Voir la source de Plutonium 238

{{Infobox Isotope
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 | titre       = Live Chart of Nuclides: {{Nucléide|238|94|Pu||144}}
 | date        = 31 mars 2004
 | site        = www-nds.iaea.org
 | éditeur     = [[Agence internationale de l'énergie atomique|AIEA]]
 | consulté le = 12 août 2021
}}.</ref>
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Le '''plutonium 238''', noté '''{{exp|238}}Pu''', est l'[[isotope]] du [[plutonium]] dont le [[nombre de masse]] est égal à 238 : son [[noyau atomique]] compte {{nobr|94 [[proton]]s}} et {{nobr|144 [[neutron]]s}} avec un [[spin]] 0+ pour une [[masse atomique]] de {{unité|238.04956|g/mol}}. Il est caractérisé par un [[excès de masse]] de {{unité|46163|keV}} et une [[énergie de liaison nucléaire]] par [[nucléon]] de {{unité|7568.36|keV}}<ref name="IAEA.Nuclides"/>. Un gramme de {{nobr|plutonium 238}} présente une [[radioactivité α]] de {{unité|633.2|GBq}}<ref>[http://arq.lanl.gov/source/orgs/nmt/nmtdo/AQarchive/97summer/Pu_238.html Los Alamos National Laboratory – The Actinide Research Quarterly: Summer 1997] NMT Division Recycles, Purifies Plutonium-238 Oxide Fuel for Future Space Missions.</ref>.

Durant les années 1960 et 1970, les scientifiques du [[Laboratoire national de Los Alamos|Laboratoire américain de Los Alamos]] ont mis au point une utilisation du {{nobr|plutonium 238}} pour fournir l'énergie nécessaire à des [[Pacemaker cardiaque|pacemakers]]<ref>{{lien web|titre=From heat sources to heart sources: Los Alamos made material for plutonium-powered pumper| url=http://www.lanl.gov/orgs/nmt/nmtdo/AQarchive/05spring/heart.html|site = Actinide Research Quarterly, Los Alamos National Laboratory|auteurs=Kathy DeLucas, Jim Foxx et Robert Nance |date= 2005}}.</ref>.

== Propriétés nucléaires ==

Le plutonium 238 donne de l'[[uranium 234]] par [[Radioactivité α|désintégration α]] avec une [[énergie de désintégration]] de {{unité|5.593|MeV}}, une puissance spécifique d'environ {{unité|567|W/kg}} et une [[période radioactive]] de {{nobr|87,75 ans}} :
:{{Nucléide|238|94|Pu}} <math>\mathrm{\xrightarrow[87,75\ ans]{\alpha\ 5,593\ MeV}}</math> {{Nucléide|234|92|U|Uranium 234}}.

Il appartient ainsi à [[chaîne de désintégration#Famille 4n + 2 de l'uranium 238|la même famille de désintégration que l'uranium 238]].

Le {{exp|234}}U donne ensuite, à son tour, du {{lnobr|thorium 230}} par désintégration α avec une période de {{unité|245500|ans}}, donc à un rythme relatif extrêmement faible. L'essentiel de la radioactivité du {{nobr|plutonium 238}} correspond donc à la désintégration de cet élément.

Le {{exp|238}}Pu est donc un puissant émetteur de [[Radioactivité α|rayonnement α]], ce qui en fait l'isotope de loin le plus utilisé dans les générateurs de chaleur et les [[Générateur thermoélectrique à radioisotope|générateurs thermoélectriques à radioisotopes]] qui alimentent les [[Sonde spatiale|sondes spatiales]] et les équipements de haute technologie requérant une source d'énergie fiable sans maintenance (typiquement les dispositifs sous-marins de renseignement militaire) ; l'usage de {{lnobr|polonium 210}} à cette fin a été abandonné, malgré sa puissance, en raison de sa trop brève durée de vie.

== Utilisation spatiale dans les RTG ==

{{article principal|Générateur thermoélectrique à radioisotope}}

[[Fichier:Cassini RTG.jpg|vignette|[[Générateur thermoélectrique à radioisotope|RTG]] de [[Cassini-Huygens (sonde spatiale)|Cassini]]. La mission de la sonde Cassini était initialement de onze ans, d'{{date-|octobre 1997}} à juin [[2008]]. Elle a pu être étendue une première fois jusqu'en 2010, puis une seconde fois jusqu'en 2017, grâce à la bonne durée de vie de ses RTG.]]

Les [[Sonde spatiale|sondes spatiales]] destinées à explorer les planètes lointaines ne peuvent pas dépendre de [[Capteur solaire photovoltaïque|panneaux solaires]] : ces sondes sont donc équipées de générateurs à radioisotope afin de prendre le relais des panneaux solaires au-delà de l'orbite de [[Mars (planète)|Mars]], comme les sondes [[Pioneer 10]], [[Pioneer 11]], [[Voyager 1]], [[Voyager 2]], [[Galileo (sonde spatiale)|Galileo]], [[Ulysses (sonde spatiale)|Ulysses]], [[Cassini-Huygens]], ou encore [[New Horizons]]. Ces générateurs permettent également aux robots déposés en surface des planètes de fonctionner la nuit, lorsque les panneaux solaires sont dans l'obscurité : les six ''[[ALSEP|Apollo Lunar Surface Experiments Package]]s'' déposés sur la [[Lune]] utilisent des GTR, tout comme les deux sondes martiennes [[Programme Viking|Viking 1 et 2]] et le rover [[Mars Science Laboratory]].

La puissance thermique {{mvar|P}}{{ind|th}} générée par le plutonium 238 décroît à partir de la puissance initiale {{mvar|P}}{{ind|th{{ind|0}}}} en fonction du temps {{mvar|t}} écoulé, exprimé en années, à raison de : {{nobr|{{mvar|P}}{{ind|th}}(&thinsp;{{mvar|t}}&thinsp;) {{=}} {{mvar|P}}{{ind|th{{ind|0}}}} × 0,5&thinsp;{{exp|(&thinsp;{{mvar|t}} &thinsp;⁄&thinsp; 87,75&thinsp;)}}}} ; ce qui signifie qu'elle perd {{nobr|1 – 0,5&thinsp;{{exp|(&thinsp;1 &thinsp;⁄&thinsp; 87,75&thinsp;)}} {{=}} 0,787 %}} de puissance thermique par an. Dans le cas, par exemple, des sondes du [[programme Voyager]], lancées en 1977, la puissance initiale des générateurs était de {{unité|470|W}}, et ne devait plus être {{nobr|23 ans}} plus tard, en 2001, que de {{unité|392|W}}. Cependant :
* compte tenu de la diminution de la chaleur produite par les éléments chauffant en oxyde de plutonium, la température de ceux-ci diminue (ainsi d'ailleurs que celle du radiateur) ;
* le rendement de conversion des [[thermocouple]]s bimétalliques convertissant en différence de potentiel le gradient de température généré par la désintégration du {{nobr|plutonium 238}} diminue ; le rendement de conversion est sensiblement proportionnel à l'écart de température entre les points chauds et points froids des thermocouples, lequel est proportionnel à la puissance thermique qui diminue ;
* en outre, un vieillissement des [[thermocouple]]s se produit.

C'est ainsi que la puissance observée des générateurs de [[Voyager 1]] et [[Voyager 2]] en 2001 n'était plus respectivement que de {{unité|315|W}} et {{unité|319|W}}.

La variation de puissance électrique relative est ainsi grossièrement proportionnelle au carré de la puissance thermique produite :
* (&thinsp;(&thinsp;315&thinsp;+&thinsp;319&thinsp;) &thinsp;⁄&thinsp; 2) &thinsp;⁄&thinsp; 470 = 317 &thinsp;⁄&thinsp; 470 = 0,6745
* (&thinsp;392 &thinsp;⁄&thinsp; 470&thinsp;)&thinsp;{{2}} = 0,6953
* le faible écart restant correspondant au vieillissement des thermocouples.

On peut voir ainsi que la puissance électrique délivrée {{mvar|P}}{{ind|e}} varie comme : {{nobr|{{mvar|P}}{{ind|e}}(&thinsp;{{mvar|t}}&thinsp;) {{=}} {{mvar|P}}{{ind|e{{ind|0}}}} × 0,5&thinsp;{{exp|(&thinsp;2&thinsp;{{mvar|t}} &thinsp;⁄&thinsp; 87,75&thinsp;)}}}} ; ce qui revient à dire que tout se passe comme si la période du radioisotope était divisée par 2.

On peut également dire que les thermocouples fonctionnaient à 80 % de leur rendement nominal.

La mission [[New Horizons]], lancée le {{date-|19 janvier 2006}} pour atteindre [[Pluton (planète naine)|Pluton]] le {{date-|14 juillet 2015}}, emporte près de {{nb|8 kg}} de {{nobr|plutonium 238}} dans son RTG, qui fournissait une puissance électrique de l'ordre de {{nb|240 W}} au lancement, contre environ {{nb|190 W}} prévus à destination, soit environ {{nobr|9,5 ans}} après.

== Histoire ==

Le plutonium 238 est le premier [[isotope]] du [[plutonium]] à avoir été synthétisé par l'équipe de [[Glenn Seaborg]] en 1941<ref>Delphine Farmer, [http://sciencereview.berkeley.edu/articles/issue1/elementary.pdf « An Elementary Problem: Artificial Atoms, Nobel Prizes, and Your Smoke Detectors »], ''Berkeley Science Review''.</ref> par bombardement d'{{lnobr|uranium 238}} par des ions [[deutérium]] D{{exp|+}} :
:{{Nucléide|2|1|D|Deutérium}} + {{Nucléide|238|92|U|Uranium 238}} ⟶ {{Nucléide|240|93|Np}}* ⟶ 2 {{Nucléide|1|0|n|Neutron}} + ( {{Nucléide|238|93|Np|Neptunium 238}} ⟶ {{Nucléide|238|94|Pu}} + [[Électron|e{{exp|−}}]] + [[Antineutrino électronique|{{Surligner|{{mvar|ν}}}}{{ind|e}}]]).

== Production ==

=== Principe physique ===

On le produit par [[capture neutronique]] en irradiant du [[neptunium 237]] isolé lors du [[traitement du combustible nucléaire usé]] : pour fixer les idées, {{nb|100 kg}} de combustible pour [[réacteur à eau légère]] irradié pendant trois ans ne contient que {{nb|700 g}} de {{nobr|neptunium 237}}, qui doit d'abord être purifié avant irradiation pour produire le {{nobr|plutonium 238}}, lequel doit ensuite être à son tour purifié en solution avant de pouvoir être utilisé sous forme de [[dioxyde de plutonium]] {{fchim|<sup>238</sup>PuO|2}} :
:{{Nucléide|1|0|n|Neutron}} + {{Nucléide|237|93|Np|Neptunium 237}} ⟶ {{Nucléide|238|93|Np|Neptunium 238}} <math>\mathrm{\xrightarrow[2,117\ jours]{\beta^-\ 1,292\ MeV}}</math> {{Nucléide|238|94|Pu}}.

=== Réacteur nucléaire ===

Du plutonium 238 est également produit au sein des réacteurs nucléaires à la suite de [[capture neutronique]] successive sur l'{{lnobr|uranium 235}} et l'[[uranium 238]] suivi de [[Radioactivité β|désintégration β<sup>−</sup>]] et/ou [[Radioactivité α|désintégration α]]<ref>{{Article |langue=en |titre=Fuel Cycle Options for the Production and Utilization of Denatured Plutonium |doi=10.13182/NSE07-A2681 |prénom1=Cornelis H. M. |nom1=Broeders |prénom2=Günther |nom2=Kessler |année=2007 |périodique=Nuclear Science and Engineering |volume=156 |numéro=1 |pages=2}}.</ref>.

=== Situation mondiale ===

Les [[États-Unis]] ont produit du plutonium 238 sur le site de [[Savannah River Site|Savannah River]] jusqu'à la fermeture de ce dernier en 1988. Le stock résiduel de plutonium 238 a pu alimenter la consommation américaines jusqu'en 1993, date à laquelle les États-Unis se sont approvisionnés en Russie<ref>[http://nuclear.inl.gov/spacenuclear/docs/final72005faqs.pdf Commonly asked questions about radioisotope power systms – space batteries], juillet 2005.</ref>. Face à la demande en hausse de la [[National Aeronautics and Space Administration|NASA]] pour alimenter plusieurs projets dont les différents rovers martiens et à des retards de livraison de la Russie<ref>{{Lien web
|langue=en
|url=https://spacenews.com/russia-withholding-plutonium-nasa-needs-deep-space-exploration/
|titre=Russia Withholding Plutonium NASA Needs for Deep Space Exploration
|auteur=Brian Berger
|jour=11
|mois=décembre
|année=2009
|site=[[SpaceNews]]
|consulté le=7 mai 2023
}}.</ref>, le [[Département de l'Énergie des États-Unis|département de l'énergie]] américain a relancé la production de {{exp|238}}Pu d'abord en très petite quantités en 2013, puis jusqu'à 50g en 2015 via un réacteur de recherche du [[laboratoire national d'Oak Ridge]]<ref>{{Lien web|langue=en|url=https://www.ornl.gov/news/ornl-achieves-milestone-plutonium-238-sample |titre=ORNL achieves milestone with plutonium-238 sample|auteur= Ron Walli| jour=22|mois=décembre|année=2015| éditeur=Oak Ridge National Laboratory |consulté le=22 December 2015}}.</ref>{{,}}<ref>{{Lien web|langue=en|auteur=Chelsea Harvey| titre=This is the fuel NASA needs to make it to the edge of the solar system - and beyond| url=https://www.washingtonpost.com/news/energy-environment/wp/2015/12/30/this-is-the-fuel-nasa-needs-to-make-it-to-the-edge-of-the-solar-system-and-beyond/| consulté le=4 January 2016 |editeur=The Washington Post |jour=30|mois=décembre|année=2015}}.</ref>.

== Notes et références ==
{{Références}}

== Annexes ==
=== Articles connexes ===
* [[Plutonium]]
* [[Isotope fertile]]
* [[Table des isotopes]]
* [[Générateur thermoélectrique à radioisotope]]

=== Liens externes ===
* [http://www.ne.doe.gov/neac/Meetings/Apr212008/NEGTN0NEAC_PU-238_042108.pdf Assessment of Plutonium-238 Production Alternatives] {{date-|avril 2008}}
* [http://www.ead.anl.gov/pub/doc/Plutonium.pdf Argonne National Laboratory] Plutonium

{{Tableau périodique des isotopes (navigation)}}
{{Portail|chimie|astronautique|physique|nucléaire}}

[[Catégorie:Isotope du plutonium]]
[[Catégorie:Radioisotope]]
[[Catégorie:Isotope fertile]]
[[Catégorie:Matériau nucléaire]]