Numération en base non entière

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Une numération en base non entière ou représentation non entière d'un nombre utilise, comme base de la notation positionnelle, un nombre qui n'est pas un entier. Si la base est notée β>1, l'écriture

x=dnd2d1d0,d1d2dm

dénote, comme dans les autres notations positionnelles, le nombre

x=βndn++β2d2+βd1+d0+β1d1+β2d2++βmdm+.

Les nombres di sont des entiers positifs ou nuls plus petits que β. L'expression est aussi connue sous le terme β-développement (en anglais β-expansion). Tout nombre réel possède au moins un, et éventuellement une infinité de β-développements. La notion a été introduite par le mathématicien hongrois Alfréd Rényi en 1957[1] et étudiée en détail ensuite par William Parry en 1960[2]. Depuis, de nombreux développements ultérieurs ont été apportés, dans le cadre de la théorie des nombres et de l’informatique théorique. Il y a des applications en théorie des codes[3] et dans la modélisation de quasi-cristaux[4]Modèle:,[5].

Construction

Les β-développements généralisent le développement décimal. Les développements décimaux sont uniques quand ils sont finis, les développements infinis ne le sont pas puisque par exemple le développement décimal de l'unité est 1,000=0,999. Les β-développements, même finis, ne sont pas nécessairement uniques. Ainsi, si β=φ, est le nombre d'or, on a 1+φ=φ2, donc 100=011. Un choix canonique pour le β-développement d'un nombre réel est d'appliquer l'algorithme glouton suivant, dû pour l'essentiel à Rényi[1], et formulé comme suit par exemple par Christiane Frougny[6] :

Soit x un nombre réel positif ou nul. Soit k l'entier tel que βkx<βk+1. On pose[7] :

dk=x/βk et rk={x/βk},

et pour k>j> :

dj=rj+1β et rj={rj+1β}.

En d'autres termes, ce β-développement canonique de x est construit en prenant pour dk le plus grand entier tel que βkdkx, puis en prenant le plus grand entier dk1 tel que βkdk+βk1dk1x et ainsi de suite. La suite des dj est notée dβ(x). Ce choix produit la plus grande séquence en ordre lexicographique représentant x. On a

x=nkdnβn

et si 0<x1

x=n0dnβn.

Dans une base entière, on obtient la représentation usuelle du nombre ; la construction ci-dessus étend l'algorithme à des valeurs non entières de la base β.

Systèmes de numération généraux

Une généralisation de la notion de β-développement est la suivante[8] : un système de numération (positionnel) est donné par une suite croissante U=(Un)n0 d'entiers positifs, avec U0=1 et tel que CU:=sup(Un+1/Un<+. On associe à la suite U les chiffres AU={0,1,CU}. La représentation gloutonne d'un entier positif n est la séquence

repU(n)=w1w0

composée de chiffres dans AU vérifiant

n=i=01wiUi

avec les conditions :

w10 et i=0j1wiUi<Uj pour j=1,,.

C'est bien entendu la dernière des conditions qui détermine le caractère glouton de la représentation. On note

repU()={repU(n)n}

l'ensemble des mots représentant les entiers naturels.


Exemples

Base [[Racine carrée de deux|Modèle:Math]]

La base 2 est très proche de la base 2 ; la méthode pour convertir un nombre écrit en binaire en base 2 est d'insérer un chiffre nul entre deux chiffres binaires ; par exemple

191110 = 111011101112 = 1010100010101000101012

et

511810 = 10011111111102 = 10000010101010101010101002.

Ceci implique en particulier que tout entier peut être écrit en base 2 sans point décimal.

Cette base peut être utilisée pour illustrer la relation entre le côté d'un carré et de sa diagonale puisqu'un carré de côté 12 a une diagonale de longueur 102 et un carré de côté 102 a une diagonale de longueur 1002. Une autre utilisation est d'illustrer la proportion d'argent notée δAg, qui vaut 1+22,414213562 (Modèle:OEIS), puisqu'elle s'écrit simplement δAg=112 en base 2. Par ailleurs, l'aire d'un octogone régulier de côté 12 est 11002, l'aire d'un octogone régulier de côté 102 est 1100002, l'aire d'un octogone régulier de côté 1002 est 110000002, etc...

Base φ

Modèle:Article détaillé

La base d'or est le système de numération utilisant le nombre d'or, à savoir φ=1+52 comme base. Ce système de numération en base non entière est également désigné plus rarement comme « développement phinaire » (car le symbole pour le nombre d'or est la lettre grecque « phi »), mais aussi « système de numération de Bergman »[9]. Tout nombre réel positif possède une représentation standard en base φ où seuls les chiffres 0 et 1 sont utilisés, et où la suite « 11 » est évitée. Une représentation non standard en base φ avec ces deux chiffres (ou avec d'autres chiffres) peut toujours être réécrite en forme standard, en utilisant les propriétés algébriques du nombre φ — c'est-à-dire que φ + 1 = φModèle:2. Par exemple 11Modèle:Ind = 100Modèle:Ind. Malgré l'usage d'une base irrationnelle, tous les entiers naturels possèdent une représentation unique en développement fini dans la base φ. Les réels positifs qui possèdent une représentation finie dans la base φ sont les [[Anneau des entiers de Q(√5)|entiers de ℚ(Modèle:Sqrt)]] positifs.

Les autres nombres positifs possèdent des représentations standards infinies en base φ, les nombres rationnels positifs ayant des représentations périodiques. Ces représentations sont uniques, excepté celles des nombres qui ont un développement fini ainsi qu'un développement non fini (de la même manière qu'en base dix : 2,2 = 2,199999… ou 1 = 0,999…).

Cette base est présentée, entre autres, par George Bergman[10] en 1957 ; l'étude de la base d'or a produit des fruits en informatique, par exemple pour la conception de convertisseurs analogique-numérique et de processeurs tolérants au bruit[11].

Base e

La base e du logarithme naturel se comporte comme le logarithme décimal, et ln(1e) = 0, ln(10e) = 1, ln(100e) = 2 et ln(1000e) = 3.

La base e est le choix le plus économique comme base β>1 [12], quand l’économie d'une base est mesurée comme le produit de la base par la longueur de la chaîne nécessaire pour représenter un intervalle de valeurs.

Base π

La base π peut être utilisée pour illustrer simplement la relation entre le diamètre d'un cercle et sa circonférence, qui correspond à son périmètre; de la relation circonférence = diamètre × π, il résulte qu'un cercle de diamètre 1π a une circonférence 10π, un cercle de diamètre 10π a une circonférence 100π, etc. Similairement, comme aire = π × rayon2, un cercle de rayon 1π a une aire égale à 10π, un cercle de rayon 10π a une aire égale à 1000π etc[13].

Propriétés

Selon que β est un nombre de Pisot, un nombre de Parry ou un nombre de Bertrand, les propriétés des développements varient. Elles ont aussi fait l'objet d'étude dans le cadre des suites automatiques[8].

Unicité

Il n'existe aucun système de numération positionnel dans lequel tout nombre admettrait une expression unique. Par exemple, en base dix, le nombre 1 possède les deux représentations 1,000... et 0,999... L'ensemble des nombres qui ont deux représentations est dense dans l'ensemble des réels (Modèle:Harvsp) ; la classification des nombres réels qui possèdent un β-développement unique est plus compliquée que pour les bases entières (Modèle:Harvsp).

Système de Parry

Si le développement du nombre réel 1 est

dβ(1)=t1tm0ω, avec tm0,

on dit que le développement de 1 est fini. Dans ce cas, on pose dβ*(1)=(t1tm1(tm1))ω, sinon, on pose dβ*(1)=dβ(1). Quand dβ*(1) est ultimement périodique, le nombre β est appelé un nombre de Parry et le système est un système de Parry. Le nombre d'or φ est un nombre de Parry ; en effet, on a dβ(1)=11 et dβ*(1)=(10)ω. On doit à Parry la caractérisation suivante des β-développement pour les nombres de Parry[14] :

Modèle:Énoncé

Système de Pisot

Un nombre de Pisot-Vijayaraghavan (ou plus simplement nombre de Pisot) est un entier algébrique réel dont tous les conjugués (réels ou complexes) sont de module strictement inférieur à 1. Un système de Pisot est un système dont la base β est un nombre de Pisot.

Ces nombres jouent un rôle dans la classification des nombres dont les β-développements sont périodiques. Soit β > 1, et soit (β) la plus petite extension de corps des nombres rationnels contenant β. Alors tout nombre réel dans l'intervalle [0,1[ qui a un β-développement ultimement périodique β appartient à (β). Plus précisément[15], on a :

  • Si tout nombre dans (β)[0,1[ a un β-développement ultimement périodique, alors β est un nombre de Pisot ou un nombre de Salem;
  • Si β est un nombre de Pisot, alors (β)[0,1[ est l'ensemble des nombres qui ont un β-développement ultimement périodique. L'ensemble des mots représentant les entiers naturels est un langage régulier[8].

Un nombre de Pisot est aussi un nombre de Parry[16], de sorte qu'un système de Pisot est un système de Parry.

Système de Bertrand

Les systèmes de numération de Bertrand ont été introduits et étudiés par Anne Bertrand-Mathis[16]. Un système de numération général U est un système de Bertrand si, pour tout mot non vide w sur AU, on a

wrepU() si et seulement si w0repU().

Le système de numération usuel en base k est un système de Bertrand. De même, le système de numération de Fibonacci usuel ; en revanche, si on considère la suite F={1,3,4,7,} définie par F0=1,F1=3,Fn+2=Fn+1+Fn, elle n'est plus de Bertrand parce que le nombre 2 est la représentation gloutonne de l'entier 2, et la représentation 20(=2×3+0) du nombre 6 n'est pas une représentation gloutonne puisque repF(6)=102(=4+2×1).

La caractérisation suivante est due à Anne Bertrand :

Modèle:Théorème Un nombre de Bertrand est un nombre réel β>1 vérifiant ces conditions.

Exemple : Le système de numération donné par la récurrence Un+1=3Un+1 et U0=1 est tel que

0*repU()={0,1,2}*{0,1,2}*30*

Les systèmes de Parry sont un sous-ensemble strict des systèmes de Bertrand; l'exemple ci-dessus est n'est pas un système de Parry[8].

Articles connexes

Notes et références

Modèle:Références

Bibliographie

Lien externe

Modèle:Portail