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Le  '''problème des partis'''<ref>« Partis » et non « Parties » car il s'agit d'un problème de « partage » même si le support en est un jeu qui comporte des « parties ».</ref> est un [[problème mathématique]] portant sur les [[jeux de hasard]]. Il joue un rôle décisif dans l'histoire de la mathématisation du [[hasard]] et l'émergence d'une théorie mathématique du probable et du [[calcul des probabilités]] à partir des travaux de [[Blaise Pascal]] et de [[Christian Huygens]] au milieu du {{s-|XVII|e}}.

Le problème est d'apparence très simple<ref>Coumet (1970) p. 574.</ref>.
[[Image:Fermatpascal.JPG|right|thumb|Page d'une copie de la première lettre de Pascal à Fermat<ref>''Œuvres de Blaise Pascal'', Volume 2, Lefèvre, 1819, lettre du 29 juillet 1654, [https://books.google.com/books?id=N7EGAAAAQAAJ&pg=PA371 p. 371].</ref>]]

== Formulation ==

Le problème des partis a été exposé par [[Blaise Pascal]] en 1654 dans sa correspondance avec [[Pierre de Fermat]].

Le problème des partis, dans sa version la plus simple, est le suivant :

{{Énoncé
|Problème des partis
|Deux joueurs jouent à un jeu de hasard en 3 parties gagnantes, chacun ayant misé la même somme d'argent <math>m</math> ; or il se trouve que le jeu est interrompu avant que l'un des deux joueurs ait obtenu 3 victoires et ainsi remporté la victoire et de ce fait la totalité des enjeux soit <math>2m</math>. Comment, dans ces circonstances, doit-on partager les enjeux ?
}} 

La solution de Pascal, dans le cas le plus simple, c'est-à-dire celui où le jeu est interrompu lorsqu'un joueur a gagné 2 parties et l'autre 1 (situation notée 2/1), consiste à considérer que si le jeu avait continué il y aurait eu 2 situations possibles, 2/2 ou 3/1, selon que l'un ou l'autre des 2 joueurs ait gagné cette partie, et cela avec un « hasard égal<ref>Pascal, lettre à Fermat du 29 juillet 1654, La Pléiade, p. 77.</ref> ». Or à 2/2 il serait équitable que chacun récupère sa mise, <math>m</math>, et à 3/1 le premier joueur serait vainqueur et recevrait la totalité des enjeux soit <math>2m</math>. Ainsi y a-t-il 2 cas aussi possibles l'un que l'autre, et le premier joueur pourrait obtenir aussi bien <math>m</math> que <math>2m</math>; il est donc assuré de gagner au moins <math>m</math>. Quant à l'autre part des enjeux, <math>m</math>, il pourrait aussi bien l'avoir que ne pas l'avoir et il est équitable qu'il en prenne la moitié, <math>\frac{m}{2}</math>, son adversaire ayant donc droit à récupérer l'autre moitié. Dans la situation d'interruption du jeu à 2/1, le partage des enjeux doit donc se faire comme <math>\frac{3m}{2}</math> et <math>\frac{m}{2}</math>. 

Toutes les autres situations peuvent être analysées de la même façon à partir de celle-là.

== Rôle historique et épistémologique ==

[[Blaise Pascal|Pascal]] a développé ces résultats dans le III{{è}} « usage » de son ''[[Traité du triangle arithmétique]]'' : « Usage du Triangle Arithmétique pour déterminer les partis qu'on doit faire entre deux joueurs qui jouent en plusieurs parties ». Par la suite, mis au courant des recherches de Pascal au cours d'un voyage à Paris en 1655{{sfn|Coumet|1981|p=124}}, [[Christian Huygens]] publie en 1657 le premier ouvrage mathématique sur cette question, son ''Sur le calcul ès jeux de hasard''<ref>C'est la traduction en français du titre latin ''De ratiociniis in ludo aleae''. Voir Coumet (1981).</ref>, repris dans le livre de [[John Arbuthnot]] de 1692<ref>''Of the laws of chance'', Londres. Cet ouvrage est publié anonymement.</ref> et en première partie de l'''Ars conjectandi'' de [[Jakob Bernoulli]] en 1713<ref>Meusnier (1996).</ref>. 

Pendant trois siècles ce problème a été considéré par les historiens des [[mathématiques]] comme l'origine de la [[théorie des probabilités]] (calcul des chances ou [[calcul des probabilités]]) ; de manière beaucoup plus subtile [[Georges-Théodule Guilbaud]] a montré au milieu du {{s-|XX|e}} comment il fallait relire ces questions de partage et les recherches de Pascal sur la « Géométrie du hasard<ref>Pascal (1954), p. 1403.</ref> » à la lumière de la [[théorie des jeux]] et dans le contexte juridique de la rupture des [[contrats aléatoires]] pour en estimer toute la capacité innovatrice<ref>Coumet (1970) p. 575.</ref>. C'est un programme de recherche auquel va alors se consacrer, entre autres travaux, [[Ernest Coumet]] à partir du milieu des années 1960.

== Origines ==

D'après Pascal lui-même dans sa lettre à Fermat du {{date-|29 juillet 1654}} c'est [[Antoine Gombaud, chevalier de Méré]], qui lui a proposé ce problème, très probablement lors de leurs rencontres chez le [[Artus Gouffier de Roannez|duc de Roannez]] et de leurs échanges de réflexions sur les jeux de hasard et leurs affaires<ref>"J'admire bien davantage la méthode des partis que celle des dés; j'avais vu plusieurs personnes trouver celle des dés, comme M. le Chevalier de Méré, qui est celui qui m'a proposé ces questions..." Pascal (1954) p.77.</ref>. 

On retrouve cependant la trace de ce problème chez plusieurs auteurs italiens de traités de mathématiques depuis la fin du {{s-|XV|e}} : [[Luca Pacioli]], [[Jérôme Cardan]], [[Tartaglia]], [[Peverone]], une période pendant laquelle les différents auteurs proposent diverses solutions plus ou moins satisfaisantes et se critiquent. Depuis les travaux engagés par Laura Rigatelli sur les arithmétiques commerciales italiennes, on sait que ce problème apparait, dans la littérature italo-chrétienne des maîtres de calcul des marchands italiens, à la fin du {{s-|XIV|e}} dans un contexte qui est celui de la rupture des contrats de compagnie, c'est-à-dire des contrats entre marchands qui s'associent dans une entreprise risquée<ref>Meusnier (2007b).</ref>. 

La question reste entière de savoir s'il existerait une origine arabo-musulmane de ce problème<ref>Meusnier (2007a).</ref>.

== Notes et références ==
{{références|colonnes=2}}

=== Sources ===

* 1954 - Blaise Pascal, ''Œuvres complètes'', [[Bibliothèque de la Pléiade]], Gallimard. Nouvelle édition en 1998.
* 1970 - Ernest Coumet, "La théorie du hasard est-elle née par hasard?", ''Annales.E.S.C'', Paris, p. 574-598.
* 1981 - {{Chapitre|auteur=Ernest Coumet|titre chapitre=Sur 'Le calcul ès jeux de hasard' de Huygens: dialogues avec les mathématiciens français (1655-57)|titre ouvrage=Huygens et la France|édition=Vrin|année=1981|lire en ligne=https://books.google.fr/books?id=4sYMubIp2S4C&lpg=PP1&hl=fr&pg=PA123 |passage=123-138}}.
* 1996 - {{article|prénom1=Norbert|nom1= Meusnier|titre=L'émergence d'une mathématique du probable au {{s|XVII}}|périodique= Revue d'histoire des mathématiques|lien périodique= Revue d'histoire des mathématiques|volume= 2|numéro=1|pages=119-147|année=1996|url=http://smf4.emath.fr/Publications/RevueHistoireMath/2/html/smf_rhm_2_119-147.html}}.
* 2007a - {{article|prénom1=Norbert|nom1= Meusnier|titre=Le problème des partis peut-il être d'origine arabo-musulmane?|périodique=J.E.H.P.S|volume=3|numéro=1|année=2007|url= http://www.jehps.net/Juin2007/Meusnier_arabes.pdf|id=arabe}}.
* 2007b - {{article|prénom1=Norbert|nom1=Meusnier|titre=Le problème des partis bouge… de plus en plus|périodique=J.E.H.P.S|volume=3|numéro=1|année=2007|date=|url=http://www.jehps.net/Juin2007/Meusnier_partis.pdf|id=partis}}.

== Bibliographie complémentaire ==

* 1952 - Georges Th. Guilbaud, Les problèmes de partage. Matériaux pour une enquête sur les algèbres et les arithmétiques de la répartition, ''Économie appliquée'', t.&nbsp;V, 1, p.&nbsp;93-137.
* 1952 - G. Th. Guilbaud, Les théories de l'intérêt général et le problème logique de l'agrégation, ''Économie appliquée'', t.V, 4, p.501-584.
* 1965 - Ernest Coumet, "Le problème des partis avant Pascal", ''Archives internationales d'histoire des sciences'', 72-73, p. 245-272.
* 1975 - [[Ian Hacking]], ''The Emergence of Probability'', New York, [[Cambridge University Press]].
* 1988 - [[Lorraine Daston]], ''Classical Probability in the Enlightenment'', Princeton, [[Princeton University Press]].
* 1991 - [[Laurent Thirouin]], ''Le hasard et les règles. Le modèle du jeu dans la pensée de Pascal'', Vrin, Paris.
* 2004 - Histoire des probabilités et statistiques, coordonné par [[Évelyne Barbin]] et Jean-Pierre Lamarche, Ellipses, p. 4-23 : Norbert Meusnier, ''Le problème des partis avant Pacioli'' {{isbn|978-2729819231}}

== Liens externes ==

* Les minutes de Port-Royal, [https://www.youtube.com/watch?v=hhzkwCpa_Mc ''Faites vos jeux avec Blaise Pascal''].

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[[Catégorie:Histoire des mathématiques]]
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[[Catégorie:Blaise Pascal]]