Voir la source de Problème de Bâle

[[Fichier:Partial sums riemann zeta function.png|vignette|Sommes partielles de la fonction de Riemann, dont le cas s=2 correspond à la série du problème de Bâle]]
En [[mathématiques]], le '''problème de Bâle''' (connu parfois aussi sous le nom de '''problème de Mengoli''') est un célèbre problème d'[[Analyse (mathématiques)|analyse]], qui consiste à déterminer la valeur de la somme de la [[série convergente]] :
<center><math>\frac1{1^2} + \frac1{2^2} + \frac1{3^2} + \frac1{4^2} + \cdots
</math></center>

Le problème a été résolu par [[Leonhard Euler]], qui établit que cette somme <math>\sum_{n=1}^\infin \frac1{n^2}</math> vaut :
:<center><math>\frac{\pi^2}6</math></center>
et en donna une première preuve en 1735, puis une deuxième, plus rigoureuse, en 1741.

Posé en premier par [[Pietro Mengoli]] en 1644, étudié 40 ans plus tard par [[Jacques Bernoulli]] né à [[Bâle]], le problème résiste aux attaques des mathématiciens éminents de l'époque.

Des valeurs approchées furent d'abord calculées, la valeur demandée étant approximativement égale à {{formatnum:1.64493406684822643}}. À cause de la lente convergence de la série<ref group="note">Pour obtenir {{nombre|4|décimales}} exactes, il faut additionner plus de {{nombre|15000|termes}} de la somme.</ref>, une telle [[valeur approchée]] n'a pu être trouvée qu'en mettant en œuvre des méthodes d'[[Accélération de suite|accélération de convergence]], ce qui a notamment été fait par [[James Stirling (mathématicien)|Stirling]]<ref name=valappStirling>{{la}} Jacobo Stirling, [https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k62011b/f60.image.r=Stirling,%20James.langFR ''{{lang|la|Methodus Differentialis sive Tractatus de Summatione et Interpolatione Serierum Infinitarum}}''], 1730, Prop. {{XI}}, {{nobr|exemple 1}}, {{p.|55-56}} ; il obtient la relation <math>\sum_{n=1}^\infty \frac1{n^2} = \sum_{n=1}^\infty \frac{3}{n^2 {2n \choose n}}</math>, qui lui permet un calcul de la somme avec une bonne précision, mais ne reconnait pas la valeur exacte {{math|π{{2}}/6}}.</ref> en 1730 et [[Leonhard Euler|Euler]]<ref name=valappEuler>Euler, ''{{lang|la|Opera Omnia}}'', {{nobr|Series 1}}, {{vol.|14}}, {{p.|39-41}} ([https://scholarlycommons.pacific.edu/euler-works/20/ E20 : {{lang|la|De summatione innumerabilium progressionum}}]). Il prouve que <math>\sum_{n=1}^\infty \frac1{n^2}=\ln(2)^2 + \sum_{n=1}^\infty \frac1{2^{n-1}n^2}</math></ref> en 1731.

Euler, dont Bâle est également la ville natale, annonce en 1735 la découverte de la somme exacte<ref name=Preuve1Euler>Euler, ''{{lang|la|Opera Omnia}}'', {{nobr|Series 1}}, {{vol.|14}}, {{p.|73-86}} ([https://scholarlycommons.pacific.edu/euler-works/41/ E41 : {{lang|la|De summis serierum reciprocarum}}]).</ref>. Mais ses arguments d’alors font intervenir des [[Produit eulérien|produits infinis]] de façon non rigoureuse. Euler obtient une notoriété immédiate. Il a considérablement généralisé le problème et ses idées seront reprises par le mathématicien allemand [[Bernhard Riemann]] dans son [[Sur le nombre de nombres premiers inférieurs à une taille donnée|article de 1859]], dans lequel celui-ci définit la [[Fonction zêta de Riemann|{{nobr|fonction ζ}}]], en démontre les propriétés de base et énonce [[Hypothèse de Riemann|sa célèbre hypothèse]].

Six ans plus tard, en 1741, Euler produit [[#Deuxième preuve d'Euler|une deuxième démonstration]]<ref name=Preuve2Euler>{{article|nom=L. Euler |titre=Démonstration de la somme de cette suite 1 + 1/4 + 1/9 + 1/16 + 1/25 + 1/36 + {{etc.|virgule=non}} |revue=Journal lit. d'Allemagne, de Suisse et du Nord |volume=2 |année=1743 |p.=115-127 |url=https://scholarlycommons.pacific.edu/euler-works/63/}} (E63, ''{{lang|la|Opera Omnia}}'', {{I}}.14, {{p.|177-186}}), écrit en 1741. Voir aussi [https://books.google.fr/books?id=qf8cLkaJ7pgC&pg=PA121 sa lettre d'avril 1742] (OO396) à [[Clairaut]].</ref>.

== Première preuve d'Euler ==

En 1735, la déduction<ref name=Preuve1Euler/> d'Euler de la valeur {{math|π{{2}}/6}} utilise essentiellement des observations sur les [[polynôme]]s, en présumant que ces mêmes propriétés sont toujours vraies pour les [[Série (mathématiques)|séries infinies]]. Le raisonnement original d'Euler requiert une justification, mais même sans celle-ci, en obtenant la valeur correcte, il est capable de la vérifier numériquement par rapport aux valeurs approchées calculées précédemment par Stirling<ref name=valappStirling/> et lui-même<ref name=valappEuler/>. La concordance qu'il observe lui inspire suffisamment confiance pour annoncer son résultat à la communauté mathématique.

Pour suivre l'argument d'Euler, rappelons le développement en [[série de Taylor]] de la [[fonction trigonométrique|fonction sinus]] au voisinage de 0 :

:<math>\forall x \in \R,\ \sin x = \sum^{\infin}_{n=0} \frac{(-1)^n}{(2n+1)!} x^{2n+1}=x - \frac{x^3}{3!} + \frac{x^5}{5!} - \frac{x^7}{7!} + \cdots </math>

En supposant {{math|''x''}} non nul, on a  donc:
:<math> \frac{\sin x}x= 1 - \frac{x^2}{3!} + \frac{x^4}{5!} - \frac{x^6}{7!} + \cdots </math>

Maintenant, les racines de {{math|(sin''x'')/''x''}} (intersection avec l'axe des {{math|''x''}}) apparaissent précisément pour {{math|1=''x'' = ±''n''π}}, où {{math|1=''n'' = 1, 2, 3…}}. Euler exprime alors audacieusement cette série infinie comme un produit de facteurs linéaires donnés par ses racines, comme on le ferait pour un polynôme :

:<math>\begin{align}\frac{\sin x}x&=\left(1 - \frac x\pi\right)\left(1 + \frac x\pi\right)\left(1 - \frac x{2\pi}\right)\left(1 + \frac x{2\pi}\right)\left(1 - \frac x{3\pi}\right)\left(1 + \frac x{3\pi}\right) \cdots\\
&= \left(1 - \frac{x^2}{\pi^2}\right)\left(1 - \frac{x^2}{4\pi^2}\right)\left(1 - \frac{x^2}{9\pi^2}\right) \cdots\end{align}
</math>
Identifiant les coefficients de <math>x^2</math> (et d'ailleurs également de <math>x^4</math>, <math>x^6</math>, etc.) dans la série et dans le développement des premiers termes du produit infini, il obtient <math>\sum_{n=1}^\infty \frac1{n^2}=\frac{\pi^2}6</math> (ainsi que <math>\sum_{n=1}^\infty \frac1{n^4}=\frac{\pi^4}{90}</math>, etc. ; voir [[Fonction zêta de Riemann#Valeurs de la fonction zêta pour s entier pair non nul|les valeurs de la fonctions zêta aux entiers pairs]]) : en effet, en développement formellement le produit,  on voit que le coefficient de {{math|''x''{{2}}}} dans {{math|sin(''x'')/''x''}} est <math>-\left(\frac1{\pi^2} + \frac1{4\pi^2} + \frac1{9\pi^2} + \cdots \right) =
-\frac1{\pi^2}\sum_{n=1}^{\infty}\frac1{n^2}</math>. Mais, à partir du développement de la série infinie originale de {{math|sin(''x'')/''x''}}, le coefficient de {{math|''x''{{2}}}} est : <math>-\frac1{3!} = -\frac16</math>. Ces deux coefficients doivent être égaux ; ainsi,<math>
-\frac16=
-\frac1{\pi^2}\sum_{n=1}^{\infty}\frac1{n^2}
</math>. En multipliant les deux côtés de cette équation par {{math|–π{{2}}}}, on obtient la somme des inverses des carrés d'entiers positifs. 

Conscient de la faiblesse de son argumentation, Euler reviendra sur cette question en 1743, et proposera une autre justification du produit par factorisation de <math>\frac{(1+x\sqrt{-1}/n)^n-(1-x\sqrt{-1}/n)^n}{2\sqrt{-1}}</math>, avec ''n'' infiniment grand<ref>Euler, ''{{lang|la|Opera Omnia}}'', {{nobr|Series 1}}, {{vol.|14}}, {{p.|138-155}} ([https://scholarlycommons.pacific.edu/euler-works/61/ E61 : {{lang|la|De summis serierum reciprocarum ex potestatibus numerorum naturalium ortarum dissertatio altera, in qua eaedem summationes ex fonte maxime diverso derivantur}}])</ref>{{,}}<ref>Euler, ''{{lang|la|Opera Omnia}}'', {{nobr|Series 1}}, {{vol.|8}}, {{p.|120}} ([https://scholarlycommons.pacific.edu/euler-works/101/ E101 : {{lang|la|Introductio in analysin infinitorum, volume 1}}])</ref>{{,}}<ref>{{ouvrage|auteur=Morris Kline|titre=Mathematical thoughts from ancient to modern times|éditeur=Osford University Press|année=1972|page=449}}</ref>. Mais une preuve rigoureuse de cette égalité ne pourra vraiment être conduite qu'au siècle suivant, avec le développement des [[fonction analytique|fonctions analytiques]].

== Deuxième preuve d'Euler ==
Dans une deuxième preuve datant de 1741, Euler<ref>{{en}} Ed Sandifer, [http://eulerarchive.maa.org/hedi/HEDI-2004-03.pdf ''{{lang|en|How Euler did it – Basel Problem with Integrals}}''{{pdf}}], mars 2004.</ref>{{,}}<ref name=Preuve2Euler/> évalue de deux façons l'intégrale <math>\int_0^1\frac{\arcsin x}{\sqrt{1-x^2}}\,{\rm d}x</math>. On la calcule d'abord explicitement :
:<math>\int_0^1\frac{\arcsin x}{\sqrt{1-x^2}}\,{\rm d}x=\left[\frac{(\arcsin x)^2}2\right]_0^1=\frac{\pi^2}8</math>.
La deuxième évaluation passe par le développement en [[série entière]] de la fonction [[arc sinus]]. D'après la [[formule du binôme généralisée]],
:<math>\forall x\in\left]-1,1\right[\quad\arcsin'x=\frac1{\sqrt{1-x^2}}=\sum_{k=0}^\infty\frac{1\cdot3\cdot5\cdots(2k-1)}{2\cdot4\cdots(2k)}x^{2k}</math>.
Par « [[Primitive|intégration]] » [[Série entière#Dérivation|terme à terme]], on en déduit que :
:<math>\arcsin x=\sum_{k=0}^\infty\frac{1\cdot3\cdot5\cdots(2k-1)}{2\cdot4\cdots(2k)}\frac{x^{2k+1}}{2k+1}
</math>.
Or
:<math>\forall k\in\N\quad\int_0^1\frac{x^{2k+1}}{\sqrt{1-x^2}}\,{\rm d}x=\frac{2\cdot4\cdots(2k)}{3\cdot5\cdots(2k+1)}</math> ([[Intégrale de Wallis#Relation de récurrence, calcul des intégrales de Wallis|par récurrence, à l'aide d'une intégration par parties]], ou par changement de variable donnant une [[intégrale de Wallis]]) .
Par [[Théorème d'interversion série-intégrale|interversion série-intégrale]], Euler trouve ainsi la somme des inverses des carrés d'entiers impairs :
:<math>\frac{\pi^2}8=\int_0^1\frac{\arcsin x}{\sqrt{1-x^2}}\,{\rm d}x=\sum_{k=0}^{\infty}\frac1{(2k+1)^2}</math> 
Puis il conclut en séparant la série <math>\sum_{n=1}^{\infty}\frac1{n^2}</math> en la somme de ses termes pairs et la somme de ses termes impairs :
:<math>\sum_{n=1}^{\infty}\frac1{n^2}= \sum_{n=1}^{\infty}\frac1{(2n)^2} + \sum_{n=0}^{\infty}\frac1{(2n+1)^2} = \frac1{4}\sum_{n=1}^{\infty}\frac1{n^2} + \frac{\pi^2}8</math>
Donc :
:<math>\sum_{n=1}^{\infty}\frac1{n^2}= \frac{4}3 \frac{\pi^2}8 = \frac{\pi^2}6</math>
Cette deuxième preuve d'Euler semblait plus rigoureuse que la première. Il n'y manquait qu'une justification de l'interversion série-intégrale. On peut y remédier en invoquant, par exemple, le [[théorème de convergence monotone]], démontré par [[Beppo Levi]] en 1906.

== Preuves géométriques ==
Certaines preuves font appel à des théorèmes de [[géométrie euclidienne]] (et à l'[[Plan complexe|interprétation géométrique des nombres complexes]]). Ainsi, Brink établit la preuve suivante<ref>{{article |langue=en |titre=A Solution to the Basel Problem that Uses Euclid’s Inscribed Angle Theorem |auteur=David Brink |périodique=Mathematics Magazine |volume=87 |numéro=3 |date=juin 2014 |pages={{pp.|222-224}} |doi=10.4169/math.mag.87.3.222 |jstor=10.4169/math.mag.87.3.222}}</ref>: on applique le développement en série entière du [[logarithme complexe]] en {{math|''z'' {{=}} e{{exp|i''x}}}}'' :''
:<math>L(1+\mathrm{e}^{\mathrm{i}x}) = \sum_{n=1}^{+\infty} \frac{(-1)^{n+1} \mathrm{e}^{\mathrm{i}nx}}{n}</math>
On en déduit :
:<math>\int_0^\pi L(1+\mathrm{e}^{\mathrm{i}x})\,\mathrm{d}x = \left[\sum_{n=1}^{+\infty} \frac{(-1)^{n+1} \mathrm{e}^{\mathrm{i}nx}}{\mathrm{i}n^2}\right]_0^\pi = \sum_{n=0}^{+\infty} \frac{2\mathrm{i}}{(2n+1)^2}.</math>
Or, par le [[Théorème de l'angle inscrit et de l'angle au centre|théorème de l'angle inscrit]] :
:<math>L(1+\mathrm{e}^{\mathrm{i}x}) = \frac{1}{2}\ln(2+2\cos(x)) + \mathrm{i}\operatorname{Arg}(1+\mathrm{e}^{\mathrm{i}x}) \Longrightarrow \Im m (L(1+\mathrm{e}^{\mathrm{i}x})) = \operatorname{arg}(1+\mathrm{e}^{\mathrm{i}x}) = \frac{x}{2}.</math>
Ainsi :
:<math>\sum_{n=0}^{+\infty} \frac{2}{(2n+1)^2} = \Im m \left(\int_0^\pi L(1+\mathrm{e}^{\mathrm{i}x})\,\mathrm{d}x\right) = \int_0^\pi \frac{x}{2}\,\mathrm{d}x = \frac{\pi^2}{4}.</math>
Grant Sanderson a donné une preuve complètement géométrique, non rigoureuse sous cette forme,  mais ne reposant que sur des arguments analogues à ceux des [[Preuve sans mots|preuves sans mots]]{{Note|texte={{Lien web|langue=en|auteur=Grant Sanderson|url=https://www.3blue1brown.com/lessons/basel-problem|titre=A geometric answer to the Basel problem|site=[[3Blue1Brown]]|format=vidéo}}}}.

== Une démonstration élémentaire ==

L'argument suivant [[Démonstration (logique et mathématiques)|prouve]] l'identité {{math|1=ζ(2) = π{{2}}/6}}, où {{math|ζ}} est la [[fonction zêta de Riemann]]. C'est la démonstration la plus élémentaire disponible ; car la plupart des démonstrations utilisent des résultats de mathématiques avancées, telle que les [[série de Fourier|séries de Fourier]], l'[[analyse complexe]]<ref group="note">L'analyse complexe fournit par exemple [[Fonction trigonométrique#Définitions à partir des séries entières|un développement de {{math|π{{2}}/sin{{2}}(π''x'')}}]] qui, appliqué à {{math|1=''x'' = 1/2}}, donne la somme des carrés des inverses des entiers naturels impairs : {{math|π{{2}}/8}}, dont [[#La démonstration d'Euler|Euler avait déduit]] {{math|1=ζ(2) = π{{2}}/6}}.</ref> et le [[Fonction de plusieurs variables|calcul à plusieurs variables]] ; celle qui suit ne requiert même pas le [[analyse (mathématiques)|calcul à une variable]] (bien qu'une [[Limite d'une suite|limite]] soit prise à la fin).

Cette démonstration remonte au ''[[Cours d'Analyse]]''<ref>[https://books.google.fr/books?id=UrT0KsbDmDwC&pg=PA548 {{nobr|Note {{VIII}}}}].</ref> de [[Augustin Louis Cauchy|Cauchy]] (1821). Elle apparaît en 1954 dans le livre d'[[Akiva Yaglom|Akiva]] et {{Lien|Isaak Yaglom}} ''{{lang|ru-Latn|Neelementarnye Zadachi v Elementarnom Izlozhenii}}''<ref>{{en}} ''{{lang|en|Challenging Mathematical Problems with Elementary Solutions}}'', {{vol.|2}}, {{Google Livres|mQ75AAAAQBAJ|aperçu}}, {{nobr|{{lang|en|Problem}} 145a}}, {{p.|24 et 131}}.</ref>, puis dans le journal ''Eureka'' en 1982, attribuée à John Scholes, mais Scholes a déclaré qu'il a appris la démonstration de [[Peter Swinnerton-Dyer]], et dans tous les cas il maintient que la démonstration était « bien connue à [[Université de Cambridge|Cambridge]] à la fin des {{nobr|années 1960}} ».

=== Rappels trigonométriques ===
[[File:limit circle FbN.jpeg|thumb|L'inégalité<br>
<math>\tfrac{1}{2}r^2\tan\theta > \tfrac{1}{2}r^2\theta > \tfrac{1}{2}r^2\sin\theta</math><br>
est montrée comme vraie visuellement pour <math>\theta \in ]0, \pi/2[</math>. Les trois termes correspondant respectivement aux aires du triangle OAC, du secteur angulaire OAB, et du triangle OAB.

En inversant l'inégalité et en l'élevant au carré, on retrouve<br>
<math>\cot^2\theta<\tfrac{1}{\theta^2}<\csc^2\theta</math>.]]
On utilise les propriétés suivantes sur les fonctions [[cotangente]] {{math|1=cot = cos/sin}} et [[Fonction trigonométrique|cosécante]] {{math|1=csc = 1/sin}}, pour tout réel {{math|''x'' ∈ ]0, π/2[}} :
* l'[[Identité trigonométrique#Relations entre fonctions trigonométriques|identité trigonométrique {{math|1=csc{{2}}''x'' = 1 + cot{{2}}''x''}}]] ;
* l'[[Identité trigonométrique#Formule de Moivre et formules d'angle multiple|identité trigonométrique (déduite de la formule de Moivre)]] <math>\frac{\sin(nx)}{\sin^nx}=\sum_{0\le k\le\frac{n-1}2}(-1)^k{n\choose 2k+1}\cot^{n-2k-1}x</math>, où les <math>{n\choose 2k+1}</math> sont des [[Coefficient binomial|coefficients binomiaux]] ;
* l'[[Identité trigonométrique#Encadrement|encadrement {{math|cot{{2}}(''x'') < {{sfrac|1|''x''{{2}}}} < csc{{2}}(''x'')}}]] .

=== La démonstration ===

L'idée principale derrière la démonstration est d'encadrer les sommes partielles

:<math>\sum_{k=1}^m \frac1{k^2} = \frac1{1^2} + \frac1{2^2} + \cdots + \frac1{m^2}</math>

entre deux expressions, chacune tendant vers {{sfrac|π{{2}}|6}} quand {{math|''m''}} tend vers l'infini.

Soit {{math|''m''}} un entier positif. D'après [[#Rappels trigonométriques|l'identité]] vue supra, on a :

:<math>\frac{\sin((2m+1)x)}{\sin^{2m+1}x}=\sum_{k=0}^m(-1)^k{2m+1\choose 2k+1}\cot^{2(m-k)}x.</math>

En particulier, à chaque {{math|1=''x{{ind|r}}'' = {{sfrac|''r''π|2''m'' + 1}} ∈ ]0, π/2[}} pour {{math|''r'' ∈ {1, … , ''m''}<nowiki/>}} :

:<math>\sum_{k=0}^m(-1)^k{2m+1\choose 2k+1}\cot^{2(m-k)}x_r=\frac{\sin(r\pi)}{\sin^{2m+1}x_r}=0\quad\text{donc}\quad P(\cot^2x_r)=0</math>
où {{math|''P''}} est le polynôme
:<math>P(t) :=\sum_{k=0}^m(-1)^k{2m+1\choose 2k+1}t^{m-k}</math>.
Puisque ce polynôme est de degré {{math|''m''}} et que <math>\cot^2x_1>\cot^2x_2>\dots>\cot^2x_m</math>, les {{math|''m''}} nombres {{math|cot{{2}}(''x{{ind|r}}'')}} [[Factorisation des polynômes|sont exactement les racines de {{math|''P''}}]]. On peut donc calculer [[Relations entre coefficients et racines|leur somme en fonction des coefficients de {{math|''P''}}]] :

:<math>\cot ^2 \left(\frac{\pi}{2m+1}\right) + \cot ^2 \left(\frac{2 \pi}{2m+1}\right)+ \cdots + \cot ^2 \left(\frac{m \pi}{2m+1}\right)=\frac{{2m+1} \choose 3}{{2m+1} \choose 1}=\frac{2m(2m-1)}6.</math>

En substituant l'identité [[#Rappels trigonométriques|{{math|1=csc{{2}}(''x'') = 1 + cot{{2}}(''x'')}}]], on a

:<math>\csc^2 \left(\frac{\pi}{2m+1}\right)+\csc^2 \left(\frac{2 \pi}{2m+1}\right)+\cdots+\csc^2 \left(\frac{m \pi}{2m+1}\right)=\frac{2m(2m-1)}6+ m=\frac{2m(2m+2)}6.</math>

Maintenant, considérons l'encadrement [[#Rappels trigonométriques|{{math|cot{{2}}(''x'') < {{sfrac|1|''x''{{2}}}} < csc{{2}}(''x'')}}]]. En additionnant tous ces encadrements pour chaque nombre {{math|1=''x{{ind|r}}'' = {{sfrac|''r''π|2''m'' + 1}}}} et en utilisant les deux identités ci-dessus, on obtient

:<math>\frac{2m(2m-1)}6< \left( \frac{2m+1}{\pi} \right) ^2 + \left( \frac{2m+1}{2 \pi} \right) ^2 + \cdots + \left( \frac{2m+1}{m \pi} \right) ^2 < \frac{2m(2m+2)}6.</math>

En les multipliant par [{{math|π/(2''m'' + 1)}}]{{2}}, cela devient

:<math>\frac{\pi ^2}6\left(\frac{2m}{2m+1}\right)\left(\frac{2m-1}{2m+1}\right) < \frac1{1^2} + \frac1{2^2} + \cdots + \frac1{m^2} < \frac{\pi ^2}6\left(\frac{2m}{2m+1}\right)\left(\frac{2m+2}{2m+1}\right).</math>

Lorsque {{math|''m''}} tend vers l'infini, les parties gauche et droite [[équivalent|tendent chacune vers]] {{math|π{{2}}/6}} donc, par le [[théorème des gendarmes]],

:<math>\zeta(2) =
\sum_{k=1}^\infin \frac1{k^2} =
\lim_{m \to \infty}\left(\frac1{1^2} + \frac1{2^2} + \cdots + \frac1{m^2}\right) = \frac{\pi ^2}6.</math>

== Une démonstration par [[transformation de Fourier]] ==
Le calcul s'obtient très simplement avec l'aide des outils de l'[[Analyse harmonique (mathématiques)|analyse harmonique]]. Il suffit pour cela d'appliquer l'[[égalité de Parseval]] à la [[série de Fourier]] de la [[fonction périodique]] de {{nobr|période 2{{mathPi}}}} égale à l'identité sur [–{{mathPi}},&nbsp;{{mathPi}}[<ref>Voir par exemple {{Note autre projet|Wikiversité|Sommation/Exercices/Séries de Fourier et fonction zêta#Exercice 9-1|cet exercice corrigé|début=}}</ref>.

== Par la technique de Feynman ==
On peut aussi utiliser la technique de Feynman dans une intégrale remarquée par Freitas <ref>{{lien arXiv|langue=en|nom1=Freitas|prénom1=F. L.|titre=Solution of the Basel problem using the Feynman integral trick|année=2023|class=math.CA|eprint=2312.04608|mode=cs2}}</ref>:
<math display=block>I(\alpha) = \int_0^\infty \ln\left(1+\alpha \mathrm{e}^{-x}+\mathrm{e}^{-2x}\right)\mathrm{d}x.</math>

La primitive de cette intégrale ne peut pas être exprimée formellement, cependant en dérivant sous le signe intégrale par rapport à <math>\alpha</math> :
<math display=block>\frac{\mathrm{d}I}{\mathrm{d}\alpha} = \int_0^\infty \frac{\mathrm{e}^{-x}}{1+\alpha \mathrm{e}^{-x}+\mathrm{e}^{-2x}}\mathrm{d}x,</math>

qu'on peut calculer par le [[Intégration par changement de variable|changement de variable]] <math>u=\mathrm{e}^{-x}</math> et une décomposition en éléments simples. En particulier, pour <math>-2\leq\alpha\leq 2</math>, on a :
:<math>\frac{\mathrm{d}I}{\mathrm{d}\alpha} = \frac{2}{\sqrt{4-\alpha^2}}\left[\arctan\left(\frac{\alpha+2}{\sqrt{4-\alpha^2}}\right)-\arctan\left(\frac{\alpha}{\sqrt{4-\alpha^2}}\right)\right].</math>

Par la formule d'[[Arc_tangente#Formule_remarquable|addition des arc tangentes]] et en intégrant, on obtient :
<math display=block>I(\alpha) = -\frac{1}{2}\arccos\left(\frac{\alpha}{2}\right)^2 + c.</math>

La constante d'intégration <math>c</math> peut être obtenue en remarquant que
:<math>I(2)= \int_0^\infty \ln\left(1+2 \mathrm{e}^{-x}+\mathrm{e}^{-2x}\right)\mathrm{d}x = \int_0^\infty \ln\left[\left(1+ \mathrm{e}^{-x}\right)^2\right]\mathrm{d}x = 2\int_0^\infty \ln\left(1+ \mathrm{e}^{-x}\right)\mathrm{d}x \stackrel{t=\frac{x}{2}}{=} 4\int_0^\infty \ln\left(1+ \mathrm{e}^{-2t}\right)\mathrm{d}t = 4I(0).</math>
D'où :
:<math>I(2)= 4I(0) \ \Longleftrightarrow \ -\frac{1}{2}\arccos(1)^2 + c = 4\left(-\frac{1}{2}\arccos(0)^2 +c\right) \ \Longleftrightarrow \  c =\frac{\pi^2}{6}.</math>
De plus :
:<math>I(-2) = 2\int_0^\infty \ln(1-\mathrm{e}^{-x})\mathrm{d}x = -\frac{\pi^2}{3}.</math>

Or, cette dernière intégrale peut être évaluée grâce au développement en série entière du logarithme :
<math display=block>\int_0^\infty \ln(1-\mathrm{e}^{-x})\mathrm{d}x= - \sum_{n=1}^\infty \int_0^\infty \frac{\mathrm{e}^{-nx}}{n}dx = -\sum_{n=1}^\infty\frac{1}{n^2}.</math>

ce qui permet de conclure.

== La fonction zêta de Riemann ==

La [[fonction zêta de Riemann]] {{math|ζ(''s'')}}<ref>{{Lien web|nom1=El Jj|titre=Deux (deux ?) minutes pour... l'hypothèse de Riemann|url=https://www.youtube.com/watch?v=dNpdMYB8pZs|date=2016-04-04|consulté le=2019-03-14}}</ref> est une des plus importantes fonctions de la [[théorie des nombres]], à cause de sa relation avec la distribution des [[nombre premier|nombres premiers]]. La fonction est définie pour tout [[nombre complexe]]  s de partie réelle strictement supérieure à 1 par la formule suivante<ref group="note">Il est possible en fait de définir ζ pour tout complexe différent de 1 par différentes méthodes de prolongement : voir [[Fonction zêta de Riemann#Extension à .E2.84.82-.7B1.7D|Fonction zêta de Riemann, § Extension à ℂ<nowiki>-{</nowiki>1}]].</ref> :

:<math>
\zeta(s) =
\sum_{n=1}^\infin\frac1{n^s}
</math>

En prenant ''s'' = 2, nous voyons que {{math|ζ(2)}} est égale à la somme des inverses des carrés d'entiers positifs :

:<math>
\zeta(2) =
\sum_{n=1}^\infin\frac1{n^2} =
\frac1{1^2} + \frac1{2^2} + \frac1{3^2} + \frac1{4^2} + \cdots \approx 1{,}644934
</math>

On montre facilement, en majorant cette série à termes positifs par une [[Somme télescopique|série télescopique]], qu'elle converge et que {{math|1=ζ(2) < 5/3 = 1,66…}}, mais la valeur exacte {{math|1=ζ(2) = π{{2}}/6}} est demeurée longtemps inconnue, jusqu'à ce qu'Euler la calcule numériquement en 1735, (ré)inventant pour ce faire la formule connue à présent sous le nom de [[formule d'Euler-Maclaurin|formule sommatoire d'Euler-Maclaurin]], et constate son égalité (jusqu'à la vingtième décimale) avec {{math|π{{2}}/6}}, puis construise la démonstration. Il a démontré bien plus tard que {{math|ζ}}(2''n'') a [[Nombre de Bernoulli#Les nombres de Bernoulli et la fonction zêta de Riemann|une belle expression en nombres de Bernoulli]] pour tout entier ''n'' > 0.

== Notes et références ==
{{Traduction/Référence|en|Basel problem|165629347|type=note}}
=== Notes ===
{{Références|groupe="note"|colonnes=1}}

=== Références ===
{{Références|colonnes=2}}

== Voir aussi ==
=== Articles connexes ===
* [[Constante d'Apéry]]
* [[Pi]]
* [[Théorème de factorisation de Weierstrass]]
* [[Théorème de Cesàro (théorie des nombres)]]
* [[Valeurs particulières de la fonction zêta de Riemann]]

=== Liens externes ===
* Bernard Martin, [https://www.apmep.fr/IMG/pdf/Expose_probleme_de_Bale.pdf ''Le problème de Bâle. Comment un calcul de primitive peut amener à la détermination de la somme d’une série'']
* {{en}} Ed Sandifer, [http://www.math.uiuc.edu/~reznick/sandifer.pdf ''{{lang|en|Euler’s Solution of the Basel Problem – The Longer Story}}'' {{pdf}}]
* {{en}} Ed Sandifer, [http://eulerarchive.maa.org/hedi/HEDI-2003-12.pdf ''{{lang|en|How Euler did it – Estimating the Basel Problem}}'' {{pdf}}]
*{{Lien web|langue=en|auteur=Robin Chapman|url=http://scipp.ucsc.edu/~haber/ph116A/zeta2.pdf|titre=Evaluating ζ(2)|format=pdf}} (compilation de quatorze preuves)
*{{Lien web|langue=en|auteur=Grant Sanderson|url=https://www.3blue1brown.com/lessons/basel-problem|titre=A geometric answer to the Basel problem|site=[[3Blue1Brown]]|format=vidéo}}
*{{MathWorld|nom_url=RiemannZetaFunctionZeta2|titre=Riemann Zeta Function zeta(2)}}

{{portail|analyse|théorie des nombres}}

[[Catégorie:Théorie des nombres]]
[[Catégorie:Analyse harmonique]]
[[Catégorie:Fonction zêta]]
[[Catégorie:Leonhard Euler]]
[[Catégorie:Série (mathématiques)]]
[[Catégorie:Pi]]