Jean Bénabou
Modèle:Voir homonymes Modèle:Infobox Scientifique
Jean Bénabou, né le Modèle:Date de naissance- à Rabat et mort le Modèle:Date de décès- à Paris, est un mathématicien français. Il est l'auteur de contributions majeures à la théorie des catégories.
Biographie
Jeunesse et débuts mathématiques
Joseph Jean Bénabou naît le Modèle:Date de naissance à Rabat, capitale du protectorat français au Maroc[1]Modèle:,[2]Modèle:,[3]. Il y effectue sa scolarité, jusqu'au baccalauréat[4].
En 1952, il entre à l'école normale supérieure de Paris, où il obtient l'agrégation de mathématiques en 1955 (9e). L'année suivante, il est recruté au CNRS[2]. En 1963, il quitte le CNRS pour l'université de Rennes, où il est nommé chargé d'enseignement[5]Modèle:,[4].
Des années 60 en ébullition
Dès sa sortie de l'ENS, Bénabou travaille sous la direction de Charles Ehresmann, l'un des fondateurs du groupe Bourbaki. Il s'intéresse d'abord à certains treillis issus de la topologie[6]Modèle:,[7] puis à la théorie des topos de Grothendieck et Giraud, qui le mène à se pencher sur la théorie des catégories[2]. Il introduit dans ce domaine plusieurs concepts qui deviendront centraux, comme les catégories monoïdales ou les catégories enrichies, et publie notamment une série de quatre articles dans les comptes-rendus de l'Académie des sciences[2]Modèle:,[8]Modèle:,[9]Modèle:,[10]Modèle:,[11].
En 1965, il peine à terminer sa thèse d'État, pour laquelle il envisage de nombreux développements. Claude Chevalley, à qui il présente ses travaux, le convainc que son premier chapitre constitue une thèse suffisante[4]. Intitulée Structures algébriques dans les catégories, il la soutient en 1966 à l'université de Paris devant un jury présidé par Henri Cartan[2]Modèle:,[12]Modèle:,[13].
En 1966-1967, il est invité par Saunders Mac Lane à l'université de Chicago, où il poursuit ses travaux en introduisant les notions de bicatégorie et de distributeur[2]Modèle:,[14].
De retour en France, Bénabou travaille sur la Modèle:Lien, notamment avec Jacques Roubaud. Ensemble, ils démontrent un théorème (connu comme « théorème de Bénabou-Roubaud ») qui ouvre d'importantes perspectives dans le domaine[15]Modèle:,[2]Modèle:,[16]Modèle:,[17].
Liens avec l'OuLiPo

Pendant ces années, Bénabou est proche de l'OuLiPo. Son cousin, l'historien Marcel Bénabou, est membre du groupe littéraire et en deviendra le « secrétaire définitivement provisoire »[4]Modèle:,[18]. Il se lie également d'amitié avec le mathématicien et poète Jacques Roubaud, qui est l'un de ses collègues lors de son passage à Rennes. Les deux hommes partagent leur passion pour la théorie des catégories, et Roubaud citera régulièrement Bénabou dans son œuvre littéraire[4]Modèle:,[3]Modèle:,[19].
En 1969, Bénabou apparaît même brièvement dans La Disparition de Georges Perec, dans un passage vraisemblablement dû à Roubaud pastichant un texte mathématique[20] : Modèle:Début citation bloc Or voici qu’il y a huit mois Kan, travaillant sur un adjoint à lui (...) montra par induction, croit-on, (...) la Proposition : Soit G soit H soit K (H ⊂G, G ⊃K) trois magmas (nous suivons Kurosh) où l’on a (...) ; si H, K n’ont qu’un individu commun H ∩ K = Las ! Kan mourut avant d’avoir fini son job. Donc à la fin, l’on n’a toujours pas la solution (1).
(1) Il paraîtrait, dit-on, qu’Ibn Abbou (son cousin plutôt) aurait la solution, mais s’il la connaît, à coup sûr il la tait !Modèle:Fin citation blocEn 1987-88, Bénabou publie une série d'articles dans les Cahiers de poétique comparée, dirigés notamment par Roubaud[4].
Le professeur et « son » séminaire
À partir de 1969, Bénabou organise un séminaire de théorie des catégories, à Jussieu puis à l'Institut Henri-Poincaré. Surnommé « séminaire Bénabou », ce séminaire sera pendant plus de trente ans un lieu d'intenses échanges scientifiques[21]Modèle:,[2]Modèle:,[4].
Nommé professeur à l'université Paris-XIII, Bénabou poursuit ses travaux en s'intéressant aux topos, à la Modèle:Lien et aux Modèle:Lien[2]. Il développe une approche singulière de ces dernières, publiant plusieurs articles sur la question et donnant en 1980 à Louvain-la-Neuve un cours qui fera date[22]Modèle:,[23]Modèle:,[24]Modèle:,[2]Modèle:,[25]Modèle:,[26].
À cette période, il dirige également plusieurs thèses, notamment celles de Sabah Al Fakir en 1973[27], Brigitte Lesaffre en 1974[26], Jean Celeyrette en 1975[28], Michel Coste et Yves Diers en 1977[12]Modèle:,[26], Marie-Françoise Roy en 1980[12], Jacques Penon en 1985[26] et Dominique Bourn en 1990[29].

En 1992, Bénabou prend sa retraite[30]. Il conserve néanmoins une activité scientifique, et publie encore plusieurs travaux sur les topos et les fibrations, entre autres aux côtés de Modèle:Lien[31]Modèle:,[32]Modèle:,[33]Modèle:,[34]Modèle:,[35]. Il continue également à organiser son séminaire jusqu'en 2001[2], et donne des exposés jusqu'à la fin de sa vie[36].
Mort
Il meurt à Paris le Modèle:Date de décès, à l'âge de 89 ans. Ses funérailles ont lieu quelques jours plus tard au cimetière du Père-Lachaise[1]Modèle:,[37], où il est inhumé (division 1, caveau Adam-Braun).
Travaux et influence
Contributions à la théorie des catégories
Jean Bénabou a significativement contribué au développement de la théorie des catégories, qu'il a participé à diffuser en France à la suite de Grothendieck et d'Ehresmann, notamment pendant les trois décennies de « son » séminaire (1969-2001)[2]Modèle:,[26].
Il a étudié plusieurs concepts aujourd'hui centraux dans la théorie, en particulier :
- les catégories monoïdales, qu'il introduit en 1963 sous le nom de « catégories avec multiplication »[8]Modèle:,[9]Modèle:,[2] ;
- les catégories enrichies, qu'il introduit en 1965 sous le nom de « catégories relatives »[10]Modèle:,[11]Modèle:,[2] ;
- les bicatégories qu'il définit en 1967[14]Modèle:,[38], ouvrant la voie à l'étude des catégories supérieures qui est aujourd'hui le principal axe de développement de la théorie des catégories[2] ;
- les distributeurs, qu'il introduit en 1967 sous le nom de « profoncteurs » (toujours utilisé en anglais), généralisant la notion de relation binaire aux catégories[14]Modèle:,[2]Modèle:,[39], et qu'il étudiera extensivement par la suite[40]Modèle:,[41] ;
- la théorie de la Modèle:Lien de Grothendieck, dans laquelle il prouve avec Roubaud un résultat majeur reliant la descente à des objets algébriques (monades, Modèle:Lien) : combiné au Modèle:Lien, ce théorème (de Bénabou-Roubaud) est le premier outil de la descente monadique, qui permet une caractérisation simple de nombreuses catégories de descente[15]Modèle:,[42]Modèle:,[43] ;
- la théorie des Modèle:Lien, dont il est l'un des principaux artisans et qu'il développe dans une approche personnelle à partir des années 1970[2]Modèle:,[26], proposant par la suite une généralisation en catégories « feuilletées »[44] ;
- la Modèle:Lien, notamment dans le cadre de la théorie des topos où il étudie la logique interne des topos élémentaires[45]Modèle:,[2]Modèle:,[26].
Il est également à l'origine du nom des monades[46][[Monade (théorie des catégories)|Modèle:,]][47][[Monade (théorie des catégories)|Modèle:,]][48].
Une œuvre écrite très parcellaire
L'étendue des travaux de Bénabou est néanmoins difficile à décrire. En effet, son perfectionnisme, sa recherche de l'élégance et de la généralité l'ont souvent poussé à retravailler ses résultats et à en retarder la publication, de sorte que ses travaux publiés sont très rares et parcellaires[4]Modèle:,[26]. À l'inverse, la transmission orale prend une place importante dans la diffusion de ses contributions : Bénabou, décrit comme un orateur remarquable, donne toute sa vie de nombreux exposés et plusieurs cours où il présente ses travaux[2]Modèle:,[26].
Ainsi son approche des catégories fibrées, qui est l'une de ses principales lignes de recherche, n'a longtemps été formalisée que dans les notes prises par Jean-Roger Roisin d'après un cours de Bénabou à Louvain-la-Neuve en 1980[22]Modèle:,[26]. Une version plus avancée de ces travaux est à nouveau diffusée comme notes de cours par Thomas Streicher en 1999 (sous le titre Fibered categories à la Jean Bénabou), puis étendue à partir de 2018[25]. Sa généralisation des catégories fibrées aux « catégories feuilletées », débutée en 1984 et poursuivie jusqu'à la fin de sa vie, n'est quant à elle publiée que via l'enregistrement d'un exposé en 2012, et via un échange de courriers électroniques en 2014 sur une liste de diffusion[26]Modèle:,[44]Modèle:,[49]Modèle:,[50].
À sa mort, Jean Bénabou laisse de nombreux manuscrits mathématiques non publiés. Son fils Roland manifeste le souhait d'en faire don à une bibliothèque universitaire[26].
Conflits d'attribution et héritage
L'absence de publication ou la publication tardive (et parfois en langue française) des travaux de Bénabou, ainsi que son éloignement de l'école nord-américaine dominante en théorie des catégories, ont parfois jeté la confusion sur la paternité de ses résultats. Ainsi en va-t-il de l'invention des catégories monoïdales (également attribuée à Mac Lane[9]), de celle des catégories enrichies (attribuée à tort à Eilenberg et Kelly[26]) ou de ses premiers travaux sur les catégories fibrées (éclipsés par ceux de Paré et Schumacher sur les catégories indexées, adoptant une approche concurrente[26]). Jacques Roubaud rapporte en outre le plagiat, par un mathématicien qu'il ne nomme pas, de travaux exposés par Bénabou à Oberwolfach[4].
Plus généralement, une part importante des travaux de Bénabou reste méconnue faute de publication, notamment ses contributions à l'étude des catégories fibrées et les travaux de ses dernières décennies d'activité[26].
Cette situation est particulièrement mal vécue par Bénabou, qui voit en elle une volonté d'invisibilisation de ses contributions de la part de l'école nord-américaine, et réagit parfois de manière violente et excessive[4]Modèle:,[26]. En 2007, il lance une virulente controverse à la suite de l'attribution erronée du théorème de Bénabou-Roubaud à Modèle:Lien par Peter Johnstone, qu'il accuse d'avoir omis plusieurs citations de lui-même et de son doctorant Jean Celeyrette dans Sketches of an Elephant[4]Modèle:,[17]Modèle:,[51]Modèle:,[52].
Notes et références
Voir aussi
Bibliographie
Articles connexes
- ↑ 1,0 et 1,1 Modèle:Lien web
- ↑ 2,00 2,01 2,02 2,03 2,04 2,05 2,06 2,07 2,08 2,09 2,10 2,11 2,12 2,13 2,14 2,15 2,16 2,17 et 2,18 Modèle:Lien web
- ↑ 3,0 et 3,1 Modèle:Ouvrage
- ↑ 4,00 4,01 4,02 4,03 4,04 4,05 4,06 4,07 4,08 4,09 et 4,10 Modèle:Lien web
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- ↑ Modèle:Article
- ↑ Modèle:Article
- ↑ 8,0 et 8,1 Modèle:Article
- ↑ 9,0 9,1 et 9,2 Modèle:Lien web
- ↑ 10,0 et 10,1 Modèle:Article
- ↑ 11,0 et 11,1 Modèle:Lien web
- ↑ 12,0 12,1 et 12,2 Modèle:Lien web
- ↑ Modèle:Article
- ↑ 14,0 14,1 et 14,2 Modèle:Chapitre
- ↑ 15,0 et 15,1 Modèle:Article
- ↑ Modèle:Lien web
- ↑ 17,0 et 17,1 Modèle:Lien web
- ↑ Modèle:Lien web
- ↑ Modèle:Ouvrage
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- ↑ 22,0 et 22,1 Modèle:Ouvrage
- ↑ Modèle:Article
- ↑ Modèle:Article
- ↑ 25,0 et 25,1 Modèle:Article
- ↑ 26,00 26,01 26,02 26,03 26,04 26,05 26,06 26,07 26,08 26,09 26,10 26,11 26,12 26,13 26,14 et 26,15 Modèle:Article
- ↑ Modèle:Ouvrage
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- ↑ Modèle:Chapitre
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- ↑ 44,0 et 44,1 Modèle:Lien web
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- Naissance en mai 1932
- Naissance à Rabat
- Naissance dans le protectorat français au Maroc
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- Personnalité inhumée au cimetière du Père-Lachaise (division 1)