Théorème de Noether (physique)

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Modèle:Voir homonymes

Emmy Noether est une mathématicienne allemande connue pour ses contributions majeures en algèbre abstraite et en physique théorique.

Le théorème de Noether exprime l'équivalence qui existe entre les lois de conservation et l'invariance du lagrangien d'un système par certaines transformations (appelées symétries) des coordonnées.

Démontré en 1915 et publié en 1918 par la mathématicienne Emmy Noether à Göttingen, ce théorème fut qualifié par Albert Einstein de « monument de la pensée mathématique » dans une lettre envoyée à David Hilbert en vue de soutenir la carrière de la mathématicienne[1].

Il est abondamment utilisé aujourd'hui par la physique théorique, où tout phénomène est abordé, chaque fois que possible, en matière de symétrie d'espace, de charges électriques, et même de temps.

Énoncés

Modèle:Théorème

Un autre énoncé équivalent est : Modèle:Théorème

Chaque « invariance » traduit le fait que les lois de la physique ne changent pas lorsqu'une expérience subit la transformation correspondante, et donc, qu'il n'y a pas de référence absolue pour mener une telle expérience[2].

Démonstrations

Modèle:Démonstration/début

Soit qi(s), un jeu de coordonnées généralisées qui dépendent continûment d'un paramètre s. Si le lagrangien L est indépendant de s, c'est-à-dire L(qi(s),q˙i(s),t)=L(qi,q˙i,t) avec qi=qi(0), alors :

I(qi,q˙i)=Lq˙idqi(s)ds|s=0

est une intégrale première, c'est-à-dire que I est invariant dans le temps : dIdt=0.

En effet :

dLds=Lqi(s)dqi(s)ds+Lq˙i(s)dq˙i(s)ds=0
dLds=ddtLq˙i(s)dqi(s)ds+Lq˙i(s)ddtdqi(s)ds

(en utilisant les équations d'Euler-Lagrange ddtLq˙i(s)=Lqi(s), et dq˙i(s)ds=ddtdqi(s)ds)

dLds=ddt(Lq˙i(s)dqi(s)ds|s)=0
dLds=ddt(Lq˙idqi(s)ds|s=0)=0.

Modèle:Démonstration/fin

Remarque : Dans le cas général, on n'a pas nécessairement un unique paramètre s mais plutôt un jeu de paramètres sj auxquels vont correspondre les invariants

Ij=Lq˙iqi(s)sj.

Modèle:Démonstration/début

Soit un Lagrangien L=L(qi,q˙i,t) qui dépend de N coordonnées généralisées qi=qi(t), avec i=1,,N. Selon le principe de moindre action, l'action S=Ldt est stationnaire sur une trajectoire physique. Ceci mène directement aux équations d'Euler-Lagrange :

iddt(Lq˙i)Lqi=0.

Aussi, sous une transformation infinitésimale des coordonnées qiqi=qi+α.δqi, si le Lagrangien est invariant à une dérivée temporelle totale près (Modèle:C.-à-d. : LL=L+α.δL=L+αddtF(qi,t), pour une fonction quelconque F(qi,t) qui ne dépend que des coordonnées généralisées et du temps), alors les équations du mouvement sont inchangées. Sous cette hypothèse, en calculant le Lagrangien au premier ordre du développement de Taylor, on obtient :

α.δL=Lqiα.δqi+Lq˙iα.δq˙i=Lqiα.δqi+Lq˙iddtα.δqi=ddt(Lq˙iα.δqi)+[Lqiddt(Lq˙i)]α.δqi.

Notons que le deuxième terme de la seconde ligne n'est autre que l'un des termes obtensible via la règle de Leibniz :

ddt(Lq˙iδqi)=ddt(Lq˙i)δqi+Lq˙iddt(δqi)

Nous avons donc simplement remplacé Lq˙iddtδqi par les autres termes de la règle en tenant compte du facteur α.

Enfin, dans notre dernière ligne, le deuxième terme est nul car il s'agit de l'équation d'Euler-Lagrange pour qi. Ainsi, par comparaison avec l'hypothèse de départ, on a :

F(qi,t)=Lq˙i.δqi.

On définit la quantité conservée du système :

C(qi,t)=F(qi,t)Lq˙i.δqi

car

ddtC(qi,t)=0.

Dans le cas où la transformation laisse le lagrangien invariant, on a alors F(qi,t)=0 et on retrouve alors le résultat de la démonstration précédente, qui est moins générale mais plus explicite. Modèle:Démonstration/fin

Exemples

Propriété du système physique Symétrie Invariant
Espace homogène Invariance par translation dans l'espace Conservation de l'impulsion
Espace isotrope Invariance par rotation dans l'espace Conservation du moment cinétique
Système indépendant du temps Invariance par translation dans le temps (les lois sont les mêmes tout le temps) Conservation de l'énergie
Pas d'identité propre des particules Permutation de particules identiques Statistique de Fermi-Dirac, Statistique de Bose-Einstein
Pas de référence absolue pour la phase des particules chargées Invariance par changement de phase Conservation de la charge électrique

Détaillons quelques-uns de ces exemples.

Quantité de mouvement

Prenons tout d'abord le cas d'une particule libre, on a donc le lagrangien

L=12mq˙2

invariant par translation. On voit bien ici que si on change l'origine des coordonnées, cela ne va pas modifier la physique de notre particule libre. Le lagrangien est donc invariant par la transformation de translationqiq~i=qi+αi

avec les αi les composantes du vecteur décrivant la translation. On voit ici que l'on a, pour une translation infinitésimale d'un vecteur δα=δαiei , une variation de nos coordonnées généralisées qui vaut δqi=q~iqi=δαi . Les quantités conservées associées à cette transformation sont donc

Ii=jLq˙jqjαi=jLq˙jδij=mq˙i=piavec δij le delta de Kronecker, on retrouve bien les composantes du vecteur quantité de mouvement.

Moment cinétique

Considérons maintenant le cas d'un système invariant par rotation, prenons par exemple une particule placée dans un potentiel central Φ(r), on a alors L=12mq˙2Φ(r). Le système étant invariant par rotation (la norme de la vitesse est invariante par rotation), il semble pertinent de se placer en coordonnées sphériques, pour lesquelles q=rer et q˙=r˙er+rθ˙eθ+rsin(θ)ϕ˙eϕ. On a alors

L=m2(r˙2+r2θ˙2+r2sin2(θ)ϕ˙2)Φ(r).

La transformation associée à la rotation en coordonnées sphériques peut s'écrire comme (r,θ,ϕ)(r,θ~=θ+χ,ϕ~=ϕ+ψ), avec χ et ψ les deux angles caractérisant la transformation. Pour une transformation infinitésimale on a donc δq=reθδχ+reϕδψ. On voit donc ici que les deux quantités conservées vont être

Iθ=L(rθ˙)qχeθ=mr2θ˙etIϕ=L(rsin(θ)ϕ˙)qψeϕ=mr2sin(θ)ϕ˙c'est-à-dire les deux composantes angulaires du moment cinétique L=r×p, à un signe près pour Lθ. Attention cependant aux indices, on a Iθ=Lϕ et Iϕ=Lθ, et on a bien sûr Lr=0 par définition du produit vectoriel.

Énergie

Si on a cette fois un système qui est invariant dans le temps, on a alors un lagrangien qui est indépendant du temps L(t+δt)=L(t), tL=0. La transformation est ici une translation dans le temps, et se traduit pour les coordonnées temporelles par qi(t)q~i(t)=qi(t+δt)=qi(t)+δtq˙i

ce qui conduit à la quantité conservée

I=iLqi˙qit.Le lagrangien étant conservé aussi, on a la quantité totale

H=iLq˙iq˙iL

qui est conservée, or ce n'est rien d'autre que le hamiltonien du système. Le hamiltonien (l'énergie) est donc conservé pour les systèmes indépendants (explicitement) du temps.

Théorie des champs classique

Le théorème de Noether est aussi valide en théorie des champs classique où le lagrangien est remplacé par une densité lagrangienne qui dépend de champs plutôt que de variables dynamiques. La formulation du théorème reste sensiblement la même[3] :

Modèle:Théorème

Modèle:Démonstration

Invariance de jauge et second théorème de Noether

On considère de manière générale pour une densité de lagrangien quelconque [ψi,μψi,xμ]

dont l'action associée doit être stationnaire pour toute transformation infinitésimale des champs selon le Principe de Hamilton. On a donc

δS=d4x[ψiδψi+(μψi)δμψi]=d4x[(ψiμ(μψi))δψi+μ((μψi)δψi)]=0

où on a utilisé la convention d'Einstein pour la sommation sur les indices répétés, et où on a mis de côté les possibles transformations de l'espace-temps (on a pris δxμ=0 ). On voit donc que l'on peut reformuler ce résultat de manière générale comme

[ψ]iδψi=μ((μψi)δψi),[ψ]i=ψiμ(μψi)

avec [ψ]i représentant donc les équations du mouvement pour le champ ψi.

On s'intéresse maintenant à une densité de lagrangien invariante sous une transformation de jauge, c'est-à-dire une transformation locale des champs. Dans ce cas on va voir que l'on applique cette fois le second théorème de Noether.

Plus précisément on considère ici une densité de lagrangien invariante sous un groupe de transformation de dimension infinie et dépendant continûment de ρ fonctions pα(xμ),α=1,...,ρ , groupe que l'on notera Gρ. On voit que dans le cas d'une telle transformation la variation infinitésimale des champs δψi dans l'équation ci-dessus se décompose comme

δψi=α[aαi(ψi,μψi,xμ)Δpα(xμ)+bαiν(ψi,μψi,xμ)νΔpα(xμ)]

où la notation Δpα dénote le fait que l'on considère un pα infinitésimal. On voit donc que l'on peut reprendre l'équation précédente sous forme intégrale pour obtenir

d4x[ψ]i(aαiΔpα+bαiννΔpα)=d4x(aαi[ψ]iν(bαiν[ψ]i))Δpα+d4xν(bαiν[ψ]iνΔpα)d4x(aαi[ψ]iν(bαiν[ψ]i))Δpα=d4xμ((μψi)δψi+bαiμ[ψ]iΔpα)or on voit ici que le second terme de la seconde équation est un terme de bord, et les fonctions pα étant arbitraires on peut toujours les choisir de sorte que ce terme s'annule. On obtient alors le second théorème de Noether[4] Modèle:Théorème

Exemple

Considérons par exemple la densité de Lagrangien

=(μ+iqAμ)ψ(μ+iqAμ)ψ*m2ψψ*14FμνFμνFμνne dépend que des dérivées première de Aμ (dans le cas abélien du moins). Elle est invariante sous la transformation de jauge locale

ψψ~=eiqθ(x)ψ,ψ*ψ~*=eiqθ(x)ψ*,AμA~μ=Aμ+μθ(x)

où voit qu'ici on a une seule fonction continue pα dans notre groupe de transformation, que l'on a noté θ(x). Cette transformation correspond sous forme infinitésimale à

δψ=iqδθψ,δψ*=iqδθψ*,δAμ=μθon a alors aψ=iqψ,aψ*=iqψ,bψ=bψ*aAμ=0,bAμν=δμν.

On en déduit que dans le cas de cette densité de Lagrangien on a la relation

[ψ]iqψ+[ψ*](iqψ*)=μ([Aν]δνμ)=μ[Aμ].

On voit alors ici que si les équations du mouvement sont satisfaites pour les deux champs de masse ψ et ψ* on a alors

μ(Aμν(νAμ))=0

or sachant que l'on a Aμ=0 et (νAμ)=Fμν on en déduit qu'ici le courant Jμ=νFμν est conservé. Cela implique notamment que Fμν soit complètement antisymétrique, et donc construit à partir de μAννAμ.

De même si à l'inverse on impose que les équations de l'électromagnétisme soient satisfaites c'est-à-dire [Aμ]=0 on obtient l'équation de conservation du quadri courant électrique usuel

μjμ=0,jμ=iq(ψ*(μ+iqAμ)ψψ(μ+iqAμ)ψ*).

Symétries internes

Modèle:...

Dans la culture

Dans Le Pyrophore, le narrateur ambitionne de découvrir de « quelles symétries naissent les invariants par le Noether des mers »[5].

Notes et références

Modèle:Références

Voir aussi

Bibliographie

Article original

Dictionnaires et encyclopédies

Articles connexes

Liens externes

Modèle:Portail

  1. Modèle:Ouvrage.
  2. Modèle:Lien web (traduction libre par J. Fric de Modèle:Lang de J. Baez).
  3. Modèle:Ouvrage.
  4. Modèle:Article.
  5. Simon Giz, Le pyrophore, dans Le journal d'un pyrophore