Groupe divisible
En mathématiques, et plus particulièrement en théorie des groupes, un groupe abélien divisible est un groupe abélien G tel que, pour tout nombre naturel n ≥ 1, on ait (en notation additive) G = nG. Ceci revient à dire que pour tout élément x de G et tout nombre naturel n ≥ 1, il existe au moins un élément y de G tel que x = ny. On peut étendre[1] cette définition aux groupes non abéliens, un groupe divisible étant un groupe dans lequel (en notation multiplicative) tout élément est n-ième puissance, quel que soit l'entier naturel n ≥ 1. Parmi les groupes divisibles, toutefois, seuls les groupes divisibles abéliens constituent un chapitre classique de la théorie des groupes et il ne sera question que de ceux-ci dans le présent article.
Exemples
- Le groupe additif ℚ des nombres rationnels est divisible.
- Plus généralement, le groupe additif de tout espace vectoriel sur le corps ℚ est divisible (on obtient ainsi tous les groupes divisibles sans torsion).
- Tout quotient d'un groupe divisible est divisible. En particulier, ℚ/ℤ est divisible.
- Pour un nombre premier p donné, la composante p-primaire ℤ[1/p]/ℤ de ℚ/ℤ — aussi notée ℤ(pModèle:Exp) — est divisible. Ceci revient à dire que les groupes de Prüfer sont divisibles.
- Le groupe multiplicatif ℂ* des nombres complexes non nuls est divisible, puisqu'un complexe possède des racines n-ièmes pour tout n.
Propriétés
- Un groupe abélien G est divisible si et seulement si G = pG pour tout nombre premier p[2].
- Un groupe abélien p-primaire (autrement dit un p-groupe abélien) est divisible si et seulement si G = pG[3].
- La somme directe d'une famille de groupes abéliens est divisible si et seulement si chacun de ces groupes est divisible[4].
- (Baer, 1940) Si f est un homomorphisme d'un groupe abélien A dans un groupe abélien divisible D, si B est un groupe abélien dont A est sous-groupe, f peut être prolongé en un homomorphisme de B dans D[5].
- Tout sous-groupe divisible d'un groupe abélien en est facteur direct[6]. (En effet, si un sous-groupe D d'un groupe abélien A est divisible, alors, d'après la propriété précédente, l'homomorphisme identité de D sur lui-même peut se prolonger en un homomorphisme de A sur D et on sait que ceci entraîne que D est facteur direct de A.)
- Tout groupe abélien peut être plongé dans un groupe abélien divisible[7].
- Un groupe abélien est divisible si et seulement s'il n'a pas de sous-groupe maximal[8].
Théorème de structure des groupes abéliens divisibles
La structure des groupes abéliens divisibles est entièrement décrite par le théorème suivant : Modèle:Énoncé
Plus explicitement, pour tout groupe abélien divisible Modèle:Math :
soit finalement :où Modèle:Math est le sous-groupe de torsion et les Modèle:Math ses composantes primaires, le cardinal de Modèle:Math est la dimension du ℚ-espace vectoriel dont Modèle:Math est le groupe additif et le cardinal de Modèle:Math est la dimension du [[Corps fini|FModèle:Ind]]-espace vectoriel dont le sous-groupe { g ∈ G | pg = 0 } de Modèle:Math est le groupe additif.
Comme tout sous-groupe d'un groupe abélien de type fini est lui-même de type fini[9] et que ni ℚ ni aucun groupe de Prüfer n'est de type fini, il en résulte qu'un groupe abélien divisible de type fini est forcément nul (ce qui peut se démontrer plus directement[10]).
Groupes abéliens réduits
On démontre[11] que tout groupe abélien G admet un plus grand sous-groupe divisible, c'est-à-dire un sous-groupe divisible qui contient tous les autres. Ce sous-groupe est noté dG. Un groupe abélien G pour lequel dG = 0 (autrement dit un groupe abélien qui n'a que son sous-groupe nul comme sous-groupe divisible) est dit réduit. On démontre[11] que tout groupe abélien G admet une décomposition en somme directe G = dG ⊕ R, où R est un groupe réduit.
Généralisations
- La notion de groupe divisible peut être étendue à des A-modules, où A est un anneau de tel ou tel type. Par exemple, Bourbaki[12] définit un A-module divisible, A étant un anneau intègre, comme un A-module M tel que pour tout élément x de M et tout élément non nul a de A, il existe un élément y de M tel que x = ay. Un groupe abélien est alors divisible si et seulement s'il est divisible comme Z-module.
- La propriété des groupes divisibles énoncée dans le théorème de Baer (cf § Propriétés) est en fait caractéristique : un groupe abélien D est divisible si et seulement s'il la vérifie[13], autrement dit s'il est injectif comme Z-module (plus généralement, sur un anneau principal, les modules divisibles sont exactement les modules injectifs).
Notes et références
- ↑ W.R. Scott, Group Theory, 1964, rééd. Dover 1987, p. 95, définit les groupes divisibles sans les supposer abéliens, mais après cette définition, tous les groupes divisibles qu'il considère sont abéliens.
- ↑ Voir par exemple Modèle:Ouvrage, Modèle:4e éd., tirage de 1999, exerc. 10.23, i, p. 324.
- ↑ Voir par exemple Modèle:Harvsp, exerc. 10.23, ii, p. 324.
- ↑ Voir par exemple Modèle:Harvsp, exemple 10.7, p. 320.
- ↑ Pour une démonstration, voir par exemple Modèle:Harvsp. J.J. Rotman appelle ce théorème « Injective Property ».
- ↑ Voir par exemple Modèle:Harvsp.
- ↑ Pour une démonstration, voir par exemple Modèle:Harvsp.
- ↑ Voir par exemple Modèle:Harvsp, exerc. 10.25, p. 324.
- ↑ Voir par exemple Modèle:Harvsp, exerc. 10.7, ii, p. 318.
- ↑ Démonstration par récurrence sur le cardinal n d'une famille génératrice finie. L'énoncé est évident si ce cardinal est nul. Si un groupe abélien divisible G est engendré par une famille finie x1, ..., xn, avec n ≥ 1, alors G/⟨xn⟩ est engendré par n – 1 éléments, donc, par hypothèse de récurrence sur n, G/⟨xn⟩ est nul, donc G est monogène. Il ne peut être monogène infini, car ℤ n'est pas divisible. Donc G est fini. Soit n son ordre. Puisque G est divisible, G = nG = 0.
- ↑ 11,0 et 11,1 Pour une démonstration, voir par exemple Modèle:Harvsp, p. 322.
- ↑ N. Bourbaki, Algèbre, vol. I, p. II.197, exerc. 33.
- ↑ Voir par exemple Modèle:Harvsp, exerc. 10.22, p. 324. Si un groupe G possède la propriété injective du théorème de Baer, alors, pour tout élément x de G et pour tout nombre naturel n non nul, l'unique homomorphisme f de nZ dans G qui applique n sur x peut être prolongé en un homomorphisme g de Z dans G. L'image de 1 par g est alors un élément y de G tel que x = ny. (On aurait aussi pu prolonger à Q l'homomorphisme de Z dans G qui applique 1 sur x.)