Fonction de Massieu

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Les fonctions de Massieu sont des fonctions établies par François Massieu dans le cadre de la thermodynamique. Il s'agit de potentiels thermodynamiques, Massieu étant, dans ses deux courtes publications parues en 1869[1], l'inventeur de cette notion, qu'il appelle fonction caractéristique.

Ces fonctions ont pour particularité d'utiliser comme variable l'inverse de la température plutôt que la température et d'être homogènes avec une entropie plutôt qu'avec une énergie : elles s'expriment en joules par kelvin, J/K. De plus elles croissent dans une transformation spontanée et atteignent un maximum à l'équilibre thermodynamique, alors qu'un potentiel thermodynamique « classique » décroît et atteint un minimum.

Rappels de thermodynamique

Premier principe de la thermodynamique

Modèle:Article détaillé

Le premier principe de la thermodynamique est un principe de conservation de l'énergie interne, notée U. Si l'on considère un système fermé siège d'une transformation quelconque (par ex. une réaction chimique) échangeant du travail W et de la chaleur Q avec le milieu extérieur, avec lequel il forme un système isolé, la variation de l'énergie interne du système est égale à la somme du travail et de la chaleur échangés avec le milieu extérieur :

Variation de l'énergie interne du système : dU=δW+δQ

Le travail fourni par le système peut être dû à de nombreuses forces : force de pression, gravité, force électromagnétique, etc. Il faut donc, pour être exhaustif, considérer le travail fourni par le système comme la somme des travaux dus à chacune de ces forces : δW=δWP+δWg+δWem+. Nous supposerons dans ce qui suit que le travail n'est dû qu'à des forces de pression. Le travail d'une force dont le travail est inutilisable (frottement, viscosité) est dégradé sous forme de chaleur.

Le premier principe de la thermodynamique pose que l'énergie globale du système isolé est conservée, autrement dit que la variation globale d'énergie du système et du milieu extérieur est nulle :

Premier principe de la thermodynamique : dU+dUext=0

avec :

  • U l'énergie interne du système ;
  • Uext l'énergie interne du milieu extérieur.

Deuxième principe de la thermodynamique

Modèle:Article détaillé

Le deuxième principe de la thermodynamique est un principe d'évolution de la transformation thermodynamique ayant lieu dans le système. Ce principe introduit la notion d'entropie, notée S. L'entropie du système est liée à la chaleur Q fournie par le système selon :

  • pour une transformation réversible : dS=δQT ;
  • pour une transformation irréversible : dS>δQT.

Cette inégalité est appelée inégalité de Clausius :

Inégalité de Clausius : dSδQT

Selon le deuxième principe de la thermodynamique, dans un processus spontané l'entropie globale du système et du milieu extérieur ne peut qu'augmenter :

Deuxième principe de la thermodynamique : dS+dSext0

avec :

  • S l'entropie du système ;
  • Sext l'entropie du milieu extérieur.

La transformation ayant lieu dans le système peut être réversible ou irréversible. Une transformation réversible est vérifiée si on a l'égalité :

Transformation réversible : dS+dSext=0

Une transformation irréversible est vérifiée si on a l'inégalité :

Transformation irréversible : dS+dSext>0

Le deuxième principe induit que l'entropie globale du système et du milieu extérieur ne peut qu'augmenter lors d'un processus spontané. Tout système thermodynamique évolue donc spontanément jusqu'à atteindre un équilibre caractérisé par un maximum de l'entropie globale du système et du milieu extérieur.

Construction des fonctions caractéristiques de Massieu

Définition générale d'une fonction caractéristique

Dans le cas du système et du milieu extérieur formant globalement un système isolé, nous posons :

  • P la pression, en considérant que le système et le milieu extérieur sont en équilibre mécanique permanent pendant la transformation (le système et le milieu extérieur sont constamment à la même pression, celle-ci pouvant changer) ;
  • T la température, en considérant que le système et le milieu extérieur sont en équilibre thermique permanent pendant la transformation (le système et le milieu extérieur sont constamment à la même température, celle-ci pouvant changer) ;
  • V le volume du système ;
  • Vext le volume du milieu extérieur.

Le système et le milieu extérieur formant un système global isolé, donc à volume global constant, nous avons la contrainte sur les variations des volumes :

dV+dVext=0

En supposant que le travail fourni par le système soit dû aux seules forces de pression, une variation élémentaire de travail vaut : δW=PdV. On vérifie que le milieu extérieur reçoit le travail opposé : δW=PdV=PdVext.

Pour le milieu extérieur, nous considérons la transformation comme réversible. Le milieu reçoit la chaleur : δQ=TdSext ; en conséquence :

dUext=PdVext+TdSext

Pour le système, dans lequel nous considérons une transformation potentiellement irréversible, nous écrivons :

dU=δW+δQ
δW=PdV (en supposant que le travail n'est dû qu'aux seules forces de pression)
dU=PdV+TdS[TdSδQ]

On a en application du deuxième principe de la thermodynamique :

TdSδQ=T[dSδQT]=T[dS+dSext]0

On peut donc écrire pour le système étudié :

dU+PdVTdS=T[dS+dSext]0

Par conséquent, de façon générale, s'il existe une fonction d'état Ψ, appelée fonction caractéristique par Massieu, telle que :

Fonction caractéristique : dΨ=dSdUTPTdV=dS+dSext

nous avons la condition d'évolution spontanée de la transformation dans le système, c'est-à-dire la condition d'évolution de la transformation laissée à elle-même, sans aucune contrainte exercée par le milieu extérieur sur le système :

Condition d'évolution spontanée : dΨ0

La fonction caractéristique Ψ varie dans le même sens que l'entropie globale du système et du milieu extérieur :

  • l'entropie globale et la fonction augmentent selon le deuxième principe de la thermodynamique ;
  • un équilibre thermodynamique est atteint lorsque l'entropie et la fonction atteignent un maximum.

Par construction, la fonction caractéristique est homogène avec une entropie: elle s'exprime en joules par kelvin, Modèle:Unité.

Par comparaison, les potentiels thermodynamiques U énergie interne, H enthalpie, F énergie interne et G enthalpie libre décroissent et atteignent un minimum à l'équilibre. Ils sont homogènes avec une énergie et s'expriment en joules, Modèle:Unité.

Cependant, il n'existe pas de fonction d'état simple dont la différentielle vérifie : dΨ=dSdUTPTdV, mais cette égalité peut être vérifiée par certaines fonctions sous certaines contraintes. Il n'y a donc pas une mais plusieurs fonctions caractéristiques. Massieu a ainsi défini les deux fonctions J et Y, qui portent respectivement le nom de fonction de Massieu et de fonction de Planck. La première est utile dans les transformations à volume et température constants, la seconde dans les transformations à pression et température constantes.

Fonction de Massieu

À volume constant dV=0, à température constante dUT=d(UT). On a :

dΨ=dS+d(UT)=d[SUT]

Il apparaît une nouvelle fonction d'état appelée fonction de Massieu, notée J[2] :

Fonction de Massieu : J=SUT=FT

avec F=UTS l'énergie libre.

Nous avons la condition d'évolution spontanée :

Condition d'évolution spontanée d'un système à volume et température constants : dJ0

La différentielle de la fonction de Massieu vaut :

dJ=dSdUTUd(1T)

Avec dU=PdV+TdS+i=1Nμidni[TdSδQ], on obtient :

dJ=PTdVUd(1T)i=1NμiTdni+[dSδQT]

En conséquence :

  • pour une transformation réversible : dJ=PTdVUd(1T)i=1NμiTdni ;
  • pour une transformation irréversible : dJ>PTdVUd(1T)i=1NμiTdni.

Les variables naturelles de J sont V, 1T et les ni : J=J(V,1T,n).

Fonction de Planck

À température constante dUT=d(UT), à pression et température constantes PTdV=d(PVT). On a :

dΨ=dS+d(UT)+d(PVT)=d[SUTPVT]

Il apparaît une nouvelle fonction d'état appelée fonction de Planck, notée Y[2] :

Fonction de Planck : Y=SUTPVT=GT

avec G=U+PVTS l'enthalpie libre.

Nous avons la condition d'évolution spontanée :

Condition d'évolution spontanée d'un système à pression et température constantes : dY0

La différentielle de la fonction de Planck vaut :

dY=dSdUTUd(1T)PTdVVd(PT)

Avec dU=PdV+TdS+i=1Nμidni[TdSδQ], on obtient :

dY=Vd(PT)Ud(1T)i=1NμiTdni+[dSδQT]

En conséquence :

  • pour une transformation réversible : dY=Vd(PT)Ud(1T)i=1NμiTdni ;
  • pour une transformation irréversible : dY>Vd(PT)Ud(1T)i=1NμiTdni.

Les variables naturelles de Y sont PT, 1T et les ni : Y=Y(PT,1T,n).

On remarquera que si l'on introduit :

d(PT)=dPT+Pd(1T)

dans la différentielle déterminée précédemment, on a :

dY=Vd(PT)Ud(1T)i=1NμiTdni+[dSδQT]
=VTdP[U+PV]d(1T)i=1NμiTdni+[dSδQT]
=VTdPHd(1T)i=1NμiTdni+[dSδQT]

avec H=U+PV l'enthalpie.

Dans ce cas les variables naturelles de Y sont P, 1T et les ni : Y=Y(P,1T,n).

Relations

Transformation de Legendre

Modèle:Article détaillé

Soit une fonction y=f(x) et la pente p=f(x). On a la relation réciproque x=f1(p). On crée une fonction g(p)=f(x)px appelée transformée de Legendre. Les fonctions f et g contiennent les mêmes informations mais la première est fonction de x et la deuxième de p. Les différentes fonctions caractéristiques sont des transformées de Legendre de l'entropie.

Si l'on considère la différentielle de l'énergie interne :

dU=PdV+TdS+i=1Nμidni

on a la différentielle de l'entropie :

dS=PTdV+1TdUi=1NμiTdni

L'entropie est une fonction du volume, de l'énergie interne et des quantités de matière : S=f(V,U,n). On a les relations :

(SV)U,n=PT
(SU)V,n=1T
(Sni)V,U,njj=μiT

On crée la transformée de Legendre pour remplacer la variable énergie interne par la variable 1/T :

g1(V,1T,n)=S(SU)V,nU=S1TU=J(V,1T,n)

On crée la transformée de Legendre pour remplacer la variable volume par la variable P/T et la variable énergie interne par la variable 1/T :

g2(V,1T,n)=S(SV)U,nV(SU)V,nU=SPTV1TU=Y(PT,1T,n)

On retrouve les fonctions de Massieu et de Planck. On peut de la même façon créer d'autres fonctions caractéristiques sans nom ni notation attribués.

On crée la transformée de Legendre pour remplacer la variable volume par la variable P/T :

g3(PT,U,n)=S(SV)U,nV=SPTV=Ψ1(PT,U,n)

On crée la transformée de Legendre pour remplacer la variable énergie interne par la variable 1/T et les variables quantités de matière par les variables μi/T :

g4(V,1T,μT)=S(SU)V,nUi=1N(Sni)V,U,njjni=S1TU+i=1NμiTni=Ψ2(V,1T,μT)

Relation de Gibbs-Duhem

Modèle:Article détaillé

Si l'on considère la fonction de Planck :

Y=GT

et l'intégrale d'Euler concernant l'enthalpie libre :

G=i=1Nμini

on a :

dY=i=1Nnid(μiT)i=1NμiTdni

Or la différentielle de la fonction de Planck vaut :

dY=Vd(PT)Ud(1T)i=1NμiTdni

Nous pouvons identifier les différents termes des deux expressions de la différentielle, on obtient la relation de Gibbs-Duhem en représentation entropie [3] :

Relation de Gibbs-Duhem en représentation entropie : Ud(1T)+Vd(PT)i=1Nnid(μiT)=0

ou encore :

Hd(1T)+VTdPi=1Nnid(μiT)=0

avec H=U+PV l'enthalpie.

Relation de Gibbs-Helmholtz

Modèle:Article détaillé

Si l'on considère la différentielle de la fonction de Massieu à composition constante :

dJ=PTdVUd(1T)

on a la dérivée partielle :

(J1T)V,n=U

soit, puisque J=FT :

(FT1T)V,n=U

De même, avec la différentielle de la fonction de Planck à composition constante:

dY=VTdPHd(1T)

on a la dérivée partielle :

(Y1T)P,n=H

soit, puisque Y=GT :

Relation de Gibbs-Helmholtz : (GT1T)P,n=H

On retrouve donc les deux relations de Gibbs-Helmholtz.

On a des relations similaires avec les fonctions caractéristiques. Ainsi, puisque S est le pendant de U et F de J, avec la différentielle de l'énergie libre à composition constante :

dF=PdVSdT

on a la relation :

(FT)V,n=S

pendant de (J1T)V,n=U.

De même, puisque G est le pendant de Y et H de Ψ1, si l'on considère :

d(PT)=dPT+Pd(1T)=dPTPT2dT

en introduisant :

dP=Td(PT)+PTdT

dans la différentielle de l'enthalpie libre à composition constante :

dG=VdPSdT=VTd(PT)(SPTV)dT=VTd(PT)Ψ1dT

on a la relation :

(GT)PT,n=Ψ1

pendant de (Y1T)P,n=H.

Capacités thermiques

Modèle:Article détaillé

La capacité thermique isochore d'un corps pur ou d'un mélange, notée CV, représente la chaleur absorbée par ce corps à volume constant rapportée à la variation de température du corps engendrée par cette transformation. Si l'on considère cette transformation comme réversible on a, à volume constant :

δQV=CVdT=TdS=dU

D'où les relations :

CVT=(ST)V,n
CV=(UT)V,n=(1TT)V,n(U1T)V,n=1T2(U1T)V,n

En considérant l'équation d'état :

(J1T)V,n=U

on obtient :

Capacité thermique isochore : CV=(UT)V,n=T(ST)V,n=1T2(2J1T2)V,n

De même, la capacité thermique isobare d'un corps pur ou d'un mélange, notée CP, représente la chaleur absorbée par ce corps à pression constante rapportée à la variation de température du corps engendrée par cette transformation. Si l'on considère cette transformation comme réversible on a, à pression constante :

δQP=CPdT=TdS=dH

D'où les relations :

CPT=(ST)P,n
CP=(HT)P,n=(1TT)P,n(H1T)P,n=1T2(H1T)P,n

En considérant l'équation d'état :

(Y1T)P,n=H

on obtient :

Capacité thermique isobare : CP=(HT)P,n=T(ST)P,n=1T2(2Y1T2)P,n

Les deux transformations sont considérées à composition constante et sans changement d'état du corps pur ou du mélange. Par construction les capacités thermiques sont homogènes avec une entropie et s'expriment en joules par kelvin, J/K.

Comparaison entre potentiels thermodynamiques et fonctions caractéristiques

Le tableau suivant compare les potentiels thermodynamiques et les fonctions caractéristiques. Pour rendre les comparaisons plus flagrantes, les variables P/T et μ/T des fonctions caractéristiques sont remplacées respectivement par P/T et μ/T.

Équivalences entre fonctions caractéristiques et potentiels thermodynamiques
Potentiel thermodynamique Fonction caractéristique
Variables intensives
Température T (Sans nom) 1T
Pression P (Sans nom) PT
Potentiel chimique μi (Sans nom) μiT
Variables extensives
Entropie S Énergie interne U
Volume V
Quantité de matière ni
Fonctions
Énergie interne
U
Variables naturelles : V, S, n
Entropie
S
Variables naturelles : V, U, n
Enthalpie
H=U+PV
Variables naturelles : P, S, n
(Sans nom)
Ψ1=SPTV
Variables naturelles : PT, U, n
Fonction de Helmholtz (Énergie libre)
F=UTS
Variables naturelles : V, T, n
Fonction de Massieu
J=S1TU=FT
Variables naturelles : V, 1T, n
Fonction de Gibbs (Enthalpie libre)
G=U+PVTS
Variables naturelles : P, T, n
Fonction de Planck
Y=SPTV1TU=GT
Variables naturelles : PT, 1T, n
Grand potentiel
ΦG=UTSi=1Nμini
Variables naturelles : V, T, μ
(Sans nom)
Ψ2=S1TUi=1N(μiT)ni=ΦGT
Variables naturelles : V, 1T, μT
Évolution spontanée
dU=δW+δQ dSδQT
Premier principe de la thermodynamique
dU+dUext=0
Deuxième principe de la thermodynamique
dS+dSext0
L'énergie interne
ne peut pas être calculée de façon absolue.
Troisième principe de la thermodynamique
L'entropie d'un cristal parfait à Modèle:Unité est nulle.
dUPdV+TdS+i=1Nμidni dS(PT)dV+1TdU+i=1N(μiT)dni
Notation générale Φ=Φ(x,y,n) Notation générale Ψ=Ψ(x,y,n)
Dans une transformation spontanée
à x et y constantes
dΦ=T[dS+dSext]0
Φ ne peut que décroître.
Dans une transformation spontanée
à x et y constantes
dΨ=dS+dSext0
Ψ ne peut que croître.
À l'équilibre dΦ=0
Φ atteint un minimum.
À l'équilibre dΨ=0
Ψ atteint un maximum.
Relation de Gibbs-Duhem
SdTVdP+i=1Nnidμi=0 Ud(1T)Vd(PT)+i=1Nnid(μiT)=0
Relations de Gibbs-Helmholtz
(J1T)V,n=U (FT)V,n=S
(Y1T)P,n=H (GT)PT,n=Ψ1
Capacités thermiques
Capacité thermique isochore CV
à volume constant δQV=CVdT=dU=TdS
CV=(UT)V,n=T(2FT2)V,n TCV=(S1T)V,n=1T(2J1T2)V,n
Capacité thermique isobare CP
à pression constante δQP=CPdT=dH=TdS
CP=(HT)P,n=T(2GT2)P,n TCP=(S1T)P,n=1T(2Y1T2)P,n

Notations

Voir aussi

Références

  1. F. Massieu, Comptes rendus hebdomadaires des séances de l'Académie des sciences, vol. 59, 1869, Modèle:P. 858 et 1057.
  2. 2,0 et 2,1 Green Book (IUPAC), Quantities, Units and Symbols in Physical Chemistry, page 56, édition 2007.
  3. Réseau Numéliphy, Relations de Gibbs-Duhem.

Liens externes

Articles connexes

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