Postulat de Bertrand

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Modèle:Voir homonymes

En mathématiques, le postulat de Bertrand affirme qu'entre un entier et son double, il existe toujours au moins un nombre premier.

Plus précisément, l'énoncé usuel est le suivant : Modèle:Énoncé

Le postulat de Bertrand est aussi connu sous le nom de théorème de Tchebychev, depuis que Pafnouti Tchebychev l’a démontré en 1850.

Énoncés

  • L'énoncé usuel du postulat de Bertrand :
    1. Pour tout entier n>1, il existe un nombre premier p tel que n<p<2n.
    est équivalent aux quatre suivants :
    2. Pour tout entier n1, il existe un nombre premier p tel que n<p2n.
    3. Pour tout entier n1, π(2n)π(n)1, où π est la fonction de compte des nombres premiers.
    4. Pour tout indice k, pk+1<2pk, où (pk)k1 est la suite des nombres premiers.
    5. Pour tout indice k, gk<pk, où gk=pk+1pk est l’écart entre un nombre premier et le suivant.
    ainsi qu'aux variantes obtenues en remplaçant, dans les énoncés 1 à 3, « pour tout entier » par « pour tout réel[1] ».
  • Celui formulé par Joseph Bertrand[2] et démontré par Pafnouti Tchebychev[3], était légèrement plus fort :

Modèle:Retrait

Historique

Le « postulat » (un terme tel qu’hypothèse ou conjecture, moins généraux, serait plus approprié) est énoncé pour la première fois en 1845 par Joseph Bertrand[4] dans une étude sur des groupes de permutations, après qu’il a vérifié sa validité pour tous les nombres inférieurs à 6 millions.

C’est Pafnouti Tchebychev qui obtient, en 1850, la première démonstration[5] : il utilise notamment un encadrement de la factorielle par des fonctions dérivées de la formule de Stirling ainsi que la fonction θ(x)=p=2xlnp, où p parcourt les nombres premiers inférieurs ou égaux à x[6]. Depuis lors, le postulat s'appelle aussi « théorème de Tchebychev[7] » ou, plus rarement, « théorème de Bertrand-Tchebychev ».

Edmund Landau, en 1909, dans son ouvrage de synthèse des connaissances de l’époque sur la répartition des nombres premiers[8], reprend pour l’essentiel la démonstration de Tchebychev[6].

En 1919, Srinivasa Ramanujan donne du postulat de Bertrand une démonstration plus simple[9].

En 1932, Paul Erdős, à l’occasion de sa première publication, à l’âge de 19 ans, publie une démonstration entièrement élémentaire[7] dans laquelle il utilise les coefficients binomiaux (il démontrera aussi que pour n>5, il existe au moins deux nombres premiers compris entre n et 2n). Pour son élégance, cette démonstration d’Erdős est l’une de celles retenues par Martin Aigner et Günter M. Ziegler dans leur livre Raisonnements divins[10].

Problèmes apparentés

Résultats dérivés de la démonstration de Tchebychev

L’essentiel de la démonstration de Tchebychev porte sur les n assez grands, le complément consistant à démontrer la propriété directement pour les n petits. L’énoncé est le suivant : Modèle:Énoncé

Un axe de recherche consiste à réduire la valeur de ϵ :

Conjecture de Legendre

Une conjecture similaire au postulat de Bertrand, mais non encore résolue, appelée conjecture de Legendre, affirme l'existence, pour tout entier n1, d'un nombre premier p tel que n2<p<(n+1)2. Elle touche à l'hypothèse de Riemann.

Théorème de Sylvester

En 1891-1892, James Joseph Sylvester généralise l'énoncé usuel avec la proposition suivante[15] :

Le produit de n entiers consécutifs strictement supérieurs à n est divisible par un nombre premier strictement supérieur à n.

Le postulat de Bertrand s'en déduit en considérant les n entiers n+1,n+2,,2n : si l'un d'eux est divisible par un nombre premier p>n, il est égal à p.

Démonstration

Notons l'ensemble des nombres premiers et définissons :

θ(x)=p;pxlnp.

Voici le plan de la démonstration :

  • lemme de majoration de θ(x) ;
  • vérification explicite de la propriété pour n630 ;
  • démonstration de la propriété (dans sa version usuelle) pour n>630 (en utilisant le lemme).

Lemme de majoration de Modèle:Math

Modèle:Énoncé

Modèle:Démonstration/début

  • La propriété est vraie pour n = 1 : θ(1)=0<1ln4.
  • La propriété est vraie pour n = 2 : θ(2)=ln2<2ln4.
  • Soit N > 2. Supposons la majoration vraie pour tous les entiers positifs n < N et montrons-la pour n = N.
    • Si N > 2 est pair : θ(N)=θ(N1)<(N1)ln4<Nln4. En effet, N, étant pair et différent de 2, n'est pas premier ; donc il y a autant de nombres premiers entre 1 et N qu'entre 1 et N – 1.
    • Si N > 2 est impair. Soit N = 2m+1 avec m > 0. Par la formule du binôme de Newton :
      4m=(1+1)2m+12=k=02m+1(2m+1k)2(2m+1m)+(2m+1m+1)2=(2m+1m+1).
      Chaque nombre premier p tel que m+1<p2m+1 divise (2m+1m+1), ce qui nous donne :
      θ(2m+1)θ(m+1)ln((2m+1m+1))ln(4m)=mln4.
      Par hypothèse de récurrence, θ(m+1)<(m+1)ln4, donc :
      θ(N)=θ(2m+1)<(2m+1)ln4=Nln4.

Modèle:Démonstration/fin

Vérification pour n ≤ 630

Si 2n630, on utilise le procédé de Landau :

considérons la suite de onze nombres premiers 2, 3, 5, 7, 13, 23, 43, 83, 163, 317 et 631, chacun étant strictement inférieur au double de son prédécesseur.

Il existe deux nombres consécutifs de cette liste, q et p, tels que

qn<p, donc n<p et 2q2n.

De plus, par construction de cette liste, p<2q, ce qui, joint à 2q2n, donne p<2n. On a donc bien

n<p<2n.

Preuve pour n > 630

Mise en place de la stratégie

Par la formule du binôme,

4n=(1+1)2n=2+k=12n1(2nk).

Puisque (2nn) est le plus grand terme de la somme, on en déduit : 4n2n(2nn). Appelons R(p,n) le plus grand nombre x tel que px divise (2nn). On a donc

4n2n(2nn)=ppR(p,n)=P1P2P3P4,

avec

P1=p,p2npR(p,n),P2=p,2n<p2n/3pR(p,n),P3=p,2n/3<pnpR(p,n),P4=p,n<p<2npR(p,n).

Pour minorer P4 (afin de montrer que P4>1), on va majorer P1, P2 et P3. Il nous faut pour cela majorer les R(p,n).

Calcul des R(p, n)

On désigne par X la partie entière de X, et par {X} sa partie fractionnaire.

Puisque (d'après une formule de Legendre) n! possède j=1npj facteurs égaux à p, on obtient :

R(p,n)=j=12npj2j=1npj=j=12npj2npj

Majoration de P1

Puisque chaque terme 2npj2npj vaut soit 0 (lorsque {npj}<12) soit 1 (lorsque {npj}12) et que tous les termes avec j>ln(2n)lnp sont nuls, on obtient :

R(p,n)ln(2n)lnp,

donc pR(p,n)2n, donc P1(2n)2n.

Majoration de P2

Pour p>2n, la somme dans R(p, n) est réduite à son premier terme, 2np2np qui, comme déjà mentionné, vaut 0 ou 1. On a donc R(p,n)1, d'où

P2p,2n<p2n/3pexp(θ(2n/3))<42n/3,

la dernière inégalité venant du lemme.

Majoration de P3

En fait, P3=1 (c'est le point clé de la preuve d'Erdös) car si 2n/3<pn alors

R(p,n)=2np2np=22=0.

Synthèse

On aboutit à

4n2nP1P2P3P4<(2n)1+2n.42n/3.1.P4,

c'est-à-dire

P4>4n/3(2n)1+2n

qui, en posant 2n=22t, se réécrit

ln(P4)>t2tln23(2tt6(1+2t)).

Or 2n>1024=210 donc t>5, d'où 2tt>255>6(1+25)>6(1+2t), si bien que ln(P4)>0, ce qui achève la démonstration.

Notes et références

Modèle:Traduction/Référence Modèle:Références

Bibliographie

Modèle:Portail

  1. Modèle:EncycloMath donne l'énoncé 1 avec : « pour tout x>1 » (implicitement : réel).
  2. L'énoncé original de la page 129 de Modèle:Article, est : Modèle:Citation Le contenu de cette page 129 permet de comprendre, sans ambiguïté possible, que n est un entier, strictement supérieur à 6, et que le nombre premier p doit vérifier les inégalités n2<pn2 (stricte pour la première et large pour la seconde).
  3. Pages 381-382 de Modèle:Article Modèle:Citation.
  4. Modèle:Harvsp.
  5. Modèle:Harvsp Modèle:Citation, publié en 1852, pendant un voyage en Europe occidentale (France, Angleterre, Allemagne). La démonstration du postulat de Bertrand est contenue dans les pages 371-382.
  6. 6,0 et 6,1 Pour plus de détails, voir les sections « Conjecture de Gauss-Legendre » et « Postulat de Bertrand » de l'article sur Pafnouti Tchebychev.
  7. 7,0 et 7,1 Modèle:Article.
  8. Modèle:Ouvrage.
  9. Modèle:En S. Ramanujan, « A proof of Bertrand's postulate », Journal of the Indian Mathematical Society, Modèle:Rom-min, 1919, Modèle:P.. — Collected Papers of Srinivasa Ramanujan, 1927, Modèle:P. ; reprint. Chelsea Publishing Company, New York, 1962.
  10. Modèle:Ouvrage.
  11. 11,0 11,1 11,2 11,3 et 11,4 Modèle:De E. Landau, Modèle:Zbl.
  12. 12,0 et 12,1 Modèle:Dickson1, vol. 1, 1919, Modèle:P..
  13. Modèle:Article. Le commentaire de Minkowski (Modèle:Lang, vol. 25, Modèle:N°, 1896, Modèle:P.) reproduit dans zbMATH est sans appel, tandis que Modèle:Harvsp, ne remarque pas l'erreur.
  14. Modèle:Article. Cahen reproduit cette note et la précédente Modèle:P. de Modèle:Article.
  15. Modèle:En Sylvester, « On arithmetical series, part I », Messenger Math., vol. 21, mai 1891-avril 1892, Modèle:P..