Timée (Platon)

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Modèle:Titre mis en forme Modèle:En-tête label Modèle:Voir homonymes Modèle:Infobox Ouvrage Le Timée (en Modèle:Lang-grc / Modèle:Langue), l'un des derniers dialogues de Platon, est considéré depuis l'Antiquité comme l'œuvre capitale du philosophe. Rédigé sans doute vers Modèle:Date, à peu d’intervalle du Politique et du Philèbe, mais avant Les Lois, comme le montrent les nombreuses analogies entre ces trois dialogues, le Timée devait composer une trilogie avec le Critias et l’Hermocrate, mais rien de ce dernier dialogue ne nous est jamais parvenu. Cette trilogie avait pour projet de décrire les origines de l'univers, de l'homme et de la société.

L'ouvrage présente une vaste cosmogonie fondée sur les données les plus certaines de la science, telle qu'elle se développait au milieu du Modèle:-s, dans un climat de curiosité intellectuelle et de partage incessant du savoir. C'est un philosophe pythagoricien, probablement fictif, du nom de Timée de Locres, qui expose une réflexion sur l'origine de l’univers, la nature du monde physique et la formation de l'Âme du monde vues comme les œuvres d'un démiurge, tout en abordant les questions de la connaissance scientifique et de la place des mathématiques dans l'explication du monde. Platon y développe une cosmogonie dans laquelle prennent place les théories novatrices du lieu, du Temps et des transformations mutuelles des éléments, expression de la puissante stimulation intellectuelle que les nouvelles découvertes astronomiques et mathématiques ont donnée au monde philosophique de son époque.

Cette cosmologie constitue une encyclopédie complète de la science platonicienne, indispensable au philosophe et à l’homme d’État. Platon y rattache une anthropologie, partie maîtresse du dialogue relative à l’homme, dans laquelle il dessine non seulement l’histoire fictive de l’humanité et de la cité d’Athènes, mais où il esquisse aussi une psychologie morale fondée sur l’imitation par l’homme de la divine harmonie cosmique. Le pressentiment qu’il existe du divin dans le cosmos, qualifié de Modèle:Citation par Platon et par Aristote, inaugure ainsi un changement décisif dans l’histoire de la religion grecque, et annonce la théologie de l’époque hellénistique et de l’Antiquité tardive. Le profond sentiment religieux qui anime le Timée, conséquence de l’idéalisme spéculatif de Platon, fonde l’optimisme de sa philosophie : puisque nous pouvons, autant qu’il est en nous, nous identifier à l’œuvre de Dieu grâce à la raison, notre salut nous appartient, il réside dans la pensée. Cette conviction anime aussi bien ses plans de réformation morale et politique que ses conceptions médicales.

L'étendue et l’importance des questions traitées dans ce dialogue qui contient une philosophie de l'histoire rattachée à une conception générale de la nature, explique la lecture ininterrompue qui en a été faite à travers les siècles par les philosophes et les savants, et la profonde influence qu’il a pu exercer dans quasiment tous les domaines du savoir, depuis l'Antiquité jusqu’aux débuts du christianisme et à la Renaissance. Malgré les grandes différences qui séparent notre savoir scientifique de celui en vigueur à l’époque de Platon, ce que l’historien de la philosophie, Walther Kranz, appelle Modèle:Citation du Timée, a été retenu par certains savants du Modèle:S- comme une hypothèse anticipant les plus récentes découvertes de la physique.

Présentation générale

Une encyclopédie

Peinture d'un vieillard portant une longue barbe et pointant son index droit vers le ciel.
Sur la fresque de L'École d'Athènes, Raphaël a représenté Platon tenant à la main le texte du Timée, considéré comme son œuvre la plus importante.

Le Timée présente une composition méthodique et pédagogique, avec des articulations nettement marquées : annonces des développements qui vont suivre, récapitulations des résultats acquis et pas moins de dix résumés. C’est aussi le dialogue dans lequel l’exposé continu d’un seul personnage, Timée de Locres, occupe la quasi-totalité de l’œuvre. Autant de procédés qui donnent à ce dialogue l’allure d’un cours destiné non à des profanes mais à un auditoire déjà Modèle:Citation (Modèle:Nobr), comme Platon le fait remarquer lui-mêmeModèle:Sfn. Sous son apparence de fiction, le caractère scientifique et positif du Timée ne doit pas être méconnu : Platon expose avec précision, et dans une langue technique, l’état le plus récent des connaissances de son temps, mais sans prétendre être exhaustifModèle:Sfn. En effet, loin de se limiter à la cosmologie et aux interrogations sur la nature du monde physique, le Timée aborde les mathématiques, la biologie, la chimie, la médecine, la psychologie, la politique, la religion et l’astronomie.

Une histoire fictive et une Genèse

Modèle:Article détaillé Dans cette encyclopédie, tout ce qui touche à la description de l’univers, à la physique et à la formation de l’Âme du Monde n’est pas l’essentiel aux yeux de Platon : la cosmologie joue un rôle accessoire par rapport à l’anthropologie. On le voit à la requête amicale que Socrate adresse à ses trois interlocuteurs. Il leur demande de faire l’éloge de la cité idéale qu’il a décrite la veille[note 1], en racontant comment, de théorique et abstraite, on peut imaginer son excellence en actionModèle:Sfn. Pourrait-on en construire le modèle vivant et montrer sa perfection face aux difficultés de la réalité, en temps de paix et de guerre (Modèle:Nobr) ? Tel est l’objet principal du Timée : l’intention du dialogue est politique. Critias fait alors le récit de la guerre victorieuse menée par Athènes, il y a neuf mille ans, contre l’ennemi atlante et la chute de l’Atlantide. C’est ainsi que, par un artifice, Platon prétend nous raconter l’histoire oubliée Modèle:Incise de l’humanité et de la cité d’Athènes : livre des générations, le Timée comme le Livre de la Genèse, ramène un peuple au souvenir de ses origines et de ses ancêtres pour mieux l’enraciner dans l’ordre universelModèle:Sfn. Il cherche aussi à fonder la constitution idéale décrite dans La République en montrant que dans la plus haute antiquité, avant le déluge, à Athènes, les choses étaient conformes à ce modèle d’excellence, qui lui-même répondait aux fins d’un être humain qui trouvait sa place dans cette cité et cet univers organisé. De la sorte, Platon dote son récit de l’autorité de l’histoire ; et en rattachant cette histoire à l’histoire de l’univers, il la fait bénéficier aussi de l’autorité de la science physique, tout en mettant en relief l’unité des chosesModèle:Sfn.

Microcosme et macrocosme

Dans le Timée, la physique de Platon, au sens grec d’« étude de la nature », est téléologique : c’est dire que Modèle:Citation, écrit Léon RobinModèle:Sfn. Ce qui demeure toujours au centre de la réflexion de Platon, c'est donc l’homme. Toutes les sciences, même les plus abstraites, ne sont étudiées que dans leurs rapports à la science de l’homme. Ainsi, l’origine des végétaux ou l’histoire des animaux ne sont traitées accessoirement qu’à l’occasion de la nutrition ; de même, la physique, la minéralogie, la chimie ne sont abordées que sous l’angle qui intéresse directement l’humanité, au point de vue des sensations, de l’hygiène, de la thérapeutique, ou de propriétés dont nous pouvons faire notre profitModèle:Sfn. Cette histoire naturelle de l’homme, qui commence avec Phoroneus, « celui qu’on appelle le premier homme » (Modèle:Nobr), est conduite en vue de ses applications pratiques à l’éducation, à la médecine et à la politique. Elle entre dans la conception globale d’une liaison étroite entre nature humaine et nature universelle, entre microcosme et macrocosme. Cette conception du Timée dominera toute la philosophie de la Renaissance et du Modèle:S-.

Composition du Timée

Modèle:Article connexe Aussitôt après le prologue (Modèle:Nobr), le personnage de Critias annonce le choix du plan qui sera suivi en fonction de l’étude projetée de l’univers puis du microcosme humain : Modèle:Citation Ce programme soulève le problème philosophique fondamental de la connaissance : peut-on embrasser dans un même discours rigoureux une cosmologie et une anthropologie ? L’homme peut-il accéder à la vérité au sujet de l’univers, de la politique et du divin ? Platon pose alors quatre principes généraux, distinguant l’Être qui est toujours et ne devient pas ; le raisonnement et l’opinion fondée sur la sensation irraisonnée ; la causalité nécessaire au commencement de tout devenir ; enfin le modèle éternel, intelligible et immuableModèle:Sfn. Il énonce ensuite les conséquences méthodologiques et épistémologiques qui résultent de ces principes pour sa recherche.

  • Dans une première partie (Modèle:Nobr), il expose la loi suivant laquelle la pensée de Dieu ou sa sagesse inspirée par sa bonté, a dû, vraisemblablement, organiser un monde le meilleur possibleModèle:Sfn : c’est l’action de la « cause intelligente (ou divine) », celle qui est à l’origine de l’Univers et de la destinée des âmes.
  • Dans une deuxième partie (Modèle:Nobr), Platon expose l’action de la « cause nécessaire » (Modèle:Grec ancien), dont la nature est de mouvoir, de façon indéterminéeModèle:Sfn ; dans l’étude de la physique, sont abordés les corps élémentaires et leurs transformations mutuelles, la minéralogie, la chimie (hydrométéores, propriétés des métaux…) et la théorie des sensationsModèle:Sfn.
  • Enfin, dans une troisième partie (Modèle:Nobr jusqu’à la fin du dialogue), Platon montre comment se sont associées les deux causes (« cause nécessaire » aussi appelée « cause errante ») sous l’autorité de la « cause intelligente »Modèle:Sfn. Ainsi commence l’histoire naturelle de l’homme en qui le principe immortel de l’âme s’allie à un corps mortel ; elle se développe avec un traité d’anatomie, de physiologie, de pathologie, d’hygiène et de thérapeutiqueModèle:Sfn.

Personnages et exécution rhapsodique

Dessin de deux personnages se détachant en ocre rouge sur fond noir, l'un debout au premier plan jouant de l'aulos, l'autre allongé.
Scène de banquet, évocatrice du Modèle:Citation auquel Socrate et ses amis sont conviés au début du Timée. Coupe attique à figures rouges, Modèle:Circa Musée du Louvre.

Les quatre personnages du Timée, Socrate, Critias, Hermocrate et Timée de Locres, sont réunis pour un festin (Modèle:Grec ancien, Modèle:Nobr), lié à la fête des Panathénées et aux concours rhapsodiques qui s’y déroulaient ; Platon file donc, tout au long du prologue, la métaphore d’une exécution rhapsodique, chaque personnage prenant le relais du discours du précédent, selon l’antique tradition établie par SolonModèle:Sfn.Modèle:ClrSocrate a pris la parole le premier pour résumer les principales caractéristiques de la Cité idéale, et par la suite il est réduit au rôle d’interlocuteur muet. Le philosophe et homme politique Critias, par son récit historique, a confirmé la peinture faite par Socrate.Modèle:ClrLe personnage d’Hermocrate ne joue quasiment aucun rôle dans le dialogue et fait surtout figure d’auditeur ; il a été identifié par Proclus avec un personnage historique, le fameux général syracusain du même nom, ennemi acharné des ambitions d’AthènesModèle:Sfn : Platon aurait ainsi ironiquement confié au glorieux stratège, vainqueur des Athéniens, le soin de déterminer leur futur régime politique. Le troisième dialogue de la trilogie projetée par Platon, qui devait porter le nom d’Hermocrate et où il aurait tenu le rôle principal, n’a sans doute jamais été écritModèle:Sfn, et nous ignorons le thème que Platon aurait traité dans ce dialogue.Modèle:ClrTimée, le personnage principal du dialogue, est présenté comme Modèle:Citation, un homme qui se distingue par la fortune et la naissance. Socrate souligne les qualités éminentes de Timée comme homme d’État et l’excellence des institutions politiques de Locres : il aurait Modèle:Citation, tout en s’élevant aux sommets de toute philosophie (Modèle:Nobr). Il est aussi versé dans les mathématiques et l’astronomie plus qu’aucun autre des personnages du dialogue, et le discours qu’il prononce est de tendance nettement pythagoricienne. Mais ce personnage mystérieux ne nous est connu que par le témoignage de PlatonModèle:Sfn. Il a peut-être existé un savant pythagoricien portant le nom de Timée de Locres, mais aucune source ne permet de l'affirmer[1] ; l’hypothèse qui domine chez la plupart des commentateurs est celle d’un personnage de fiction, forgé sur le portrait du mathématicien et savant pythagoricien Archytas de Tarente : sous le nom de Timée, Platon aurait ainsi rendu hommage à son ami qu’il ne pouvait nommer expressément, puisque le discours de son personnage ne représentait pas exactement les conceptions du Tarentin[2].

Une cosmologie mathématique et révolutionnaire

Modèle:Article connexe On a pu dire que la cosmologie du Timée prolongeait les projets des physiologues présocratiques qui, dès le Modèle:-s-, avaient pris le relais des poètes dans la tentative d’offrir une explication de l’origine comme cause et de l’évolution du monde visible, le cosmos (Modèle:Grec ancien), depuis le Chaos primordial : alternative rationnelle à la cosmogonie des récits mythiques à la manière d’Hésiode au Modèle:-s-Modèle:Sfn. De fait, le Timée est le tout premier ouvrage de cosmologie à nous être parvenu dans son intégralité. Dans divers textes intitulés Sur la nature (en grec ancien Modèle:Grec ancien), des penseurs, parmi lesquels Anaximandre, Héraclite, Empédocle, et Parménide, avaient produit un discours qui, au-delà de l’univers physique (macrocosme), traitait aussi du microcosme, de l’origine et de la nature des êtres vivants, de l’homme et de la société, offrant par là une vision politique pour un modèle d’organisation de la cité fondé sur une vision du monde.

Mais la cosmologie du Timée s’écarte de celle des présocratiques sur deux points essentiels. Platon innove puissamment sur le plan philosophique et métaphysique, en concevant le monde et tous les êtres vivants qui le composent comme une création qui n’avait rien de nécessaire, comme un acte de pure générosité. Selon le mot d’André Motte, Modèle:Citation Poussant la spéculation sur le cosmos dans la voie jusque-là inexplorée des découvertes scientifiques les plus récentes, Platon est aussi le premier à penser l’univers en termes géométriques et mathématiquesModèle:Sfn : Modèle:Citation, écrit Bertrand Saint-SerninModèle:Sfn. L’information mathématique, reçue du monde intelligible et soulignée par Platon par l’expression Modèle:Grec ancien, constitue le ciment (Modèle:Grec ancien) qui assure à l’univers sa stabilité et sa continuitéModèle:Sfn. Kepler aussi bien que Galilée ont reconnu le bien-fondé de cette démarche que l’on peut qualifier de Modèle:Citation pour rendre compte de la constitution de l’universModèle:Sfn. Galilée, lui aussi, affirme en 1623 : Modèle:Citation

Le pari des Formes intelligibles

Modèle:Article détaillé Si Platon postule une physique mathématique de l’univers, c’est à la fois en vertu d’une conviction ancienne et d’un pari. Le Timée repose en effet sur l’hypothèse des Idées ou des Formes intelligibles, c’est-à-dire sur une réalité d’un ordre suprasensible définie dans le Phédon comme Modèle:Citation Ces termes sont très exactement ceux employés dans le Timée pour caractériser le modèle idéal dont s’est servi le Démiurge pour organiser le monde visible[A 1]. Platon précise que ce modèle éternel et immuable, Modèle:Citation (51 d). Dès lors l’alternative est posée en ces termes : Modèle:Citation Il n’y a pas d’évidence irréfutable d’un côté ou de l’autre, il faut prendre parti. Platon parie : « je vote », dit-il, (Modèle:Grec ancien), en faveur de la première option, et il précise aussitôt que Modèle:Citation La cosmologie et l’anthropologie devront donc être unifiées à l’aide d’une modélisation mathématique, et d’abord pour des raisons ontologiques : Platon conçoit en effet la nature des corps vivants en quelque sorte comme « poussière d’étoiles », les hommes sont faits, dit-il, Modèle:Citation, après la mort (Modèle:Nobr).

Recherches et intuitions scientifiques dans le Timée

En matière scientifique, Platon a pris une part considérable au développement de la physique et des mathématiques de son époque, au point d’apparaître non seulement comme un chercheur mais comme l’instigateur de l’essor mathématique du Modèle:-s-Modèle:Sfn Les mathématiques sont en effet pour lui l’instrument permettant d’exprimer certaines des conséquences découlant des axiomes posés.

La [[Lettre VII|Modèle:Nobr]] indique que Platon était en contact avec les scientifiques et les intellectuels pythagoriciens de Grande-Grèce, parmi lesquels figure son ami, le philosophe et mathématicien Archytas de TarenteModèle:Sfn, le modèle présumé de Timée de Locres. Parmi tous les domaines qu’il a abordés, Archytas se distingue par l’étude des proportions numériques appliquées aux intervalles musicaux ; ces recherches sur les rapports numériques le conduisirent à une théorie descriptive du cosmos[3]. Pythagore et Archytas établissent en effet un lien étroit entre harmonie musicale et harmonie universelle[A 2], or Platon fait de même dans le Timée (Modèle:Nobr) : Archytas a donc pu fonder la doctrine harmonique du Timée[4].

Image dans les tons sépia représentant une mosaïque avec sept personnages vêtus à la mode antique.
L’Académie de Platon, symbole de Modèle:Citation[5]. Mosaïque romaine de Pompéi, Modèle:-s- Musée archéologique national de Naples.

Le Timée conserve aussi le souvenir des travaux de recherche effectués dans tous les domaines scientifiques au sein de l’Académie, et montre combien Platon souhaitait être à la pointe de l’actualité scientifique de son époque. Ainsi, le dialogue suppose connus le théorème de Pythagore et la théorie des quantités irrationnelles formulée par Théodore de Cyrène, le maître de Platon ; les mathématiques d’Eudoxe de Cnide et la méthode d'exhaustion apparaissent à la source du système cosmologique de Platon, en particulier dans les divisions du mélange utilisé par le démiurge pour combler les intervalles dans les séries créées pour l’Âme du monde (Modèle:Nobr)Modèle:Sfn ; le Timée utilise la théorie des médiétés et la théorie des polyèdres réguliers (Modèle:Nobr) qui se sont développées précisément à l’époque de Platon, dans le milieu socratiqueModèle:Sfn ; c'est Théétète, l’ami de Socrate et de Platon, qui, le premier démontre qu’il ne peut y avoir que cinq polyèdres réguliers convexes inscriptibles dans la sphère : la [[Tétraèdre|pyramide à Modèle:Unité]], le cube, l’octaèdre, le dodécaèdre et l’icosaèdre, utilisés dans le dialogueModèle:Sfn ; c’était à cette époque une nouveauté mathématique, comme Platon le dit lui-même (Modèle:Nobr). Concernant l’atomisme platonicien, bien qu’il ne se réfère jamais explicitement ni à Leucippe ni à Démocrite, le Timée présente d’assez nombreuses ressemblances avec la physique de Démocrite, dont la doctrine était répandue à l’époque de Socrate. Ce dialogue suppose une théorie corpusculaire Modèle:Incise mais sans l’espace vide des atomistes, et dans une interprétation finaliste de la nature, sous la loi du BienModèle:Sfn. Ces particules élémentaires sont animées d’un mouvement naturel uniforme, semblable à celui de l’Âme du monde et des planètes dans le système cosmologique de Platon : considérée à la lumière de la mécanique classique, cette conception de la nature du mouvement n’est pas autre chose que la première intuition du principe d’inertie[6]. Enfin, en biologie et médecine, le Timée présente, sur les organes des sens, une doctrine semblable à celle d’Empédocle, d’Alcméon et du Corpus hippocratiqueModèle:Sfn. Au cours de ses voyages en Sicile, entre Modèle:Date- et Modèle:Date-, Platon s’est lié d’amitié avec le célèbre anatomiste Philistion de Locres, chirurgien et chef de l’école de médecine dont il reprend globalement les idées en matière d’anatomie, et il ne s’en écarte que sur le siège de l’intelligence et la question des sensations[7].

Un mythe vraisemblable et rationnel

Modèle:Article connexe La genèse du cosmos est un évènement originel inaccessible à l’hommeModèle:Sfn, Platon raconte donc les évènements tels qu’ils auraient pu ou auraient dû arriver. Le récit cosmologique du Timée ne peut être qu’une fable vraisemblable (Modèle:Grec ancien, Modèle:Nobr). En tant que mythe, le récit prend ainsi la forme d’une narration qui se déploie dans le temps, et qui décrit ce que font des personnages (Modèle:Nobr). La nécessité de recourir au mythe s’explique par la distinction entre deux formes de connaissance, d’une part la science, qui fonde un savoir irréfutable au moyen de démonstrations rigoureuses et que la persuasion ne peut ébranler (Modèle:Nobr), et d’autre part les opinions vraisemblables (Modèle:Nobr) ; l’opinion est une fluctuation de pensée qu’entraîne le discours vrai ; le discours vrai ne peut porter que sur ce qui est et non sur ce qui devient (Modèle:Nobr ; Modèle:Nobr ; Modèle:Nobr) : Modèle:Citation bloc Platon fait également la distinction entre cause nécessaire et raison vraisemblable (Modèle:Grec ancien), et il n’hésite pas à répéter maintes fois le caractère conjectural de son discoursModèle:Sfn, allant même jusqu’à considérer parfois que la connaissance qu’il cherche, Modèle:Citation (Modèle:Nobr). Le monde sensible que va décrire Platon n’est qu’une copie d’une forme intelligible, le « Vivant en-soi ». Le discours que tient Timée ne peut donc être dit vrai, il ne peut qu’être semblable au discours vrai. Seul le discours sur les formes intelligibles peut être considéré comme un discours vraiModèle:Sfn. Le philosophe ne peut guère plus, et fera donc comme le poète : tenir un discours qui ne pourra être dit vrai ou faux, car nul n’aura pu en être le témoin. Enfin, la certitude affirmée par Platon que l’être humain est la proie d’erreurs et d’illusions des sens, et sa Modèle:Citation, a pu contribuer à donner l’impression que le Timée n’était qu’une fable distrayante mais sans valeur.

En réalité, la vraisemblance, notée par l’épithète Modèle:Grec ancien, utilisée à dix-neuf reprises dans le Timée pour qualifier le mytheModèle:Sfn, loin de l’affaiblir, fonde au contraire l’autorité du récit : Modèle:Citation Il a en effet recours au mythe pour éclairer, de façon approximative, les questions impénétrables par la seule force de la raison discursive[8] ; telles sont les questions métapsychologiques pour lesquelles Platon forge la théorie mythique de la structure psychique de l’homme (Modèle:Nobr). Il fait de même dans le domaine métaphysique et cosmologique, pour expliquer Modèle:Citation (Modèle:Grec ancien)[note 2]. Car non seulement cet univers a été créé à un moment que nous ne connaissons pas, mais en οutre le changement auquel il est soumis dans le flux incessant du devenir crée un principe d’indétermination et d’incertitude ; or, pour Platon, seules les formes intelligibles répondent aux critères de stabilité et de permanence requis par la scienceModèle:Sfn ; faute de vérité absolue, c’est donc la vraisemblance du mythe qui permet de formuler, avec le charme de la poésie, une théorie simplement probableModèle:Sfn : elle fournit un schéma possible pour penser la genèse de l’Univers, comme Descartes le fera aussi dans son Traité du MondeModèle:Sfn. Cette contemplation philosophique de l’Univers (Modèle:Grec ancien) en imagination est destinée à engendrer en nous la grandeur d’âme en nous faisant vivre dans une perspective cosmiqueModèle:Sfn. Même si le Timée reste traditionnel dans sa forme et dans son objet, il est novateur par la nature de l’explication qu’il propose. C’est une théorie du cosmos tout à fait novatrice parce que reposant sur des fondements mathématiques et géométriques, et conforme aux exigences épistémiques énoncées par Parménide en son poème Sur la nature[9] : elle est en effet Modèle:Citation

La question épistémologique

Intellection et opinion

Le récit de Timée est fondé sur des principes épistémologiques et métaphysiques : Platon établit d’abord la distinction entre Modèle:Citation et Modèle:Citation (Modèle:Nobr), le premier étant appréhendé par l’intellection et le raisonnement (Modèle:Grec ancien), le second, par l’opinion jointe à la sensation irraisonnée (Modèle:Grec ancien)Modèle:Sfn. Cette distinction, qui rappelle celle de La République entre l’Intelligible et le sensible[A 3] et qui implique une distinction entre deux formes de la connaissance, soulève la question épistémologiqueModèle:Sfn. Selon la conviction platonicienne, il n’y a pas de réalité véritable dans le changement incessant créé par le devenir ; et il n’y a pas de connaissance rigoureuse sans une certaine permanence. Ainsi, le monde sensible, soumis au changement perpétuel, contrairement aux Idées éternelles (Modèle:Grec ancien), qui ne sont ni changeantes ni mouvantes, devrait rester inconnuModèle:Sfn. Platon résume cette conviction dans cet aphorisme : Modèle:Citation (Modèle:Nobr). Or, selon Timée, une explication scientifique doit présenter à la fois un caractère de nécessité et d’idéalité Modèle:Incise. Nous ne pouvons donc pas nous fier simplement aux données que nous renvoient nos sens.

Être, Devenir, Khôra

Pour pouvoir connaître le monde sensible, Platon fait donc l’hypothèse de trois types d’entités sans lesquelles le monde sensible resterait inconnu :

Dans l’articulation de ces trois concepts, le Timée glisse ainsi de la physique à la métaphysique, même si Platon ne dissocie pas les deux. Le Timée offre donc à la fois une spéculation théorique, physique et métaphysique, et vise en même temps à l’établissement d’une éthique. L’éthique rejoint en effet la physique dans la mesure où la contemplation de l’univers sensible est, selon Platon, une étape indispensable à la contemplation des formes intelligibles Modèle:Incise

Méthode hypothético-déductive

Pour résoudre le problème de la connaissance scientifique, Platon met en place ce qui deviendra la méthode de toute recherche scientifique : la méthode hypothético-déductive. Elle consiste à poser a priori une liste d’axiomes présupposés, puis à vérifier, en se fondant sur des règles d’inférence, de logique, si les propositions que l’on arrive à déduire des axiomes (les théorèmes) présentent une correspondance convenable et raisonnable avec les données des observations. Tel est le point de départ de la thèse soutenue par Luc Brisson et Walter Meyerstein[10] : le Timée serait une théorie scientifique, parce que ce serait une théorie axiomatique de type mathématique, close sur elle-même. Platon y pose cependant les axiomes a posteriori, ses règles d’inférence sont implicites, et il fait peu appel à l’expérience pour montrer la validité de son système : il ne prend pas l’observation comme point de départ, ni comme critère de validité de son système, sauf en de rares exceptions, par exemple relativement à la pesanteur du feu (Modèle:Nobr)Modèle:Sfn, à la formation des odeurs (Modèle:Nobr)Modèle:Sfn, et au rôle des fibres dans le sang (Modèle:Nobr)Modèle:Sfn. Mais Yvon Gauthier réfute l’ensemble de cette thèse qu’il juge « confuse et fausse »Modèle:Sfn : Modèle:CitationModèle:Sfn. On ajoutera que, loin de présenter le Timée comme une théorie scientifique, Platon n’a de cesse, au contraire, de souligner son caractère conjectural mais aussi les limites infranchissables du savoir humainModèle:Sfn : Modèle:Citation (Modèle:Nobr).

Le Démiurge, la Nécessité et la Pronoia

Modèle:Article détaillé La recherche du principe premier, l’arkhè, à l’origine de tout, conduit Platon à une métaphysique de la causalitéModèle:Sfn : cette recherche suppose un effort pour penser la cause originaire hors du temps et hors de toute détérioration due au devenir, cause elle-même nécessairement dépourvue d’origine. Aussi, cette recherche doit-elle s’effectuer, après une prière philosophique (Modèle:Nobr), avec la bienveillance des dieux, eux-mêmes principes tutélaires de l’origineModèle:Sfn. Après avoir présenté les causes auxiliaires ou adjuvantes du mouvement, produisant des effets au hasard et sans ordre, Platon introduit donc la notion d’une causalité supérieure, douée d’intelligence et produisant des choses belles et bonnes (Modèle:Nobr) : il s’oppose ainsi radicalement aux physiciens présocratiquesModèle:Sfn. À l’arbitraire d’un mécanisme aveugle, il substitue alors Modèle:Citation Cette cause parfaite[note 3] est indissociable de la divinité, sous la figure du dieu-artisan et démiurge.

Le Démiurge, Modèle:Citation, réunit en lui le savoir-faire d’un parfait artisan, l’activité artistique d’un créateur-poète (Modèle:Grec ancien) et la sollicitude bienveillante d’un père (Modèle:Grec ancien) qui désire que ses enfants lui ressemblentModèle:Sfn. Il a créé le monde par un mélange de la Nécessité et de l’intelligence ; parce qu’Modèle:Citation (Modèle:Nobr), écrit Platon, illustrant ainsi la causalité souveraine du Bien : Modèle:Citation Aussi le démiurge est-il Modèle:Citation (Modèle:Nobr), c’est-à-dire la cause qui opère avec le concours de l’intelligenceModèle:Sfn.

Dans la naissance du monde, l’action de la Nécessité ([[Ananké (mythologie)|Modèle:Grec ancien]]) se combine avec la pensée. Rompant avec la nécessité de Démocrite et des atomistes pour qui elle est principe de toutes choses, Platon présente cette Nécessité comme une cause instrumentale coopérante au service de la causalité premièreModèle:Sfn : l’Intelligence (le Noûs du dieu) domine la Nécessité, qui Modèle:Citation (Modèle:Nobr). Le démiurge façonne ainsi d’abord tout ce qui est immortel dans le monde ; il demande ensuite à ses aides, les dieux jeunes, secondés par l’Âme du monde, de créer les corps périssables ; il travaille tel un artisan dont la fonction principale consiste à mettre en ordre l'UniversModèle:Sfn ; à cet effet, il doit assurer la présence de l’intelligible dans le sensible sous la forme mathématiqueModèle:Sfn, et convaincre la Nécessité ; car celle-ci est liée aux propriétés des éléments physiques, elle ne peut pas en être séparée et elle s’impose aux dieux eux-mêmesModèle:Sfn. C’est une nécessité qu’il y ait dans ce monde de l’imperfectionModèle:Sfn. La Nécessité est aussi liée au hasard ; elle est représentée par ces causes accessoires, Modèle:Citation (Modèle:Grec ancien) et génératrices de Modèle:CitationModèle:Sfn (Modèle:Nobr). Elle semble correspondre à ce que l’on pourrait appeler le pur mécanisme, puisqu’il y a en elle de l’indétermination et du dérèglement (Modèle:Grec ancien)Modèle:Sfn ; Platon relève par exemple comme une exception à la forme la meilleure possible, les parties du corps humain où les besoins contradictoires de résistance et de sensibilité ont imposé un choix préférentiel (Modèle:Nobr)Modèle:Sfn.

Platon souligne également Modèle:Citation, (en Modèle:Lang-grc) ; c’est cette providence qui explique l’ordre et les lois que le dieu a préétablis dans le Monde par bontéModèle:Sfn ; elle se révèle d’abord dans le dessein de créer un Monde qui est lui-même un dieu vivant parfait, doté d’une Âme et d’un corps ; de même, les dieux subalternes, bien que ni immortels ni incorruptibles, demeureront indissolubles, parce que sa volonté expresse constitue un lien plus puissant que les liens de leur naissance (Modèle:Nobr)Modèle:Sfn ; quant aux êtres humains, le dieu a veillé à les pourvoir d’une âme apparentée au divin et d’un Intellect (Modèle:Nobr, et Modèle:Nobr), facultés de pratiquer la justice et de dominer leurs affections par la raison, afin que lui-même Modèle:Citation, et qu’ils Modèle:Citation (Modèle:Nobr)Modèle:Sfn. Le Démiurge apparaît ainsi comme un allié pour l’homme qu’il a aussi doté de la vue, Modèle:Citation et dont les bienfaits sont considérables (Modèle:Nobr). Dans les textes platoniciens le mot pronoia est rare : il n'est présent qu'en trois dialogues, le Phèdre, le Timée et Les Lois[A 5]. Mais cette rareté relative du terme n'implique pas que la notion de Providence soit, dans la philosophie de Platon, un élément marginal : la Providence est pleinement à l'œuvre dans le livre X des Lois ; et la notion de Providence divine occupe dans la philosophie de Platon une place centrale, dans la mesure où ce n'est qu'en ayant recours à cette notion que Platon peut convenablement résoudre le problème des causes de la génération et de la corruption posé dans les derniers passages du Phédon.

L’Âme du Monde et l’âme du vivant mortel

Les pages du TiméeModèle:Citation[11] s’ouvrent sur le premier acte de l’art divin, l’Âme du Monde. Mélangeant d’abord deux essencesModèle:Sfn, la substance du Même (Modèle:Grec ancien), Modèle:Citation (Modèle:Nobr) et la substance de l’Autre (Modèle:Grec ancien), divisible et Modèle:Citation[note 4], le dieu en a composé une troisième, l’essence tout court (Modèle:Grec ancien), mélange des deux précédentes ; mélangeant de nouveau ces trois substances afin d’obtenir leur fusion intime et parfaite, il a obtenu l’essence définitive dont il s’est servi pour sa construction (Modèle:Nobr)Modèle:Sfn. Le démiurge a placé cette essence au centre du corps du monde, il l’a élargie à tout l’univers, de sorte qu’elle l’englobe de toutes parts, et de manière à former Modèle:Citation (Modèle:Nobr). L’Âme du monde se confond ainsi avec la sphère céleste[note 5] ; sa nature est divine et étant principe de vie, son rôle consiste à assurer les mouvements ordonnés de l’universModèle:Sfn. Modèle:Citation (Modèle:Nobr).

Quant à l’âme du vivant mortel, comme son modèle l’Âme du monde, elle est invisible, immortelle, possède les deux cercles du Même et de l’Autre, les mêmes intervalles et a ses révolutions définies par des déterminations mathématiquesModèle:Sfn. Elle ne diffère de l’Âme du monde que par des proportions différentes dans les essences du mélange de fabrication (Modèle:Nobr)Modèle:Sfn.

Harmonie mathématique et musicale de l'Âme du monde

Modèle:Article détaillé

Lambda majuscule portant à gauche depuis son sommet les intervalles Modèle:Nobr, et à droite, les intervalles Modèle:Nobr
Harmonie mathématique et musicale de l’Univers représentée sous la forme d’un lambda majuscule : la série des octaves à gauche suit la progression géométrique de raison 2, et celle des duodécimes à droite suit la progression de raison 3. Les flèches indiquent l’ordre donné par Platon (Timée, Modèle:Nobr).

L’Âme du monde est configurée selon des rapports arithmétiques (les nombres qui expriment la division proportionnelle du mélange dont elle est faite), et des rapports géométriques (le rapport des deux cercles de l’équateur céleste et de l’écliptique) (Modèle:Nobr). Le mélange définitif imaginé par Platon pour l’Âme du monde est composé de trois substances (que l’on peut appeler par convention A, B, et C) et peut être symbolisé dans la formule mathématique A2+B2=C. Le mélange achevé a été divisé en 7 parts qui sont entre elles comme les termes de deux suites géométriques, l’une de raison 2 (Modèle:Nobr : suite d’octaves), et l’autre de raison 3 (Modèle:Nobr : suite de duodécimes)Modèle:Sfn. Dans ces séries, Modèle:Nobr et Modèle:Nobr correspondent au carré, Modèle:Nobr et Modèle:Nobr, au cube. Selon Francis M. Cornford, Platon limite la progression de ces deux suites aux cubes car ceux-ci suffisent à décrire l'espace tridimensionnel tel que nous le percevonsModèle:Sfn. À l’aide de ces deux progressions, le Démiurge a formé une progression unique, et procédé au remplissage des intervalles subsistant entre les termes au moyen de deux médiétés. Dans le langage mathématique grec, on appelle médiété (Modèle:Grec ancien) soit une série de trois termes formant une progression continue, soit le moyen terme qui unit entre eux les deux extrêmes de la progressionModèle:Sfn. Platon connaît la médiété arithmétique, la médiété harmonique et la médiété géométrique[note 6].

Photographie en couleurs de la silhouette noire d'une coupole d'observatoire se détachant sur un ciel en tons dégradés du bleu nuit à l'orange, avec alignement planétaire vertical
Modèle:Citation, écrit Platon (Timée, Modèle:Nobr). L'alignement de Mercure, de Vénus et de la Lune dans le ciel crépusculaire, donne l'image de ce « cosmos » admiré du philosophe.

D’après deux passages du Timée (Modèle:Nobr), l’ensemble de ces valeurs numériques, Modèle:Nobr, représenteraient la valeur du rayon des orbites des planètesModèle:Sfn, mesurée par rapport à la distance de la Lune à la Terre prise comme unitéModèle:Sfn ; ces distances par rapport à la Terre seraient donc : Lune 1 ; Mercure 2 ; Vénus 3 ; Soleil 4 ; Mars 8 ; Jupiter 9 ; Saturne 27.

Pour combler les intervalles qui séparent deux termes consécutifs d’une médiété, Platon associe ces rapports numériques aux intervalles de la gamme diatonique, car il y a parenté entre les proportions de l’échelle musicale et les révolutions de l’âmeModèle:Sfn (Modèle:Nobr) ; il fait appel aux notions, empruntées à la musique, d’épogdoon et de plus petit intervalle ou leimma (en Modèle:Lang-grc, « résidu »), qu’il évalue à 256243 (Modèle:Nobr)[12], soit 2835. L’harmonie de l’Âme du Monde, qui va jusqu’à l’intervalle 27, comprend toutes les gammes possibles et dépasse infiniment les harmonies produites par les instruments de musiqueModèle:Sfn. Il faut donc se représenter l’étendue de l’âme, dotée d’un sens inné de l’harmonie, et traversée silencieusement par des mouvements tout à fait analogues aux mouvements du son dans l’échelle musicaleModèle:Sfn. Harmonie musicale et harmonie des mouvements célestes, l’Âme marque le moment décisif dans la génération du cosmos : Platon fait ainsi valoir la puissance du nombre, source de beauté invisible au profane mais familière aux philosophes depuis les travaux des pythagoriciens Philolaos de Crotone et Archytas de TarenteModèle:Sfn.

Fonction intellective de l'âme

Modèle:Article connexe Le sens de cette fabrication de l’âme, c’est que dans l’âme, il y a de l’intelligible, du sensible et de l’intermédiaireModèle:Sfn. L’explication en est donnée par Aristote : Modèle:Citation[A 6]. Dans le mouvement par lequel elle connaît, l’âme entre en contact tantôt avec l’indivisible (identifié avec le rationnel, Modèle:Grec ancien), et tantôt avec le divisible (identifié avec le sensible, Modèle:Grec ancien) : dans le premier cas, ce processus produit l’intuition intellectuelle et la science (Modèle:Grec ancien), dans le second, il produit l’opinion (Modèle:Grec ancien) et la sensation (Modèle:Nobr). Toujours selon Aristote[A 7], les divers modes de connaissance, dans la doctrine platonicienne, sont symbolisés par les nombres : l’intuition correspond à l’unité, la science à la dualité, l’opinion à la triade, et la sensation à la tétrade. L’âme est donc essentiellement un intellect dans un principe de vieModèle:Sfn. Il ajoute que l’âme est une grandeur[A 8], non corporelle sans doute mais coextensive au corpsModèle:Sfn : à partir du centre, le démiurge l’a en effet « étendue en tous sens » (Modèle:Grec ancien) jusqu’à la périphérie du corps sphérique du monde, pour l’envelopper tout entier (Modèle:Nobr)Modèle:Sfn. Au total, l’âme participe aussi bien à la réflexion raisonnée qu’à l’harmonie des intelligibles éternels (Modèle:Grec ancien)Modèle:Sfn. Vivifiant et administrant le corps de l’Univers, elle est Modèle:CitationModèle:Sfn.

Cosmogonie

Éléments et solides élémentaires

Modèle:Article détaillé

Les cinq polyèdres réguliers convexes de Platon
Tétraèdre Hexaèdre
ou Cube
Octaèdre Dodécaèdre Icosaèdre
Tétraèdre Cube Octaèdre Dodécaèdre Icosaèdre

Platon s’interroge : est-il possible d’établir une relation rationnelle entre les formes des quatre états de la matière (feu, air, eau, terre) et la diversité des corps composés ?Modèle:Sfn Il répond dans le récit suivant, qui décrit, de façon spectaculaireModèle:Sfn, l’état initial de l’Univers, avant l’intervention du Démiurge.

Au commencement, règnent le désordre et la violence de forces déséquilibrées. La matrice spatiale de la khôra, tout entière embrasée et remplie de Modèle:Citation (Modèle:Grec ancien) de terre, d’eau et d’air, est soumise à des forces erratiques qui la secouent dans tous les sens. Il se produit une chaîne de réactions spasmodiques qui agissent comme un tamis de vannage pour séparer le lourd du léger, et rapprocher les formes semblables des corps élémentaires (Modèle:Nobr)Modèle:Sfn. À partir de ce début de mise en ordre pré-cosmique, le Démiurge a configuré chacun des quatre éléments Modèle:Citation, Modèle:Grec ancien (Modèle:Nobr)Modèle:Sfn, afin de leur donner leur figure exacte, aussi parfaite que possible. Platon bâtit alors son récit sur des données mathématiques.

Or, Modèle:Citation (Modèle:Nobr)[note 7]. Le Dieu a donc formé l’univers comme un corps solide (Modèle:Grec ancien), visible et tangible, à l’aide de terre (t) et de feu (f), en y adjoignant deux éléments intermédiaires, l’air (a) et l’eau (e), de telle sorte que ces quatre éléments soient dans le même rapport (Modèle:Nobr)Modèle:Sfn ; ils sont unis par le lien le plus fort, celui d’une proportion continue à deux médiétés géométriques telles que l’on ait fa=ae=et. En langage moderne, les moyennes recherchées pour les quantités a et e sont données par les formules : a=f2t3 et e=ft23. Ces formules correspondent à deux problèmes solides : a est l’arête d’un cube, équivalent à un prisme droit de hauteur t et de base f ; e est l’arête d’un cube, équivalent à un prisme droit de hauteur f et de base t. Ces corps solides sont limités par des plans ; or tout plan se résout en triangles[note 8] (triangle isocèle, triangle équilatéral, triangle scalène), à l’aide desquels Platon construit les corps élémentaires : tétraèdre, octaèdre, icosaèdre et cubeModèle:Sfn.

Triangle équilatéral avec perpendiculaires entrecroisées formant plusieurs triangles
Six demi-triangles équilatéraux, dont les côtés sont dans une proportion de 1, 2, 3, composent la face des tétraèdres, octaèdres et icosaèdres. Modèle:Citation (Timée, Modèle:Nobr)

En fonction du type de leur base, de leur taille et du caractère plus ou moins saillant de leurs angles solides, chacun des polyèdres présente une affinité avec les propriétés sensibles des élémentsModèle:Sfn. Platon admet en effet, comme Démocrite, cette corrélation entre les propriétés de la matière. Ainsi, le tétraèdre ou la pyramide, avec ses pointes acérées, et sa forme qui est la plus petite et la plus mobileModèle:Sfn, est-il la figure élémentaire du feu, l’octaèdre celle de l’air, l’icosaèdre celle de l’eau, et le cube, forme la plus stable, celle de la terre (55 e - 56 b) : l’attribution de ces formes géométriques aux éléments de la matière reste pour Platon une conjecture vraisemblableModèle:Sfn. Pour le cinquième polyèdre régulier, le dodécaèdre, Modèle:Citation écrit Platon (Modèle:Nobr) : selon Léon Robin, ce serait Modèle:CitationModèle:Sfn ; c’est aussi le polyèdre qui s’approche le plus près de la forme d’une sphère, puisque l’Univers doit avoir la forme sphérique voulue par le DémiurgeModèle:Sfn. Et toutes ces figures sont microscopiques au point d’être imperceptiblesModèle:Sfn (Modèle:Nobr).

Ces triangles élémentaires ne sont pas conçus comme possédant une taille ultime atomique ; ils sont susceptibles d’acquérir une taille supérieure par assemblage de plusieurs autres triangles ou une taille inférieure par désassemblage, pourvu que soient respectées les deux règles de composition suivantes : 4 triangles rectangles isocèles pour une face du cube, et 6 demi-triangles équilatéraux pour une face des autres polyèdresModèle:Sfn, à l’exception des dodécaèdres.

Le résultat de l’action du Démiurge est une rotation du Monde fini dont Modèle:Citation (Modèle:Nobr)Modèle:Sfn.

La météorologie

Dans leurs interactions, les faces des particules des corps simples peuvent se détacher et échanger leurs triangles élémentaires. Le feu, l’eau et l’air se transforment ainsi constamment l’un dans l’autreModèle:Sfn. Par exemple, deux tétraèdres de feu (deux fois 4 faces) peuvent se transformer en un octaèdre d’air (8 faces). Seuls les cubes de terre ne peuvent pas se transformer avec les trois autres corps élémentairesModèle:Sfn. Dans le devenir incessant, les éléments doivent être perçus comme choses fuyantes, et non comme des êtres dotés de permanence (49 e, Modèle:Grec ancien)Modèle:Sfn. En tant que choses sensibles, ces corps ne sont que des systèmes instables, une succession d’états changeantsModèle:Sfn. Dans le Timée, Platon esquisse donc l’ébauche d’une météorologie, au sens étymologique du grec Modèle:Grec ancien / Modèle:Langue, c’est-à-dire une étude des corps et des phénomènes célestes dans laquelle existent plusieurs variétés des corps élémentaires (Modèle:Nobr).

Platon explique ainsi que le feu est Modèle:Citation ; en tant qu'élément, il n’existe pas uniquement sous forme de flamme ; il y a trois sortes de feu : flamme brûlante (Modèle:Grec ancien), lumière, et résidus incandescents de la flammeModèle:Sfn. Mêlé à l’eau ou à l’air, il produit de la chaleur et joue un rôle dans la digestion ou la respiration (Modèle:Nobr). Platon distingue deux sortes d’air : la plus pure est l’éther (Modèle:Grec ancien) (Modèle:Nobr), région du ciel où reposent les astres et la nuée obscure. L’eau est considérée comme un solide qui ne se liquéfie que sous l’action du feu, comme les métaux ; les hydrométéores que sont la neige, la glace et la grêle sont pour Platon des liquides congelés ; cette conception a perduré jusqu’aux alchimistes du Moyen Âge. La terre enfin contient une proportion plus ou moins grande d’eau ou de feu. Cette eau s’évapore et se transforme partiellement en air, qui comprime la couche d’air et par contre-coup, la surface de la terre (Modèle:Nobr) ; ainsi se forment, selon Platon, les différentes espèces de pierres dures ; l’étude des météorites n’a pas été abordée. Ces théories, reprises par Aristote[A 9], ont formé la base de la minéralogie et de la chimie jusqu’à l’époque moderneModèle:Sfn.

Le système planétaire selon Platon

Modèle:Article détaillé

Figure géométrique représentant un système de coordonnées sphériques
Le plan de l’écliptique (en jaune), divisé en sept cercles concentriques de diamètres différents, est celui des planètes ; le cercle de l’équateur céleste (en bleu clair) correspond à la révolution de la sphère céleste et des étoiles fixes.

Une fois l’Âme du monde constituée, le Démiurge a procédé à la construction de la sphère céleste ; l’univers du Timée se présente sous une forme exactement sphérique, car, Modèle:Citation (Modèle:Nobr) ; contre Xénophane, Platon affirme la sphéricité de la Terre et du monde dans son ensemble, en se fondant sur la géométrie des Pythagoriciens et de Théétète ; après lui Aristote réaffirmera cette position dans son traité Du ciel[A 10]Modèle:,Modèle:Sfn ; cette sphère est divisée en quatre couches dont chacune est le lieu d’un des quatre éléments de la matière distingués par Platon, comme Empédocle l’avait déjà imaginéModèle:Sfn.

À l’aide de deux bandes croisées l’une sur l’autre, le Démiurge a formé les deux cercles concentriques de l’équateur céleste et de l’écliptique. Le cercle de l’équateur céleste, formé avec la substance du Même, correspond à la sphère des fixes, limite de l’univers ; celui de l’écliptique, formé avec la substance de l’Autre, correspond au plan orbital des planètes. Ces deux cercles tournent en sens inverse, Modèle:Citation, selon la demande de Platon au mathématicien Eudoxe, chargé de le confirmer par ses calculs.

Platon énonce dans le Timée (Modèle:Nobr) plusieurs hypothèses astronomiques : la révolution des astres fixes dans le plan de l’équateur, la révolution en sens contraire des planètes dans le plan de l’écliptique, la vitesse respective de tous ces astres et leurs mouvements rétrogradesModèle:Sfn. Il connaît leurs conjonctions (Modèle:Grec ancien), les avances les uns par rapport aux autres (Modèle:Grec ancien) ou le rebroussement de leurs orbites (Modèle:Grec ancien) (Modèle:Nobr)[note 9]. Mais il ne connaît pas les deux théories qui ne seront formulées qu’à l’époque d’Eudoxe pour expliquer ces phénomènes, à savoir la théorie des excentriques et la théorie des épicycles. Selon Francis M. Cornford, la description par Platon de son système planétaire fait référence à une sphère armillaire (Modèle:Grec ancien)Modèle:Sfn : le philosophe évoque lui-même Modèle:Citation (Modèle:Nobr), qui existaient à l’Académie et chez les astronomes grecs de Syracuse[A 11].

Gravure en noir et blanc représentant plusieurs cercles métalliques concentriques et entrecroisés, matérialisant une sphère
Sphère armillaire géocentrique, donnant une idée de ce que pouvaient être, dans l’Antiquité, les Modèle:Citation du système planétaire, auxquels Platon fait allusion (Timée, Modèle:Nobr)

Dans cet univers, la Terre, selon la doctrine pythagoricienne, Modèle:Citation (Modèle:Nobr). Placée au centre du Monde[note 10], elle reste immobile[note 11] autour de l’axe qui traverse le ToutModèle:Sfn. Autour de ce noyau central constitué par l’élément solide de la terre, s’étendent deux couches sphériques concentriques constituées l’une par l’eau, l’autre par l’air. Au-delà, s’étend la zone du feu, limitée extérieurement par la sphère des fixesModèle:Sfn.

Ainsi achevé, cet univers, Modèle:Citation, offre quatre caractéristiques : la perfection mathématique du cosmos, sous le double aspect de la proportion continue et de la sphéricité ; l’unicité du monde ; son autarcieModèle:Sfn ; et enfin sa santé et sa jeunesse éternelles (Modèle:Nobr)Modèle:Sfn. Pour apporter consistance et cohésion à ce système cosmique, Platon se réfère, dans ces postulats cosmologiques, à la force qu’Empédocle appelle Amitié (Modèle:Nobr) ainsi qu’aux arguments de Parménide relatifs à l’Un, et il s’oppose à la cosmologie atomiste de Démocrite qui postulait la pluralité des mondesModèle:Sfn. Les derniers mots de Platon dans le Timée résonnent comme un hymne à la divinité de ce Modèle:Citation (Modèle:Grec ancien) : Modèle:Citation bloc

Le Temps

Dans le Timée, Platon développe une théorie du Temps singulièrement moderne, peut-être empruntée aux PythagoriciensModèle:SfnModèle:,[A 12]. Le temps y est déterminé à la fois dans sa nature et dans sa fonction. La mise en ordre du monde sensible par le Démiurge se fait dans le temps, mais aussi conformément à la théorie des Formes intelligibles et immuables. Le Démiurge, fixant son regard sur le modèle éternel, a doté le monde d’un corps et d’une âme, et il s’est réjoui de le voir en mouvement et en vie ; sachant que rien d’engendré ne saurait être éternel, il chercha à rendre le monde encore plus semblable à son modèle noétique : Modèle:Citation Le temps est l'image mobile de l'éternité immobile et une, et ce sont les mouvements des sept astres errants qui permettent de penser et de mesurer le tempsModèle:Sfn. Le temps en effet ne peut ni exister ni être pensé sans les mouvements du Soleil et de la Lune, et Modèle:Citation (Modèle:Nobr) Platon distingue donc le devenir qui s’oppose à l’existence éternelle, et le temps, durée divisible et mesurableModèle:Sfn. Or ce temps relatif que les hommes mesurent sur Terre n’est pas le même que le Temps cosmique en raison de ce que Platon appelle Modèle:Citation, avec leurs trajectoires Modèle:Citation et leur mouvement prograde ou rétrogradeModèle:Sfn : il n’existe donc pas un temps mais plusieurs, tout aussi réguliers mais différemment rythmésModèle:Sfn. Cette diversité de temps cosmiques est cependant enveloppée dans le temps unique qui, avec l’éternel retour de la Grande Année, ramène tous les corps célestes aux mêmes positions, et tous les temps au mêmeModèle:Sfn.

Khôra, ou la théorie du lieu

Dans ce récit sur l’origine de l’univers, Platon a défini le Modèle intelligible, ainsi que la copie du Modèle Modèle:Incise mais sans jamais parler ni d’espace ni de matière ; or, la Nécessité, attachée de manière indissoluble à l’essence de tous les corps, impose d’ajouter une troisième sorte d’être, le « lieu » où adviennent les objets sensibles entrant dans le devenirModèle:Sfn. Car il serait contradictoire ou que la copie fût son propre modèle, ou qu’une chose pût être dans une autre, qui en est différente, sans se confondre avec celle-ci ; il faut donc un troisième terme, un réceptacle où ait lieu la copieModèle:Sfn : ce réceptacle, en grec ancien Modèle:Grec ancien, « emplacement » / khôra, est une réalité difficile à définir selon Platon lui-même. Elle relève de la Nécessité, elle est indestructible, imperceptible par les sens (Modèle:Nobr) et précède l’ordre du monde instauré par le démiurgeModèle:Sfn. Modèle:Citation (Modèle:Nobr) ; en tant que réceptacle universel (Modèle:Grec ancien) qui reçoit tout ce qui se fait en elle, la khôra doit être vierge de toutes formes pour les recevoir toutes le mieux possibleModèle:Sfn. Avec une certaine insistance, Platon lui donne les traits de quelque chose de passif et de féminin : elle est assimilée à une nourrice et à une mère (Modèle:Grec ancien) ; elle est ainsi décrite à travers les images du « réceptacle » et de la « matrice » (Modèle:Nobr)Modèle:Sfn, autant de formules qui font penser à l’espace vide qui contient les objets visiblesModèle:Sfn. Mais Platon emploie aussi les métaphores du « porte-empreintes pour toutes choses » (Modèle:Nobr), de l’excipient désodorisé dans lequel les parfumeurs fixent les odeurs, et de l’or dans lequel le bijoutier façonne quantité d’objets : métaphores qui font songer à la matière. Or, Modèle:Citation, écrit Albert RivaudModèle:Sfn.

Les ambiguïtés prêtées à ce mot de khôra sont récentesModèle:Sfn et ont soulevé des difficultés d’interprétation[note 12]. Quelle est la nature de la khôra, est-elle corporelle, ou abstraite et purement géométrique ? Dans l’antiquité, Aristote[A 13] tenait khôra pour un synonyme de Modèle:Grec ancien, la matière. Plotin, dans le traité 26 des Énnéades, Sur l’impassibilité des incorporels, y voit un non-être inétendu et informe. Son caractère amorphe implique en effet que la khôra n’est ni un corpsModèle:Sfn ni un matériau indéterminéModèle:Sfn. Eduard Zeller y a vu quelque chose comme l’étendue cartésienne[13]Modèle:,Modèle:Sfn. En tant que lieu d’accueil universel, la khôra est la condition qui rend possible toute génération : or le lieu n’a pas de réalité propre. Martin Heidegger observe que les Grecs n’ont pas de mot pour « espace » : Modèle:Citation[14], de sorte qu’on distinguera Modèle:Citation Ce réceptacle est défini par Léon Robin comme Modèle:Citation[note 13]Modèle:,Modèle:Sfn. L’espace qui peut recevoir les copies des formes intelligibles n’est pas une substance nouvelle mais une composante essentielle dans l’analyse de ce qu’est un objet spatio-temporelModèle:Sfn ; il représente une nécessité dialectique en offrant aux objets du monde sensible simplement l’occasion de s’étendre ; en somme, la khôra peut être assimilée au vide relatif des atomistes, mais à ceci près que de ce vide, ne subsiste rien d’inoccupé dans la cosmologie de PlatonModèle:Sfn : Modèle:Citation, résume Albert RivaudModèle:Sfn. Avec l’innovation importante que représente la khôra dans sa métaphysique, Platon reconnaît donc trois entités distinctes, antérieures à la génération du monde : l’Être, l’emplacement et le devenir, Modèle:Grec ancien (Modèle:Nobr).

Physiologie, anatomie et médecine

L’anthropologie de Platon entreprend de décrire la nature du corps humain, à l’aide d’une physiologie fort rudimentaire et non dénuée d’obscurités et d’erreurs, fondée sur des connaissances Modèle:Citation, écrit Albert RivaudModèle:Sfn ; cette physiologie est centrée sur les deux fonctions intimement liées de la nutrition et de la respiration, la théorie de la circulation sanguine n’étant qu’ébauchéeModèle:Sfn. Le philosophe se distingue au contraire en élaborant une théorie, déjà très complète, de l’âme humaine et de son union avec le corps, la première Modèle:CitationModèle:Sfn.

De l’âme humaine

L’âme immortelle et les âmes inférieures

Le Timée présente la doctrine platonicienne de l’âme sous la forme d’une synthèse entre l’ancienne croyance orphique ou pythagoricienne et la conception plus moderne de l’âme comme principe des fonctions corporellesModèle:Sfn. En tant que principe de la vie, l’âme immortelle possède l’exclusivité de la double fonction, motrice et cognitiveModèle:Sfn ; elle est à l’origine de mouvements ordonnés en vue d’une certaine fin[note 14]. Tout ce qui se meut régulièrement de soi-même possède donc une âmeModèle:Sfn : c’est ce que Platon appelle dans le Timée Modèle:Citation, Modèle:Grec ancien (Modèle:Nobr) : façonnée par le démiurge lui-même, cette âme immortelle, unie au corps, demeure dans la partie la plus élevée de notre corpsModèle:Sfn : c’est pourquoi la tête est qualifiée de Modèle:Citation (Modèle:Nobr). Constituée avant le corps, l’âme immortelle possède sur lui la maîtrise psychique : Modèle:Citation (34 c)Modèle:Sfn. Elle est un don de Modèle:Citation (Modèle:Grec ancien) (Modèle:Nobr). Elle est en tout point semblable à l’Âme du monde, y compris pour les révolutions périodiques du Même et de l’Autre (Modèle:Nobr). Dans son essence, Platon admet en effet ces deux révolutions, dans la droite ligne de la théorie de la révolution de l’âme exposée dans le traité Du Régime du corpus hippocratiqueModèle:Sfn ; or, dans le désordre produit par les sensations, la première de ces révolutions est complètement entravée, et la seconde, troublée (Modèle:Nobr). Ce sont là les causes des illusions des sens, des erreurs et de la folie ; à la naissance, la déchéance de l’âme qui subit la loi de l’incarnation est si profonde qu’elle en perd d’abord la raison, elle devient folleModèle:Sfn (Modèle:Grec ancien)[A 14] jusqu’à ce que le sujet, Modèle:Citation, acquière le bon sens (Modèle:Grec ancien)[A 15]. Platon recommande donc de se rendre, à force de contemplation, semblable à la beauté du monde et à l’harmonie des mouvements circulaires de l’Univers (90 c-d). La philosophie équivaut ainsi à une mise en ordre de l’âme, car celle-ci devient plus vigoureuse par l’exercice continuel des facultés les plus hautes de l’être humain, ses facultés intellectuelles et spirituellesModèle:Sfn. Reconnaissant l’éminente dignité de cette âme immortelle et intelligente, Platon écrit : Modèle:Citation bloc Par ses facultés supérieures, la pensée de l’homme est donc directement unie au divin, et par elle, notre salut (Platon dit Modèle:Grec ancien, Modèle:Nobr) nous appartientModèle:Sfn ; en donnant la suprématie à l’intelligence, faculté par laquelle l’homme peut maîtriser ses passions, vivre une vie juste et atteindre à la réalité intelligible, Platon fonde une doctrine eschatologique de la connaissanceModèle:Sfn.

Platon distingue également deux autres âmes, de nature mortelle, œuvres des dieux subalternes, et toutes logées au-dessous du cou (Modèle:Nobr) ; l’une, l’âme irascible, siège de la colère et de l’ardeur guerrière, Modèle:Grec ancien (Modèle:Nobr), est dans le thorax ; l’autre, l’âme désirante, siège de l’appétit du boire et du manger, du plaisir et de la douleur, Modèle:Grec ancien (Modèle:Nobr), est placée dans le ventre ; la violence des désirs dans Modèle:Citation (Modèle:Nobr) est présentée comme celle d’un être vivant animé, Modèle:Grec ancien, attaché à la générationModèle:Sfn et absolument rebelle au raisonnementModèle:Sfn. C’est de cette troisième espèce d’âme que sont aussi dotés les végétaux, qui, par leur passivité, appartiennent à une condition inférieure à celle de l’animal (Modèle:Nobr).

Maladies de l’âme et métempsychose

Comme le corps, l’âme a ses maladies, et Platon établit une relation de causalité entre dysfonctionnements physiques et troubles psychiques. La plus caractéristique de ces maladies de l’âme est la « déraison », (Modèle:Grec ancien, Modèle:Nobr), perversion ou occultation de la rationalité qui peut prendre deux formes, la folie ou l’ignorance. Ces maladies peuvent résulter de plaisirs ou de douleurs excessifs qui affectent le corps avec violence et obscurcissent la raison et la connaissanceModèle:Sfn au point de provoquer, selon le cas, la peine, l’oubli, la mauvaise humeur, l’abattement, la témérité ou la lâchetéModèle:Sfn ; Modèle:Citation, observe Lucia SaudelliModèle:Sfn. Inversement, une âme agitée, pleine d’une ardeur excessive, peut aussi rendre le corps malade et le consumer (Modèle:Nobr). Il est assez remarquable que pour Platon le déterminisme de ces psychopathologies ne soit pas simplement biologique mais aussi familial et social, l’éducation et l’environnement culturel et même politique (Modèle:Grec ancien, Modèle:Nobr) jouant un rôle important. Ainsi, dans cette perspective psychosomatique, l’incapacité à dominer sa volupté et une Modèle:Citation sont des maladies de l’âmeModèle:Sfn ; selon Platon, celui qui tombe dans ces excès n’est pas vicieux volontairement, c’est un malade qui subit Modèle:Citation (Modèle:Nobr) : la doctrine socratique, « nul ne fait le mal volontairement »[A 16], est ici fondée sur des faits biologiques.

Contre les maux engendrés par les passions, leurs excès et les humeurs malignes qu’elles répandent dans le corps, Platon souligne la nécessité des rapports de proportion et d’harmonie qui doivent régir les parties du corps et de l’âme : en toutes choses, il faut préserver l’équilibre et la juste mesure, et Modèle:Citation (Modèle:Nobr) ; la thérapeutique platonicienne consiste donc en une éducation aussi bien physique qu’intellectuelleModèle:Incise Modèle:Sfn. Platon entremêle ainsi différentes traditions médicales : celle de l’école de Cnide qui prônait la primauté de la gymnastique et la nécessité d’un mouvement continuel, et celle de l’école pythagoricienne d’Alcméon de Crotone pour qui la santé était un équilibreModèle:Sfn. Faute de quoi, celui qui s’abandonne entièrement à ses vices risque de Modèle:Citation (Modèle:Nobr)[note 15] et de connaître le cycle des métempsychoses[A 17]. Car, après la première incarnation de l’âme, d’autres incarnations se succèdent selon la manière, bonne ou mauvaise, dont la vie humaine aura été vécue ici-bas (Modèle:Nobr)Modèle:Sfn. Les âmes déchues peuvent alors se réincarner dans les corps de toutes sortes d’êtres vivants (Modèle:Nobr)[note 16], tandis que les pensées immortelles d’une âme vertueuse, appliquée à reproduire les harmonies du ciel, lui assurent l’immortalité. La psychophysiologie de Platon renvoie donc non seulement à sa cosmologie mais aussi à son éthique, dans une perspective eschatologique et sotériologiqueModèle:Sfn.

La théorie des sensations

En raison de ses conceptions finalistes (Modèle:Nobr), Platon expose sa théorie des sensations avant l’anatomie et la physiologie humaines. Pour rendre compte des impressions sensorielles (en grec ancien, Modèle:Grec ancien), il invoque les propriétés physiques des particules élémentaires du feu, de l’eau, de l’air ou de la terre, en particulier leur taille, leur forme et leur plus ou moins grande mobilité. La sensation est ainsi définie comme un mouvement d’incursion transmis de l’extérieur jusqu’à l’âme mortelle par l’intermédiaire de la chair (Modèle:Nobr) à l’aide des organes des sens conçus comme portes d’entrée du corps ; ce mouvement produit un ébranlement et c’est une information étrangère à la raison (Modèle:Nobr). C’est ce mouvement d’incursion à l’intérieur qui explique le recours à l’étymologie platonicienne du mot Modèle:Grec ancien en grec, rapproché du verbe Modèle:Grec ancien, « accourir vers »[15]. Évitant les longs débats philosophiques sur les sensations qui avaient déjà eu lieu chez Alcméon, Empédocle, les atomistes, Antisthène ou Gorgias, et que lui-même avait traités dans le Théétète[A 18], Platon entend exposer ici cette théorie des sensations en naturaliste et en physicienModèle:Sfn, fidèle à la doctrine de l’intelligence de l’âme exposée dans le traité médical Du Régime du Corpus hippocratiqueModèle:Sfn.

La vision, les miroirs et les couleurs

La théorie de la vision proposée dans le Timée diffère de celle qui figure dans le Ménon (Modèle:Nobr) et qui remontait à Gorgias et sans doute à EmpédocleModèle:Sfn. Elle suppose trois sortes de feu distingués par Platon : le feu très pur et qui ne brûle pas contenu dans Modèle:Citation (Modèle:Grec ancien, Modèle:Nobr) et qui s’en échappe en un flux continu ; le feu propre à chaque objet visible et qui se manifeste sous la forme de la couleur ; enfin, la lumière du jour, sans laquelle les objets restent en général invisibles (45 c)Modèle:Sfn. L’acte de la vision s’opère ainsi à l’extérieur de l’œil, dans ce que Platon considère comme Modèle:Citation, fusion entre le courant lumineux qui sort des yeux et la lumière diurneModèle:Sfn, sans qu’il soit jamais question de rayons ni d’un faisceau de lignesModèle:Sfn. Les objets quant à eux laissent s’écouler des particules ignées qui, à la rencontre du corps de la vision, engendrent la sensation de la couleur (67 c-d)Modèle:Sfn, la dimension de ces particules de feu étant compatible avec celle de l’orifice de l’œil afin de pouvoir y pénétrer[15]. La perception du noir et du blanc dépend respectivement d’un resserrement ou d’une dilatation du corps de la vision.

Trois disques colorés (bleu, rouge et vert) sur fond noir intersectés entre eux : surfaces cyan, magenta et jaune aux intersections deux par deux, blanche à l'intersection des trois
Les couleurs primaires en synthèse additive.

Platon nomme correctement quatre couleurs du spectre, le jaune, le rouge, le vert et le bleu, mais les mélanges des autres couleurs qu’il indique ne correspondent pas aux mélanges de lumières colorées de l’optique moderne (Modèle:Nobr) ; il semble plutôt songer aux mélanges des pigments colorés utilisés par les peintres et les teinturiersModèle:Sfn.

L’explication des images inversées dans un miroir manifeste la préoccupation de Platon pour cette notion d’image[A 19]. La remarque selon laquelle cette explication Modèle:Citation, laisse supposer que les miroirs suscitaient à son époque des tentatives d’explicationModèle:Sfn. L’image spéculaire, qu’il décrit comme Modèle:Citation (Modèle:Grec ancien) (Modèle:Nobr), ne repose sur aucune réflexion optique ni sur la vision binoculaireModèle:Sfn : cette image, dotée d’une réalité d’imitation et localisée dans le miroir, résulte de la solidification unissant le corps de la vision et le flux de feu provenant du corps vuModèle:Sfn ; la surface lisse du miroir sert de support à la rencontre et à l’union de ces deux feuxModèle:Sfn. Dans les miroirs concaves, Platon explique l’inversion de l’image par une réflexion non pas de la lumière mais du rayon visuel lui-même rebondissant sur la surface lisse[note 17] (Modèle:Nobr)Modèle:Sfn : il semble ainsi Modèle:Citation

Audition, goût, toucher et odorat

Le son est défini de façon remarquable : c’est Modèle:Citation (Modèle:Nobr)[A 20]. Platon, comme Aristote[A 21], caractérise le son par les propriétés du mouvement qui le provoque, vitesse ou lenteur, uniformité ou incohérence, intensité plus ou moins grande, et il explique la cause de l’harmonie ou de la discordance des sons (Modèle:Nobr). Concernant le goût, il distingue sept saveurs fondamentales[A 22], expliquées tantôt par l’action mécanique des corps rugueux ou lisses, tantôt par leur action chimique, détersive et purifianteModèle:Sfn.

Au plan tactile, le feu donne une impression de chaud en raison de l’acuité de ses angles et de la petitesse de ses corpuscules qui lui confèrent une vive mobilité (Modèle:Nobr) ; l’impression de froid se produit quand, dégagés de l’humidité, les éléments les plus grands, ne pouvant entrer, poussent les plus hauts en cercle. Modèle:Citation (Modèle:Nobr)[A 23]. Concernant l’odorat, il constate que toute odeur implique un processus chimique analogue à la fermentation ou à l’évaporation : toute odeur est donc l’état intermédiaire des corps en train de se transformer (Modèle:Nobr), c’est une fumée ou une vapeurModèle:Sfn. Les corps élémentaires, en revanche, sont inodores. Théophraste dira que la bonne odeur est la suite de l’élaboration parfaite que la chaleur naturelle donne aux humeurs. Il attribue la bonne odeur à une sorte de coction des matières aqueuses, lorsque le principe humide, lequel est funeste, en a été dégagé par la chaleur.

Anatomie

Dessin montrant l'anatomie d'un thorax humain
Organes principaux du corps humain : foie (1), poumon (5), cœur (9), estomac (11) ; mouvement du diaphragme dans la respiration (2 et 3).

Modèle:Article connexe Le Timée contient un véritable traité d’anatomie, dans lequel Platon étudie les organes principaux (cœur, poumon, foie, rate, intestins et cerveau) et leurs fonctions ; le philosophe apparaît gêné par des connaissances anatomiques lacunaires et parfois imprécisesModèle:Sfn, mais son but n’est pas médical ; il est de mieux préciser la situation des différentes espèces[note 18] d’âmeModèle:Sfn et leurs rapports avec le corps. L’anatomie, présentée constamment dans une perspective finaliste, apparaît ainsi comme une science annexe de la psychologieModèle:Sfn.

Le corps a été donné comme Modèle:Citation à l’âme immortelleModèle:Sfn. Ce corps tout entier et ses processus physiologiques (circulation sanguine, nutrition, respiration) sont conçus pour permettre à l’âme immortelle-intelligente d’assurer sa domination sur les deux espèces mortelles que sont l’âme irascible et l’âme désiranteModèle:Sfn ; car toutes deux sont capables du meilleur comme du pire : ainsi, l’âme irascible, logée dans le thorax, entre le diaphragme et le nombril, peut-elle engendrer le courage, aussi bien que la fureur des désirs et de la colère ; mais celle-ci peut être ramenée à la raison grâce au cœur, Modèle:Citation et source du sang qui circule dans tous les membres (Modèle:Nobr). De même, le foie, organe de l’âme désirante mais aussi de la divination (Modèle:Grec ancien), est-il en communication avec les images de l'intellect (Modèle:Nobr)Modèle:Sfn : tantôt l’intellect, avec ses pensées véhémentes, épouvante le foie, tantôt au contraire il libère la douceur que renferme le foie et rend ainsi joyeuse et sereine l’espèce mortelle de l'âme qui s’y trouve (Modèle:Nobr).

Dessin d'un coupe anatomique sagittale d'un encéphale humain, montrant la face interne de l'hémisphère cérébral droit, ainsi que le tronc cérébral
Section du cerveau humain ; en rose, le tronc cérébral avec le mésencéphale, le Pont de Varole et la moelle allongée ; à l’arrière, le cervelet.

L’âme immortelle, pour maîtriser les mouvements corporels et remplir sa fonction, doit connaître tous les éléments dont le corps est composé et entrer en contact avec euxModèle:Sfn ; or étant logée dans la tête, elle n’enveloppe pas la totalité du corps humain. Ce qui permet ce contact, et qui assure l’union intime[note 19] de l’âme et du corps auquel elle est liée Modèle:Citation (Modèle:Nobr), c’est une substance fondamentale, le principe à l’origine de tous les tissus, la moelle, (Modèle:Grec ancien) sous ses trois formes : moelle du cerveau, (encéphale et moelle allongée), moelle spinale dans les vertèbres et moelle osseuse (Modèle:Nobr)Modèle:Sfn. Cette substance, composée des triangles Modèle:Citation, est à l’origine d’une Modèle:Citation (Modèle:Grec ancien) ; mieux encore, la moelle contient toutes les sortes de figures que chaque espèce de corps doit avoir à sa naissance (Modèle:Nobr), c’est pourquoi Platon montre que tous les tissus organiques Modèle:Incise sont fabriqués à partir de la moelleModèle:Sfn, pressentant ainsi l’hérédité génétiqueModèle:Sfn. Par sa configuration circulaire non seulement dans le cerveau Modèle:Citation, mais aussi dans les vertèbres où elle présente une forme Modèle:Citation, la moelle est soumise, comme il convenait, aux mouvements circulaires de l’âme, qui peut ainsi accomplir sa fonctionModèle:Sfn. Dans le même souci d’instaurer une continuité circulaire, Platon décrit, depuis la moelle jusqu’à la peau, aux cheveux et aux ongles, chacun des tissus biologiques enveloppant et protégeant celui qui le précède, le contient ou l’enferme, dans une progression continue du centre vers la périphérie du corps, les mouvements de circulation sanguine et de respiration étant eux-mêmes circulairesModèle:Sfn.

Pathologie et thérapeutique

Modèle:Article connexe Alors que l’Univers divin ne souffre pas de dépendance ou de vieillesse, l’organisme humain est sujet aux maladies ; selon Platon, celles-ci sont causées soit par une modification anormale de la proportion, de la situation ou des propriétés des éléments constitutifs du corps humain, soit par des désordres physiologiques particuliersModèle:Sfn. Les causes de ces désordres sont un sang corrompu ou mêlé de sérosités (Modèle:Grec ancien), de toutes sortes de phlegmes (Modèle:Grec ancien) ou d’humeurs peccantes telles que pituites. Suivant la doctrine hippocratique, Platon désigne ainsi diverses mucosités, glaire ou pus qui gâtent le sang, la chair, les os ou la moelle, et il leur donne le nom commun de bile (Modèle:Grec ancien), en distinguant bile jaune et amère, bile noire, bile rougeâtre et bile verte (Modèle:Nobr). Plusieurs maladies citées par Platon sont décrites en détail dans les livres du corpus hippocratique, mais le philosophe n’en énumère qu’un nombre extrêmement réduit : on a ainsi identifié la carie des os ou le cancer (Modèle:Nobr), le tétanos et l’opisthotonos (Modèle:Nobr), mais aussi l’épilepsie (Modèle:Nobr), les abcès ou phlegmons, les maladies inflammatoires, les diarrhées et les dysenteries (Modèle:Nobr)Modèle:Sfn. Le mal qui couvre le corps de taches blanches ou pituite blanche pourrait être la leucophlegmasie[A 24] ; les affections qui touchent les poumons sont vraisemblablement la congestion pulmonaire ou la bronchite (Modèle:Nobr). Les fièvres sont dites « continues, quotidiennes, tierces ou quartes » selon leur cause et leur durée. Cette pathologie platonicienne, très sommaire et assez incohérenteModèle:Sfn, semble inspirée par des doctrines médicales diverses, où l’on reconnaît à la fois Alcméon, les Hippocratiques, et EmpédocleModèle:Sfn.

Quant à la thérapeutique, Platon prône, comme les médecins de Cos, l’hygiène de vie (Modèle:Grec ancien) par l’exercice harmonieux du corps et de l’esprit ; s’il n’exclut pas les remèdes de la pharmacopée (Modèle:Grec ancien), il les considère toutefois avec une certaine méfiance : Modèle:Citation (Modèle:Nobr) car les maladies, ayant une durée définie, il ne faut pas Modèle:CitationModèle:Sfn.

Éthique et théologie de la volonté

Le but du thème traité dans le Timée, et annoncé d’emblée par Critias, était de rendre compte de la nature humaine dans le contexte de la nature de l’Univers, avant d’aborder la vertu humaine en action dans le dialogue suivant. Ce but est atteint à la fin du Timée : l’anthropologie s’achève en effet dans une psychologie morale et une éthiqueModèle:Sfn, qui permettent de définir les conditions du mode de vie le meilleur, en fonction de la nature rationnelle et immortelle de l’âme.

Hégémonie de l’âme rationnelle

Le concept platonicien d’âme humaine, dans sa divinité, implique un ensemble de prédicats qui l’associent à la raison et à une fonction d’hégémonie (Modèle:Grec ancien, Modèle:Nobr)[16]. Dans la psychologie morale qu’il a esquissée, Platon accorde la priorité à la fonction de commandement dévolue à l’âme humaine dans sa relation au corps, en raison de sa « priorité d’origine »[A 25] : le Démiurge, en effet, Modèle:Citation (Modèle:Nobr). Cette fonction de commandement de l’âme est conçue par Platon comme une Modèle:Grec ancien / Modèle:Langue[note 20] (Modèle:Nobr), l’exercice de l’art de « diriger, gouverner ». Pour permettre à l’âme rationnelle et immortelle d’exercer cette hégémonie, les hommes sont donc invités à cultiver soigneusement son bien-être, lequel consiste en un état « bien ordonné », Modèle:Grec ancien (Modèle:Nobr)Modèle:Sfn. Une âme est entretenue en bon ordre par Modèle:Citation, (Modèle:Grec ancien), ce qui est une des formes de la philosophie pour Platon, mais aussi par une sorte de spiritualité religieuse, c’est-à-dire « la capacité de penser aux choses immortelles et divines », Modèle:Grec ancien (Modèle:Nobr) ; en particulier, il convient pour l’homme d’approfondir la connaissance de l’harmonie et des révolutions de l’Univers, et d’aligner sur elles les révolutions de l’âme humaine qui ont été troublées à la naissanceModèle:Sfn. Une fois réalisé, ce réalignement restaure l’âme à sa condition d’origine et apporte ainsi Modèle:Citation (Modèle:Nobr). Seul ce culte rendu au génie divin (Modèle:Grec ancien) qui habite en chaque être humain assure le bonheur et l’immortalité : c’est l’œuvre propre de l’âme humaine de permettre cette divinisation[16].

Théologie de la volonté

Cette doctrine de l’hégémonie est liée à la question de la causalité de l’âme, à la fois sur elle-même et dans le monde ; c’est dire qu’elle implique aussi la question de l’action et de l’intentionnalité. Or, le Timée a défini trois principes de commandement Modèle:Incise, et à l’hégémonie cosmique répond une hégémonie éthique ; l’Âme du Monde qui préside aux cycles du cosmos est relayée par l’âme humaine, dans son œuvre de divinisation. La volonté de l’Intellect divin, celle des dieux et de l’Âme du monde sont présentées par Platon dans un rapport d’imitation (Modèle:Grec ancien, Modèle:Nobr)[16]. La volonté humaine est appelée elle aussi à reproduire par imitation, dans l’œuvre de divinisation, l’acte de la volonté du Démiurge[16]. Cette volonté démiurgique est intégralement bonne, (Modèle:Grec ancien / Modèle:Langue) ; en ce sens la bonté absolue du dieu constitue pour Platon la cause première, Modèle:CitationModèle:Sfn ; cette bonté qu’il possède dans sa plénitude ontologique est aussi une bonté éthique qui meut la totalité de son vouloirModèle:Sfn ; elle est dénuée de ce vice que les Grecs appelaient phtonos (Modèle:Grec ancien, Modèle:Nobr), « envie »[A 26], qui caractérisait au contraire les dieux de la tradition, jaloux les uns des autres aussi bien que de la réussite éclatante des hommesModèle:Sfn. L’absence de ce vice ou Modèle:Grec ancien définit une attitude vertueuse, qui agit comme une propension à la création, au don, à la générosité débordante : elle est à l’origine de la création de l’Univers dans le Timée, et caractérise la divinité, le philosophe authentique et l’amant véritable[17].

Les manuscrits du Timée

Le texte du Timée est connu par une trentaine de manuscrits dont le plus ancien est le Codex Parisinus græcus 1807 (A)Modèle:Sfn conservé à la Bibliothèque nationale de France. Il a été écrit sur un parchemin de bonne qualité dans le troisième quart du Modèle:S-, durant la période de renaissance byzantine qui a favorisé Modèle:Citation[18]. Il fait partie de la Collection philosophique dont l’origine généralement admise est constantinopolitaine[19]. Il a été découvert en 1490 et rapporté d’Orient par l’érudit byzantin Jean LascarisModèle:Sfn. Un second groupe de manuscrits, conservés à la Bibliothèque nationale autrichienne, à Vienne, comprend les Cod. Vindobonensis 21 (Y), 54 (W) et 55 (F). Les autres manuscrits sont le Cod. Palatinus Vaticanus 173 (P), conservé à la Bibliothèque Apostolique du Vatican[20], et le Cod. Parisinus græcus 1812 ; ce dernier, copié vers 1320-1330, est entré dans la bibliothèque de Colbert et faisait partie de la collection de manuscrits grecs accumulés par deux érudits français du Modèle:S-, Jean-Jacques de Mesmes et son fils Henri de Mesmes[21].

Réception et fortune du Timée

La réception du Timée à l’Académie de Platon

Photographie en noir et blanc d'un texte comportant onze lignes manuscrites à l'encre noire, écrites en grec ancien ; un cercle entourant un triangle est dessiné au centre
Un passage du traité d’Aristote, Du ciel (Modèle:Nobr). Manuscrit de la Bibliothèque nationale d’Autriche, Vienne (Phil. graec. 100).

Le Timée n’a pas cessé d’inspirer philosophes et savants à travers l’histoire. Dans l’Antiquité, dès sa publication, l’ouvrage suscite d’intenses débats philosophiquesModèle:Sfn ; il occupe une place prépondérante au sein même de l’Académie de Platon où les disciples le tiennent pour l’œuvre capitale du maîtreModèle:Sfn : Speusippe et Xénocrate en discutent de nombreux passages, et Crantor en rédige un commentaire. Au témoignage de Plutarque[A 27], jusqu’au Modèle:-s, on interpréta la génération du monde par Platon comme une façon métaphorique de faire comprendre les éléments qui le constituent et le rapport entre la cause, les Idées et la matière ; cette interprétation était très répandue dans l’Académie ancienne, avec Speusippe et Xénocrate[22]. Aristote cependant est le premier partisan d’une interprétation littérale de la cosmogonie du Timée. La cosmologie du Stagirite dans son traité Du ciel prouve à quel point elle est redevable à celle du Timée, mais il s’y développe aussi une critique constante contre ce dialogue de Platon qui y est explicitement nommé[23]. Elle apporte ainsi quelques éléments d’information sur le monde de spéculations physiques et astronomiques que constituaient les discussions au sein de l’Académie[23].

Les questions se posaient parmi les philosophes et les astronomes grecs de savoir Modèle:Citation[A 28], si le monde est fini ou infini et s’il n’en existe qu’un seul ou une pluralité[23]. La critique qu’Aristote se soucie le plus de souligner, sans pour autant s’éloigner de Platon, c’est l’abandon du monde invisible des Idées érigé dans le Timée en modèle du cosmos visible, et la doctrine de la création de l’Univers par le démiurgeModèle:Sfn. La conception platonicienne d’un cosmos éternel (c’est-à-dire qui ne sera pas détruit en raison de la perfection de sa composition et de la volonté immuable de son auteur)Modèle:Sfn mais qui a eu un commencement, est rejetée par Aristote à la fois dans son traité Sur la philosophie et dans le premier livre Du ciel[A 29]. Pour lui, rien de ce qui est « engendré » ne saurait être « indestructible » ; par conséquent le monde n’a pas eu de naissance, il est un, éternel (c’est-à-dire sans commencement ni fin) et fini. Au Dieu-producteur platonicien, Aristote opposera plus tard un Dieu-générateur (Modèle:Grec ancien)[A 30] qui engendre la vie en vertu de la reproduction sexuéeModèle:Sfn. La théorie du mouvement circulaire continu que Platon attribue à la cause immatérielle de l’Âme du monde suscita également nombre de débats dans l’Académie. Les plus sérieuses objections vinrent des calculs nouveaux et précis entrepris par l’école d’Eudoxe et par Philippe d'Oponte sur la taille et la distance du Soleil, de la Lune et des autres corps célestes : ces calculs rendirent insoutenable la doctrine de la sphère du feu dans les cieux supérieurs, et ruinèrent en conséquence la théorie platonicienne de la transformation réciproque des éléments[23]. La volonté d’Aristote s’attacha dès lors à expliquer tous les phénomènes du mouvement par les lois naturelles de la matière, en élaborant une physique cosmique sans âmes des astres et sans interventions mythiques, non pas dans un esprit de polémique, mais afin de parvenir à une meilleure connaissance[23].

À la même époque, les stoïciens, Épicure, et les atomistes étudient le Timée et le commentent : grâce à ces philosophes, le Timée a contribué à maintenir l’intérêt pour les sciences du quadrivium durant toute l’Antiquité et au-delàModèle:Sfn.

La fortune du Timée

Les raisons de l’influence ininterrompue, voire de l’engouement suscité par le Timée sont en partie liées à la difficulté du texte, qui a pu laisser croire qu’il serait l’expression d’une sagesse mystérieuse et cachée, synthèse des connaissances des PythagoriciensModèle:Sfn. Elles tiennent aussi à son aspect d’encyclopédie, riche d’un savoir varié, qui a séduit les savants du Moyen Âge toujours soucieux de composer une somme des connaissances humaines, et qui a permis de féconder jusqu’à nos jours les domaines les plus divers de la philosophie et des sciences.

À l'époque du médio-platonisme

À l’automne 45 Modèle:Av JC, Cicéron fait du Timée une traduction en latin dont il reste des fragments importants[A 31] ; cette traduction n’a exercé que peu d’influence, si l’on excepte la lecture qu’en a sans doute faite saint Augustin avant 400[24]. À partir du début du Modèle:-s-, une nouvelle forme philosophique se diffuse dans l’empire romain, celle de l’exégèse et du commentaire, qui permet de transformer les doctrines des dialogues de Platon en un système cohérent capable de rivaliser avec le stoïcisme et l’aristotélisme. C’est le Timée qui détient la prépondérance absolue dans l’exégèse médio-platonicienne, avec des Commentaires directs à ce dialogue ou des traités philosophiques portant sur un de ses thèmes, comme on le voit dans l’œuvre de Numenius, Sur le bien, ou le De Iside et Osiride de PlutarqueModèle:Sfn. Ce dernier en fait aussi un commentaire partiel dans son De animæ procreatione in Timæo Platonis, défendant l’interprétation littérale de la cosmogonie platonicienne. Parmi la quantité considérable d’œuvres exégétiques de formes diverses publiées à cette époque, on connaît les commentaires d’Atticus, de Sévère et de Taurus, ou les œuvres d’Harpocration et d’AlbinusModèle:Sfn. Auteur d’une Introduction aux dialogues de Platon ou Prologos, et d’un manuel intitulé Didaskalikos Logos, Albinus a joué, indirectement, un rôle important au siècle des Lumières, puisque son interprétation de la philosophie de Platon est celle qu’adopte d’abord l’historien allemand Johann Jakob Brucker et à sa suite, celle développée par Diderot et d'Alembert dans l’Encyclopédie : elle détermina ainsi l’idée que le Modèle:S devait se faire de la philosophie de Platon[25]. À la fin du Modèle:S, le médecin Claude Galien étudie attentivement la partie du Timée consacrée à la physiologie et à la médecine ; il consacre à ce dialogue deux ouvrages, les Commentaires (Modèle:Grec ancien) en quatre livres et une Synopse, que le syriaque Hunayn ibn Ishaq traduit partiellement au Modèle:S-[26] ; Galien contribue ainsi à inspirer la médecine du monde oriental et du monde latin. Parmi les Alexandrins qui vouent un culte particulier au Timée, l’astronome et mathématicien Ératosthène propose une explication de la théorie de l’Âme du monde selon PlatonModèle:Sfn.

Interprétations chrétiennes du Timée

Dès l’époque impériale romaine et jusqu’au début de l’Antiquité tardive, les débats sur la cosmologie sont largement déterminés par les commentaires du Timée. C’est l’un des dialogues de Platon les plus lus dans la patristique grecque, parfois par l’intermédiaire des auteurs juifs dont l’influence sur la lecture chrétienne de cette œuvre n’est pas négligeableModèle:Sfn.

Un passage du Timée (Modèle:Nobr), important pour les premiers chrétiens, était souvent cité, tant par des auteurs juifs comme Philon d'Alexandrie et Flavius Josèphe[A 32], que par des chrétiens comme Maxime de Tyr[A 33] : Modèle:Citation. Cette formule est considérée par les philosophes du moyen-platonisme puis de l’Antiquité tardive comme le témoignage de la nature inconcevable et ineffable de Dieu ; cette exégèse traditionnelle mais à contresens a ensuite été reprise par plusieurs auteurs chrétiens. Selon le mot de Sébastien Morlet, Modèle:Citation. Pénétré de platonisme, Clément d’Alexandrie proclame la nécessité de la culture grecque ; il en adopte le programme d’éducation, l’idéal moral et la dialectique, en accordant à la philosophie grecque une importance égale à celle des Écritures de l’Ancien Testament et il justifie cette conviction par l’idée que les philosophes ont pillé l’enseignement de Moïse et des prophètes[27]. D’une manière générale, les savants chrétiens s’attachent avec ardeur au TiméeModèle:Sfn : parmi les Pères de l'Église, ce sont notamment Basile de Césarée et Grégoire de Nysse qui y découvrent en germe le dogme de la TrinitéModèle:Sfn. L’hypothèse, formulée par Platon, de l’origine du monde qui serait né (Modèle:Grec ancien, Modèle:Nobr) est interprétée dans le sens du récit biblique de la Création Modèle:LatinModèle:Sfn. Le Livre de la Genèse et le Timée, rapprochés par Eusèbe de Césarée et les Pères de l’Église, sont dès lors comptés au nombre des ouvrages fondateurs de la pensée occidentaleModèle:Sfn.

Du néoplatonisme au Moyen Âge

Photographie en couleurs de deux pages jaunies d'un texte manuscrit à l'encre noire comportant des illustrations de figures géométriques colorées
Timée, traduit en latin par Chalcidius, vers le Modèle:S-. Manuscrit du Modèle:S-.

Dans l’Antiquité tardive, Plotin (205-270) se donne pour tâche de reprendre tous les enseignements de Platon pour les expliquer à ses disciples, et ses traités portent la marque d’une profonde influence du Timée ; mais il n’hésite pas aussi à attaquer la conception du démiurge de Platon vu comme un artisan, à en répudier d’autres, et à élaborer ainsi sa propre doctrine en cosmologie, en psychologie et en métaphysique : il devient le fondateur du néoplatonisme[28]. Son élève, Porphyre, auteur d’un Commentaire au Timée, joue un rôle fondamental comme source de Proclus pour son propre Commentaire sur ce dialogueModèle:Sfn. Proclus se réfère aux lectures d’Albinus, de Plotin, de Porphyre, de Syrianos et d’Atticus, mais aussi au Commentaire de Jamblique. Tenant compte des désaccords interprétatifs entre tous ces philosophes, il étudie en particulier le débat qui portait sur le statut ontologique du Démiurge, son rapport avec les Idées et leur produit ; la question de savoir si le Démiurge existait aussi avant le moment de la création soulevait la thèse d’un temps pré-cosmiqueModèle:Sfn. Grâce au Timée et au Parménide, Proclus va réaliser la synthèse de ces questions métaphysiques qui ont agité le néoplatonisme tardif, en inaugurant une création originale, Modèle:Citation, selon le mot de Luc Brisson[29].

Aux Modèle:S2-, le Timée de Platon est connu grâce à la traduction latine effectuée par Chalcidius vers la fin du Modèle:S- : des copies de cette traduction sont attestées en Gaule-Francie et en Hispanie[30]. Dès l’époque carolingienne, c’est dans cette traduction latine de Chalcidius, seul texte alors accessible, que le Timée est étudié dans l’Occident médiéval ; bien que partielle (elle couvre seulement les lignes Modèle:Nobr), elle est accompagnée d’un riche commentaire visant à éclairer ce texte difficile. Elle se diffuse dans plusieurs centres monastiques, comme l’abbaye bénédictine de Fulda en Allemagne, ou l’abbaye de Fleury dans le Val de Loire ; elle est connue des grands intellectuels qui fréquentent le cercle d’Alcuin, le savant directeur de l’École palatine à Aix-la-Chapelle, ainsi que des philosophes Jean Scot Érigène et Gerbert d’Aurillac, futur pape sous le nom de Sylvestre IIModèle:Sfn. Le passage du Timée (Modèle:Nobr) relatif à la création de l’âme du monde construite selon des rapports musicaux est utilisé conjointement avec le traité de l’Institution musicale de Boèce. Les savants médiévaux sont ainsi conduits à concevoir la notion de musique des sphères : elle intéresse non seulement un théoricien de la musique comme Hucbald de Saint-Amand mais elle engage même les musiciens médiévaux à faire coïncider leur pratique avec la théorie platonicienne, grâce à l’adoption d’une échelle musicale constituée sur le modèle des diagrammes établis par Chalcidius : Modèle:CitationModèle:Sfn.

Aux Modèle:S2-, les savants et les théologiens juifs, musulmans et chrétiens, en particulier les théologiens de l’École de Chartres commentent le Timée d’après cette traduction latine de Chalcidius, et le citentModèle:Sfn. Les philosophes chartrains essaient de concilier la cosmogonie du Timée avec le Livre de la Genèse. Ils sont particulièrement intéressés par la notion de cosmos, cette harmonie de la nature Modèle:Incise qui doit servir de modèle pour établir la paix dans l’âme humaine et dans la sociétéModèle:Sfn Modèle:Incise. Mais la faveur dont jouissent les conceptions de Platon sur la nature, inconnues des Pères de l’Église, inquiètent certains théologiens comme Adalbold II d'Utrecht et Manegold de Lautenbach : bien que sans parti-pris contre le philosophe grec dont ils reconnaissent les mérites, ils redoutent l’idée d’une physique païenne, soustraite à l’influence de l’Évangile, et qui prétendrait expliquer rationnellement l’origine de l’homme et du mondeModèle:Sfn. À Chartres, où fleurit le culte de Platon, le maître Guillaume de Conches commente systématiquement la traduction de Chalcidius, en particulier pour le domaine arithmétique et musicalModèle:Sfn. Il rédige des Gloses sur le Timée, où il élabore une herméneutique et propose un parallèle entre l’Âme du monde selon Platon et le Saint Esprit, ajoutant prudemment à propos du philosophe grec : Modèle:Citation. C’est encore à la cosmologie du Timée et à la doctrine platonicienne des Idées qu’il faut se référer si l’on veut comprendre la position d’un autre maître, Bernard de Chartres, et celle de Pierre Abélard sur le problème des universaux[31]. L’argumentation d’Abélard atteste qu’il connaît le démiurge du Timée, la conception platonicienne de l’Intellect et la théorie des formes à travers la présentation qu’en a donnée Macrobe dans son Commentaire au Songe de Scipion. Sa théologie chrétienne, où la notion de Souverain Bien occupe une place centrale, est toute imprégnée de platonisme ; pour avoir voulu expliquer rationnellement le mystère de la Trinité, et avoir voulu soumettre la religion et la morale à l’exercice de sa puissante dialectique plutôt qu’à la foi, Abélard est finalement condamné en 1140 au concile de Sens[32].

Durant les deux siècles suivants, tenus pour l’âge des ténèbres en matière d’hellénisme, la référence à Platon ne se rencontre plus que chez de rares lettrés comme Albert le Grand ou le poète Dante. Au chant IV du Paradis[33], l’auteur de la Divine Comédie, s’interroge sur la doctrine platonicienne de l’âme humaine et le séjour des Bienheureux. Quelle est la signification de ces Modèle:Citation par le démiurge, dont parle Platon dans le Timée[A 34], et qui, après leur mort, retourneraient dans les astres, après une vie vécue ici-bas dans la justice ? La voix de Béatrice suggère au poète que peut-être, il faut entendre Platon non dans un sens littéral mais dans un sens métaphorique. Elle lui enseigne que Modèle:Citation qui y vit les divinités nommées Jupiter, Mercure et Mars[34].

Influence dans les temps modernes

Au Modèle:S-, une délégation byzantine venue de Constantinople en Italie pour participer au concile de Florence-Ferrare en 1437 suscite un intérêt accru pour l’œuvre de Platon et particulièrement pour le Timée dont la doctrine Modèle:CitationModèle:Sfn. On le constate dans les œuvres de deux des participants à ce concile, Gémiste Pléthon et Nicolas de Cues. Pléthon défend résolument la supériorité de la conception platonicienne de Dieu, de la genèse du monde et de la cosmologie mathématique du Timée, jugées nettement supérieures théologiquement à la conception aristotélicienneModèle:Sfn. Nicolas de Cues estime lui aussi que les conceptions développées dans le Timée peuvent s’accorder avec le christianisme, moyennant certaines adaptations doctrinales : le livre de la nature est bien écrit en langage mathématique, et grâce aux arts libéraux du quadrivium, l’homme a la capacité de comprendre en partie les relations entre les choses, même si Dieu seul possède la clef définitive de l’UniversModèle:Sfn; dans son ouvrage, La Docte Ignorance, Nicolas de Cues récuse la doctrine platonicienne des trois principes de l’acte créateur Modèle:Incise au profit de la Trinité, en qui se rassemble toute la causalité de la création ex nihilo. Il rejette également la théorie de l’Âme du monde, incompatible avec sa propre conception d’un univers infini (le centre est partout, la circonférence nulle part), et indéfini (c’est-à-dire non doté d’une forme)Modèle:Sfn.

L’intérêt pour le Timée s’accroît bientôt grâce au travail de l’humaniste florentin, Marsile Ficin, qui rédige en 1483 et 1484 un Commentaire sur le Timée (Modèle:Latin) avec, pour la première fois, la traduction intégrale de ce dialogue en latin[35]. Dans l’interprétation de Ficin, la figure centrale du démiurge donne sens à la théorie de l’homme créateur complétant l’œuvre divine ; cette synthèse unique entre la pensée médiévale, l’héritage religieux et le platonisme grec, exerce une influence considérable et devient l’interprétation définitive adoptée par la Renaissance. Dans cette traduction latine qui occupe une place de choix dans la bibliothèque des clercs, le Timée influence alors toute la culture occidentale, alimentant les débats théologiques sur le Verbe incarné, l’immanence au monde et la transcendance de DieuModèle:Sfn. Astronomes et mathématiciens tâchent de pénétrer le sens caché des passages relatifs à l’Âme du mondeModèle:Sfn.

Photographie en noir et blanc de deux pages d'un texte imprimé, extraites d'un incunable du Modèle:S-
Le Timée traduit en latin dans l’édition originale d’Henri Estienne, 1578, et accompagné du texte grec.

C’est bientôt dans le texte original que les savants vont lire le Timée dont la première édition en grec est publiée en Modèle:Date à Venise, grâce au travail attentif de l’érudit crétois, Marcus Musurus, ami de Jean Lascaris.

À la fin du Modèle:S-, le fondateur de l’astronomie moderne, Johannes Kepler, est influencé par la cosmologie et la physique mathématique du Timée, de même que GaliléeModèle:Sfn et Descartes dont la pensée présente bien des analogies avec celle de PlatonModèle:Sfn ; en Modèle:Date, Leibniz lit et médite le Timée, tandis que, jusqu’au Modèle:S-, des savants essaient même de localiser l’AtlantideModèle:Sfn. En France Voltaire, hermétique à toute spéculation cosmologique et métaphysique, présente le philosophe grec, dans le conte intitulé Songe de Platon, comme un rêveur de théories fumeuses.

En Allemagne, l’influence du Timée s’exerce sur nombre d’érudits, de philosophes et de philologues. Parmi ces philosophes, Schelling puise très tôt dans l’œuvre de Platon auquel il doit beaucoup, et dont il emprunte encore la dialectique dans ses dernières œuvres ; selon le mot de Xavier Tilliette, le Timée est Modèle:Citation[36]. En Modèle:Date-Modèle:Date, le jeune Schelling n’a que dix-huit ans lorsqu’il lit intensément le Timée dans le texte, le traduit, et rédige son propre commentaire au dialogue de Platon sous le titre Timæus. Ce commentaire porte sur la seule section allant de Modèle:Nobr, la partie qui expose la genèse de l’univers[37] ; Schelling s’intéresse en particulier aux trois entités platoniciennes des Formes intelligibles, des choses sensibles et du réceptacle. Il donne du Timée une interprétation historiquement très orientée, dans la ligne de l’idéalisme transcendantal de Kant, et des débats post-kantiens : la relation entre l’Intellect et la Nécessité de Platon apparaît à Schelling comme la relation de la forme et de la matière de la connaissance[38] ; la mise en ordre du chaos originel par le démiurge est conçue comme Modèle:Citation. Schelling n’a donc pas eu pour objectif d’expliquer le Timée ou de faire comprendre Platon pour lui-même, mais plutôt d’accumuler des notes de lecture pour nourrir sa propre réflexion, sur un texte considéré comme fondateur de l’histoire de la philosophieModèle:Sfn.

Au début du Modèle:S-, les philosophes allemands débattent de la doctrine de Platon sur le fond. En 1804, le philosophe Karl Joseph Hieronymus Windischmann publie sa traduction du Timée, où il voit Modèle:Citation, tandis que Johann Friedrich Herbart, dans son essai De Platonici systematis fundamento commentario publié un an plus tard, rejette vivement cette présentation élogieuse, allant jusqu’à dénier toute valeur moderne à ce dialogueModèle:Sfn. Dès 1804 Tennemann, très bon connaisseur de Platon, lui consacre une monographie de Modèle:Unité et apporte la démonstration irréfutable du caractère apocryphe du Timée de Locres ; mais les philosophes SchellingModèle:Sfn et Hegel admettent encore l’hypothèse dépassée selon laquelle le dialogue de Platon serait Modèle:CitationModèle:Sfn. Les savants Friedrich August Wolf et August Böckh étudient les problèmes philologico-historiques soulevés par la composition du TiméeModèle:Sfn. Quelques années plus tard, s’intéressant à son tour au Timée, Friedrich Nietzsche formule l’hypothèse que Platon a incorporé ou retravaillé l’Hermocrate et l’a ajouté aux textes des Lois[39].

Sur le plan philosophique, c’est sur Hegel que l’influence du Timée apparaît la plus forte. Il retient du Timée les questions qui sont, selon ses propres mots, Modèle:Citation (Modèle:Allemand) : la conception de Dieu, la proportion, la notion d’âme, la valeur du monde, le problème du temps et de l'espaceModèle:Sfn. Il reconnaît que Platon a eu, comme les néoplatoniciens, l’idée exacte de la vraie nature de Dieu et la prescience claire de la Trinité chrétienneModèle:Sfn. Le concept platonicien d’âme du monde est à l’origine chez Hegel de la notion d’Esprit existant dans le monde ; elle signifie pour lui la supériorité de l’Esprit sur la matièreModèle:Sfn ; par son statut intermédiaire que Hegel a bien perçu, l’âme du monde représente l’intelligibilité du monde divin qui lie le Dieu trine à la nature multipleModèle:Sfn. Il reconnaît aussi sa dette envers Platon sur l’idéalité du Temps et de l’espace qui ne peuvent être compris par rapport à la matière mais seulement par rapport au monde divinModèle:Sfn.

Au Modèle:S-, Jacques Derrida constate le paradoxe et l’énigme que représente la khôra platonicienne : ce troisième genre d’être ne peut être approché que par Modèle:Citation, constatait déjà Platon (Modèle:Nobr). La khôra a obsédé Jacques Derrida depuis quasiment le début de son travail, dans La Pharmacie de Platon en Modèle:Date, jusqu’à la fin, dans Voyous publié en Modèle:Date, quelques mois avant sa mortModèle:Sfn. Il traite de cette notion de manière approfondie dans Comment ne pas parler (Psyché, Modèle:Date) et Khôra (Modèle:Date). Dans cette dernière œuvre, il insiste sur la nécessité de Modèle:Citation et de supprimer l’article défini qui Modèle:Citation En Modèle:Date, la comparaison, faite par Platon, de la khôra avec le tamis de vannage de l’agriculteur devient le motif central d’une correspondance entre le philosophe et l’architecte Peter Eisenman à propos d’un projet qui avait précisément pour nom Choral Work. Faisant allusion à cette comparaison, Derrida avouait son aporie : Modèle:Citation

Philosophes et scientifiques du Modèle:S-

Modèle:Article détaillé Au Modèle:S-, sept personnalités de premier plan, versées à la fois en philosophie, en mathématique, en physique théorique et quantique, ont montré à quel point les intuitions du Timée de Platon pouvaient inspirer leurs propres travaux, et même servir l’unité de la connaissance.

En Modèle:Date, le mathématicien, logicien et métaphysicien Alfred North Whitehead déclare que le Timée revêt la même importance scientifique que le Scholium ajouté par Isaac Newton, en Modèle:Date, à ses Principia[40] ; ces deux ouvrages, le Scholium et le Timée, constituent les plus grands textes cosmologiquesModèle:Sfn, et sont aussi Modèle:CitationModèle:Sfn. Le paradoxe de ce jugement s’explique : la physique du Modèle:S-, relativiste et quantique, accorde en effet un nouveau rôle aux nombres entiers en raison du quantum d’action mécanique de Planck : à l’opposé du calcul différentiel et intégral de Leibniz et de son célèbre Modèle:Citation, la physique quantique introduit une sorte de nouveau pythagorisme[41], après celui qui a inspiré Platon[note 21]. Whitehead reconnaît la vitalité de la philosophie platonicienne en général et l’importance capitale de sa contribution à l’histoire de la pensée occidentale. Dans sa « philosophie du processus » (en Modèle:Lang-en), les axes majeurs de son propre système que sont « Dieu, les Objets éternels, la Créativité », sont explicitement mis en parallèle, respectivement avec les concepts platoniciens du Démiurge, des Idées, et de la Khôra (ou réceptacle), présentés dans le Timée[42].

Le lauréat du prix Nobel de physique Modèle:Date et l’un des fondateurs de la mécanique quantique, Werner Heisenberg, lit le Timée quand il fait son service militaire à MunichModèle:Sfn. Dès Modèle:Date, il publie un article sur la philosophie grecque, approfondissant le monde des Idées de Platon et puisant quelques réflexions chez les présocratiques[43] ; dans ces sources antiques, il recommande de Modèle:Citation ; il met aussi à profit la notion aristotélicienne de puissance, et rejoint Platon dans sa modélisation mathématique des corpuscules élémentaires : Modèle:Citation

Entre Modèle:Date et Modèle:Date, le mathématicien et philosophe Albert Lautman, Modèle:Citation, selon le mot de Jean PetitotModèle:Sfn, veut construire une philosophie des sciences directement métaphysique. Il est authentiquement platonicien dans sa conception de la participation du Sensible à l’Intelligible et sa référence immédiate aux Idées ; pour lui, Modèle:Citation L’être mathématique, écrit-il, Modèle:Citation, et les théories mathématiques et physiques sont comme des structures organisatrices douées d’harmonie, d’autonomie et de vie. Les créations mathématiques doivent être lues, selon lui, comme des approfondissements d'oppositions dialectiques au sens platonicien entre des contraires tels que le Même et l'Autre, le Continu et le Discontinu, l'Essence et l'Existence, le Fini et l’InfiniModèle:Sfn. Modèle:Citation Mais ces Idées Modèle:Citation[44], précise-t-il ; à la différence de Platon, Lautman supprime en effet la distance irréductible qui sépare l’eidos (Modèle:Grec ancien, « Forme, Idée ») de sa représentation, pour affirmer le pouvoir producteur des idées qui s'incarnent dans les théoriesModèle:Sfn : Modèle:Citation

Dans une étude publiée en Modèle:Date et intitulée Modèle:Anglais, le mathématicien et physicien Hermann Weyl constate la justesse des intuitions exprimées par Platon dans le Timée sur les propriétés mathématiques de la matière : Modèle:Citation Il ajoute que parmi les cinq polyèdres réguliers de Platon, Modèle:Citation ; le Timée anticipe en effet un concept moderne et abstrait, puisqu’il présente déjà Modèle:Citation[41], en raison du rôle des rotations imprimables aux polyèdres réguliersModèle:Sfn.

La philosophe Simone Weil, tout en participant aux réunions du groupe Bourbaki et en s’intéressant à la théorie des quanta[45], lit et commente le Timée : elle s’inscrit dans la longue tradition de ceux qui, des Pères de l’Église à Abélard, et jusqu’à Hegel y ont découvert le mystère chrétien de la Trinité[note 22]. Elle résume en ces termes sa lecture chrétienne du Timée : Modèle:CitationModèle:Sfn. Sa conception du rôle médiateur du Beau dans la contemplation de l’ordre divin du cosmos[46] s’inspire de la création du monde par le démiurge contemplant un modèle : par analogie avec la création artistique, où Modèle:Citation, elle développe une métaphysique du détachement et du renoncement à toutes les finsModèle:Sfn. Simone Weil reprend également à Platon la notion-clef de Modèle:Citation (Modèle:Nobr) à laquelle elle donne, Modèle:Citation, celui du Christ auquel saint Jean donne le nom de Logos, terme qui désigne en grec le Médiateur ou la moyenne proportionnelleModèle:Sfn. L’influence de Platon sur Simone Weil s’avère forte, particulièrement sur sa conception du Temps et du moiModèle:Sfn. Conformément à cette idée essentielle du Timée que nous devons reproduire en nous l’ordre du monde et l’harmonieuse circularité de son mouvement, elle pense l’arrachement au devenir ; par la régularité de leurs retours, les corps célestes symbolisent Modèle:CitationModèle:Sfn. Dans le Timée, ce Modèle:Citation, Simone Weil découvre au total une conception mystique de la connaissance : Platon ayant contemplé l’univers comme Dieu le voit, a essayé de l’expliquer aux hommes ; Modèle:Citation[47].

Carl Friedrich von Weizsäcker, professeur de physique théorique, spécialiste de l’atome, en même temps que professeur de philosophie, s’intéresse à la philosophie de la nature ; en 1970, dans une conférence intitulée « La science platonicienne dans l’Histoire », il constate que la physique moderne semble récapituler les idées de Platon mais avec une conception différente du Temps. Le système des particules élémentaires du Timée, qui sont constituées sur la base des triangles et de la ligne, ramène à une modélisation mathématique et implique le principe d’unité de la nature comme dans la physique moderne. Pour Weizsäcker, les développements futurs de la physique moderne exigent une réflexion philosophique qui devra prendre en considération la pensée de Platon Modèle:Citation[48].

En 2010, le physicien Anthony Leggett, lauréat du prix Nobel de physique de Modèle:Date, publie un essai sur les Résonances du Timée de Platon dans la physique et la cosmologie modernesModèle:Sfn. Il y affirme que Platon pose les bonnes questions sur la naissance de l’univers et sur les rapports du Temps et de l’univers ; les relations que Platon établit entre la Nécessité, l’espace et l’Intellect illustrent un débat toujours actuel : faut-il concevoir cet univers comme le résultat des constantes de la physique, ou comme le résultat de conditions initiales arbitraires ? Anthony Leggett constate aussi que l’exposé de Platon sur la structure des particules élémentaires demeure jusqu’à nos jours riche de suggestions et susceptible d’inspirer la pensée contemporaine.

Notes et références

Notes

Modèle:Références

Références antiques

Modèle:Références

Références bibliographiques

Modèle:Références nombreuses

Bibliographie

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Éditions en français

Études

Sur l’ensemble du Timée et sa métaphysique
Sur la cosmologie du Timée
Sur le Temps
Sur khora
Sur les sciences
Sur l’anthropologie
Sur la forme du Timée et le mythe platonicien
Sur l’éthique et la théologie
Sur la réception et la fortune du Timée

Liens externes

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  2. Modèle:Article.
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  4. Modèle:Chapitre
  5. Carlos Lévy, dans Le Savoir grec (de Jacques Brunschwig et Geoffrey Lloyd), Flammarion, 1996, Modèle:P..
  6. Modèle:Article.
  7. Modèle:Article
  8. Donald Ipperciel, « La vérité du mythe : une perspective herméneutique-épistémologique », Modèle:P..
  9. Modèle:Lien web.
  10. Modèle:Ouvrage
  11. Modèle:Chapitre.
  12. Jean-François Mattéi, Platon, P.U.F., coll. « Que sais-je ? », 2005, Modèle:P..
  13. Modèle:Ouvrage.
  14. Martin Heidegger, Introduction à la métaphysique, 1983, coll. Tel, Gallimard, Modèle:P..
  15. 15,0 et 15,1 Modèle:Article
  16. 16,0 16,1 16,2 et 16,3 Modèle:Article
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  33. Dante, Divine Comédie, Paradis (Divine Comédie), vers Modèle:Nobr.
  34. Dante, La Divine Comédie, tome troisième, Paradis, Traduction André Pératé, édition Jean de Bonnot, 1972, Modèle:P..
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  39. Friedrich Nietzsche, Introduction à l’étude des dialogues de Platon, Modèle:P., Éditions de l'Éclat, Modèle:Date.
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  41. 41,0 et 41,1 Modèle:Lien web.
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  47. Simone Weil, « Dieu dans Platon », La Source grecque, Gallimard, coll. Espoir, 1979, Modèle:P..
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