Voir la source de Théorème de Radon-Nikodym-Lebesgue

{{homon|Théorème de Lebesgue}}
Le '''théorème de [[Johann Radon|Radon]]-[[Otto Nikodym|Nikodym]]-[[Henri Lebesgue|Lebesgue]]''' est un [[théorème]] d'[[analyse (mathématiques)|analyse]], une branche des [[mathématiques]] qui est constituée du [[Calcul infinitésimal|calcul différentiel et intégral]] et des domaines associés.

== Définitions ==
{{Théorème|nom=Définitions|
énoncé=Soit {{math|''ν''}} une [[mesure positive]] sur <math>(X,\mathcal A)</math> et soient {{math|''ρ''}}, {{surligner|{{math|''ρ''}}}} des mesures positives ou [[Mesure complexe|complexes]] sur <math>(X,\mathcal A)</math>.
* On dit que {{math|''ρ''}} est ''[[Absolue continuité|absolument continue]]'' par rapport à {{math|''ν''}}, et l'on note {{math|''ρ'' ≪ ''ν''}}, si pour tout <math>A\in\mathcal A</math> tel que {{math|1=''ν''(''A'') = 0}}, on a également {{math|1=''ρ''(''A'') = 0}}.
* On dit que {{math|''ρ''}} est ''portée par<ref name=Rudin/>'' <math>E\in\mathcal A</math> (ou ''concentrée sur'' {{math|''E''}}) si pour tout <math>A\in\mathcal A</math> on a {{math|1=''ρ''(''A'') = ''ρ''(''A'' ∩ ''E'')}}. (Cela équivaut à l'hypothèse : pour tout <math>A\in\mathcal A,</math> {{math|1=''ρ''(''A''\''E'') = 0}}.)
* On dit que {{math|''ρ''}} et {{surligner|{{math|''ρ''}}}} sont ''mutuellement singulières<ref name=Rudin/>'' (ou ''étrangères''), et l'on note {{math|''ρ'' ⊥}} {{surligner|{{math|''ρ''}}}}, s'il existe <math>E\in\mathcal A</math> telle que {{math|''ρ''}} soit portée par {{math|''E''}} et {{surligner|{{math|''ρ''}}}} soit portée par {{math|''E{{exp|c}}''}}.
}}


== Théorème de Radon-Nikodym-Lebesgue ==

Le théorème de Radon-Nikodym-Lebesgue est un résultat de [[théorie de la mesure]], cependant une démonstration faisant intervenir les [[Espace de Hilbert|espaces de Hilbert]] a été donnée par le mathématicien [[John von Neumann]] au début du {{s-|XX|e}}<ref name=Rudin>Voir par exemple {{Rudin}} pour de plus amples détails.</ref>. Il s'énonce de la façon suivante :

{{Théorème|||énoncé=Soient {{math|''ν''}} une mesure positive [[Mesure sigma-finie|σ-finie]] sur <math>(X,\mathcal A)</math> et {{math|''μ''}} une mesure positive σ-finie (respectivement réelle, resp. complexe) sur <math>(X,\mathcal A)</math>.

*Il existe un unique [[Couple (mathématiques)|couple]] {{math|(''μ''{{ind|1}}, ''μ''{{ind|2}})}} de mesures positives σ-finies (resp. réelles, resp. complexes) tel que :
**<math>\mu = \mu_1 + \mu_2,</math>
**<math>\mu_1 \ll \nu,</math>
**<math>\mu_2 \perp \nu.</math>
:Cette décomposition s'appelle la {{Lien|trad=Lebesgue's decomposition theorem|Théorème de décomposition de Lebesgue|texte=décomposition de Lebesgue}} de {{math|''μ''}} par rapport à {{math|''ν''}}.
*Il existe une unique (à égalité {{math|''ν''}}-[[presque partout]] près) fonction {{math|''h''}} mesurable positive (resp. {{math|''ν''}}-intégrable réelle, resp. {{math|''ν''}}-intégrable complexe) telle que pour tout <math>A\in\mathcal A</math> on ait :<center><math>\mu_1(A) = \int_A h~\mathrm d\nu = \int_X 1_A h~\mathrm d\nu.</math></center>Cette fonction {{math|''h''}} s'appelle la '''dérivée de Radon-Nikodym''' de {{math|''μ''{{ind|1}}}} par rapport à {{math|''ν''}}.|nom=Théorème de Radon-Nikodym-Lebesgue}}

==Propriétés de la dérivée de Radon-Nikodym==
La dérivée de Radon-Nikodym a les propriétés suivantes<ref>{{cite arxiv | eprint=2501.18374 | title=Proofs for Folklore Theorems on the Radon-Nikodym Derivative | author=Yaiza Bermudez, Gaëtan Bisson, Iñaki Esnaola, and Samir M. Perlaza | year=2025 }}</ref> :
* Soient ''ν'', ''μ'' et ''λ'' des mesures σ-finies sur le même [[espace mesurable]]. Si ''ν'' ≪ ''λ'' et ''μ'' ≪ ''λ'' (''ν'' et ''μ'' sont toutes deux absolument continues par rapport à ''λ''), alors  
<math display="block"> \frac{d(\nu+\mu)}{d\lambda} = \frac{d\nu}{d\lambda}+\frac{d\mu}{d\lambda} \quad \lambda\text{-presque partout}.</math>
* Si ''ν'' ≪ ''μ'' ≪ ''λ'', alors  
<math display="block">\frac{d\nu}{d\lambda}=\frac{d\nu}{d\mu}\frac{d\mu}{d\lambda}\quad\lambda\text{-presque partout}.</math>
* En particulier, si ''μ'' ≪ ''ν'' et ''ν'' ≪ ''μ'', alors  
<math display="block"> \frac{d\mu}{d\nu}=\left(\frac{d\nu}{d\mu}\right)^{-1}\quad\nu\text{-presque partout}.</math>
* Si ''μ'' ≪ ''λ'' et {{mvar|g}} est une fonction ''μ''-intégrable, alors  
<math display="block"> \int_X g\,d\mu = \int_X g\frac{d\mu}{d\lambda}\,d\lambda.</math>

== Densité d'une mesure ==

{{Théorème|Définition|
Soit {{math|''ν''}} une mesure positive σ-finie sur <math>(X,\mathcal A)</math> et soit {{math|''ρ''}} une mesure positive σ-finie (resp. réelle, resp. complexe) sur <math>(X,\mathcal A).</math>
On dit que ''{{math|ρ}} possède une densité {{math|h}} par rapport à {{math|ν}}'' si {{math|''h''}} est une fonction mesurable positive (resp. {{math|''ν''}}-intégrable réelle, resp. {{math|''ν''}}-intégrable complexe), telle que pour tout <math>A\in\mathcal A</math> on ait :

<center><math>\rho(A) = \int_A h~\mathrm d\nu = \int_X 1_A\,h~\mathrm d\nu.</math></center>

On note
<center><math>h=\frac{\mathrm d\rho}{\mathrm d\nu}.</math></center>
}}

En conséquence du théorème de Radon-Nikodym, on a la propriété suivante :
{{Théorème|Proposition|Soient {{math|''ν''}} une mesure positive σ-finie sur <math>(X,\mathcal A)</math> et {{math|''μ''}} une mesure positive σ-finie (resp. réelle, resp. complexe) sur <math>(X,\mathcal A).</math> Il y a équivalence entre :

* <math>\mu \ll \nu, </math>
* {{math|''μ''}} possède une densité par rapport à {{math|''ν''}}.
}}
{{Démonstration|Si <math>\mu\ll\nu</math> alors, clairement, <math>\mu=\mu+0</math> est une décomposition de {{math|''μ''}} satisfaisant le théorème de Radon-Nikodym donc, en vertu de la dernière partie du théorème, {{math|''μ''}} possède une densité par rapport à {{math|''ν''}}. Réciproquement, notons {{math|''h''}} la densité de {{math|''μ''}} par rapport à {{math|''ν''}}. Si
<center><math>\nu(A) = \int_X 1_A~\mathrm d\nu = 0,</math></center>
alors <math>1_A</math> est nul {{math|''ν''}}-presque partout. Il suit que <math>1_A\,h</math> est nul {{math|''ν''}}-presque partout également, donc
<center><math>\mu(A) = \int_X 1_A\,h~\mathrm d\nu=0.</math></center>}}

L'hypothèse de [[Mesure sigma-finie|σ-finitude]] est importante : par rapport à la [[mesure de comptage]], une mesure est toujours absolument continue mais [[mesure de Lebesgue|celle de Lebesgue sur ℝ]] (par exemple) n'a pas de densité.

=== Densité de probabilité d'un vecteur aléatoire ===

{{Théorème|Rappel|
* On appelle [[densité de probabilité]] d'une [[variable aléatoire]] {{math|''X''}} à valeurs dans ℝ{{exp|''d''}} une [[fonction (mathématiques)|fonction]] {{math|''f''}} mesurable, telle que pour toute partie borélienne {{math|''A''}} ⊂ ℝ{{exp|''d''}} :<center><math>\mathbb{P}(X\in A)= \int_{\R^d}\ 1_A(u)\,f(u)~\mathrm du= \int_A\ f(u)~\mathrm du.</math></center>
* La [[variable aléatoire|loi de probabilité]] <math>\mathbb{P}_X</math> d'une variable aléatoire <math>X</math> à valeurs dans ℝ{{exp|''d''}} est la mesure de probabilité définie, pour toute partie borélienne {{math|''A''}} ⊂ ℝ{{exp|''d''}}, par :<center><math>\mathbb{P}_X(A)=\mathbb{P}(X\in A).</math></center>
* Si ''d ''{{=}} 1, {{math|''X''}} est appelée une [[variable aléatoire réelle]], ou encore v.a.r.}}
Au vu des définitions, le langage probabiliste diffère légèrement du langage de la théorie de la mesure. Il y a équivalence entre les trois assertions :
* Une variable aléatoire {{math|''Z''}} à valeur dans ℝ{{exp|''d''}} possède une densité de probabilité.
* La mesure <math>\mathbb{P}_Z</math> possède une densité par rapport à la [[mesure de Lebesgue]] sur ℝ{{exp|''d''}}.
* La mesure <math>\mathbb{P}_Z</math> est absolument continue par rapport à la mesure de Lebesgue sur ℝ{{exp|''d''}}.
Le dernier point peut se réécrire, en langage probabiliste.

{{Théorème|Critère|Une variable aléatoire {{math|''Z''}} à valeurs dans ℝ{{exp|''d''}} possède une densité de probabilité si et seulement si, pour chaque borélien {{math|''A''}} de ℝ{{exp|''d''}} dont la mesure de Lebesgue est nulle, on a :
:<math>\mathbb{P}\left(Z\in A\right)=0.</math>}}

Ce critère est rarement employé dans la pratique pour démontrer que {{math|''Z''}} possède une densité, mais il est en revanche utile pour démontrer que certaines probabilités sont nulles. Par exemple, si le vecteur aléatoire {{math|''Z'' {{=}} (''X'', ''Y'')}} possède une densité, alors :
* <math>\mathbb{P}\left(X=Y\right)=0,</math>
* <math>\mathbb{P}\left(X^2+Y^2=1\right)=0,</math>
car la mesure de Lebesgue (autrement dit, l'aire) de la [[première bissectrice]] (resp. du [[cercle unité]]) est nulle.

Plus généralement, la mesure de Lebesgue du [[graphe d'une fonction]] mesurable ''φ'' étant nulle, il suit que :
* <math>\mathbb{P}\left(Y=\varphi(X)\right)=0.</math>
De même, il y a de nombreux exemples où, du fait que l'ensemble <math>\left\{(x,y)\in\R^2\mid\psi(x,y)=0\right\}</math> est de mesure de Lebesgue nulle, on peut conclure que :
* <math>\mathbb{P}\left(\psi(X,Y)=0\right)=0.</math>

Le critère de Radon-Nikodym peut aussi être utilisé pour démontrer qu'un vecteur aléatoire ne possède pas de densité, par exemple si :

:<math>Z=\left(\cos \Theta, \sin \Theta\right),</math>

où {{math|Θ}} désigne une variable aléatoire suivant la [[Loi uniforme continue|loi uniforme]] sur {{math|[0, 2π]}}, alors {{math|''Z''}} ne possède pas de densité car :

:<math>\mathbb{P}\left(X^2+Y^2-1=0\right)=1.</math>

{{Théorème|Remarque|2=Dans le cas ''d ''= 1, une variable aléatoire {{math|''Z''}} à valeurs dans ℝ possède une densité de probabilité si et seulement si sa [[fonction de répartition]] est [[Propriété locale|localement]] absolument continue.}}

== Note et référence ==
{{Références}}

== Bibliographie ==
*{{Ouvrage|langue=en|auteur1=Leo Egghe|titre=Stopping Time Techniques for Analysts and Probabilists|éditeur=|collection=London Mathematical Society Lecture Note Series|année=1984|pages totales=351|isbn=978-0-521-31715-3|lire en ligne=https://books.google.com/books?id=GsZzLBVsLcUC&printsec=frontcover}}
*{{Ouvrage|lang=en|auteur={{Lien|Gerald Folland}}|titre=Real Analysis: Modern Techniques and Their Applications|numéro d'édition=2|éditeur=[[John Wiley & Sons]]|année=2013|url={{Google Livres|wI4fAwAAQBAJ|page autre=PT80}}}}
*{{Article|lang=en|auteur=J. von Neumann|titre=On rings of operators, III|revue=[[Annals of Mathematics|Ann. Math.]]|vol=41|numéro=1|année=1940|p.=94-161|url=http://venus.usc.edu/PAPERS/RINGS/RingsIII.pdf}} (cf. p. 127-130)
*{{Article|auteur=Otton Nikodym|titre=Sur une généralisation des intégrales de M. J. Radon|revue=[[Fundamenta Mathematicae|Fund. Mat.]]|vol=15|année=1930|p.=131-179|url=https://eudml.org/doc/212339|zbl=56.0922.02}}
*{{Article|lang=de|auteur=J. Radon|titre=Theorie und Anwendungen der absolut additiven Mengenfunktionen|revue=Sitz. Kais. [[Académie autrichienne des sciences|Akad. Wiss. Wien]]|série=Math.-Naturwiss. Kl. IIa|vol=122|année=1913|p.=1295-1438}}

{{Portail|analyse}}

{{DEFAULTSORT:Theoreme Radon Nikodym Lebesgue}}
[[Catégorie:Théorème de la théorie de la mesure|Radon Nikodym Lebesgue]]