suivante:

{{Exemple|nom=Propriété|1=Si ''A'' → ''B'' est un théorème, alors ''A'' et ''B'' partagent une constante non logique.}}

Il suit qu'une logique pertinente ne peut pas avoir un théorème de la forme (''p'' ∧ ¬''p'') → ''q'', et donc sous des hypothèses raisonnables ne peut pas valider de raisonnement qui à partir de {''p'', ¬''p''} démontre ''q''.

Les logiques paracohérentes recoupent en large manière les logiques à valeur multiples ; cependant toutes les logiques paracohérentes ne sont pas à valeur multiples, (et, bien sur, toutes les logiques à valeur multiples ne sont pas paracohérentes). Les logiques dialethéistes, qui sont des logiques à valeur multiples, sont paracohérentes. Mais l'inverse n'est pas vrai.

Dans une [[logique intuitionniste]], ''A'' ∨ ¬''A'' n'est pas forcément une vérité, alors qu'à l'inverse ''A'' ∧ ¬''A'' est forcément faux. Il semble donc naturel de voir les logiques paracohérentes et les logiques intuitionnistes comme duales. Cependant la logique intuitionniste est un système logique spécifique, tandis que les logiques paracohérentes forment une famille de systèmes. En cohérence, la notion duale de la para[[cohérence (logique)|cohérence]] est appelée para[[complétude (logique)|complétude]], et le dual de la logique intuitionniste (une logique paracohérente particulière) est un système appelé ''anti-intuitionniste'' ou ''logique intuitionniste duale'' (parfoir appelée {{Langue|en|''Brazilian logic''}} logique brésilienne, pour des raisons historiques)<ref>Voir Aoyama (2004).</ref>. La dualité se voit bien dans un cadre de [[calcul des séquents]]. Le séquent {{indente|<math>\vdash A \lor \neg A</math>}} n'est pas dérivable, tandis que pour son dual c'est le séquent {{indente|<math>A \land \neg A \vdash</math>}} qui ne l'est pas.
De la même manière {{indente|<math>\neg \neg A \vdash A</math>}} n'est pas dérivable alors que {{indente|<math>A \vdash \neg \neg A</math>}} n'est pas dérivable dans le dual.
La logique dual-intuitionniste possède un connecteur <code>#</code> dit ''pseudo-différence'' qui est le dual de l'implication intuitionniste. Très grossièrement, {{nobr|1=''A'' # ''B''}} peut être lu « ''A'' mais pas ''B'' ». Cependant, <code>#</code> n'est pas fonctionnel pour la vérité comme on pourrait attendre d'un opérateur 'mais pas'; de manière similaire, l'implication intuitionniste ne peut pas être traîtée comme équivalente à « {{nobr|1=¬ (''A'' ∧ ¬''B'')}} ». Cette logique ont aussi un connecteur <code>⊤</code> qui est le dual du <code>⊥</code> intuitionniste: la négation peut être définie comme {{nobr|1=¬''A'' = (⊤ # ''A'')}}

Un argumentaire complet sur cette dualité, y compris une explication sur le pourquoi ces logiques ne coïncident pas, est dans {{harvsp|Brunner|Carnielli|2005}}.

== Applications ==
Les logiques paraconsistantes ont été utilisées pour gérer les incohérences dans de nombreux domaines, incluant<ref name="See Bremer">Ces exemples sont discutés dans Bremer (2005) et Priest (2002).</ref> :
; [[Sémantique]]: On les a proposés comme moyen de procurer des définitions de la [[vérité]] qui tiennent la route face à des paradoxes comme le [[paradoxe du menteur]]. Cependant, ces systèmes doivent aussi éviter le [[paradoxe de Curry]], bien plus difficile parce qu'il n'implique essentiellement pas sa propre négation.
; [[théorie des ensembles]] et [[fondements des mathématiques|fondations des mathématiques]]: (voir {{Lien Wikidata|mathématiques paracohérentes|idwikidata=Q7134013}}).
: {{Qui|Certaines personnes pensent}} que les logiques paracohérentes ont un grand avenir sur l'interprétation des [[théorèmes d'incomplétude de Gödel]] et du [[paradoxe de Russell]].
;[[épistémologie]]: ainsi que la [[révision des croyances]], cette logique a été proposée comme moyen de raisonner avec des théories qui sont incohérentes entre elles, et pour la modélisation des systèmes de croyance.
;[[gestion des connaissances]] et [[intelligence artificielle]]: des informaticiens ont utilisé les logiques paracohérentes comme possibilité de gérer convenablement des informations comportant des incohérences<ref>Voir les systèmes de maintien de la Vérité ({{Lien Wikidata|idwikidata=Q7301486|système de maintenance des raisonnements}}</ref>{{,}}<ref>les articles de Bertossi et al. (2004).</ref>.
; [[logique déontique]] et la méta-éthique : elles ont été proposées comme possibilité pour gérer les conflits d'éthique et d'autres conflits normatifs.
; [[génie logiciel]]: elles ont été proposées comme moyen de gérer les incohérences dans la documentation, les cas d'utilisation, et dans le code de grandes infrastructures logicielles<ref name="Hewitt 2008b"/>{{,}}<ref name="Hewitt 2008a"/>.
; [[Électronique (technique)|Électronique]]: dans ce domaine des logiques à quatre valeurs sont utilisés de manière routinière, avec des valeurs « haute-impédance (z) » et « pas d'importance (x) » qui jouent des rôles similaires à « inconnu » et « vrai et faux à la fois » respectivement, en plus de « vrai » et « faux ». Cette logique a été développée indépendamment du domaine de la logique mathématique.

== Critiques ==
Certaines critiques du [[dialethéisme]] sur l'abandon de l'un principes de déductions qu'il est nécessaire d'abandonner. Si le principe d'explosion peut être contre-intuitif, il est aussi contre-intuitif d'abandonner des principes de déduction aussi peu contestables. En mettant en balance les deux, on peut considérer que les principes de base ont plus d'importance que l'absence de principe d'explosion.

D'autres critiques comme celle du philosophe [[David Lewis (philosophe)|David Lewis]], portent sur la possibilité même d'une contradiction<ref>voir Lewis (1982).</ref>. Une remarque liée porte sur la nature de la ''négation'' dans les logiques paraconsistante : il ne s'agit sans doute pas d'une ''[[négation logique|négation]]'' au sens le plus fort du terme; il s'agit plus simplement d'un opérateur de type [[carré logique|subcontraire]]<ref>Voir Slater (1995), Béziau (2000).</ref>.

== Alternatives ==

=== Les logiques multivaluées ===
Des approches différentes existent, notamment pour l'inférence en présence de croyances incohérentes qui ne violent aucun des principes de déductions intuitifs. La plupart de ces approches utilisent des {{Lien|langue=en|trad=Multi-valued logic|fr=logiques à valeurs multiples}} munies d'inférences de type [[inférence bayésienne|bayésienne]] et la [[théorie de Dempster-Shafer]], autorisant certaines croyances non-tautologiques à n'être pas totalement irréfutables (avec une probabilité différente de 1 par exemple) car basée sur des données incomplètes, trop abstraites, (mal) interprétées, probablement non confirmées, ou potentiellement incorrecte. (Bien entendu, cette même supposition contient, si elle n'est pas tautologique, sa propre réfutabilité, si par « réfutabilité » nous voulons dire « non totalement (à 100 %) irréfutable ».). Ces systèmes abandonnent en pratique certains principes logique sans les rejeter en théorie.

=== La logique contextuelle ===
La [[logique contextuelle]] propose d'intégrer la [[pensée]] dans le [[raisonnement]] formel, par l'application de la formule ''c'' → ''f'' (pour ''c'' une proposition élémentaire du langage qui symbolise la pensée, et ''f'' la formule qui la décrit). Le formalisme obtenu vérifie la propriété suivante : si ''c<sub>1</sub>'' → ''f'', si ''c<sub>2</sub>'' → ''g'', et si ''f'' ∧ ''g'' → ''h'', alors, [[Intelligence artificielle|un agent intelligent]] peut croire {''c<sub>1</sub>'',''f''} et {''c<sub>2</sub>'',''g''} et ne pas croire ''h''. Ce constat conduit à définir une [[sémantique]] [[Logique non monotone|non monotone]] qui respecte les règles [[Fonction monotone|monotones]] de production syntaxique de la [[Calcul des propositions|logique propositionnelle]]. Elle permet de modéliser et d'exploiter simultanément dans une même base de connaissances 2 contextes ''c<sub>1</sub>'' et ''c<sub>2</sub>'' éventuellement incohérents l'un par rapport à l'autre.

== Personnes notables du domaine ==

Quelques noms ayant contribué ou contribuant encore au développement des logiques paracohérentes :
* {{Lien|langue=en|fr=Alan Ross Anderson}} ([[États-Unis]], 1925–1973). Un des fondateurs de la {{Lien|langue=en|trad=relevance logic|fr=logique pertinente}}, une logique paracohérente.
* {{Lien|langue=en|fr=F. G. Asenjo}} ([[Argentine]])
* {{Lien|langue=en|fr=Diderik Batens}} ([[Belgique]])
* {{Lien|langue=en|fr=Nuel Belnap}} ([[États-Unis]], né en 1930). Il a travaillé avec Alan Anderson sur la logique pertinente.
* [[Jean-Yves Béziau]] ([[France]]/[[Suisse]], né en 1965). Il a beaucoup écrit sur les caractéristiques structurelles et philosophiques de ces logiques.
* {{Lien|langue=en|fr=Ross Brady}} ([[Australie]])
* {{Lien|langue=en|fr=Bryson Brown}} ([[Canada]])
* {{Lien|langue=en|fr=Walter Carnielli}} ([[Brésil]]). Le créateur de la ''sémantique de traductions possibles'', une sémantique qui permet selon lui d'appliquer en pratique les logiques paracohérentes et de les expliquer philosophiquement.
* {{Lien|langue=en|fr=Newton da Costa}} ([[Brésil]], né en 1929). Un des premiers créateur de logique paracohérente formelle.
* {{Lien|langue=en|fr=Itala M. L. D'Ottaviano}} ([[Brésil]])
* {{Lien|langue=en|fr=J. Michael Dunn}} ([[États-Unis]]). Une figure de la logique pertinente.
* {{Lien|langue=en|fr=Carl Hewitt}}
* [[Stanisław Jaśkowski]] ([[Pologne]]). Un pionnier dans la création de logique paracohérente formelle.
* {{Lien|langue=en|fr=R. E. Jennings}} ([[Canada]])
* [[David Lewis (philosophe)|David Kellogg Lewis]] (États-Unis, 1941–2001). Critique argumenté de ce type de logique.
* [[Jan Łukasiewicz]] ([[Pologne]], 1878–1956)
* {{Lien|langue=en|fr=Robert K. Meyer}} ([[États-Unis]]/[[Australie]])
* {{Lien|langue=en|trad=Chris Mortensen (philosopher)|fr=Chris Mortensen (philosophe)|texte=Chris Mortensen}} ([[Australie]]). À beaucoup écrit sur les {{Lien|langue=en|trad=paraconsistent mathematics|fr=mathématiques paracohérentes}}.
* {{Lien|langue=en|fr=Lorenzo Peña}} ([[Espagne]], né en 1944). Créateur de la logique ''gradualistic'' (des degrés ?) (aussi appelée ''logique transitive'', TL), sur les bases de la [[Logique floue]].
* [[Val Plumwood]] [anciennement Routley] ([[Australie]], né en 1939). collaborateur de Sylvan.
* [[Graham Priest]] ([[Australie]]). Promoteur de la logique paracohérente.
* [[Francisco Miró Quesada]] ([[Pérou]]). Créateur du terme {{Langue|en|''paraconsistent logic''}}.
* {{Lien|langue=en|fr=B. H. Slater}} ([[Australie]]). Critique argumenté.
* {{Lien|langue=en|fr=Richard Sylvan}} [anciennement Routley] ([[Nouvelle-Zélande]]/[[Australie]], 1935–1996). Personnage de la logique pertinente, collaborateur de Plumwood et Priest.
* {{Lien|langue=en|fr=Nicolai A. Vasiliev}} ([[Russie]], 1880–1940). Premier constructeur d'une logique tolérante aux contradictions (1910).

== Notes et références ==

=== Bibliographie ===
==== En français ====
* [[Gilles Gaston Granger]] ''L'irrationnel'', Chapitre 5 Le recours à l'irrationnel en logique, pages 139-179, Paris, Odile Jacob, 1998. Chapitre entièrement consacré aux logiques paraconsistantes dont celle de da Costa.
==== En anglais ====
* {{Ouvrage|langue=en|auteur1=Jean-Yves Béziau|auteur2=Walter Carnielli|auteur3=[[Dov Gabbay]]|titre=Handbook of Paraconsistency|lieu=Londre|éditeur=King's College|année=2007|pages totales=512|isbn=978-1-904987-73-4|asin=1904987737}}
* {{article | auteur=Hiroshi Aoyama | titre= LK, LJ, Dual Intuitionistic Logic, and Quantum Logic | journal=[[Notre Dame Journal of Formal Logic]] | année=2004 | volume=45 | numéro= 4 | pages= 193–213  | doi=10.1305/ndjfl/1099238445}}
* {{Ouvrage |langue=en |prénom1=Leopoldo, eds. |nom1=Bertossi |titre=Inconsistency Tolerance |lieu=Berlin |éditeur=Springer |année=2004 |isbn=3-540-24260-0}}
* {{article | nom1=Brunner| prénom1=Andreas |nom2=Carnielli| prénom2=Walter | titre=Anti-intuitionism and paraconsistency | journal= Journal of Applied Logic | année=2005 | volume=3 | numéro= 1 | pages= 161–184  | doi=10.1016/j.jal.2004.07.016}}
* {{ouvrage | langue=en| nom1=Béziau | prénom1=Jean-Yves <!--| éditeur=In D. Batens et al. (eds.)--> | titre=Frontiers of Paraconsistent Logic | année=2000 | éditeur=Research Studies Press | lieu=Baldock | isbn=0-86380-253-2 | passage=95–111 | titre chapitre=What is Paraconsistent Logic?}}
* {{Ouvrage | langue=en | prénom1=Manuel | nom1=Bremer | titre=An Introduction to Paraconsistent Logics | lieu=Francfort | éditeur=[[Peter Lang (maison d'édition)|Peter Lang]] | année=2005 | pages totales=249 | isbn=3-631-53413-2}}
* {{ouvrage | langue=en|nom1=Brown | prénom1=Bryson <!--| éditeur=In Dale Jacquette (ed.)--> | titre=A Companion to Philosophical Logic | année=2002 | éditeur=Blackwell Publishers | lieu=Malden, Massachusetts | isbn=0-631-21671-5 | passage=628–650 | titre chapitre=On Paraconsistency}}
* {{ouvrage| langue=en|nom1=Carnielli | prénom1=Walter | nom2=Coniglio| prénom2=Marcelo E. |nom3= Marcos|prénom3= J, <!--| éditeur=In [[Dov Gabbay|D. Gabbay]] and F. Guenthner (eds.)--> | titre=Handbook of Philosophical Logic, Volume 14 | numéro d'édition=2 | année=2007 | éditeur=[[Kluwer Academic Publishers]] | lieu=The Netherlands | isbn=1-4020-6323-7 | passage=1–93 | titre chapitre=Logics of Formal Inconsistency}}
* {{article|auteur=Solomon Feferman | année=1984 | titre=Toward Useful Type-Free Theories, I |périodique =Journal of Symbolic Logic |jstor=2274093|pages=75–111|volume=49|numéro=1 }}
* {{lien conférence | auteur= Carl Hewitt | titre=Large-scale Organizational Computing requires Unstratified Reflection and Strong Paraconsistency | titre livre=Coordination, Organizations, Institutions, and Norms in Agent Systems III | auteurs ouvrage= Jaime Sichman, Pablo Noriega, Julian Padget and Sascha Ossowski (ed.) | série=Lecture Notes in Computer Science | volume=4780 | éditeur=Springer-Verlag | doi=10.1007/978-3-540-79003-7|date=2008|consulté le=18 mai 2023}}
* {{lien arXiv | nom=Hewitt |prénom= Carl |année=2008 | titre=Common sense for concurrency and inconsistency tolerance using Direct Logic<sup>TM</sup> and the Actor model |eprint=0812.4852 <!--| classe=cs.LO-->}}
* {{Ouvrage| langue=en| prénom1=David| nom1=Lewis| titre=Papers in Philosophical Logic| lieu=Cambridge| éditeur=[[Cambridge University Press]]| année=1998| année première édition=1982| passage=97–110| isbn=0-521-58788-3| titre chapitre=Logic for Equivocators}}
* {{article | nom=Peña | prénom=Lorenzo | titre=Graham Priest's 'Dialetheism': Is it altogether true? <!-- paramètre inconnu | année première édition=1996--> | url=http://lp.jurid.net/articles/logica/dialethe.htm | hdl=10261/9714 | consulté le=2009-05-03 | journal=Sorites | année=1996 | volume=7 | pages=28–56 }}
* {{ouvrage | nom1=Priest | prénom1=Graham <!--| éditeur=In [[Dov Gabbay|D. Gabbay]] and F. Guenthner (eds.)--> | titre=Handbook of Philosophical Logic, Volume 6 | numéro d'édition=2 | année=2002 | éditeur=[[Kluwer Academic Publishers]] | lieu=The Netherlands  | isbn=1-4020-0583-0  | passage=287–393 | titre chapitre=Paraconsistent Logic.}}
* {{lien web | auteur1=Graham Priest | auteur2=Koji Tanaka | année=1996, 2009 | titre=Paraconsistent Logic | série=[[Stanford Encyclopedia of Philosophy]] | url=http://plato.stanford.edu/entries/logic-paraconsistent/ | consulté le= 17 juin 2010}} (Première publication mardi {{date-|24 septembre 1996}}, révision substantielle vendredi {{date-|20 mars 2009}})
* {{article | auteur=B. H. Slater | titre=Paraconsistent Logics? | journal=Journal of Philosophical Logic | année=1995 | volume=24 | pages= 451–454 | doi=10.1007/BF01048355 | numéro=4}}
* {{Ouvrage | langue=en | prénom1=John | nom1=Woods | titre=Paradox and paraconsistency | sous-titre=conflict resolution in the abstract sciences | lieu=Cambridge | éditeur=[[Cambridge University Press]] | année=2003 | pages totales=362 | isbn=0-521-00934-0}}

=== Liens externes ===
* {{IEP|para-log|Paraconsistent Logic}}
* [http://plato.stanford.edu/entries/logic-paraconsistent/ Stanford Encyclopedia of Philosophy: Paraconsistent Logic]
* [http://plato.stanford.edu/entries/mathematics-inconsistent/ Stanford Encyclopedia of Philosophy: Inconsistent Mathematics]
* [http://www.paraconsistency.org World Congress on Paraconsistency, Ghent 1997, Juquehy 2000, Toulouse, 2003, Melbourne 2008, Kolkata, 2014]

=== Références ===
{{Références}}
{{Traduction/Référence|lang1=en|art1=Paraconsistent logic|id1=616337810}}

=== Articles connexes ===
* [[Logique formelle]]

{{Palette|Logique}}
{{Portail|logique}}

{{DEFAULTSORT:Logique paracohérente}}
[[Catégorie:Logique non classique]]