Loi de composition de Gauss

De testwiki
Version datée du 19 novembre 2024 à 14:37 par imported>Detsed1 (growthexperiments-addlink-summary-summary:3|0|0)
(diff) ← Version précédente | Version actuelle (diff) | Version suivante → (diff)
Aller à la navigation Aller à la recherche

Modèle:Voir homonymes En mathématiques, en théorie des nombres, la loi de composition de Gauss est une règle, découverte par Carl Friedrich Gauss, utilisée effectuer une opération binaire sur des formes quadratiques binaires entières (FQBE). Gauss a présenté cette règle dans ses Disquisitiones Arithmeticae[1], un manuel de théorie des nombres publié en 1801, aux articles 234 à 244. La loi de composition de Gauss est l'un des résultats les plus profonds de la théorie des FQBE, et sa formulation ainsi que les preuves de ses propriétés telles que données par Gauss sont généralement considérées comme très compliquées et très difficiles[2]. Plusieurs mathématiciens ont ultérieurement simplifié la formulation de la loi de composition et l'ont présentée sous un format adapté aux calculs numériques. Le concept a également trouvé des généralisations dans plusieurs domaines.

Formes quadratiques binaires entières

Une expression de la forme Q(x,y)=αx2+βxy+γy2, où α,β,γ,x,y sont tous entiers, est appelée forme quadratique binaire intégrale (FQBE). La forme Q(x,y) est appelé une FQBE primitive si α,β,γ sont premiers entre eux. La quantité Δ=β24αγ est appelé le discriminant de la FQBE Q(x,y). Un nombre entier Δ est le discriminant d'un FQBE si et seulement si Δ0,1(mod4). Δ est appelé discriminant fondamental si et seulement si l’une des affirmations suivantes est vraie :

  • Si Δ<0 et α>0 alors Q(x,y) est dite définie positive
  • Si Δ<0 et α<0 alors Q(x,y) est dite négative définie
  • Si Δ>0 alors Q(x,y) est dit indéfinie.

Équivalence des FQBE

Deux FQBE g(x,y) et h(x,y) sont dites improprement équivalentes si

αδβγ=1 et g(αx+βy,γx+δy)=h(x,y).

On notera g(x,y)h(x,y) lorsque g(x,y) et h(x,y) sont équivalents. est une relation d'équivalence. La classe d'équivalence de g(x,y) est noté [g(x,y)].

On dit que deux FQBE g(x,y) et h(x,y) sont équivalentes (ou proprement équivalents) s'il existe des entiers α,β,γ,δ tels que

αδβγ=1 et g(αx+βy,γx+δy)=h(x,y).

Il s'agit également d'une relation d'équivalence.

Le discriminant est un invariant d'équivalence (propre et impropre)

Formulation de Gauss de la loi de composition

Contexte historique

L'identité suivante, appelée identité de Brahmagupta, était connue du mathématicien indien Brahmagupta qui l'utilisa pour calculer des approximations fractionnaires de racines carrées d'entiers positifs :

(x2+Dy2)(u2+Dv2)=(xu+Dyv)2+D(xvyu)2

En écrivant f(x,y)=x2+Dy2 cette identité peut être réécrite sous la forme suivante :

f(x,y)f(u,v)=f(X,Y)X=xu+Dyv,Y=xvyu.

La loi de composition des FQBE de Gauss généralise ceci à une identité de la forme g(x,y)h(u,v)=F(X,Y)g(x,y),h(x,y),F(X,Y) sont toutes des FQBE et X,Y sont des combinaisons linéaires des produits xu,xv,yu,yv.

La loi de composition des FQBE

Soient les FQBE suivants :

g(x,y)=ax2+bxy+cy2
h(x,y)=dx2+exy+fy2
F(x,y)=Ax2+Bxy+Cy2

S'il est possible de trouver des entiers p,q,r,s et p,q,r,s tel que les six nombres suivants

X=pxu+qxv+ryu+syv
Y=pxu+qxv+ryu+syv

soient premiers entre eux et tels que si

pqqp=2,prrp=5,pssp=3,qrrq=0,qssq=4,rssr=10.

on a l'égalité suivante

g(x,y)h(u,v)=F(X,Y)

alors on dit que F(x,y) est une composée des formes g(x,y) et h(x,y). On peut noter qu'un composéee de deux FQBE, s’il existe, n’est pas nécessairement unique.

Exemple

Soient les FQBI suivantes :

g(x,y)=2x2+3xy10y2
h(x,y)=5x2+3xy4y2
F(x,y)=10x2+3xy2y2

On pose

[p,q,r,s]=[1,0,0,2],[p,q,r,s]=[0,2,5,3]

On a

X=pxu+qxv+ryu+syv=xu+2yv,
Y=pxu+qxv+ryu+syv=2xv+5yu+3yv.

Ces six nombres sont bien premiers entre eux.

De plus, soient

g(x,y)h(u,v)=F(X,Y).

On peut alors vérifier que

g(x,y)g(x,y)
h(x,y)h(x,y)

Ainsi F(x,y) est une composée de g(x,y) et h(x,y).

Un algorithme pour trouver le composite de deux FQBE

L'algorithme suivant peut être utilisé pour calculer une composée de deux FQBE[3].

Algorithme

Étant donné les FQBE suivantes ayant le même discriminant Δ :

f1(x,y)=a1x2+b1xy+c1y2
f2(x,y)=a2x2+b2xy+c2y2
Δ=b124a1c1=b224a2c2
  1. Calculer β=b1+b22
  2. Calculer n=pgcd(a1,a2,β)
  3. Calculer t,u,v tel que a1t+a2u+βv=n
  4. Calculer A=a1a2n2
  5. Calculer B=a1b2t+a2b1u+v(b1b2+Δ)/2n
  6. Calculer C=B2Δ4A
  7. Calculer F(x,y)=Ax2+Bxy+Cy2
  8. Calculer
X=nx1x2+(b2B)n2a2x1y2+(b1B)n2a1y1x1+[b1b2+ΔB(b1+b2)]n4a1a2y1y2
Y=a1nx1y2+a2ny1x1+b1+b22ny1y2

Alors F(X,Y)=f1(x1,y1)f2(x2,y2) de sorte que F(x,y) est une composée de f1(x,y) et f2(x,y).

Propriétés de la loi de composition

Existence de la composée

La composée de deux FQBE existe si et seulement si elles ont le même discriminant.

Formes équivalentes et loi de composition

Soient g(x,y),h(x,y),g(x,y),h(x,y) des FQBE tels que :

F(x,y)F(x,y).

Si F(x,y) est une composée de g(x,y) et h(x,y), et F(x,y) est un composée de g(x,y) et h(x,y), alors

[g(x,y)][h(x,y)]=[F(x,y)]

Une opération binaire

Soit D un entier fixé et SD l'ensemble de toutes les FQBE primitives de discriminant D. Soit maintenant GD=SD/ l'ensemble des classes d'équivalences de SD pour . Soient [g(x,y)] et [h(x,y)] deux éléments de GD. Si F(x,y) est une composée des FQBE g(x,y) et h(x,y) dans SD, on définit l'opérateur binaire par :

[g(x,y)][h(x,y)]=[F(x,y)]

Le groupe 𝐆𝐃

  • (GD,) est un groupe abélien fini
  • L'élément neutre de GD est{[x2(D/4)y2] if D0(mod4)[x2+xy+((1D)/4)y2] if D1(mod4)
  • L'inverse de [ax2+bxy+cy2] est [ax2bxy+cy2].

Approche moderne de la loi de composition

L'esquisse suivante de l'approche moderne de la loi de composition des FQBE est basée sur une monographie de Duncan A. Buell[4]. Le livre peut être consulté pour plus de détails et pour des preuves de toutes les propriétés énoncées ci-après.

Nombres algébriques quadratiques et entiers

Soit l'ensemble des entiers. Dans cette section, nous appelerons entiers rationnels les éléments de pour les distinguer des entiers algébriques, qu'on redéfinit ici :

Un nombre complexe α est un nombre algébrique quadratique s'il satisfait une équation de la forme

ax2+bx+c=0 avec a,b,c.

α est un entier algébrique quadratique s'il satisfait une équation de la forme

x2+bx+c=0 avec b,c

Les nombres algébriques quadratiques sont des nombres de la forme

α=b+ed2a avec a,b,d,e, où d est sans facteurs carrés.

L'entier d est appelé la radicande de l'entier algébrique α. La norme du nombre algébrique quadratique α est définie comme suit :

N(α)=(b2+e2d)/4a2.

Soit le corps des nombres rationnels. Le plus petit corps contenant et un nombre algébrique quadratique α est l'extension quadratique de dont la base de transcendance est (1,α). Elle est notée notée (α). On peut montrer qu'on a en fait :

(α)=(d)={t+ud|t,u}
Δ={4d si d2 ou 3(mod4)d si d1(mod4)

Soit d1 un entier rationnel sans facteurs carrés. L'ensemble des entiers algébriques quadratiques de radicande d est noté O(d). On montre qu'on a en fait :

O(d)={{a+bd|a,b} si d2 ou 3(mod4){(a+bd)/2|a,b,abmod2)} si d1(mod4)}

O(d) est un anneau pour l'addition et la multiplication ordinaires.

Soit

δ={d si d est pair(1d)/2 si d est impair

alors

O(d)={a+bδ,|a,b}.

Idéal d'un corp quadratique

Soit 𝐚 un idéal de O(d) (c'est-à-dire soit 𝐚 un sous-ensemble non vide de O(d) stable par addition et fortement stable par multiplication). Alors on peut trouver α1,α2O(d) tel que n'importe quel élément de 𝐚 peut être représenté de manière unique sous la forme α1x+α2y avec x,y. Une telle paire d'éléments dans O(d) est appelé une base de l'idéal 𝐚. On écrit alors 𝐚=α1,α2.

La norme de 𝐚=α1,α2 est défini par :

N(𝐚)=|α1α2α1α2|/Δ.

La norme est indépendante du choix de la base.

Quelques idéaux particuliers

  • Le produit de deux idéaux 𝐚=α1,α2 et 𝐛=β1,β2, noté 𝐚𝐛, est l’idéal engendré par les combinaisons -linéaires de α1β1,α1β2,α2β1,α2β2.
  • Un idéal fractionnaire est un sous-ensemble I de (Δ) pour lequel les deux propriétés suivantes sont vérifiées :
  1. Pour tous α,βI et pour tous λ,μO(d), λα+μβI
  2. Il existe un entier algébrique ν tel que pour chaque αI, ναO(d)
  • Un idéal 𝐚 est appelé idéal principal s’il existe un entier algébrique α tel que 𝐚={λα|λO(d)}. Cet idéal principal est alors noté (α).

On peut également prouver ce théorème important :

« Étant donné un idéal (intégral ou fractionnaire) 𝐚, il existe un idéal intégral 𝐛 dtel que 𝐚𝐛 est un idéal principal. »

Une relation d'équivalence sur l'ensemble des idéaux

Deux idéaux (intégraux ou fractionnaires) 𝐚 et 𝐛 sont dits équivalents (on note alors 𝐚𝐛), s'il existe un idéal principal (α) tel que 𝐚=(α)𝐛. Ces idéaux sont dits étroitement équivalents si la norme de α est positive. Ces relations sont des relations d'équivalence.

Les classes d'équivalence (respectivement classes d'équivalence étroites) des idéaux fractionnaires d'un anneau d'entiers algébriques quadratiques O(d) forment un groupe abélien pour la multiplication des idéaux. L'élément neutre du groupe est l'ensemble des idéaux principaux (ou, pour l'équivalence étroite, l'ensemble des idéaux principaux de norme positive ). Les groupes de classes d'idéaux et de classes étroites d'idéaux sont appelés le groupe des classes et le groupe étroit des classes de (d).

Formes quadratiques binaires et classes d'idéaux

Le résultat principal qui relie les FQBEs et les classes d’idéaux peut maintenant être énoncé comme suit :

Le groupe des classes de formes quadratiques binaires de discriminant Δ est isomorphe au groupe étroit des classes du corps (Δ).

Approche de Bhargava

Cube de Bhargava avec les entiers a, b, c, d, e, f, g, h aux coins

Manjul Bhargava, mathématicien canado-américain lauréat de la médaille Fields, a introduit une configuration, appelée cube de Bhargava, de huit nombres entiers a,b,c,d,e,f (voir figure) qui permet d'étudier les lois de composition des formes quadratiques binaires et d'autres formes similaires. En définissant les matrices associées aux faces opposées de ce cube comme indiqué ci-dessous

M1=[abcd],N1=[efgh],M2=[aceg],N2=[bdfh],M3=[aebf],N3=[cgdh],

Bhargava construit trois FQBEs comme suit :

Q1=det(M1x+N1y),Q2=det(M2x+N2y)Q3=det(M3x+N3y)

Bhargava a établi le résultat suivant reliant un cube de Bhargava à la loi de composition de Gauss[5] :

Soit un cube A et Q1,Q2,Q3 les trois formes quadratiques binaires primitives données par A, alors Q1,Q2,Q3 ont le même discriminant, et le produit de ces trois formes est l'élément neutre dans le groupe défini par la composition de Gauss. Inversement, si Q1,Q2,Q3 sont trois formes quadratiques binaires primitives du même discriminant dont le produit est l'identité sous la composition de Gauss, alors il existe un cube A donnant Q1,Q2,Q3.

Références

Modèle:Références Modèle:Palette Modèle:Portail