Approximant de Padé

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Le concept de l'article doit son nom au mathématicien français Henri Padé (1863-1953).

En mathématiques, et plus précisément en analyse complexe, l'approximant de Padé est une méthode d'approximation d'une fonction analytique par une fonction rationnelle. En ce sens, elle est un peu analogue à un développement limité qui approche la fonction selon les mêmes critères à l'aide d'un polynôme.

De même que les développements limités forment une suite appelée série entière, convergeant vers la fonction initiale, les approximants de Padé apparaissent comme les réduites de diverses fractions continues (généralisées) dont la limite est aussi la fonction initiale. En ce sens, ces approximants font partie de la vaste théorie des fractions continues.

En analyse complexe, les approximants offrent un développement dont le domaine de convergence est parfois plus large que celui d'une série entière. Ils permettent ainsi de prolonger des fonctions analytiques et d'étudier certains aspects de la question des séries divergentes. En théorie analytique des nombres, l'approximant permet de mettre en évidence la nature d'un nombre ou d'une fonction arithmétique comme celle de la fonction zêta de Riemann. Dans le domaine du calcul numérique, l'approximant joue un rôle, par exemple, pour évaluer le comportement d'une solution d'un système dynamique à l'aide de la théorie des perturbations.

Le développement d'une fonction en fraction continue est utilisé pour la première fois par Leonhard Euler, pour démontrer l'irrationalité du [[e (nombre)|nombre Modèle:Math]]. Une stratégie plus élaborée permet à Jean-Henri Lambert de montrer celle de [[pi|Modèle:Math]]. Cette notion est développée plus systématiquement par Henri Padé et érigée en théorie à part entière.

Préambule

Présentation du concept

Charles Hermite utilise ce qui est maintenant appelé un approximant de Padé pour démontrer la transcendance de Modèle:Math en 1873.

Il est utile d'approcher une fonction donnée par une suite de fonctions aisément calculables. Cette démarche est à l'origine de la théorie des séries entières consistant à approcher de plus en plus précisément une fonction analytique à l'aide de la suite de ses développements limités. Les développements limités, puis les séries entières offrent de nombreuses possibilités comme le calcul d'une limite ou la résolution d'une équation différentielle.

La démarche de Padé est, à beaucoup d'égards, analogue à celle des séries entières. L'objectif est d'approcher « le mieux possible » une fonction analytique à l'aide d'une fraction rationnelle. « Le mieux possible » signifie ici que pour un couple (p, q) d'entiers positifs donné, la fraction rationnelle h/k est telle que les polynômes h et k sont de degrés majorés respectivement par p et q et son développement limité « colle » le mieux possible à celui de la fonction f. Si les deux développements limités coïncident jusqu'à l'ordre p + q, une telle fraction est un approximant de Padé de f.

De même qu'il est intéressant de considérer la suite des développements limités, il est judicieux d'étudier les suites d'approximants, de plus en plus précises et convergeant vers la fonction f. Ces suites peuvent toujours s'exprimer sous forme de fractions continues (généralisées). Dans le cas des polynômes, les développements limités sont indexés par un entier positif, ce qui engendre une suite naturelle : la série entière. Les approximants de Padé sont indexés par un couple d'entiers positifs, engendrant une infinité plus complexe de suites. D'autres causes rendent l'approche plus complexe. La somme, le produit, la dérivée ou la primitive d'approximant de Padé n'ont aucune raison d'être encore un approximant de Padé.

Ces suites offrent néanmoins quelques avantages que n'ont pas les séries entières. La nature arithmétique d'un nombre comme [[Pi|Modèle:Math]] ou [[E (nombre)|Modèle:Math]] est plus simplement mise en valeur. Les preuves de l'irrationalité de Modèle:Math et de Modèle:Math, comme celles de leur transcendance, se fondent naturellement sur cet outil[1]. Les suites d'approximants de Padé possèdent parfois un autre avantage. Certaines fonctions, comme la fonction zêta de Riemann, sont initialement définies par des séries dont le domaine de convergence est limité par la présence des pôles, c'est-à-dire des espèces de montagnes qui grimpent jusqu'à l'infini. La série entière ne permet pas de voir plus loin qu'un pôle. Les approximants de Padé possèdent le mérite de permettre de voir l'autre versant des pôles. Le caractère parfois plus vaste du domaine de convergence d'une suite d'approximants de Padé par rapport à une expression sous forme de série entière est donc un atout non négligeable. La physique ou l'astronomie offrent des exemples d'application. L'étude d'un système dynamique un peu complexe peut nécessiter le recours à la théorie des perturbations, les solutions sont souvent des fonctions analytiques exprimées sous forme de séries entières. Or la présence de pôles impose parfois un rayon de convergence trop petit pour permettre un calcul effectif intéressant. Ce phénomène se traduit par le besoin de calculer la limite d'une série divergente. Trouver une bonne suite d'approximants de Padé permet d'élargir le domaine de convergence, le comportement de la fonction analytique est ainsi connu sur une plus vaste étendue et le calcul effectif de la limite est possible.

Approche par la fraction continue

Modèle:Article détaillé

Une fraction continue permet d'approcher un nombre réel avec une précision aussi bonne que souhaitée. Une démarche analogue peut être appliquée aux fonctions analytiques. Une fonction analytique f se développe en série entière ; si tModèle:Ind est un point de domaine de définition de f et t un scalaire de module strictement inférieur à r, le rayon de convergence de f au point tModèle:Ind, il est possible de développer f de la manière suivante : f(tModèle:Ind + t) = αModèle:Ind + αModèle:IndtModèle:Exp + …. Ici, αModèle:Ind ainsi que les coefficients suivants, sont choisis non nuls. Pour cette raison, nModèle:Ind n'est pas nécessairement égal à 1. Il existe une fonction analytique fModèle:Ind définie en 0 et telle que

f(t0+t)=a0+tn1f1(t)aveca0=α0.

Un traitement analogue sur la fonction fModèle:Ind, puis fModèle:Ind, montre qu'il est encore possible d'écrire la fonction f de la manière suivante :

f(t0+t)=a0+tn1a1+tn2f2(t)=a0+tn1a1+tn2a2+tn3f3(t)=

Cet algorithme, bien que naïf et impliquant des calculs laborieux, permet d'approcher la fonction analytique f par une fraction rationnelle. Si f est elle-même une fraction rationnelle, il existe une valeur p tel que fModèle:Ind soit une fonction constante et le processus s'arrête ; dans le cas contraire, le processus continue indéfiniment. Cette configuration est analogue à celle des nombres rationnels pour la fraction continue.

On utilise dans cet article la notation de Pringsheim :

f(t0+t)=a0+tn1a1+tn2a2+tn3a3+

Si le processus est arrêté à la pModèle:E étape, on obtient une fraction rationnelle qui « approche » la fonction initiale f et qui est un exemple d'approximant de Padé[2].

Pour une raison de simplicité, dans la suite de l'article, la valeur tModèle:Ind est choisie nulle.

Fonction tangente

Pour illustrer cette démarche, considérons la fonction fonction tangente, l'un des premiers exemples historiques de fonction analytique dont le développement en fraction continue est calculé, par Lambert[1] :

tan(t)=t1t23t25t27=t1t23t25t27+

Appliquons l'algorithme naïf du paragraphe précédent au point t0 = 0. La valeur a0 est égale à 0 et n1 à 1. On obtient une première fraction rationnelle h0(t)/k0(t) approchant la fonction tangente :

tan(t)=0+tf1(t),f1(t)=ttan(t)eth0(t)=0,k0(t)=1.

Prolongeons le calcul :

f1(t)=ttan(t)=tt+t33+O(t5)=1t23+O(t2)=1t2f2(t).

On obtient une nouvelle expression plus précise de la fonction tangente :

tan(t)=0+t1t2f2(t),f2(t)=t2tanttantteth1(t)=t,k1(t)=1.

Par une autre méthode, Lambert découvre[3] une formule de récurrence permettant de calculer plus rapidement hn(t)/kn(t) :

n2hn(t)=(2n1)hn1(t)t2hn2(t)etkn(t)=(2n1)kn1t2kn2(t).

Modèle:Démonstration/début Lambert transpose de la manière suivante (aux notations près) l'algorithme d'Euclide usuellement appliqué au calcul des fractions continues de réels : il « divise » d'abord RModèle:Ind := cos(t) par Modèle:Nobr ce qui lui donne un « quotient » Modèle:Nobr et un « reste » –RModèle:Ind :

cost=sinttR1 donc tant=t1tR1R0.

Il prévoit qu'indéfiniment, RModèle:Ind divisé par RModèle:Ind donne un quotient QModèle:Ind = (2n – 1)/t (et un reste –RModèle:Ind) :

Rn2=2n1tRn1Rn donc tRn1Rn2=t22n1tRnRn1.

Cela fournit le développement annoncé, sous réserve de prouver que la valuation des RModèle:Ind, définis par

R1=cos,R0=sinetn>0Rn=2n1tRn1Rn2,

croît avec n. Il lui suffit pour cela d'expliciter la valeur des restes qu'il observe pour les premières valeurs de n et qu'il prévoit pour tout n :

nRn=tn+12nk=0(1)kt2k(n+k)!k!(2n+2k+1)!

puis de vérifier cette égalité par une récurrence d'ordre 2 : si elle est vraie aux ordres n – 2 et n – 1, on trouve bien, en remplaçant RModèle:Ind et RModèle:Ind par leurs expressions et en regroupant les termes :

Rn=2n1tRn1Rn2=tn12nk=0k(1)k1t2k(n+k1)!k!(2n+2k1)!=tn+12nk=1(1)k1t2(k1)(n+k1)!(k1)!(2n+2(k1)+1)!.

La relation de récurrence sur les numérateurs hModèle:Ind et les dénominateurs kModèle:Ind des fractions partielles est alors une conséquence immédiate de l'algorithme d'Euclide étendu. Modèle:Démonstration/fin

Il démontre de plus la [[#Illustration par l'exemple de la fonction tangente|convergence des quotients hModèle:Ind/kModèle:Ind vers la fonction tangente]][4]. Il remarque même que Modèle:Citation, ce qui est la clé de sa démonstration de l'irrationalité de Modèle:Math[1].

Modèle:Démonstration/début Par parité des kModèle:Ind et imparité de tan et des hModèle:Ind, il suffit de prouver la convergence sur l'intervalle [0, 1].

La méthode utilisée ici consiste à étudier la suite des fonctions ψn(t) définies sur [0, 1] par

ψn(t)=kn(t)sinthn(t)cost,

autrement dit, par

ψ0(t)=sint,ψ1(t)=sinttcostetn2ψn(t)=(2n1)ψn1(t)t2ψn2(t).

Pour montrer que la suite de ces fonctions tend uniformément vers 0, on déduit d'abord facilement de la définition (par une récurrence d'ordre 2) que pour tout entier n > 0, la dérivée de ψn(t) est égale à tψModèle:Ind(t) puis, que chaque fonction ψModèle:Ind est nulle en 0 et strictement croissante (donc positive). On en déduit alors que la suite des ψn tend uniformément vers zéro et même (par récurrence, en utilisant que ψn est la primitive de tψModèle:Ind(t) qui s'annule en 0) que

t[0,1]ψn(t)t2n+12nn!.

Pour en déduire que ψn/(kModèle:Indcos) converge aussi vers 0, on a besoin de minorer kModèle:Ind. Une récurrence montre que pour tout entier n > 0,

t[0,1]2n1(n1)!kn(t)(2n)!2nn!.

On dispose donc de l'encadrement suivant :

t[0,1]0tan(t)hn(t)kn(t)=ψn(t)cos(t)kn(t)t2n+122n1n!(n1)!cos(1),

ce qui montre non seulement que la suite (hModèle:Ind/kModèle:Ind) converge uniformément sur [0, 1] vers la fonction tangente mais aussi que, pour n fixé, hModèle:Ind/kModèle:Ind et tangente ont même développement limité en 0 à l'ordre 2n. Modèle:Démonstration/fin

Dans cet exemple, la suite des approximants de Padé « avale » les pôles et fournit une approximation sur tous les nombres réels, à l'exception des pôles.

Une analyse plus précise montre que si t n'est pas de la forme Modèle:Math, où k est un entier, hModèle:Ind(t)/kModèle:Ind(t) tend vers tan(t).

Les approximations successives permettent d'« avaler » les pôles de la fonction tangente. Sur les réels positifs, la deuxième approximation, en violet sur la figure, simule le premier pôle avec une asymptote à Modèle:Sqrt au lieu de Modèle:Math. La quatrième approximation, en bleu, ne diffère pas de manière visible de la fonction tangente, en rouge sur le graphique, sur l'intervalle Modèle:Math. Elle possède deux pôles sur les réels positifs. La huitième approximation, en vert, « colle à la fonction tangente » sur l'intervalle Modèle:Math et possède 4 pôles positifs dont 3 sont visibles sur la figure. De manière plus générale, si n est un entier strictement positif et ε un réel strictement positif, la suite des approximants converge uniformément sur la réunion des intervalles Modèle:Math et Modèle:Mathj varie de 1 à n.

Modèle:Refnec d'autant plus fort que ce résultat reste valable si les fonctions sont considérées comme complexes de la variable complexe. À la différence des séries entières, les approximants de Padé fournissent des informations sur la fonction tangente en dehors du disque de rayon Modèle:Math. Modèle:Référence insuffisante l'étude de la fonction zêta de Riemann[5].

Fonction exponentielle

Modèle:Article détaillé Il est possible d'appliquer un algorithme un peu de même manière avec la fonction exponentielle. On peut par exemple, établir une expression en fraction continue :

exp(x)=1+x+12x2113x+136x21115x+1100x21135x+

L'algorithme utilisé est ici un peu différent. Les numérateurs ne sont plus des constantes mais des fonctions affines. En revanche une propriété reste commune : le développement limité des fractions hp/kp à l'ordre égal à la somme des degrés du numérateur et du dénominateur est identique à celui de la fonction exponentielle.

Il existe de multiples expressions différentes de la fonction exponentielle sous forme de fraction continue, ce qui amène une série de questions d'ordre général sur les approximations par des fractions rationnelles d'une fonction analytique. Quatre sont particulièrement importantes aux yeux de Padé : pour un couple d'entiers strictement positifs (p, q), existe-t-il une fraction rationnelle h/k telle que h soit un polynôme de degré p, k un polynôme de degré q et telle que la fraction ait le même développement limité à l'ordre p + q que la fonction exponentielle ? Existe-t-il des relations de récurrence permettant de passer d'un approximant à un autre à l'aide de formules analogues à celles présentées dans cet exemple ? Ces formules de récurrence permettent-elles d'établir des fractions continues ? Enfin, ces fractions continues convergent-elles vers la fonction cible ?

Ces réponses, toutes positives pour la fonction exponentielle, sont l'objet de l'article détaillé. Cet exemple est choisi par Padé[6] pour introduire sa théorie.

Fragments d'histoire

Origine

Lagrange énonce une propriété sur des réduites de fractions continues correspondant à notre définition moderne d'approximant de Padé.

Padé place[7] l'origine de ses approximants aux travaux d'Euler (1707-1783) avec sa démonstration de l'irrationalité de Modèle:Math. Il est vrai qu'une formule d'Euler permet d'exprimer la fonction exponentielle sous forme de fraction continue, mais d'une forme très particulière : chaque réduite est non seulement une fraction rationnelle mais un polynôme (la somme partielle de la [[Exponentielle complexe|série entière Modèle:Math]]). Lambert (1707-1777) franchit un pas fondamental en développant des fonctions, ce qui lui permet de démontrer que si un nombre réel non nul t est rationnel, alors ni tan(t), ni exp(t) ne l'est[1], démontrant par là l'irrationalité de Modèle:Math. Il développe en fraction continue non seulement tan(t) mais tanh(t), arctan(t), log(1 + t)Modèle:Etc. L'application de son approche reste néanmoins limitée à la recherche d'expressions sous forme de fraction continue généralisée de nombres spécifiques ; Lambert ne cherche pas a priori à mieux connaître le comportement d'une fonction.

Joseph-Louis Lagrange (1736-1813) généralise l'emploi des fractions continues à l'analyse. Son optique est plus proche de celle de l'article. La fraction continue d'une fonction est utilisée comme un outil de résolution d'équations différentielles ; il est nécessaire de réduire la fraction continue qui s'exprime alors comme une fonction rationnelle et Lagrange remarque que dans l'un de ses exemples, les développements limités de la solution et de la fraction rationnelle coïncident Modèle:Citation, ce qui correspond à une définition moderne des approximants de Padé. Carl Friedrich Gauss (1777-1855) utilise les résultats de Lagrange et généralise l'usage des fractions continues au plan complexe ; les fractions continues de Gauss permettent de retrouver des développements en fraction continue de nombreux quotients de fonctions hypergéométriques. L'approche reste néanmoins empirique. Rien ne permet de déterminer de manière exhaustive toutes les fractions continues associées à une fonction analytique donnée ou même encore d'ébaucher une classification des fractions continues.

Formalisation

Riemann met en évidence un des intérêts des approximants de Padé : ils permettent parfois de prolonger des fonctions analytiques complexes.

Une triple motivation modifie à la fois l'approche et les questions relatives à ces fractions continues un peu spéciales. La première est la conséquence des travaux de Bernhard Riemann (1826-1866). Elles mettent en évidence l'importance de l'analyse complexe, dans cet univers, les fonctions sont souvent définies par des séries entières. Or ces séries ne sont pas convergentes à l'extérieur d'un disque donné, la question du prolongement est parfois cruciale. Les approximants de Padé n'ont pas toujours cette limitation, comme le montre l'exemple de la tangente. Leur étude est naturellement Modèle:Citation. Riemann étudie la convergence des fractions continues de Gauss. Modèle:Refnec démonstration du théorème d'Apéry, prouvé en 1977 et énonçant que l'image de 3 par la fonction zêta de Riemann est un nombre irrationnel[8].

Charles Hermite, le directeur de thèse de Padé[9], étudie la question de l'interpolation d'une fonction par une fraction rationnelle ainsi que les propriétés de fractions continues associées à l'exponentielle, ce qui lui permet de montrer la transcendance de Modèle:Math[10], le premier nombre démontré transcendant qui n'a pas été spécialement conçu pour une démonstration (comme ceux de Liouville). Sur la base de ces idées, Ferdinand von Lindemann démontre la transcendance de Modèle:Math en 1882 clôturant ainsi la question millénaire de la quadrature du cercle. Ce problème, que Charles Hermite croyait hors de portée et dont il disait : Modèle:Citation était résoluble avec les techniques qu'il avait développées. Enfin, l'étude de systèmes dynamiques complexes comme ceux étudiés par Henri Poincaré pour démontrer la statibilité du système solaire impose l'usage de fractions continues de type Padé[11].

Il est donc naturel que la question des fractions continues, construites à l'aide de fonctions rationnelles, soient à l'ordre du jour à la fin du Modèle:XIXe siècle. Cependant, en 1890, Poincaré décrit la théorie des fractions continues algébriques comme une Modèle:Citation dont Modèle:Citation. Henri Padé étudie la question sous un jour nouveau. Il cherche systématiquement la fraction rationnelle dont le numérateur et le dénominateur ont des degrés respectifs ne dépassant pas les valeurs d'un couple (p, q) et qui approxime localement le mieux une fonction analytique donnée. Son travail de thèse[12], soutenu à l'université de la Sorbonne en 1892, consiste à étudier la table de ces approximants et à en établir une théorie très générale. Il détermine les lois qui permettent de passer de cette table aux fractions continues, dont il parvient à classifier les représentants importants. En 1898, il applique sa théorie à la fonction exponentielle[6], indique comment construire toutes les fractions continues régulières de cette fonction. Avant son mémoire, seuls cinq exemples étaient connus ; son travail montre qu'ils ne correspondent qu'à des cas particuliers d'une triple infinité de fractions.

Une question reste encore largement ouverte : la convergence des différentes fractions continues que l'on peut construire. En 1894, Thomas-Joannes Stieltjes est d'un apport considérable sur cette question[13]. Il établit exactement, pour une vaste famille de fractions continues, le domaine de convergence[14] ; ce sont celles qui s'avèrent nécessaires pour démontrer la stabilité du système solaire étudiée par Poincaré. Cette question de la convergence est jugée suffisamment importante pour faire l'objet du Grand prix de l'Académie des sciences de Paris de 1906[9]. Son jury est composé par des grands noms de l'époque comme Poincaré ou Picard. Il est remporté par Padé qui dit présenter[15] Modèle:Citation, tout en Modèle:Citation

Définitions et premières propriétés

Définitions

Dans toute la suite de l'article, f(t) désigne une fonction analytique en 0 et qui ne s'annule pas en 0. Le fait que cette fonction ne s'annule pas en 0 ne limite en rien la généralité des propos. Si g(t) est une fonction analytique en 0, il existe nécessairement une valeur n telle que g(t) soit égal à tnf(t) où f est une fonction qui satisfait les hypothèses précédentes. Les lettres p et q désignent deux entiers positifs.

Pour Padé, la première question associée à sa théorie est : Existe-t-il une fraction rationnelle h/k telle que h soit un polynôme de degré p, k un polynôme de degré q et telle que la fraction ait le même développement limité à l'ordre p + q que f ? Elle amène la définition suivante[16] :

  • Un approximant de Padé d'indice (p, q) de la fonction f désigne une fraction rationnelle h/k telle que les degrés des polynômes h et k soient inférieurs ou égaux respectivement à p et q et que h/k approxime f en 0 au moins à l'ordre p + q.

Si cette définition est souvent reprise, elle n'est pas totalement satisfaisante. Pour s'en rendre compte le plus simple est de considérer le cas où f(t) est égal à 1 + t2. Recherchons l'approximation d'indice (1,1). Si a + bt désigne le dénominateur, son produit avec la fonction f(t) ne doit pas comporter de terme du deuxième degré, ce qui impose à a d'être nul. Le numérateur doit alors être égal, lui aussi, à bt. Cependant, la fonction constante bt/bt = 1 n'approxime 1 + tModèle:2 qu'à l'ordre 1. Cet exemple montre qu'il n'existe pas d'approximant de Padé d'indice (1,1). Pour cette raison, une deuxième définition s'avère nécessaire. On n'espère plus une fraction qui approche la fonction f à l'ordre p + q et l'on se contente de choisir, parmi les fractions dont les degrés des numérateur et dénominateur sont majorés respectivement par p et q, une fraction qui approxime f le mieux possible :

  • Les termes de fraction réduite ou réduite d'indice (p,q) de la fonction f désignent une fraction rationnelle h/k telle que les degrés des polynômes h et k soient inférieurs ou égaux respectivement à p et q et telle que pour tous polynômes u et v de degrés inférieurs ou égaux respectivement à p et q, le développement limité de u/v coïncide avec celui de f à un ordre moins grand que ne le fait celui de h/k. La réduite d'indice (p,q) est parfois notée f[p,q].

Premières propriétés

La définition de réduite, moins restrictive que celle d'approximant de Padé pallie l'absence de réponse positive à la première question : par définition même, son existence est garantie. Un résultat essentiel à la théorie affirme non seulement l'existence d'une réduite h/k mais aussi son unicité, sous une certaine forme : on peut toujours rendre h et k premiers entre eux, puis rendre égal à 1 le terme constant de k (qui est non nul puisque 0 n'est pas un pôle)[17] : Modèle:Théorème

Modèle:Démonstration/début

  • Il existe des polynômes h et k premiers entre eux tels que deg(h) ≤ p, deg(k) ≤ q et h/k approxime f à l'ordre max(p + deg(k), q + deg(h)) :
    Considérons l'application qui à tout polynôme g(t) de degré inférieur ou égal à q associe la partie de degrés p + 1 à p + q du développement en série entière de g(t)f(t). C'est une application linéaire d'un espace vectoriel de dimension q + 1 dans un espace de dimension q. Son noyau est donc non réduit au vecteur nul. Soit tωk(t) un polynôme non nul de cet espace, avec ω le plus grand possible et k(t) de terme constant égal à 1.
    Soit h1(t) le développement à l'ordre p de tωk(t)f(t). Le développement à l'ordre p + q de tωk(t)f(t) – h1(t) est nul par construction, ce qui montre que h1(t) est un multiple de tω. Soit h(t) le polynôme h1(t) divisé par tω. La fraction rationnelle h(t)/k(t) possède un développement limité à l'ordre p + q – ω égal à celui de f(t). De plus, h(t) et k(t) sont premiers entre eux car pour tout facteur commun d(t), de degré ω', le polynôme tω+ω'(k(t)/d(t)) appartient au noyau ci-dessus donc ω' = 0.
  • Pour un tel (h, k), toute réduite est égale à h/k :
    Soit u/v une réduite d'indice (p, q). Elle approxime f au moins aussi bien que ne le fait h/k. Par conséquent, le numérateur de la fraction rationnelle suivante admet 0 comme racine multiple d'ordre au moins p + q – ω : h/ku/v = (hv – ku)/kv. Ce numérateur étant de degré inférieur ou égal à p + q – ω, il est donc nul, ce qui prouve que u/v = h/k.

Modèle:Démonstration/fin

Les analogies avec la fraction continue (comme le premier des trois corollaires de la section suivante) sont multiples, ce qui justifie un vocabulaire commun.

Table de Padé

Modèle:Voir Une méthode de présentation des approximants est la table de Padé. Elle consiste en un tableau à double entrée dont la case de colonne p et de ligne q contient la réduite d'indice (p, q). L'article Approximant de Padé de la fonction exponentielle propose celle de l'exponentielle, où chaque case contient une fraction rationnelle distincte. Tel n'est trivialement pas le cas pour une fonction f paire, puisque sa table n'est qu'un dédoublement des lignes et colonnes de celle de la fonction g telle que f(t) = g(tModèle:2). Voici par exemple[18] la table de la fonction arctan(t)/t :

Table de Padé pour arctan(t)/t
pqp
0
1
2
3
4
5
0
1
1
113t2
113t2
113t2+15t4
113t2+15t4
1
1
1
113t2
113t2
113t2+15t4
113t2+15t4
2
11+13t2
11+13t2
1+415t21+915t2
1+415t21+915t2
1+821t2+4105t41+57t2
1+821t2+4105t41+57t2
3
11+13t2
11+13t2
1+415t21+915t2
1+415t21+915t2
1+821t2+4105t41+57t2
1+821t2+4105t41+57t2
4
11+13t2445t4
11+13t2445t4
1+1121t21+67t2+335t4
1+1121t21+67t2+335t4
1+79t2+64945t41+109t2+521t4
1+79t2+64945t41+109t2+521t4
5
11+13t2445t4
11+13t2445t4
1+1121t21+67t2+335t4
1+1121t21+67t2+335t4
1+79t2+64945t41+109t2+521t4
1+79t2+64945t41+109t2+521t4

Ici, les mêmes fractions sont affichées à l'aide d'une couleur commune. On remarque qu'elles couvrent des surfaces carrées. On peut préciser ces carrés :

Modèle:Théorème

En effet, d'après le théorème de la section précédente, les indices (m, n) pour lesquels h/k est une réduite sont ceux pour lesquels pm, qn et max(m + p, n + q) ≤ p + q + ω.

On en déduit le cas particulier ω infini, ainsi que — lorsque l'ensemble de couples ci-dessus est non vide, c'est-à-dire ω ≥ 0 — le lien entre les notions d'approximant de Padé et de réduite :

Modèle:Théorème

Fraction continue

Généralités

L'approximant de Padé est particulièrement utile au sein d'une suite de réduites de plus en plus avancées. Une réduite est dite plus avancée qu'une autre lorsque la somme des deux coordonnées du centre du carré (constitué de cases de réduites identiques) où se situe la première est strictement plus élevée que celle de l'autre, autrement dit — d'après le théorème précédent — lorsqu'elle constitue (au voisinage de 0) une meilleure approximation[19]. Ces suites représentent un peu l'équivalent d'une série entière. Une série entière peut être vue comme une suite de polynômes qui approxime localement de mieux en mieux la fonction cible, à l'image des suites d'approximants décrites dans ce paragraphe. Une suite de cette nature est toujours la suite des réduites d'une fraction continue généralisée :

Modèle:Énoncé

Il suffit en effet de définir (αn) et (βn) par[20] la relation de récurrence :

αn+2=hn+1kn+2hn+2kn+1hnkn+1hn+1kn,βn+2=hnkn+2hn+2knhnkn+1hn+1kn

et l'initialisation (en supposant, dans le cas Modèle:Math, que kModèle:Ind = 1) :

(I)β0=h0,α1=h1h0k1,β1=k1,
(II)α0=h0,β0=k0,α1=(h0k1h1k0)/h0,β1=h1/h0.

Les (αn) et (βn) ainsi construites sont en général seulement des suites de fractions rationnelles. On peut bien sûr, dans ce cas, les convertir (sans modifier les réduites) en des suites de polynômes, mais l'inconvénient est que les nouveaux numérateurs AModèle:Ind et dénominateurs BModèle:Ind des réduites ne coïncideront alors plus avec les anciens, hModèle:Ind et kModèle:Ind : on aura seulement égalité des fractions rationnelles, AModèle:Ind/BModèle:Ind = hModèle:Ind/kModèle:Ind, les nouveaux numérateur et dénominateur pouvant être multipliés par un polynôme parasite. Il complexifie inutilement l'expression de la réduite et, pour un calcul effectif, ajoute une instabilité par l'adjonction de singularités factices.

Fraction continue simple

Pour éviter l'apparition par conversion des polynômes parasites décrits au paragraphe précédent, il faut et il suffit que les fractions rationnelles αModèle:Ind et βModèle:Ind, définies comme ci-dessus à partir des hModèle:Ind et kModèle:Ind, soient déjà des polynômes. Padé limite l'étude des suites (hModèle:Ind/kModèle:Ind) pour lesquelles cette condition est vérifiée, en ajoutant des contraintes :

  • Une fraction continue (de type Modèle:Math ou Modèle:Math ci-dessus) est dite simple lorsque ses numérateurs partiels αn sont des monômes non constants, sauf αModèle:Ind (pour le type Modèle:Math) qui doit être une constante non nulle et lorsque de plus, chacun de ses dénominateurs partiels βn est un polynôme de terme constant non nul[21].

Cette condition est un peu équivalente à celle qui sépare les fractions continues de nombres réels, dont les numérateurs partiels sont toujours égaux à 1, d'avec les fractions continues généralisées qui ont des numérateurs partiels quelconques. À l'image de la situation des fractions continues de nombres réels, le numérateur et le dénominateur de chaque réduite sont alors premiers entre eux, d'après la caractérisation suivante :

Modèle:Énoncé

Cette propriété générale indique comment choisir une suite d'approximants de Padé f[pn, qn] pour que la fraction continue associée soit simple. En effet, la condition 1 est toujours vérifiée, la 4 l'est si le premier approximant est au bord du tableau — c'est-à-dire pModèle:Ind ou qModèle:Ind nul, selon le type — et, sous réserve que la condition 2 soit assurée par d'autres moyens, la propriété suivante garantit la condition 3 :

Modèle:Énoncé

Il reste encore à trouver un moyen pratique pour assurer la condition 2. La connaissance de la structure de la table de Padé permet de répondre à ce besoin. Elle est composée de carrés ne contenant que des réduites égales. Soient p, q et ω trois entiers positifs tels que les couples (p, q), (p+ω, q), (p, q+ω) et Modèle:Nobr forment les sommets du carré contenant toutes les occurrences de l'approximant de Padé f[p, q], comme indiqué à la fin du § « Table de Padé ». La propriété suivante permet de trouver les candidats pour la construction d'une fraction continue simple :

Modèle:Énoncé

La figure de droite illustre cette situation. Toutes les cases du carré bleu contiennent la même réduite. Si l'une de ses cases est un élément de la suite des approximants de Padé et si la suivante est l'une des deux cases rouges, le numérateur partiel de la fraction continue est un monôme non nul et le dénominateur un polynôme de terme constant non nul. Dans le cas où le carré se réduit à une unique case, il est aussi possible de choisir la case diagonale en bas à droite.

Modèle:Démonstration/début

  • Pour une fraction continue simple :
    1. hModèle:Ind(0) et les kModèle:Ind(0) sont non nuls : immédiat pour hModèle:Ind, kModèle:Ind et kModèle:Ind (pour les deux types) et s'en déduit pour les autres kModèle:Ind, d'après leur définition par récurrence (kModèle:Ind = βModèle:IndkModèle:Ind + αModèle:IndkModèle:Ind) et le fait qu'en 0, les αn sont nuls (pour n > 0) mais pas les βn (on peut montrer de même que tous les hModèle:Ind(0) sont non nuls) ;
    2. les hModèle:IndkModèle:IndhModèle:IndkModèle:Ind sont des monômes non nuls : d'après leur expression comme produits de monômes –αi ;
    3. la suite de leurs degrés est strictement croissante : puisque le quotient par ce monôme du monôme suivant est –αModèle:Ind ;
    4. kModèle:Ind = 1 (type Modèle:Math) ou hModèle:Ind est constant (type Modèle:Math) : immédiat ;
    5. hModèle:Ind et kModèle:Ind sont premiers entre eux : conséquence directe des propriétés 1 et 2 ;
  • Si des polynômes hModèle:Ind, kModèle:Ind, vérifient 1, 2, 3 et 4, alors la fraction continue associée est simple :
  • Si f[pn, qn] est une suite d'approximants de Padé telle que (pModèle:Ind) et (qModèle:Ind) sont croissantes et si les
    hpn,qnkpn+1,qn+1hpn+1,qn+1kpn,qn
    sont des monômes non nuls, alors la suite de leurs degrés est strictement croissante :
    Le (n + 1)Modèle:E monôme peut se réécrire
    kpn+1,qn+1(kpn+2,qn+2fhpn+2,qn+2)kpn+2,qn+2(kpn+1,qn+1fhpn+1,qn+1).
    Dans cette différence, la série entière de droite n'a que des monômes de degrés au moins égaux à pn+1 + qn+1 + 1, et celle de gauche aussi d'après l'hypothèse de croissance. Le degré du (n + 1)Modèle:E monôme est par conséquent au moins égal à pn+1 + qn+1 + 1. Il est donc bien strictement supérieur à celui du nModèle:E, puisque ce dernier ne peut dépasser le maximum des deux valeurs pn + qn+1 et pn+1 + qn.
  • Les deux polynômes suivants sont des monômes non nuls :
    hp,qkp+ω+1,qhp+ω+1,qkp,q,hp,qkp,q+ω+1hp,q+ω+1kp,q.
    Le raisonnement est analogue au précédent. Démontrons la proposition pour le premier polynôme. Il s'exprime aussi comme la différence des deux séries entières suivantes :
    kp,q(kp+ω+1,qfhp+ω+1,q)kp+ω+1,q(kp,qfhp,q),
    ce qui montre qu'il ne contient que des monômes de degrés au moins p + q + ω + 1. Or son degré est exactement p + q + ω + 1. C'est donc un monôme non nul.

Modèle:Démonstration/fin

Fraction continue régulière

Même en imposant à la fraction continue d'être simple, il reste encore un très vaste choix de suites d'approximants disponibles. Il suffit de partir du bord de la table, c'est-à-dire d'un indice (p, 0) ou (0, q), et de sauter d'un carré au carré adjacent situé soit en bas soit à droite. Deux choix au moins se présentent à chaque étape et trois si la largeur du carré est égal à 1. Une nouvelle contrainte peut encore simplifier massivement les calculs :

  • Une fraction simple est dite régulière lorsque[22] tous les αn sont de même degré sauf éventuellement αModèle:Ind et αModèle:Ind et tous les βn sont de même degré sauf éventuellement βModèle:Ind.

Une telle recherche est plus facile à formuler si les carrés de même réduites de la table de Padé présentent une géométrie régulière. Étudions le cas où ω, la longueur du côté d'un carré quelconque, est toujours égale à 1. Trois déplacements sont possibles : vers le bas, la droite ou en diagonale, en bas à droite, pour assurer la simplicité. Ajouter la régularité impose un déplacement précis. Il en existe de trois types différents.

Fraction continue régulière de type I,
privée de la première case de sa trajectoire
Fraction continue régulière de type II

Pour le premier type, on démarre soit par une descente le long du bord vertical, soit par un déplacement à droite le long du bord horizontal[23], puis la suite suit une trajectoire en escalier, illustrée sur la figure de gauche et composée d'une alternance régulière de déplacements une fois vers la droite puis une fois vers le bas. Les numérateurs partiels de la fraction continue sont des monômes du premier degré et les dénominateurs partiels sont égaux à 1 (sauf quelques termes initiaux, Modèle:Cf. définition ci-dessus). Par exemple, pour la fonction exponentielle, Lagrange démarre par la réduite d'indice (0, 0) et obtient, en suivant la trajectoire illustrée en rouge, le résultat suivant :

exp(t)=1+t112t1+16t116t1+110t1110t1+114t1114t1+

L'approche consistant à construire la fraction continue à l'aide d'une relation de récurrence est déjà présente dans celle des « divisions successives » que faisait Lambert[24] et son développement de la fonction tangente, divisée par t pour être non nulle en 0, fait aussi partie de ce type : le développement de la fonction paire tan(t)/t (vue comme une fonction de tModèle:2)

tantt=11t23t25t27+

correspond à la trajectoire (0, 0), (0, 1), (1, 1), (1, 2)…

Le type II correspond à la figure de droite. Il suppose un déplacement constant soit vers le bas, soit vers la droite. Le numérateur est toujours un monôme de degré 1 mais cette fois, le dénominateur est un polynôme de degré 1. Lorsque ce déplacement se fait le long de la première ligne du tableau (en vert sur la figure), la fraction continue obtenue est celle déduite d'une formule d'Euler et ses réduites sont les sommes partielles de la série entière. Un premier exemple est celle associée à la série exponentielle :

exp(t)=11t1+t12t1+12t13t1+13t14t1+14t

Un autre exemple est donné par la fonction paire suivante (vue comme fonction de tModèle:2) issue du logarithme :

1tartanh(t)=12tLog(1+t1t)=1113t21+13t235t21+35t257t21+57t279t21+79t2

On a longtemps cru que ce type de fraction continue n'était qu'une exception[25]. Il existe pourtant une infinité de fractions continues de cette nature — une par ligne et une par colonne — pour chaque fonction analytique, sous réserve que chaque carré soit de côté 1.

Fraction continue régulière de type III

Le troisième type est celui de l'exemple du § « Fonction exponentielle » ci-dessus. Le numérateur est un monôme de degré 2 et le dénominateur un polynôme de degré 1, avec une exception possible : il arrive que le monôme dominant du dénominateur se simplifie systématiquement. Un exemple se trouve dans l'article Approximant de Padé de la fonction exponentielle. Cet article traite exclusivement d'une fonction particulière mais la logique décrite est générale aux tables de Padé dont les carrés sont tous de côtés 1 et le raisonnement se généralise à des tables plus complexes.

Convergence

Structure du domaine

Modèle:Refnec La question de la convergence est, en conséquence, particulièrement cruciale. Elle est néanmoins difficile, contrairement à ce que laisseraient espérer l'exemple de la fonction exponentielle et le développement particulier de la fonction tangente étudié ici. Sans même aborder la délicate question du lien, en un point où toutes deux sont définies, entre la limite de la fraction continue et la série entière f de départ, ce paragraphe se borne, comme Modèle:Harv, à quelques remarques élémentaires sur la convergence des fractions continues simples.

Soit (hModèle:Ind/kModèle:Ind) la suite des réduites d'une fraction continue simple de type Modèle:Math. On a donc, pour tout entier n > 0, hModèle:Ind(t)kModèle:Ind(t) – hModèle:Ind(t)kModèle:Ind(t) = aModèle:IndtModèle:Exp, où la suite des exposants νModèle:Ind est strictement croissante, si bien qu'en notant dModèle:Ind le polynôme kModèle:IndkModèle:Ind :

hn(t)kn(t)hn1(t)kn1(t)=aνndn(t)tνn

et

hn(t)kn(t)=h0(t)+i=1naνndn(t)tνn.

Notons D le disque de convergence de la série entière de terme général aktk (en posant aModèle:Ind = 0 si k n'est pas égal à l'un des νn).

  • Pour N et c > 0 fixés, soit H l'ensemble des t pour lesquels, à partir de l'indice N, le module de dModèle:Ind(t) reste supérieur à c. Sur l'intersection de H et du disque ouvert D, la fraction continue converge (elle converge même uniformément sur tout compact de HD).
  • En tout point t extérieur au disque fermé Modèle:Surligner et pour lequel la suite (dModèle:Ind(t)) reste bornée, la fraction continue diverge.

Illustration par l'exemple de la fonction tangente

Modifions un peu les conventions du § « Fonction tangente » ci-dessus pour rendre égal à 1 le terme constant de chaque dénominateur kn :

n2hn(t)=hn1(t)t2(2n1)(2n3)hn2(t)etkn(t)=kn1(t)t2(2n1)(2n3)kn2(t).

Les fractions sont les mêmes à un facteur multiplicatif près du numérateur et du dénominateur, qui ne modifie donc pas leurs valeurs. Elles sont maintenant normalisées. Avec les notations du paragraphe précédent, on a :

na2n=i=1n12i1eta2n+1=0.

Il suffit de minorer 2i – 1 par i pour conclure que la série entière de coefficients aModèle:Ind est majorée terme à terme par exp(t2). Son rayon de convergence est donc infini.

La suite des dénominateurs de la fraction continue converge manifestement vers la fonction cosinus.

Il suffit alors de vérifier que la suite des dénominateurs n'a pas tendance à se rapprocher de zéro en dehors des pôles de la fonction tangente. Le graphique ci-dessus laisse prévoir que cette suite converge vers la fonction cosinus. Un calcul (Modèle:Cf. boîte déroulante ci-dessous) confirme que cette convergence a lieu sur tout le plan complexe et est uniforme sur tout compact. La suite (dn(t)) converge donc vers cosModèle:2(t).

Soit K un fermé du plan complexe, borné par un réel M, et ne contenant aucun des zéros de la fonction cosinus (qui sont les (2j+1)π/2 pour tout entier j). D'après le paragraphe précédent, la suite des approximants de Padé est uniformément convergente sur K. (En effet, il existe une constante strictement positive 2c telle que le module de cosModèle:2(t) soit supérieur à 2c pour tout t de K donc il existe un rang N tel que toute fonction de la suite (dn(t)) d'indice supérieur à N est, en module, supérieure à c sur K.)

Cela ne suffit pas à prouver que la limite est bien la fonction tangente. Lambert, lui, montre directement[26] non seulement cette convergence des dénominateurs vers cosinus mais aussi des numérateurs vers sinus.

Modèle:Démonstration

Notes et références

Modèle:Références

Voir aussi

Article connexe

Fonction de Bessel

Bibliographie

  • Jean-Étienne Rombaldi, Interpolation & approximation, analyse pour l'agrégation, Vuibert, 2005
  • Modèle:Ouvrage
  • Modèle:En C. Brezinski et M. Redivo-Zaglia, Extrapolation Methods: Theory and Practice, North-Holland, 1991 Modèle:ISBN
  • Modèle:En G. A. Baker et P. Graves-Morris, Padé Approximants, coll. « Encyclopedia of Mathematics and its Applications » (n° 59), 1996, Modèle:2e éd. Modèle:Lire en ligne Modèle:ISBN
  • H. Padé, Œuvres rassemblées et présentées par Claude Brezinski, Librairie Albert Blanchard, Paris, 1984.

Liens externes

Modèle:Portail

  1. 1,0 1,1 1,2 et 1,3 Modèle:Cf. Fraction continue et approximation diophantienne.
  2. Modèle:Ouvrage, Modèle:Lang 27.7.
  3. Modèle:Article, § 21.
  4. Modèle:Harvsp : Modèle:Citation
  5. Modèle:Article.
  6. 6,0 et 6,1 Modèle:Article.
  7. Modèle:Article (thèse), Modèle:P..
  8. Modèle:Article.
  9. 9,0 et 9,1 Voir par exemple Modèle:MacTutor.
  10. Modèle:Article, présenté et analysé par Michel Waldschmidt sur le site Bibnum.
  11. Voir par exemple H. Poincaré, Méthodes nouvelles de la mécanique céleste, 3 vol., Gauthier-Villars, Paris, 1892-1899.
  12. Modèle:Harvsp.
  13. Modèle:Article.
  14. Modèle:Article.
  15. Modèle:Article.
  16. Erreur de référence : Balise <ref> incorrecte : aucun texte n’a été fourni pour les références nommées GHL
  17. Cette normalisation de la réduite correspond au choix de Modèle:Harvsp.
  18. Cette table figure, sans commentaire, dans Modèle:Harvsp.
  19. Modèle:Harvsp.
  20. Modèle:Harvsp.
  21. Modèle:Harvsp.
  22. Modèle:Harvsp, aux notations près.
  23. Modèle:Harvsp.
  24. Méthode que Modèle:Harvsp, pour sa part, qualifie de Modèle:Citation.
  25. Modèle:Harvsp, fait référence à Modèle:De Eduard Heine, Handbuch der Kugelfunctionnen, vol. 1, 1878, Modèle:P. et s..
  26. Modèle:Harvsp.