Voir la source de Univers constructible

{{Homon|Constructible}}
En [[mathématiques]] et en [[théorie des ensembles]], l''''univers constructible''', ou l''''univers constructible de Gödel''', noté {{var|L}}, est une [[Classe (mathématiques)|classe]] d'ensembles qui peuvent entièrement être décrits en termes d'ensembles plus simples. Elle a été introduite en 1938 par [[Kurt Gödel]] dans son article sur {{Citation|la [[cohérence (logique)|cohérence]] de l'[[axiome du choix]] et de l'[[hypothèse généralisée du continu]]}}<ref>{{Article|langue=en
  | doi = 10.1073/pnas.24.12.556
  | nom = Gödel | prénom = Kurt
  | titre = The Consistency of the Axiom of Choice and of the Generalized Continuum-Hypothesis
  | périodique = [[Proceedings of the National Academy of Sciences|PNAS]]
  | volume = 24
  | numéro = 12
  | année = 1938
  | pages = 556–557
  | pmid = 16577857
  | pmc = 1077160
  | jstor=87239}}.</ref>. Il y montrait que cette classe est un {{Lien|langue=en|trad=inner model|fr=modèle intérieur}} de la [[théorie ZF]] et que l'axiome du choix et l'hypothèse généralisée du continu sont vrais dans ce modèle. Ceci prouve que ces deux propositions sont cohérentes avec les axiomes de ZF, à condition que ZF soit déjà cohérente. De nombreux autres théorèmes (comme les résultats d’existence dépendant du [[lemme de Zorn]]) n'étant applicables que si on admet l’axiome du choix, sa cohérence est un résultat important.

== Définition ==

L'[[Univers (logique)|univers]] constructible de Gödel {{var|L}} peut être construit par étapes, de manière similaire à la construction de l'[[univers de von Neumann]], {{var|V}}. Les étapes sont indexées par des [[nombre ordinal|nombres ordinaux]]. Alors que dans l'univers de [[von Neumann]], l'étape {{math|{{var|V}}<sub>α+1</sub>}} d'un [[ordinal successeur|successeur]] est l'ensemble de tous les sous-ensembles de l'étape ''V''<sub>α</sub> précédente, dans l'univers constructible de Gödel cet ensemble est l'ensemble des sous-ensembles qui sont définissables par une [[formule (logique mathématique)|formule]] {{var|φ}} qui respecte les contraintes suivantes :
* {{var|φ}} doit être une formule du [[langage formel]] de la théorie des ensembles ;
* {{var|φ}} ne doit être paramétrée que par des ensembles de l'étape précédente ;
* les variables [[quantificateur (logique)|quantifiées]] doivent prendre leur domaine dans l'étape précédente.

En construisant une étape uniquement à partir de ce qui a été construit aux étapes précédentes, on s'assure que l'ensemble qui en résulte soit indépendant des particularités du modèle de théorie des ensembles qui sert de base, et soit inclus dans n'importe lequel des modèles de cette théorie.

=== Définition formelle ===

Soit

: <math>\begin{align}
\text{Def}(X) := & \Bigl\{ \{y \mid y\in X \text { et } \Phi(y,z_1,\ldots,z_n) \text{ est vraie dans }(X,\in)\} \mid \\ & \qquad \Phi \text{ une formule du premier ordre et }z_1,\ldots,z_n\in X\Bigr\}.
\end{align}</math>

Alors, par les règles de [[récurrence transfinie]], on définit :

* <math>L_0 =\varnothing</math>
* <math>L_{\alpha+1} = \text{Def}(L_\alpha)\,</math>
* Si <math>\lambda</math> est un [[ordinal limite]], alors <math>L_{\lambda} = \bigcup_{\alpha < \lambda} L_{\alpha} . </math>

:L'univers L est alors défini comme l'union de tous les ''L''<sub>α</sub> {{Note|texte=Chaque <math>L_\alpha</math> est bien un ensemble, mais leur réunion forme une [[classe propre]].}} : 
:*<math>L = \bigcup_{\alpha} L_{\alpha} . </math>

Si z appartient à ''L''<sub>α</sub>, alors z = {y | y ∈ ''L''<sub>α</sub> et y ∈ z} ∈ {{math|Def}}(''L''<sub>α</sub>) = ''L''<sub>α+1</sub>. Par conséquent ''L''<sub>α</sub> est inclus dans ''L''<sub>α+1</sub>, qui est un sous-ensemble de l'[[ensemble des parties]] de ''L''<sub>α</sub>. ''L'' est donc une tour d'[[ensemble transitif|ensembles transitifs]] emboîtés.

Les éléments de la [[Classe (mathématiques)|classe]] {{var|L}} sont appelés ''ensembles constructibles ''; {{var|L}} est appelé l'''univers constructible''. {{math|Def}} et ''L ''sont [[Ensemble définissable|définissables]]<ref>{{Ouvrage|langue=en|auteur1=[[Keith Devlin|Keith J. Devlin]]|titre=Constructibility|lieu=Berlin|éditeur=Springer|année=1984|passage=56-107|isbn=978-0-387-13258-7|lire en ligne=http://projecteuclid.org/DPubS?verb=Display&version=1.0&service=UI&handle=euclid.pl/1235419480|numéro chapitre=II|titre chapitre=The Constructible Universe}}.</ref>. L'[[axiome de constructibilité]], qu'on peut écrire ''V = L'', affirme que tout ensemble de ''V ''est constructible, c'est-à-dire qu'il est aussi dans ''L''.

== Quelques développements sur ''L'' ==

On peut également définir {{Var|L}} par la formule {{indente|
Pour tout ordinal {{math|α}}, <math>L_{\alpha} = \bigcup_{\beta < \alpha} \operatorname{Def} (L_{\beta}).</math>}}

Les ensembles {{Var|L{{ind|n}}}} et {{Var|V{{ind|n}}}} sont identiques pour n'importe quel ordinal {{var|n}} fini, qu'on accepte ou rejette l'axiome de constructibilité. Par conséquent {{math|1={{var|L}}<sub>ω</sub> = {{var|V}}<sub>ω</sub>}} : leurs éléments sont exactement les {{Lien|langue=en|trad=hereditarily finite set|fr=Ensemble héréditairement fini|texte=ensembles héréditairement finis}}. Pour les ordinaux plus grands, l'égalité n'est plus valide. Même pour les modèles de [[ZFC]] dans lesquels {{Var|V}} est égal à {{Var|L}}, {{Math|{{Var|L}}<sub>ω+1</sub>}} est un sous-ensemble strictement inclus dans {{Math|{{Var|V}}<sub>ω+1</sub>}}, ce qui entraîne que {{math|{{var|L}}<sub>α+1</sub>}} est un sous-ensemble strict de l'ensemble des parties de {{Math|{{var|L}}<sub>α</sub>}} pour tout {{math|α > ω}}.

Pour un ordinal infini {{math|α}}, {{math|{{var|L}}<sub>α</sub>}} et {{math|α}} sont en [[bijection]], par une bijection constructible. Ces ensembles sont donc [[équipotent]]s dans n'importe quel modèle de théorie des ensembles les incluant.

Tel que défini au-dessus, {{Math|Def({{var|X}})}} est l'ensemble des sous-ensembles de {{var|X}} définis par des formules de [[Hiérarchie arithmétique|classe {{math|Δ{{ind|0}}}}]], les formules de la théorie des ensembles ne comprenant que des {{Lien|langue=en|trad=bounded quantifier|fr=quantificateur borné|texte=quantificateurs bornés}} dont les paramètres sont {{var|X}} ou ses éléments.

Une définition équivalente de Gödel, sans référence à la définissabilité, caractérise chaque ''L''{{ind|α+1}} comme l'intersection de l'ensemble des parties de ''L''{{ind|α}} et de la clôture de ''L''{{ind|α}}∪{''L''{{ind|α}}<nowiki/>} par une collection de neuf fonctions particulières.

Tout sous-ensemble de ω ou relation sur ω qui est [[hiérarchie arithmétique|arithmétique]] appartient à L<sub>ω+1</sub>, la définition arithmétique en fournissant une dans L<sub>ω+1</sub>. Inversement, tout sous-ensemble de ω appartenant à L<sub>ω+1</sub> est arithmétique, car les éléments de L<sub>ω</sub> sont codables par des [[Entier naturel|entiers naturels]] de manière que l'appartenance ∈ soit définissable, donc arithmétique. Cependant, L<sub>ω+2</sub> contient déjà certains sous-ensembles non arithmétiques de ω, comme l'ensemble des (entiers codant des) énoncés arithmétiques vrais : en effet, il est définissable à partir de L<sub>ω+1</sub> ; il appartient donc à L<sub>ω+2</sub>.

Tous les sous-ensembles de ω et les relations sur ω qui sont {{Lien|langue=en|trad=Hyperarithmetical theory|fr=Théorie hyperarithmétique|texte=hyperarithmétiques}} appartiennent à <math>L_{\omega_1^{\mathrm{CK}}}</math>, où <math>\omega_1^{\mathrm{CK}}</math> désigne l'{{Lien|langue=en|trad=Church–Kleene ordinal|fr=ordinal de Church-Kleene}} et, inversement, les sous-ensembles de ω appartenant à <math>L_{\omega_1^{\mathrm{CK}}}</math> sont hyperarithmétiques<ref>{{Ouvrage|langue=en|auteur1=[[Jon Barwise]]|titre=Admissible Sets and Structures|sous-titre=an approach to definability theory|lieu=Berlin|éditeur=[[Springer Verlag|Springer]]|année=1975|pages totales=394|passage=60|isbn=0-387-07451-1}}<!-- (comment following proof of theorem 5.9)-->.</ref>.

== ''L ''est un modèle intérieur standard de ZFC ==
{{Var|L}} est un modèle « standard », au sens où c'est une [[Ensemble transitif|classe transitive]] dont la relation d'appartenance est celle de ''V''. Par conséquent, toute formule {{math|Δ{{ind|0}}}} est {{Lien|langue=en|trad=Absoluteness|fr=Formule absolue|texte=absolue}} pour ''L''. On en déduit que {{Var|L}} est un modèle intérieur, c'est-à-dire une sous-classe de ''V ''qui contient tous les [[nombre ordinal|ordinaux]] de {{Var|V}}. En effet, on montre par [[Récurrence transfinie|induction transfinie]], que α ∈ ''L''<sub>α+1</sub><ref>{{Ouvrage|langue=en|auteur1=[[Thomas Jech]]|titre=Set Theory|lieu=Berlin/Heidelberg/New York|éditeur=Springer|collection=Springer Monographs in Mathematics|année=2002|numéro d'édition=3|pages totales=769|passage=175|isbn=3-540-44085-2|lire en ligne={{Google Livres|WTAl997XDb4C|page=175}}}}.</ref>. {{Var|L}} est un modèle de ZFC<ref>{{Harvsp|Jech|2002|p=176}}.</ref>, c'est-à-dire qu'il satisfait les [[axiome]]s suivants :
; L'[[axiome de fondation]]
:Tout ensemble non vide {{var|x}} possède un élément {{var|y}} disjoint de {{var|x}}.
:{{retrait|(''L'', ∈) est une sous-structure de (''V'', ∈) qui est [[relation bien fondée|bien fondée]], elle l'est donc également. En particulier, si {{var|x}} ∈ ''L'', alors par transitivité de {{Var|L}}, {{var|y}} ∈ ''L''. Si l'on reprend ce même {{var|y}} de la même manière que dans {{var|V}}, alors il est toujours disjoint de {{var|x}} parce qu'on réutilise l'élément sans y ajouter de nouvel ensemble.}}
; L'[[axiome d'extensionnalité]] : Deux ensembles sont identiques si et seulement s'ils ont les mêmes éléments,
: {{retrait|par transitivité de {{Var|L}}.}}
; L'[[axiome de la paire]] : Si ''x'', ''y ''sont des ensembles, alors {''x'', ''y''} est un ensemble.{{retrait|1=Si ''x ''∈ ''L ''et ''y ''∈ ''L'', alors il existe un ordinal α tel que ''x ''∈ ''L''<sub>α</sub> et ''y ''∈ ''L''<sub>α</sub>. Par conséquent {''x'', ''y''} = {''s ''{{!}} ''s ''∈ ''L''<sub>α</sub> et (''s = x ''ou ''s = y'')} ∈ ''L''<sub>α+1</sub>. Nous pouvons en déduire que {''x'', ''y''} ∈ ''L ''et que sa signification dans {{var|L}} est identique à celle dans {{var|V}}.}}
; L'[[axiome de l'union]] : Pour tout ensemble ''x'', il existe un ensemble ''y ''dont les éléments sont précisément les éléments des éléments de ''x''. {{retrait|Si ''x ''∈ ''L''<sub>α</sub>, alors ses éléments sont dans ''L''<sub>α</sub> et leurs éléments appartiennent à ''L''<sub>α</sub>. ''y ''est donc un sous-ensemble de ''L''<sub>α</sub>. ''y ''{{=}} {''s ''{{!}} ''s ''∈ ''L''<sub>α</sub> et il existe ''z ''∈ ''x ''tel que ''s ''∈ ''z''} ∈ ''L''<sub>α+1</sub>. Donc ''y ''∈ ''L''.}}
; L'[[axiome de l'infini]] : Il existe un ensemble ''x ''tel que ∅ appartienne à ''x ''et tel que si ''y ''appartient à ''x'', l'union ''y''∪{''y''} lui appartienne également{{retrait|car ω est un ordinal de ''V''.}}
; L'[[Schéma d'axiomes de compréhension|axiome de compréhension]] : Étant donné n'importe quels ensembles ''S'', ''z''{{ind|1}}, … , ''z{{ind|n}} ''et n'importe quelle proposition ''P''(''x'', ''z''{{ind|1}}, … , ''z{{ind|n}}''), {''x ''| ''x ''∈ ''S ''et ''P''(''x'', ''z''{{ind|1}}, … , ''z{{ind|n}}'')} est un ensemble. {{retrait|1=Par induction sur les sous-formules de ''P'', on peut montrer qu'il existe un α pour lequel ''L''<sub>α</sub> contient ''S ''et ''z''{{ind|1}}, … , ''z{{ind|n}}'' et (''P ''est vraie dans ''L''<sub>α</sub> si et seulement si ''P ''est vraie dans ''L ''— c'est le ''{{Lien|langue=en|trad=reflection principle|fr=principe de réflexion}}''). Donc {''x ''{{!}} ''x ''∈ ''S ''et ''P''(''x'', ''z''{{ind|1}}, … , ''z{{ind|n}}'') est valide dans ''L''} = {''x ''{{!}} ''x ''∈ ''L''<sub>α</sub> et ''x ''∈ ''S ''et ''P''(''x'', ''z''{{ind|1}}, … , ''z{{ind|n}}'') est valide dans ''L''<sub>α</sub>} ∈ ''L''<sub>α+1</sub>. Par conséquent ce sous-ensemble est dans ''L''.}}
; L'[[axiome de remplacement]] : Étant donné n'importe quel ensemble ''S ''et n'importe quelle classe fonctionnelle, définie formellement comme une proposition ''P''(''x'', ''y'') pour laquelle ''P''(''x'', ''y'') et ''P''(''x'', ''z'') implique ''y = z'', {{nobr|<nowiki>{</nowiki>''y ''{{!}} il existe ''x ''∈ ''S ''tel que ''P''(''x'', ''y'')<nowiki>}</nowiki>}} est un ensemble. {{retrait|1=Soit ''Q''(''x'', ''y'') la formule qui relativise ''P ''à ''L'', c'est-à-dire que les quantificateurs de ''P ''sont restreints aux membres de ''L''. ''Q ''est une formule bien plus complexe que ''P'', mais est toujours finie, et comme ''P ''était fonctionnelle sur ''L'', ''Q ''est fonctionnelle sur ''V ''; par conséquent, on peut appliquer le remplacement dans ''V ''à ''Q''. Donc {{nobr|{''y ''{{!}} ''y ''∈ ''L ''et il existe ''x ''∈ ''S ''tel que ''P''(''x'', ''y'') est vraie dans ''L''}<nowiki/>}} {{=}} {{nobr|{''y ''{{!}} il existe ''x ''∈ ''S ''tel que ''Q''(''x'', ''y'')}<nowiki/>}} est un ensemble dans ''V ''et est une sous-classe de ''L''. En utilisant à nouveau l'axiome de remplacement, on peut montrer qu'il existe un α tel que cet ensemble est inclus dans ''L''<sub>α</sub> ∈ ''L''<sub>α+1</sub>. On peut alors utiliser l'axiome de compréhension dans ''L ''(ci-dessus) pour terminer de montrer que c'est également un élément de ''L''.}}
; L'[[axiome de l'ensemble des parties]] : Pour tout ensemble {{var|x}}, il existe un ensemble {{var|y}} dont les éléments sont précisément les sous-ensembles de {{var|x}}.
:{{retrait|En général, certaines parties d'un ensemble ''x ''de ''L ''ne sont pas dans ''L'', donc l'ensemble de toutes les parties de ''x ''non plus. Ce qu'on doit montrer ici, c'est que l'intersection avec ''L ''de cet ensemble des parties appartient à ''L''. Nous utilisons l'axiome de remplacement dans ''V ''pour montrer qu'il existe un α pour lequel cette intersection est un sous-ensemble de ''L''<sub>α</sub>. L'intersection s'exprime alors {''z ''{{!}} ''z ''∈ ''L''<sub>α</sub> et ''z ''est inclus dans ''x''} ∈ ''L''<sub>α+1</sub>. L'ensemble requis est donc dans ''L''.}}
; L'[[axiome du choix]] : Étant donné un ensemble {{var|x}} d'ensembles non vides deux à deux disjoints, il y a un ensemble {{var|y}} (appelé ensemble de choix de {{var|x}}) contenant exactement un seul élément pour chaque membre de {{var|x}}.
:{{retrait|On peut montrer qu'il existe un [[bon ordre]] sur ''L ''dont la définition fonctionne avec la même définition à l'intérieur de ''L ''lui-même. Nous pouvons donc choisir le plus petit élément de chaque élément de {{Var|x}} pour construire {{Var|y}} par les axiomes (ci-dessus) d'union et de compréhension dans {{Var|L}}.}}

Tout l'intérêt de ''L ''est que la preuve que c'est un modèle de ZFC nécessite uniquement que ''V ''soit un modèle de ZF, c'est-à-dire qu'elle ne dépend pas de la validité de l'axiome du choix dans {{Var|V}}.

== ''L ''est absolu et minimal ==
Soit ''W ''un modèle standard de ZF qui possède les mêmes ordinaux que ''V''. L'univers ''L ''défini dans ''W'' est alors le même que celui défini dans ''V''. En particulier ''L''<sub>α</sub> est le même dans ''V ''et ''W ''pour n'importe quel ordinal α, et les mêmes formules et paramètres dans {{Math|Def}}(''L''<sub>α</sub>) produisent les mêmes ensembles constructibles dans ''L''<sub>α+1</sub>.

De plus, comme ''L ''est une sous-classe de ''V ''et de ''W'', ''L ''est la plus petite classe qui à la fois contient tous les ordinaux et est un modèle standard de ZF. En effet ''L ''est l'intersection de toutes ces classes.

S'il existe un ''ensemble'' ''W'' dans ''V'' qui est un modèle intérieur de ZF et si l'ordinal κ est l'ensemble des ordinaux appartenant à ''W'', alors ''L<sub>κ</sub>'' est le ''L'' de ''W''. S'il existe un {{Lien|langue=en|trad=Standard model (set theory)|fr=modèle standard (théorie des ensembles)|texte=modèle standard}} de ZF, alors le plus petit de ces ensembles est un tel ''L<sub>κ</sub>''. Cet ensemble est appelé le {{Lien|langue=en|trad=Minimal model (set theory)|fr=modèle minimal}} de ZFC. En utilisant le [[théorème de Löwenheim-Skolem]] descendant, on peut montrer que le modèle minimal, s'il existe, est nécessairement dénombrable.

Bien sûr, n'importe quelle théorie cohérente doit avoir un modèle, donc il existe des modèles de ZF y compris à l'intérieur de ce modèle minimal (en supposant que ZF soit cohérente). Cependant, ces modèles des ensembles ne sont pas standards. En particulier, ils n'utilisent pas la relation normale d'appartenance et ils ne sont pas bien fondés.

On déduit que ''V = L'' est vrai dans ''L'' et dans tout ''L<sub>κ</sub>'' qui est un modèle de ZF, des faits que le ''L'' de ''L'' et le ''V'' de ''L'' sont tous deux le vrai ''L'' et que le ''L'' de ''L<sub>κ</sub>'' et le ''V'' de ''L<sub>κ</sub>'' sont le vrai ''L<sub>κ</sub>''. Ce sont cependant les seuls modèles standard de ZF dans lesquels ''V = L'' soit valide.

=== ''L'' et les grands cardinaux ===

Comme {{Math|O{{ind|n}} ⊂ ''L'' ⊆ ''V''}}, les propriétés des ordinaux qui dépendent de l'absence d'une fonction ou d'une autre structure (i.e. les formules Π{{ind|1}}<sup>ZF</sup>) sont préservées de ''V'' à ''L''. Les {{Lien|langue=en|trad=initial ordinal|fr=cardinal initial|texte=ordinaux initiaux}} de ''V'' sont donc aussi initiaux dans ''L''. Les {{Lien|langue=en|trad=Regular ordinal|fr=Ordinal régulier|texte=ordinaux réguliers}} le restent dans ''L''. Les [[Cardinal limite|cardinaux limites faibles]] deviennent des limites fortes dans ''L'' parce que l'[[hypothèse généralisée du continu]] est vérifiée dans ''L''. Les [[cardinal inaccessible|cardinaux faiblement inaccessibles]] deviennent fortement inaccessibles. Plus généralement, n'importe quelle propriété de [[grand cardinal]] plus faible que {{Lien|langue=en|trad=Zero sharp|fr=zéro dièse|texte=0<sup>#</sup>}} (voir la {{Lien|langue=en|trad=list of large cardinal properties|fr=liste de propriétés de grands cardinaux}}) sera vérifiée également dans ''L''.

Cependant 0<sup>#</sup> n'est pas vérifiée dans ''L'', même si elle l'est dans ''V''. Tous les grands cardinaux dont l'existence implique 0<sup>#</sup> ne conservent donc que leurs propriétés plus faibles que 0<sup>#</sup>. Par exemple les [[cardinal mesurable|cardinaux mesurables]] ne sont plus mesurables dans ''L'' mais restent {{Lien|langue=en|trad=Mahlo cardinal|fr=Cardinal de Mahlo|texte=de Mahlo}}.

On peut remarquer que si 0<sup>#</sup> est vraie dans ''V'', alors il existe une [[Ensemble club|classe close et non bornée]] d'ordinaux [[indiscernables]] dans ''L''. Bien que certains d'entre eux ne soient même pas des ordinaux initiaux de ''V'', ils ont les propriétés plus faibles que 0<sup>#</sup> dans ''L''. De plus, n'importe quelle fonction sur les classes strictement croissante de la classe des indiscernables vers elle-même, peut être étendue d'une manière unique en un {{Lien|langue=en|trad=Elementary extension|fr=Extension élémentaire|texte=plongement élémentaire}} de ''L'' dans ''L''. Cette propriété confère à ''L'' une structure de segments se répétant.

== L peut être bien ordonné ==
Il y a plusieurs manières de faire de L un [[bon ordre]]. Certaines partent de ''l'élégante structure'' (traduction de {{citation|{{lang|en|fine structure)}}}}) décrite par Ronald Bjorn Jense<ref>{{Article|auteur=Ronald Bjorn Djensen|langue=en|titre=The fine structure of the constructible hierarchy|année=1972|journal=Annals of Mathematical Logic|url=http://www.math.cmu.edu/~laiken/public_html/papers/FineStructure.pdf}}</ref> de L. Dans son article, il donne un aperçu d'une construction de bon ordre pour L utilisant seulement les définitions données jusqu'ici, plutôt que d'expliquer cette structure.

Supposons que x et y soient deux ensembles différents appartenant à L, et que nous souhaitons déterminer si x<y ou si x>y. Si x apparaît à l’étape L<sub>α+1</sub> et y apparaît dans L<sub>β+1</sub>, et β différent de α, alors définissons x<y si et seulement si α<β. À partir de ce point nous supposerons que β=α.

Rappelons que L<sub>α+1</sub> = Def (L<sub>α</sub>), c'est-à-dire que L<sub>α+1</sub> est défini grâce à des formules paramétrées par des ensembles de <L<sub>α</sub>. Si on oublie temporairement les paramètres, les formules peuvent être énumérées par un [[codage de Gödel]] standard. Si Φ et Ψ sont les formules de plus petits nombres de Gödel permettant de définir respectivement x et y, et si ces formules sont différentes, nous définissons x<y si et seulement si le nombre de Φ est strictement inférieur au nombre de Ψ. Nous avons supposé β=α, donc nous supposerons Φ=Ψ.

Continuons la définition en supposant que Φ possède n paramètres de L<sub>α</sub>. Supponsons que la séquence de paramètre z{{ind|1}}, ..., z{{ind|n}} soit la séquence de paramètres de Φ utilisée pour définir x, et que de même w{{ind|1}}, ..., w{{ind|n}} soit celle de y. Choisissons alors x<y si et seulement si
* z<sub>n</sub><w{{ind|n}} ;
* (z{{ind|n}}=w{{ind|n}} et z<sub>n-1</sub><w<sub>n-1</sub>) ; 
* (z{{ind|n}}=w{{ind|n}} et z<sub>n-1</sub>=w<sub>n-1</sub> et <sub>n-2</sub><w<sub>n-2</sub>) ; 
* etc.
C'est-à-dire l'[[ordre lexicographique]] inverse. S'il existe plusieurs séquences définissant le même ensemble, nous choisissons la plus petite par cette définition. Nous devons remarquer que les valeurs possibles pour un paramètre sont ordonnées d'après l'ordre sur L restreint à L<sub>α</sub>, cette définition est donc une définition par [[récurrence transfinie]].

Le bon ordre des valeurs sur chaque paramètre est donné par l'hypothèse d'induction de cette récurrence. Les valeurs des n-uplets de paramètres sont bien ordonnées par leur [[ordre produit]]. Les formules paramétrées sont bien ordonnées par [[somme ordonnée]] par les nombres de Gödel de bons ordres. Enfin L est bien ordonné par somme ordonnée par α des ordres sur L<sub>α+1</sub>.

Notons que ce bon ordre peut être défini dans L lui-même par une formule sans paramètre de la théorie des ensembles, seulement avec les variables libres x et y. Cette formule a la même [[valeur de vérité]] quelle que soit la manière dont on l'évalue dans L, V, ou W (un autre modèle standard de ZF muni des mêmes ordinaux) et nous pouvons supposer qu'elle sera fausse si soit x soit y ne sont pas dans L.

Il est bien établi que l'axiome du choix est équivalent à la possibilité de donner un bon ordre sur n'importe quel ensemble. Bien ordonner la classe propre V (comme nous venons de le faire avec L) est équivalent à [[Axiome du choix global]] qui couvre les classes propres d'ensembles non vides; il est donc plus puissant que l'axiome du choix habituel.

== L possède un principe de réflexion ==
Faire la démonstration que L vérifie l'[[schéma d'axiomes de séparation|axiome de séparation]], l’[[axiome de remplacement]], et l’[[axiome du choix]] nécessite (au moins dans la démonstration précédente) l'utilisation d'un {{Lien|langue=en|trad=reflection principle|fr=principe de réflexion}} pour L, en voici un:
Par [[raisonnement par récurrence|induction mathématique]] sur n<ω, nous utilisons ZF dans V pour démontrer que pour n’importe quel nombre ordinal α, il existe un ordinal β>α pour lequel n’importe quelle formule P(z{{ind|1}}, ..., z{{ind|k}}) avec z{{ind|1}}, ..., z{{ind|k}} appartenant à L<sub>β</sub> constituée de moins de n symboles (les constantes contenues dans L<sub>β</sub> comptent pour un symbole), nous obtenons que P(z{{ind|1}}, ..., z{{ind|k}}) est vérifiée dans L<sub>β</sub> si et seulement si elle est vérifiée dans L.

== L'hypothèse généralisée du continu est vraie dans L ==
Soit <math>S \in L_\alpha </math>, et ''T'' n'importe quel sous-ensemble constructible de ''S''. Il existe alors un ordinal β pour lequel <math>T \in L_{\beta+1}</math>, donc <math>T = \{x \in L_\beta : x \in S \wedge \Phi(x, z_i)\} = \{x \in S : \Phi(x, z_i)\} </math>, pour une formule Φ et un <math>z_i</math> choisis dans <math>L_\beta</math>. Par le [[théorème de Löwenheim-Skolem]] inversé, il existe nécessairement un ensemble transitif ''K'' contenant <math>L_\alpha</math> et un <math>w_i</math>, qui possède une théorie du premier ordre identique à <math>L_\beta</math> dont le <math>w_i</math> serait substitué par <math>z_i</math>; ce ''K'' aura le même cardinal que <math>L_\alpha</math>. comme <math> V = L </math> est vérifiée dans <math>L_\beta</math>, il est aussi vrai dans ''K'', par conséquent <math>K = L_\gamma</math> pour un γ qui a le même cardinal qu'α. Donc <math>T = \{x \in L_\beta : x \in S \wedge \Phi(x, z_i)\} = \{x \in L_\gamma : x \in S \wedge \Phi(x, w_i)\} </math> parce que <math>L_\beta</math> et <math>L_\gamma</math> ont la même théorie. ''T'' est donc dans <math>L_{\gamma+1}</math>.

Tous les sous-ensembles constructibles d'un ensemble infini ''S'' ont des rangs κ (au maximum) identiques au rang de ''S''; il suit que si α est l’ordinal initial de κ<sup>+</sup>, alors <math>L \cap \mathcal{P}(S) \subseteq L_{\alpha+ 1}</math> peut servir d'"ensemble des parties" de ''S'' à l’intérieur de ''L''. Cette étape montre que le simili ensemble des parties de ''S'' à un cardinal d'au plus <math>\|\alpha\|</math>. En supposant que ''S'' a κ pour cardinal, cet ensemble des parties doit avoir un cardinal d'exactement κ<sup>+</sup>. Ce qui est exactement l'[[Hypothèse du continu#G.C3.A9n.C3.A9ralisation|hypothèse généralisée du continu]] rapportée à ''L''.

== Les ensembles constructifs sont définissables à partir des nombres ordinaux ==
Il existe une formule de la théorie des ensembles qui énonce quelque chose de similaire à X=L<sub>α</sub>. Elle n’est composée que de variables libres pour X et α. En l’utilisant, nous pouvons étendre la définition pour n’importe quel ensemble constructible. Si s∈L<sub>α+1</sub>, alors {{Math|1=s = {y{{!}}y∈L<sub>α</sub> et Φ(y,z{{ind|1}},...,z{{ind|n}}) sont vérifiées dans (L<sub>α</sub>,∈)} }} pour une formule Φ et un z{{ind|1}}, ..., z{{ind|n}} de L<sub>α</sub>. C'est la même chose de dire : pour tout y, y∈s si et seulement si [il existe un X tel que X=L<sub>α</sub> et y∈X et Ψ(X, y, z{{ind|1}}, ..., z{{ind|n}})] dans laquelle Ψ(X, ...) est le résultat de la restriction de tous les quantificateurs aux ensembles de X dans Φ(...). Notons que chaque z{{ind|k}}∈L<sub>β+1</sub> pour un β<α. Combinons alors les formules destinées aux {{math|z}} avec la formule affectée à s. Si nous appliquons une [[quantification existentielle]] aux z de l’extérieur, nous obtenons une formule définissant l’ensemble {{Math|s}} en utilisant uniquement les ordinaux {{math|α}} apparaissant comme paramètre dans les expressions similaires à X=L<sub>α</sub>.

{{Exemple|
L'ensemble {{Math|{5,ω} }} est constructible. S'il est l’unique ensemble s, qui vérifie la formule {{retrait|<math>\forall y (y \in s \iff (y \in L_{\omega+1} \land (\forall a (a \in y \iff a \in L_5 \land Ord (a)) \lor \forall b (b \in y \iff b \in L_{\omega} \land Ord (b)))))</math>,

(avec <math>Ord (a)</math> une notation pour {{retrait| <math>\forall c \in a (\forall d \in c (d \in a \land \forall e \in d (e \in c))).</math>)}}}}}}

Nous avons en fait encore dans cet exemple une version simplifiée de la formule résultant de l’exécution des instructions données ici, mais le résultat est quand même là : il existe une formule de la théorie des ensembles vérifiée seulement pour les ensembles {{math|s}} que nous désirions, paramétrées seulement par des valeurs ordinales.

== Constructibilité relative ==

Un modèle de la théorie des ensembles aussi petit que {{Var|L}}, mais incluant ou étant lié à un ensemble constructible est parfois recherché. On dispose dans ces cas de deux versions d'une ''constructibilité relative'' notées {{Math|L(A)}} et {{Math|L[A]}}.

La classe {{Math|L(A)}} d'un ensemble non constructible est définie comme l’intersection de toutes les classes modèles standards de la théorie des ensembles qui incluent A et de tous les ordinaux.

;{{Math|L(A)}} est définie par [[récurrence transfinie]]:
:* {{Math|1=L{{ind|0}}(A)}} = le plus petit ensemble transitif auquel appartient A, c'est-à-dire la [[fermeture transitive]] de {{Math|{A}<nowiki/>}}.
:* {{Math|1=L<sub>α+1</sub>(A) = Def (L<sub>α</sub>(A))}}
:* Si λ est un ordinal limite, alors <math>L_{\lambda}(A) = \bigcup_{\alpha < \lambda} L_{\alpha}(A) \! </math>.
:* <math>L(A) = \bigcup_{\alpha} L_{\alpha}(A) \! </math>.

L'axiome du choix est utilisable si {{Math|L(A)}} contient un bon ordre pour la fermeture transitive de {{Math|{A}<nowiki/>}}. Cet axiome du choix peut être extensible à {{Math|L(A)}}. Dans le cas contraire, l'axiome n’est pas valable.

Un exemple classique en est {{Math|L('''R''')}}, le plus petit modèle incluant les réels, très utilisé en [[théorie descriptive des ensembles]].

;{{Math|L[A]}} : la classe des ensembles dont la construction dépend d'une classe propre ou d'un ensemble (à priori non constructible) A. 
:Sa définition utilise {{Math|Def{{ind|A}} (X)}}, identique à Def (X) si ce n’est que dans l’évaluation de la valeur de vérité des formules Φ, le modèle {{Math|(X,∈)}} est remplacé par le modèle {{Math|(X,∈,A)}}, dans lequel {{Math|A}} est un prédicat d'arité 1 s'interprétant {{Citation|A(y) est y∈A}}.

Cette classe est systématiquement modèle de l’axiome du choix. Même si {{Math|A}} est un ensemble, il n’appartient pas nécessairement à {{Math|L[A]}}, à l'exception des A constitués uniquement d'ordinaux.

Les ensembles de L(A) et de L[A] ne sont cependant, rappelons le, souvent pas constructibles, et leurs propriétés peuvent être très différentes de celles de L.

== Références ==
=== Bibliographie ===
* {{Ouvrage|langue=en|auteur1=Ulrich Felgner|titre=Models of ZF-Set Theory|éditeur=Springer|collection=Lecture Notes in Mathematics|année=1971|isbn=3-540-05591-6}}
* {{Ouvrage|langue=en|auteur1=Kurt Gödel|titre=The Consistency of the Continuum Hypothesis|titre volume=AM 3|lieu=Princeton (NJ)|éditeur=[[Princeton University Press]]|collection=Annals of Mathematics Studies|année=1940|pages totales=66|isbn=978-0-691-07927-1|math reviews=0002514|lire en ligne=http://press.princeton.edu/titles/1034.html}}

=== Notes ===
{{Références}}
{{Palette|Logique}}

{{Portail|mathématiques}}

[[Catégorie:Théorie des ensembles]]