Matrice suffisante

De testwiki
Aller à la navigation Aller à la recherche

En mathématiques, les termes suffisante en colonne, suffisante en ligne et suffisante qualifient des matrices carrées réelles apportant des propriétés particulières aux problèmes de complémentarité linéaire. Brièvement, une matrice Mn×n est dite

  • suffisante en colonne si x(Mx)0 implique que x(Mx)=0,
  • suffisante en ligne si x(Mx)0 implique que x(Mx)=0,
  • suffisante si elle est à la fois suffisante en colonne et suffisante en ligne.

Dans ces définitions, uv désigne le produit de Hadamard des vecteurs u et v, qui est un vecteur dont la composante i est uivi, et M désigne la matrice transposée de M. Il faut comprendre « x(Mx)0 implique que x(Mx)=0 » comme suit : « tout point x vérifiant x(Mx)0 vérifie aussi x(Mx)=0 ».

Les matrices suffisantes en colonne sont aussi celles qui assurent la convexité de l'ensemble des solutions d'un problème de complémentarité linéaire. Les matrices suffisantes en ligne sont aussi celles qui assurent que l'ensemble des solutions d'un tel problème est identique à l'ensemble des points stationnaires de son problème quadratique associé.

Ces notions ont été introduites par Cottle, Pang et Venkateswaran (1989[1]). La terminologie anglaise originale est column sufficient, row sufficient et sufficient. Les qualificatifs en colonne et en ligne ne sont guère intuitifs. En réalité, l'appellation suffisante en colonne a été choisie en partie pour plaisanter et parodier le terme adéquate en colonne[2], notion introduite par Ingleton (1966[3]) et qui signifie que

xn:x(Mx)0Mx=0.

Comme cette notion revient à dire que pour tout I{1,,n} non vide, detMI,I=0 si, et seulement si, les colonnes MI de M sont linéairement dépendantes, le qualificatif en colonne se justifie plus aisément dans ce dernier cas.

Problème de complémentarité

Ce sont les problèmes de complémentarité qui ont motivé l'introduction des notions de matrice suffisante. Nous rappelons donc ici quelques notions liées à ces problèmes.

Définitions

Pour un vecteur vn, la notation v0 signifie que toutes les composantes vi du vecteur sont positives.

Étant donnés une matrice réelle carrée Mn×n et un vecteur qn, un problème de complémentarité linéaire consiste à trouver un vecteur xn tel que x0, Mx+q0 et x(Mx+q)=0, ce que l'on écrit de manière abrégée comme suit :

CL(M,q):0x(Mx+q)0.

Un point x vérifiant x0 et Mx+q0 est dit admissible pour le problème CL(M,q) et l'ensemble

Adm(M,q):={xn:x0,Mx+q0}

est appelé l'ensemble admissible de ce problème. On dit que le problème CL(M,q) est réalisable si Adm(M,q). On note

Sol(M,q)

l'ensemble des solutions du problème de complémentarité linéaire CL(M,q).

Problème quadratique associé

Considérons le problème d'optimisation quadratique en xn suivant :

(PQ){minx(Mx+q)x0Mx+q0.

Comme le coût de ce problème est borné inférieurement sur l'ensemble admissible (il y est positif), ce problème a toujours une solution (Frank et Wolfe, 1956[4]). On en déduit alors que Modèle:Bloc emphase Toutefois, le problème quadratique (PQ) peut, en général, avoir des minima locaux ou des points stationnaires qui ne sont pas solution de CL(M,q). On rappelle qu'un point xn est stationnaire pour le problème (PQ) s'il existe des multiplicateurs sn et zn tels que les conditions de Karush, Kuhn et Tucker suivantes soient vérifiées :

(KKT){(a)(M+M)x+qsMz=0(b)0xs0(c)0(Mx+q)z0.

On note

Sta(M,q)

l'ensemble des points stationnaires du problème quadratique (PQ).

Matrice suffisante en colonne

Définition

Modèle:Théorème

Rôle dans les problèmes de complémentarité

En toute généralité, l'ensemble Sol(M,q) des solutions d'un problème de complémentarité linéaire est une réunion de polyèdres convexes[5]. Les matrices suffisantes en colonne sont celles pour lesquelles l'ensemble de ces solutions est un unique polyèdre convexe.

Modèle:Théorème

Lien avec d'autres classes de matrices

On note 𝐏𝟎 l'ensemble des 𝐏𝟎-matrices. Si M𝐏𝟎, il existe un x0 tel que, pour tout indice i, xi0 xi(Mx)i<0. Cette propriété n'est pas compatible avec la 𝐒𝐂-matricité. On a donc l'inclusion suivante.

Modèle:Ancre Modèle:Bloc emphase

Matrice suffisante en ligne

Définition

Modèle:Théorème

Rôle dans les problèmes de complémentarité

Si xn est solution du problème de complémentarité linéaire CL(M,q), il est également solution du problème quadratique (PQ). Comme les contraintes de ce dernier sont qualifiées, les conditions de Karush, Kuhn et Ticker (KKT) sont vérifiées pour des multiplicateurs sn et zn. On a donc

Sol(M,q)Sta(M,q).

Le résultat suivant montre que l'on a égalité dans cette relation, quel que soit qn, si, et seulement si, la matrice M est suffisante en ligne.

Modèle:Théorème

Liens avec d'autres classes de matrices

Si on note 𝐏 l'ensemble des P-matrices, 𝐏𝟎 l'ensemble des P0-matrices 𝐐𝟎 l'ensemble des Q0-matrices et 𝐒𝐃𝐏 l'ensemble des matrices semi-définies positives (non nécessairement symétriques), on a[1]

Modèle:Bloc emphase

Les inclusions 𝐏𝐒𝐋𝐏𝟎 résultent des définitions des SL-matrices, des P-matrices et des P0-matrices. On observe ensuite que, si q est tel que Adm(M,q), alors le problème quadratique (PQ) a une solution[4], qui est un point stationnaire de ce problème ; maintenant, si M est suffisante en ligne, ce point stationnaire est solution de CL(M,q) ; donc 𝐒𝐋𝐐0. Enfin, l'inclusion 𝐒𝐃𝐏𝐒𝐋 est due à Dorn (1961[6]).

Les matrices suffisantes en ligne sont donc exactement celles qui permettent de démontrer l'existence d'une solution de CL(M,q) en passant par les conditions d'optimalité (KKT) du problème quadratique (PQ)[1]. Le fait que 𝐒𝐋 ne soit pas tout 𝐐𝟎 laisse penser qu'il doit exister d'autres approches analytiques permettant de montrer l'existence de solution de CL(M,q) ; les matrices copositives-plus introduites par Lemke (1965[7]) sont un exemple familier de classe de matrices qui ne sont pas suffisantes en ligne[8]Modèle:,[1].

Matrice suffisante

Définition

Modèle:Théorème

Rôle dans les problèmes de complémentarité

Modèle:Théorème

Liens avec d'autres classes de matrices

Si on note 𝐒𝐃𝐏 l'ensemble des matrices semi-définies positives (non nécessairement symétriques), 𝐏 l'ensemble des P-matrices et 𝐏* l'ensemble des P*-matrices, on a les inclusion et égalité suivantes[9].

Modèle:Bloc emphase

Annexes

Notes

Modèle:Références

Article connexe

Références


Modèle:Portail

  1. 1,0 1,1 1,2 et 1,3 Modèle:En R.W. Cottle, J.-S. Pang, V. Venkateswaran (1989). Sufficient matrices and the linear complementarity problem. Linear Algebra and its Applications, 114, 231–249. doi
  2. Modèle:En R.W. Cottle (2005). Linear complementarity since 1978. Dans Variational Analysis and Applications, Nonconvex Optimization and Its Applications 79, pages 239–257. Springer, New York.
  3. Modèle:En A.W. Ingleton (1966). A problem in linear inequalities. Proc. London Math. Soc., 2, 519–536.
  4. 4,0 et 4,1 Modèle:En M. Frank, P. Wolfe (1956). An algorithm for quadratic programming. Naval Research Logistics Quarterly, 3, 95–110.
  5. Modèle:En M.J.M. Janssen (1983). On the structure of the solution set of a linear complementarity problem. Cahiers Centre Études Rech. Opér., 25, 41–48.
  6. Théorème 1 de Dorn (1961).
  7. Modèle:En C.E. Lemke (1965). Bimatrix equilibrium points and mathematical programming. Management Science, 11, 681–689. doi
  8. Modèle:En R.W. Cottle, G.B. Dantzig (1968). Complementarity pivot theory of mathematical programming. Linear Algebra and its Applications, 1, 103–125. doi
  9. Les inclusions (𝐒𝐃𝐏𝐏)𝐏*𝐒𝐂 ont été démontrées par Kojima, Megiddo, Noma and Yoshise (1991). L'inclusion 𝐏*𝐒𝐋 a été démontrée par Guu et Cottle (1995). L'inclusion 𝐒𝐔𝐏* a été démontrée par Väliaho (1996).