Voir la source de Milieu interstellaire

{{Palette Naissance des étoiles}}
{{Voir homonymes|ISM}}
[[Fichier:WHAM survey.png|300px|vignette|La répartition d'hydrogène ionisé dans des régions du milieu interstellaire, vue depuis l'hémisphère nord de la Terre.]]

En [[astronomie]], le '''milieu interstellaire''' (en anglais, ''{{langue|en|interstellar medium}}'' ou ''{{langue|en|ISM}}'') est la matière qui, dans une [[galaxie]], remplit l'espace entre les [[étoile]]s et se fond dans le [[milieu intergalactique]] environnant. Il est un mélange de gaz (ionisés, atomiques et moléculaires), de [[rayon cosmique|rayons cosmiques]] et de [[poussière interstellaire|poussières]]. L'énergie qui occupe le même volume, sous forme de rayonnement électromagnétique, correspond au champ de rayonnement interstellaire.

Les étoiles se forment au sein des régions les plus denses du milieu (les [[nuage moléculaire|nuages moléculaires]]) et approvisionnent le milieu en matière et en énergie au moyen de [[nébuleuse planétaire|nébuleuses planétaires]], [[vent solaire|vents solaires]], [[supernova]] et leur extinction finale<ref>{{Ouvrage|langue=en|prénom1=Theo|nom1=Koupelis|titre=In quest of the universe|lieu=Sudbury, Mass|éditeur=Jones and Bartlett Publishers|année=2011|numéro d'édition=6|pages totales=614|passage=367|isbn=978-0-7637-6858-4|oclc=807004927|lire en ligne=https://books.google.com/books?id=GVlpKZ67DscC&printsec=frontcover}}.</ref>. Cette interaction entre les étoiles et le milieu interstellaire lui-même aide à définir la vitesse à laquelle une galaxie épuise sa réserve gazeuse, et donc sa durée de formation d'étoiles.

Le milieu interstellaire occupe une position importante dans l'astrophysique entre les échelles stellaires et galactiques. Ces régions (et les processus qui s'y produisent) doivent être étudiées à l'aide de télescopes infrarouges (par exemple l'[[Infrared Astronomical Satellite|IRAS]]) puisqu'elles n'émettent pas de [[Spectre visible|lumière visible]]<ref>''Les Cahiers du Monde des Sciences'', printemps 2014, {{2e}}{{éd.}}, {{p.}}56.</ref>.

La frontière entre l'[[astrosphère]] d'une étoile (en particulier, pour le [[Soleil]] l'[[héliosphère]]) et le milieu interstellaire avoisinant se nomme l'[[astropause]] (en particulier, l'[[héliopause]]).

== Composition et phases ==
{{Article détaillé|Liste de molécules détectées dans le milieu interstellaire}}
Le milieu interstellaire se compose de plusieurs phases, selon l'état de la matière (soit ionique, atomique ou moléculaire), sa température (millions de [[kelvin]]s, milliers de kelvins ou dizaines de kelvins) et sa densité. Ce modèle en trois phases a été développé par [[Christopher McKee|Chris McKee]] et [[Jeremiah Ostriker|Jerry Ostriker]] dans un article publié en [[1977]] et a servi de base aux études menées pendant les {{nobr|25 années}} qui ont suivi. Les proportions relatives de ces phases sont encore matière à discussion dans les cercles scientifiques. Le modèle précédemment accepté comportait deux phases<ref>* {{Ouvrage | prénom1=G. B. | nom1=Field | prénom2=D. W. | nom2=Goldsmith | prénom3=H. J. | nom3=Habing | titre=Cosmic-Ray Heating of the Interstellar Gas | volume=155 | éditeur= | année=1969 | pages totales=L149 | doi=10.1086/180324 | bibcode=1969ApJ...155L.149F | collection=Astrophysical Journal }}.</ref>.

Les pressions thermiques de ces phases sont à peu près en équilibre. Les [[champ magnétique|champs magnétiques]] et les [[turbulence]]s sont également des sources de pression dans le milieu, typiquement plus importantes au niveau dynamique que la pression thermique.

Pour toutes les phases, le milieu entre-étoiles est extrêmement ténu<ref>{{lien web |auteur1=Jacques Gispert |titre=Milieu insterstellaire |url=http://astronomia.fr/5eme_partie/milieuInter.php |site=astronomia.fr |consulté le=23-05-2023}}.</ref> par rapport à l'atmosphère terrestre. Dans le premier on constate une densité caractéristique de l'ordre d'un atome d'hydrogène par cm{{3}}<ref>{{lien web |auteur1=Jacques Gispert |titre=Milieu insterstellaire |url=http://astronomia.fr/5eme_partie/milieuInter.php#milieu |site=astronomia.fr |consulté le=23-05-2023}}.</ref> alors que, sur Terre, la densité de l'air est typiquement de l'ordre de {{nb|2.7|e=19}} atomes par cm{{3}}. Dans les régions froides du milieu interstellaire, les nuages moléculaires ont une densité supérieur à {{Nb||e=3}} molécule par cm{{3}}<ref>{{Article|prénom1=Mark G.|nom1=Wolfire|prénom2=David|nom2=Hollenbach|prénom3=Christopher F.|nom3=McKee|titre=THE DARK MOLECULAR GAS|périodique=The Astrophysical Journal|volume=716|numéro=2|pages=1191–1207|date=2010-06-20|issn=0004-637X|issn2=1538-4357|doi=10.1088/0004-637X/716/2/1191|lire en ligne=https://iopscience.iop.org/article/10.1088/0004-637X/716/2/1191|consulté le=2025-01-15}}</ref>. Dans les régions chaudes, plus diffuses, où la matière est principalement ionisée, la densité du milieu se situe entre 0.01 et {{Nb||e=2}} ions par cm{{3}}<ref>{{Article|langue=en|prénom1=W. D.|nom1=Langer|prénom2=J. L.|nom2=Pineda|prénom3=P. F.|nom3=Goldsmith|prénom4=E. T.|nom4=Chambers|titre=The dense warm ionized medium in the inner Galaxy|périodique=Astronomy & Astrophysics|volume=651|pages=A59|date=2021-07-01|issn=0004-6361|issn2=1432-0746|doi=10.1051/0004-6361/202040223|lire en ligne=https://www.aanda.org/articles/aa/full_html/2021/07/aa40223-20/aa40223-20.html|consulté le=2025-01-15}}</ref>. La densité en hydrogène du milieu interstellaire aux limites du [[système solaire]] est de {{Unité|0,127 ± 0,015|cm|-3}}, d'après une mesure effectuée par la sonde [[New Horizons]]<ref>{{Article|langue = anglais|titre = Density of Neutral Hydrogen in the Sun's Interstellar Neighborhood|périodique = [[The Astrophysical Journal]]|auteur1 = P. Swaczyna |auteur2 = D.J. McComas|auteur3 = E.J. Zirnstein|et al. = oui|date = 30 octobre 2020|lire en ligne = https://iopscience.iop.org/article/10.3847/1538-4357/abb80a|volume = 903|numéro = 1}}.</ref>.

Par masse, 99 % du milieu interstellaire prend une forme de gaz, avec 1 % sous forme de poussière<ref name="Boulanger">{{lien conférence|auteur=Boulanger, F. ; Cox, P. et Jones, A. P.|titre=Course 7: Dust in the Interstellar Medium|titre livre=Infrared Space Astronomy, Today and Tomorrow|année=2000|éditeur=F. Casoli, J. Lequeux et F. David|pages=251, volume 70|bibcode=2000isat.conf..251B|title=}}</ref>. Parmi ces gaz, 89 % d'atomes sont d'[[Atome d'hydrogène|hydrogène]], 9 % d'[[hélium]] et 2 % d'atomes d'éléments plus lourds (appelés ''métaux'' dans le langage astronomique) que ces deux. L'hydrogène et l'hélium sont des produits de la [[nucléosynthèse primordiale]] alors que les éléments plus lourds sont le résultat d'enrichissement lors de l'évolution des étoiles. Des molécules sont également observées dans les [[nébuleuse|nuages]] (lat. ''nebulae'') du milieu interstellaire, les plus abondantes étant [[Dihydrogène|H<sub>2</sub>]] et [[Monoxyde de carbone|CO]]. Ont également été observées [[Hydroxyle|OH]], [[Molécule d'eau|H<sub>2</sub>O]], CN, [[monosulfure de carbone|CS]], [[cyanure d'hydrogène|HCN]], [[méthanal|H<sub>2</sub>CO]] et des centaines d'autres (en particulier dans la [[nébuleuse d'Orion]]). Des molécules encore plus massives sont reportées : C<sub>60</sub> ([[fullerène]]), des [[Hydrocarbure aromatique polycyclique|HAP]], des [[acide aminé|acides aminés]] entre autres.

{| class="wikitable alternance centre"
|+ Caractéristiques du milieu interstellaire par phase<ref>James Lequeux, ''Interstellar medium'', Springer, 2004, {{p.}}4</ref>
|-
!! scope="col" | Phase !! !! scope="col" | Densité<br>({{nb|atome/cm3}}) !! scope="col" | Température<br>(K) !! scope="col" | Masse totale dans la Voie lactée<br><math>M_{\odot}</math>
|-
| Atomique || froid ||≃ 25 || ≃ {{unité/2|100|K}} || {{nb|1,5|e=9}}
|-
| || chaud ||≃ 0,25 || ≃ {{unité/2|8000|K}} || {{nb|1,5|e=9}}
|-
| Moléculaire || || > {{nb|1000}} || < {{unité/2|100|K}} || {{nb|e=9}} ?
|-
| Ionisé || [[Région HII]] || 1 – {{nb|e=4}} || ≃ {{unité/2|10000|K}}|| {{nb|5|e=7}}
|-
| || Diffus || ≃ 0,03 || ≃ {{unité/2|8000|K}}|| {{nb|e=9}}
|-
| || Chaud || ≃ {{nb|6|e=-3}} || ≃ {{unité/2|500000|K}} || {{nb|e=8}} ?
|}

Dans le milieu interstellaire, le [[gaz]] et les [[Poussière interstellaire|grains de poussière]] sont intimement mêlés. Un milieu interstellaire est présent dans toutes les [[galaxie spirale|galaxies spirales]], [[galaxie spirale barrée|spirales barrées]] et [[galaxie irrégulière|irrégulières]]. Il est quasiment inexistant dans les [[galaxie elliptique|galaxies elliptiques]] et [[galaxie lenticulaire|lenticulaires]]. La [[poussière interstellaire]] se présente sous la forme de grains extrêmement fins, dont la taille typique est de l'ordre d'une fraction de [[micromètre]]<ref>Koupelis, {{p.}}370.</ref>. La composition chimique des grains de poussière interstellaire est variée : on y trouve du [[graphite]], des [[silicate]]s, des [[carbonate]]s, etc. Les poussières interstellaires ({{ex}} la phase solide) comptent pour environ 1 % de la masse totale de milieu interstellaire.

{| class="wikitable alternance centre"
|+ Composants du milieu interstellaire par type<ref>Michael A. Seeds, Dana E. Backman, ''Stars and Galaxies'', {{7e}}{{éd.}}, Brooks/Cole, 2011, {{p.}}205</ref>
|-
!! scope="col" | Composant !! scope="col" | Densité<br>({{nb|atome/cm3}}) !! scope="col" | Température<br>(K) !! scope="col" | État du gaz
|-
| [[Nuage moléculaire]] || {{nb|e=3}} – {{nb|e=5}} || {{unité/2|20|K}} à {{unité/2|50|K}} || Molécules
|-
| [[Région HI]] || 1-{{formatnum:1000}} || {{unité/2|50|K}} à {{unité/2|150|K}}|| Hydrogène neutre. Autres atomes ionisés
|-
| Milieu entre les nuages || 0,01 || {{unité/2|1000|K}} à {{unité/2|10000|K}} || Partiellement ionisé
|-
| [[Couronne galactique]] || {{nb|e=-4}} – {{nb|e=-3}} || {{unité/2|100000|K}} à {{unité/2|1000000|K}} || Hautement ionisé
|}

== Recherches ==
Les principaux sujets d'étude du milieu interstellaire sont : les [[nuage moléculaire|nuages moléculaires]], les [[nuage interstellaire|nuages interstellaires]], les [[région HII|régions HII]], les [[rémanent de supernova|rémanents de supernova]], les [[nébuleuse planétaire|nébuleuses planétaires]], ainsi que d'autres structures diffuses.

Le milieu interstellaire demeure encore aujourd'hui un sujet de recherche complexe, tant au niveau de la physique que de la chimie qui s'y déroulent. De plus en plus, les études réalisées prennent en compte ces deux aspects pour tenter d'expliquer les abondances des éléments observées dans le milieu interstellaire.

=== Avancées dans l'étude du milieu interstellaire ===
* [[1848]] : [[William Parsons|Lord Rosse]] étudie [[Catalogue de Messier|M1]] et le nomme « [[nébuleuse du Crabe]] ».
* [[1864]] : [[William Huggins]] étudie le [[spectre électromagnétique|spectre]] de la [[nébuleuse d'Orion]] et prouve que c'est un nuage de gaz.
* [[1927]] : [[Ira Sprague Bowen|Ira Bowen]] explique les [[raie spectrale|raies spectrales]] non identifiées en tant que [[raie de transition interdite|raies de transition interdites]].
* [[1930]] : [[Robert Jules Trumpler]] découvre l'absorption par la [[nuage interstellaire|poussière interstellaire]] en comparant la taille apparente et la luminosité d'[[amas globulaire]]s.
* [[1944]] : [[Hendrik Christoffel van de Hulst|Hendrik van de Hulst]] prédit l'existence de la [[raie à 21 centimètres|raie hyperfine à {{unité/2|21|cm}}]] de l'hydrogène interstellaire neutre.
* [[1951]] : [[Harold Ewen]] et [[Edward Mills Purcell]] observent la raie hyperfine à {{unité/2|21|cm}} de l'hydrogène interstellaire neutre.
* [[1956]] : [[Lyman Spitzer]] prédit l'existence de [[gaz coronal]] autour de la [[Voie lactée]].
* [[1965]] : [[James E. Gunn (astronome)|James Gunn]] et [[Bruce Peterson]] utilisent l'observation de l'absorption relativement faible du composant bleu de la [[série de Lyman|raie Lyman alpha]] de [[3C 9]] pour fortement contraindre la [[densité]] et l'état d'[[ion]]isation du [[milieu intergalactique]].
* [[1969]] : [[Lewis Snyder]], [[David Buhl]], [[Benjamin Zuckerman|Ben Zuckerman]] et [[Patrick Palmer]] découvrent du [[Méthanal|formaldéhyde]] interstellaire.
* [[1970]] : [[Arno Allan Penzias|Arno Penzias]] et [[Robert Woodrow Wilson|Robert Wilson]] découvrent du [[monoxyde de carbone]] interstellaire.
* [[1970]] : [[George Robert Carruthers|George Carruthers]] observe de l'hydrogène [[molécule|moléculaire]] ([[dihydrogène]]) dans l'[[espace (cosmologie)|espace]].
* [[1977]] : [[Christopher McKee]] et [[Jeremiah Ostriker]] proposent une théorie du milieu interstellaire composé de trois phases.
* [[1976]]-[[1978]] : [[Marie-Paul Bassez]], aidé d'une petite équipe de la Monash University (Australie), est la première à avoir effectué une analyse du spectre rotationnel de la glycine (acide aminé) et l'avoir ainsi recherché dans les nuages interstellaires de notre galaxie (1978).
* ~ {{date|25|août|2012}} : [[Voyager 1]] sort de l'[[héliosphère]], zone de prédominance du [[vent solaire]], pour atteindre le milieu interstellaire.
* [[Février 2014]] : la [[National Aeronautics and Space Administration|NASA]] annonce une base de données améliorée pour les [[Hydrocarbure aromatique polycyclique|hydrocarbures aromatiques polycycliques]]<ref>{{lien web|url=http://www.astrochem.org/pahdb/|titre=PAH IR spectral database}}</ref>.

== Références ==
{{Références}}

== Voir aussi ==
{{autres projets| commons=Category:Interstellar medium}}

=== Articles connexes ===
* [[Espace (cosmologie)]]
* [[Espace cislunaire]]
* [[Milieu interplanétaire]]
* [[Milieu intergalactique]]
* [[Poussière interstellaire]]

=== Liens externes ===
* [https://www.franceculture.fr/emissions/la-methode-scientifique/vive-le-vent-galactique « Vive le vent galactique ! »], ''La Méthode scientifique'', France Culture, 19 octobre 2021.
* [https://www.franceculture.fr/emissions/la-methode-scientifique/la-methode-scientifique-emission-du-mardi-29-octobre-2019 «Milieu interstellaire, gaz à tous les étages»] ''La Méthode scientifique'', France Culture, {{date-|29 octobre 2019}}.
* [http://www.cerimes.fr/articles/article_3252/le-gaz-dans-l-univers-ombres-chinoises Vidéo-conférence sur le thème : ''Le gaz dans l’Univers : Ombres chinoises''] (intervention du {{date-|2 décembre 2008}} de [[Patrick Petitjean]], astrophysicien à l'[[Institut d'astrophysique de Paris|IAP]])

{{Portail|astronomie}}

[[Catégorie:Milieu interstellaire| ]]